L’amendement n° 180 concerne l’application Ma sécurité, que je vous recommande de télécharger pour voir de quoi nous parlons.
Cette application permet de savoir quel est le service de police et gendarmerie le plus proche de chez vous. C’est pratique de connaître leurs coordonnées et leurs horaires d’ouverture. Cela ne me semble pas très attentatoire aux libertés.
Il est aussi possible d’y déposer une préplainte en ligne, comme on peut déjà le faire sur un ordinateur. Là encore, c’est pratique, et cela n’attente guère aux libertés.
Cette application permet enfin de discuter en direct avec un policier ou un gendarme. Vous pouvez le faire pendant que nous parlons : il est possible de poser des questions sur le droit, sur la démarche à suivre pour déposer une plainte, sur les documents dont il faut se munir, etc.
Si vous êtes une femme et que l’on est en train de vous importuner dans les transports en commun, si vous n’osez pas appeler le 17 et demander de l’aide à voix haute, au risque peut-être de devoir patienter en ligne, vous pouvez contacter la police discrètement, comme si vous envoyiez des messages à un ami.
Cette application permet donc de renforcer la sécurité, elle n’est pas destinée à remplacer le rapport à la victime par le tout-numérique. Elle est simplement l’un des outils permettant de répondre à un certain nombre de besoins de nos concitoyens. J’ai donc du mal à comprendre l’amendement n° 180.
Sur l’utilisation des robots, permettez-moi de vous lire le texte du rapport, que j’ai en grande partie écrit moi-même. Je me souviens très bien que je n’ai pas proposé le remplacement des femmes et des hommes de la police nationale par des robots !
À la première ligne et en caractères gras, il est écrit : « Les accueils physiques des brigades et des commissariats seront modernisés. » Puis : « la brigade et le commissariat de 2030 ne ressembleront en rien à ceux d’aujourd’hui. » Je l’espère ! Il est question en particulier des espaces d’accueil, qui ne sont pas ce qu’on fait de mieux dans les services publics : l’accueil d’un commissariat de police ou d’une brigade de gendarmerie, où l’on ne passe pas forcément des moments agréables, que l’on soit victime ou accusé, n’est pas toujours très humain ou très accueillant, il faut bien l’avouer. On n’y est pas toujours reçu de la manière la plus riante qui soit, nous pouvons le constater ensemble. Enfin, il est indiqué dans le rapport qu’un « effort conséquent en termes de confidentialité et d’ergonomie dans les accueils des brigades et casernes sera réalisé. »
Je signale qu’il n’est plus nécessaire, désormais, d’énoncer sa plainte devant tout le monde. À l’accueil de chaque commissariat, lequel est d’ailleurs souvent tenu par un personnel civil – de même que dans beaucoup de gendarmeries –, ont été installés depuis plus d’un an un rond orange et un rond bleu. Si vous êtes une femme victime de violences, vous ne dites même pas qui vous êtes, vous n’évoquez même pas la raison de votre présence, vous n’avez donc pas à formuler votre plainte, vous n’avez qu’à désigner le rond et les services de police vous conduisent immédiatement devant un officier de police judiciaire.
Cette idée émane de policiers du Mans qui avaient compris la difficulté qu’avaient certaines femmes à venir déposer plainte et à dire devant plusieurs personnes, devant plusieurs victimes potentielles, qu’elles étaient victimes de violences conjugales par exemple. J’ai rencontré ces policiers et nous avons généralisé leur dispositif. Nous n’autorisons donc plus les policiers à demander l’intégralité de l’intitulé de la plainte à l’accueil.
Il est aussi dit dans le rapport que, « au-delà des efforts nécessaires en termes immobiliers, il s’agira de généraliser la prise de rendez-vous en ligne, d’accentuer le déploiement des bornes d’accueil, la diffusion vidéo de contenus pour optimiser les temps d’attente ».
Il n’est pas anormal, en effet, que, durant le temps d’attente, des vidéos vous expliquent vos droits, vous indiquent que le policier ne peut pas vous refuser la présence d’un avocat lorsque vous déposez plainte ou vous informent que vous devez apporter un certain nombre de documents pour déposer une plainte, comme une pièce d’identité… On n’y pense pas forcément lorsque l’on vient déposer plainte et que l’on est en état de choc. Dans n’importe quel lieu ou service public, on diffuse ce type de vidéos sur les démarches administratives. C’est une forme de modernité, de même que le robot d’accueil, comme l’a bien dit le rapporteur.
Un robot d’accueil suffit, par exemple, lorsqu’il ne s’agit que d’obtenir des informations. Bien des personnes entrent dans un service de police pour des raisons qui n’ont rien à voir avec des enquêtes : pour demander leur chemin, pour obtenir des copies de documents égarés, pour déclarer la perte d’une pièce d’identité… Est-il indispensable de prendre du temps d’un policier pour traiter ces requêtes ? C’est possible si vous n’avez aucune envie de discuter avec une borne numérique, mais cette dernière est la plupart du temps beaucoup plus pratique. Il vaut mieux que le policier consacre son temps à des affaires plus complexes, qui demandent plus de pâte humaine, plus de travail d’enquêteur.
