Intervention de Thomas Fatome

Commission des affaires sociales — Réunion du 19 octobre 2022 à 9h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 — Audition de M. Thomas Fatome directeur général de la caisse nationale de l'assurance maladie cnam

Thomas Fatome, directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie :

Le déficit prévu pour 2023 se réduit effectivement nettement plus rapidement que dans les projections précédentes. Il me semble que trois raisons principales peuvent expliquer cette évolution.

Premièrement, la dynamique des recettes. En 2022 comme en 2023, la progression de la masse salariale devrait être supérieure à 5 % du fait de l'inflation, mais aussi, en tout cas pour 2022, du fait du dynamisme des créations d'emplois.

Deuxièmement, le choix du Gouvernement d'opérer un transfert financier de 2 milliards d'euros de la branche famille vers la branche maladie contribue à accélérer le redressement de cette dernière. Adopter une approche transversale des finances sociales me semble cohérent. Ce faisant, le Gouvernement s'inscrit dans la démarche adoptée depuis vingt ans.

Troisièmement, l'estimation des dépenses liées au covid s'élève à 1 milliard d'euros, dont 600 millions d'euros pour les vaccins et 400 millions d'euros pour les tests. Cette enveloppe n'est pas fermée et peut évoluer en fonction des besoins.

La trajectoire pluriannuelle de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) est exigeante. Elle suppose le renforcement des actions visant à une maîtrise des dépenses médicales, à la gestion du risque et à la lutte contre la fraude, entre autres.

Jusqu'à présent, les dispositions législatives en matière de démographie médicale étaient différentes selon les professions de santé. L'article 22 du PLFSS crée une base transversale permettant aux partenaires conventionnels d'agir en la matière. Le texte promeut un principe de responsabilité afin que les partenaires se saisissent du sujet de la répartition des professionnels sur l'ensemble du territoire. Il existe des différences fondamentales selon les métiers. Le nombre d'infirmiers libéraux a doublé en vingt ans et la hausse du nombre de masseurs-kinésithérapeutes s'élève à 50 %, ce qui entraîne des problèmes de répartition. La situation est différente pour les médecins : leur densité a diminué et tous les territoires font face à des tensions. La question de la création d'un éventuel mécanisme contraignant se pose différemment selon que les professions sont ou non en tension. Le ministre de la santé a pris des positions à ce sujet ; nous attendons les lignes directrices fixées par le Gouvernement.

Les rémunérations forfaitaires ont progressé significativement durant les quinze dernières années : elles représentent entre 10 % et 15 % du salaire des médecins généralistes. Toutefois, le double mouvement de revalorisation des actes et de renforcement du poids des forfaits dans les émoluments des médecins finit par créer des tensions sur l'enveloppe globale. Ce sujet, complexe, constituera l'un des éléments de discussion avec les médecins.

Le PLFSS vise à faire évoluer la rémunération des médicaments très innovants. Nous faisons face à une augmentation très significative des coûts de traitement unitaire et des demandes des laboratoires sur des médicaments à destination de populations ciblées. Ceux-ci s'élèvent parfois à plusieurs centaines de milliers d'euros par patient. Le Gouvernement prévoit des paiements à échéance différée : cette mesure participe de la maîtrise des coûts en vue d'atteindre une soutenabilité des dépenses.

Voilà quatre ans, nous avons mené des travaux en vue d'estimer le rapport entre le coût réel et les tarifs établis pour des actes d'imagerie médicale. À l'époque, nous avions considéré que des ajustements étaient nécessaires. Nous voulons désormais bâtir, en partenariat avec la profession, une évaluation approfondie afin de disposer d'une analyse plus fine de la réalité. Je pense notamment aux dépenses liées aux produits de contraste : celles-ci sont deux à quatre fois plus importantes que celles constatées dans les autres pays européens.

J'en viens à la lutte contre la fraude. Nous espérons recouvrer la somme de 500 millions d'euros à l'horizon 2024. C'est un objectif ambitieux, puisque le rendement historique de nos actions s'élevait à 290 millions d'euros avant la crise sanitaire. Nous menons actuellement plusieurs évaluations sur l'activité des médecins généralistes et des sociétés de transport sanitaire : les fraudes sont de l'ordre de 2 à 5 % des activités totales. Nous souhaitons mieux les détecter et mieux les contrôler, afin de les sanctionner plus efficacement. Les échanges de données constituent des leviers au service de cette stratégie.

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