Intervention de Gérald Darmanin

Réunion du 11 octobre 2022 à 21h30
Orientation et programmation du ministère de l'intérieur — Article 1er et rapport annexé

Gérald Darmanin :

Madame la sénatrice, j’ai beaucoup de respect pour votre engagement, mais vous avez dit une bêtise sur le plan juridique : les policiers et gendarmes ne procèdent pas, de leur propre initiative, à des contrôles d’identité. Ils ne le font – il en est ainsi depuis que les magistrats autorisent des contrôles d’identité – que sous l’autorité du procureur de la République.

Ils procèdent à ces contrôles – c’est le premier cas – sur réquisition du procureur de la République, dans des lieux particulièrement criminogènes, par exemple dans les gares. §Il s’agit d’une politique pénale !

Lors de l’examen de la réforme de la police nationale, vous m’avez tous expliqué pendant deux heures qu’il fallait respecter l’indépendance de la justice et se garder de commenter les instructions des procureurs de la République et des magistrats.

Je vous dis là que lorsque les policiers et les gendarmes procèdent à des contrôles d’identité, par exemple autour des gares ou dans les stations de métro, ils le font sur réquisition du procureur de la République. Soit la justice est indépendante, soit elle ne l’est pas ! Les policiers et gendarmes contrôlent quand ils ont reçu des réquisitions de contrôle.

Les policiers et gendarmes peuvent ensuite contrôler l’identité d’une personne dans un deuxième cas : lorsqu’ils sont officiers de police judiciaire. Ces contrôles sont tout de même assez rares dans la vie de tous les jours, même si cela peut arriver, des OPJ étant présents dans les effectifs des brigades anticriminalité (BAC). Lorsqu’ils ne respectent pas les principes déontologiques et les règles de contrôle, ces OPJ se voient retirer leur habilitation. Il arrive ainsi très souvent que le procureur exerce, en opportunité, un tel contrôle.

Je rappelle que c’est non pas moi qui délivre l’habilitation, mais le procureur de la République, après avis d’une commission présidée par un magistrat.

Un policier peut enfin – troisième et dernière situation – effectuer un contrôle de sa propre initiative lorsqu’il constate une infraction, un crime ou un délit. Quelqu’un viendrait-il à dire, à la sortie du palais du Luxembourg, avoir été témoin d’un meurtre ou victime d’un vol de sac à main que le policier – dont les actes seront ensuite contrôlés par le juge des libertés – procéderait alors aux contrôles d’identité nécessaires.

Mesdames, messieurs les sénateurs, la loi française ne permet pas aux policiers d’effectuer des contrôles de leur propre initiative. Si vous pensez, pour les raisons que vous avez évoquées, que ces contrôles sont trop nombreux, il faut soit le dire à l’occasion d’un futur débat de politique pénale – vous avez vous-même autorisé ces contrôles en votant les lois de la République –, soit expliquer – ce n’est pas ce que vous avez dit, madame la sénatrice, mais bien ce que vous avez dit, monsieur le sénateur – qu’une partie des procureurs de la République organisent sciemment en France des contrôles à répétition de certaines personnes, pour des raisons raciales ou en raison de leur faciès.

Je le répète : ce ne sont pas les services de police qui sont à l’initiative des contrôles. Ils sont sous l’autorité d’un magistrat.

Monsieur le sénateur, feriez-vous la même démonstration si je vous disais que la plupart des contrôles fiscaux s’appliquent aux personnes qui gagnent le plus d’argent ?

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