Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 12 octobre 2022 à 21h30
Politique énergétique de la france — Déclaration du gouvernement suivie d'un débat

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau :

Jamais l’Allemagne n’a cessé de défendre ses intérêts et jamais la France n’a défendu les siens ! Voilà le problème, mes chers collègues.

L’Allemagne s’est mise dans la main de la Russie en achetant à bon marché le gaz de ce pays et elle a voulu exporter ses voitures vers la Chine. Ce faisant, elle a handicapé l’ensemble de l’Europe, et nous avons suivi, parce que nous croyions à la solidarité et au couple franco-allemand.

J’aimerais y croire, moi aussi, mais j’attends un certain nombre de garanties de nos amis allemands et de l’Europe. Ce que l’on demande à un Président de la République, qui n’est pas celui de la République fédérale d’Allemagne, c’est d’abord de défendre à Bruxelles les intérêts de la France et des Français ! C’est un point capital.

Maintenant, il faut une stratégie, donc une politique énergétique. Cette dernière, tout d’abord, doit avoir une constance et une cohérence. Elle ne peut s’accommoder du « en même temps », qui est tout sauf une boussole ou un cap.

Ensuite, il faut agir sur l’ensemble des leviers : premièrement, la production, c’est-à-dire l’offre ; deuxièmement, la demande, avec la sobriété ; troisièmement, la tarification, autrement dit les prix.

Commençons par les prix, puisque je critiquais la politique européenne. Souvenez-vous, madame la Première ministre, en juillet dernier, nous étions à la même place, vous au banc du Gouvernement et moi ici, à la tribune, répondant au discours de politique générale que vous veniez de prononcer. Je vous invitais alors à faire ce que l’Espagne et le Portugal venaient de faire. Vous nous le proposez aujourd’hui, mais en ayant perdu plus de trois mois ! La tarification européenne est stupide. Elle a avantagé l’Allemagne et elle dessert la France.

J’écoutais avant la séance le Président de la République, car, mes chers collègues, en plus de notre débat de ce soir, il y en a un autre à la télévision sur la stratégie énergétique de la France. Or le Président de la République expliquait qu’il faut évidemment décorréler le prix de l’électricité et celui du gaz. Mais il aurait fallu le faire plus tôt ! Il existait déjà des dispositifs nous permettant, à nous, Français, de reprendre la main. Hélas, on veut toujours favoriser la solidarité européenne et, ce faisant, on pèche par naïveté, car la solidarité suppose la réciprocité…

Nous vous demandons donc de découpler, une fois pour toutes, le prix de l’électricité de celui du gaz, madame la Première ministre.

Il faudra sans doute aller plus loin. Le groupe Les Républicains vous prie de revenir sur la suppression des tarifs réglementés, qui doit avoir lieu le 30 juin prochain. Un véritable bouclier ne doit pas consister simplement en un déversement d’argent public sur les ménages ou dans l’économie. Il y a des décisions à prendre. Or je n’ai pas entendu une seule intervention sur ces tarifs réglementés, alors que c’est fondamental.

De même, il faudra pousser EDF, une fois le pic tarifaire passé, à conclure des contrats de long terme avec ses clients. L’Europe s’y est souvent opposée au nom de la concurrence pure et parfaite, mais, au nom de ce principe, que de problèmes n’avons-nous pas connus dans les années 2000 et 2010 : démantèlement d’EDF, tarification du gaz, et j’en passe !

Je veux bien défendre la solidarité européenne, mais à condition qu’elle ne nous mène pas dans le mur, mes chers collègues ! Je ne suis pas naïf. Pour moi, construire l’Europe ne consiste pas, comme le disait le général de Gaulle, à sauter sur sa chaise comme un cabri. Pas du tout. Il s’agit de défendre les intérêts du pays et, en même temps du reste, ceux de l’Europe.

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