L’amendement n° 224 a pour objet d’inscrire directement les dispositions envisagées pour l’ordonnance prévue initialement à l’article 5 dans le dur de la loi, afin de répondre à l’interpellation de la commission des lois qui a supprimé cet article – le Parlement n’aime pas particulièrement les ordonnances !
Je vais m’attarder quelque peu sur cet amendement, qui est assez long, même si vous avez eu un débat en commission sur le sujet lorsque vous avez supprimé l’article et que nous l’avons évoqué lors de la discussion générale. L’amendement vise à créer le réseau Radio du futur (RRF), qui est inscrit dans la programmation financière que vous avez votée à l’article 2 du projet de loi – je vous en remercie – pour un montant de 2 milliards d’euros.
Il s’agit de remplacer l’intégralité des réseaux de radio de la police – y compris ceux de la préfecture de police de Paris –, de la gendarmerie et des services de la sécurité civile, ainsi que d’autres services publics qui voudraient y participer, par exemple l’administration pénitentiaire ou les douanes, par un réseau unique basé sur d’autres réseaux – ceux du futur ! – que ceux utilisés actuellement.
Ces derniers ont en effet connu un certain nombre de difficultés de fonctionnement lors de crises récentes, que ce soit pendant les grands incendies que notre pays a connus ou à l’occasion de calamités comme celle qui a touché les vallées de la Vésubie et de la Roya. Nous avons ainsi constaté que, dans certaines circonstances, les réseaux de communications ne fonctionnaient plus pour des raisons liées aux conditions météorologiques, ce qui signifie des urgences auxquelles on ne répond pas et des vies perdues.
En prévision des jeux Olympiques de Paris et dans un cadre interministériel, le ministère de l’intérieur a donc décidé de lancer ce grand projet de RRF pour un montant global de 2 milliards d’euros, je le disais, avec un appel d’offres – je signerai d’ailleurs demain le marché correspondant. C’est Airbus qui dirigera le lot le plus important et l’opérateur sera Bouygues Telecom.
Beaucoup d’industriels ont concouru à cet appel d’offres, ce qui démontre le sérieux de notre démarche et les opportunités que ce futur savoir-faire offrira ensuite à l’export pour nos entreprises.
La France sera le premier pays à mener ce type de projet, c’est-à-dire un réseau numérique utilisant à la fois la radio, l’image et la géolocalisation, unique pour l’ensemble des forces et résistant, quelles que soient les intempéries. Par ailleurs, tous les agents concernés des forces de l’ordre en disposeront sur leur téléphone portable, ce qui facilitera leur action.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je répondrai aux questions que vous ne manquerez pas de me poser, car il est normal de s’interroger sur un projet doté de 2 milliards d’euros. Sachez que, en ce qui concerne le cadre juridique, le Conseil d’État a indiqué, dans son avis du 18 mai 2021, que le pilotage du RRF devait être assuré par une personne morale distincte de l’État. C’est pourquoi nous vous proposons dans cet amendement de prévoir en dur, c’est-à-dire directement dans la loi et non dans une ordonnance, la création d’un établissement public administratif chargé d’opérer le futur réseau.
L’amendement vise aussi à définir les nouvelles notions techniques propres au RRF.
Il tend ainsi à lister les exigences particulières de ce réseau, notamment l’obligation pour tous les opérateurs non retenus dans le marché – tous sauf Bouygues Telecom donc – de fournir l’itinérance afin de ne pas avoir de zones blanches : l’intérêt général doit s’appliquer et le réseau doit fonctionner partout et en tout temps.
Il prévoit également les exemptions aux exigences qui s’imposent habituellement aux autres opérateurs, mais qui n’ont pas de sens pour RRF, par exemple l’accessibilité pour les personnes malentendantes.
Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, l’objet de cet amendement. Il est certes un peu long, je le redis, mais le Gouvernement n’en a déposé que deux et celui-ci l’a été à la demande de votre commission, en espérant qu’elle n’a supprimé l’article 5 que pour une raison de forme…