D’ailleurs, la Poste fait la même chose : si vous souhaitez acheter des timbres ou déposer des chèques, vous pouvez utiliser une borne numérique ; pour des opérations plus complexes, vous pouvez vous adresser à une personne physique. Les temps d’attente sont ainsi réduits et tout le monde est content ! Le choix demeure : personne n’est obligé d’utiliser la borne numérique. On voit cela aussi dans les mairies, dans la plupart des services publics et dans la plupart des pays qui nous entourent.
J’ai donc du mal à comprendre comment on peut s’opposer à des évolutions aussi évidentes.
Il est aussi indiqué dans le rapport que « plus systématiquement qu’aujourd’hui, la pratique dite du mystery shopping ou “usager mystère” sera développée. » Je suis en effet le premier ministre de l’intérieur à demander à des usagers mystères du service public de se rendre dans les commissariats, dans les brigades de gendarmerie, et de me faire remonter directement ce qu’ils ont vu. Je le ferais moi-même, si je ne commençais à être un peu connu des services de police – même s’il en existe encore qui ne me reconnaissent pas tout à fait ! §Quand vous arrivez très tard le soir, sans prévenir personne, vous voyez comment vous êtes accueilli dans le service public de police ou de gendarmerie.
Il est évident qu’il faut pouvoir contrôler la qualité du service public. D’ailleurs, aussi bien sur les moteurs de recherche dits américains que sur le site service-public.fr, les commissariats et brigades de gendarmerie ne sont pas les plus mal notés des administrations pour leur accueil. Il arrive effectivement qu’on y soit mal reçu, je ne dis pas le contraire, mais des efforts très importants ont été faits.
Je le répète, j’ai du mal à comprendre l’amendement n° 180, sur lequel j’émets donc un avis défavorable.
J’émets à l’inverse un avis favorable sur l’amendement n° 76 de M. Benarroche, quoiqu’il soit légèrement redondant par rapport à ce qui figure déjà dans le texte. Mais comme le rapporteur ne s’y oppose pas et que le thème est important…
J’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 131, car l’article 15-3 du code de procédure pénale prévoit déjà une remise systématique et immédiate de la copie du procès-verbal de la plainte. Cet amendement est donc largement satisfait, comme l’a dit le rapporteur. Je m’engage bien volontiers, monsieur le sénateur, à renouveler mes instructions aux services de police dans les cas où les situations constatées ne correspondraient pas au droit.
J’émets un avis favorable sur l’amendement n° 9, qui me paraît frappé au coin du bon sens. Le Nord est un grand département, parmi les plus peuplés de France. C’est celui qui compte le plus grand nombre de parlementaires. Il mérite donc plusieurs maisons d’accueil pour les enfants et pour les femmes, puisqu’on y déplore beaucoup de violences intrafamiliales. Il serait absurde de se limiter à une maison d’accueil par département.
Pour les mineurs, le sujet n’est pas tant la création des maisons de confiance et de protection de la famille que la question de savoir comment les policiers ou les gendarmes traitent les auditions des enfants. Les procureurs de la République demandent, pour ce type d’audition seulement, une retranscription au mot près. Or, pour entendre un enfant de 4 ans ou 5 ans qui a subi des viols, il faut beaucoup de temps d’audition, afin d’obtenir un maximum d’informations qui pourront aider dans la suite de la procédure pénale. En conséquence, il arrive que des policiers ou des gendarmes passent jusqu’à dix heures à retranscrire une audition particulièrement difficile, alors que celle-ci a été filmée et enregistrée. Nous pourrions auditionner bien plus d’enfants et aller plus vite si nous pouvions produire des procès-verbaux synthétiques, à charge pour le procureur de la République de visionner les images ou d’écouter la bande-son des moments qui l’intéresseraient. Nous devons progresser sur ce point avec les services du ministre de la justice, car le mieux est l’ennemi du bien.
Pour être plus efficaces face à l’augmentation des violences sur les mineurs, nous devons aussi mobiliser les nouvelles technologies. Par exemple, l’intelligence artificielle ou encore les logiciels de reconnaissance vocale permettent d’obtenir automatiquement des comptes rendus d’audition. Les utiliser serait une mesure de bon sens pour accélérer la procédure.
De manière extrêmement technocratique, le ministère de l’intérieur et l’État profond qu’il abrite indiquent que l’amendement n° 173 rectifié est satisfait et qu’il faut donc le rejeter. Pour ma part, j’y verrais plutôt une raison de l’adopter… J’émets donc un avis favorable sur cet amendement, qui porte sur l’accueil dans les commissariats et brigades de gendarmerie des personnes à mobilité réduite. L’accessibilité est notre objectif principal, et nous ne sommes pas l’administration la plus en retard sur ce point. Chacun doit pouvoir se rendre devant les services de police et de gendarmerie.
Je ne reviendrai pas sur les robots d’accueil et j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 73. J’émets enfin un avis favorable sur l’amendement n° 130 relatif au cyberharcèlement et à la formation des correspondants de police et de sécurité de l’école, pour les mêmes raisons que sur l’amendement n° 173 rectifié : puisqu’il est satisfait, autant l’adopter.