Monsieur le président, monsieur le vice-président de la commission des finances, madame la vice-présidente de la commission des finances, mesdames, messieurs les sénateurs, c’est un plaisir et un honneur de prendre part avec vous à ce premier débat consacré aux finances locales.
Ce nouvel outil démocratique a été rendu possible par la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques. Il constitue, selon moi, une avancée pour notre pays et pour nos collectivités, en introduisant de manière inédite un temps consacré aux finances locales dans le cours de l’examen des projets de loi de finances.
J’ai déjà pu me livrer à cet exercice vendredi dernier à l’Assemblée nationale, avec mon collègue Gabriel Attal. Comme le veut le fonctionnement de nos institutions, c’est aujourd’hui au Sénat, chambre des territoires, que j’ai l’occasion de m’y livrer de nouveau, selon des modalités légèrement différentes.
Gabriel Attal, Christophe Béchu et moi-même avons en effet suivi une méthode renouvelée dans l’élaboration du volet territorial du projet de loi de finances pour 2023, conformément à la volonté du Président de la République et de la Première ministre. Notre démarche a consisté à échanger en continu, en amont, avec les associations d’élus, afin de coconstruire des mesures qui répondent aux besoins des territoires et aux attentes de nos concitoyens.
Nous les avons toutes reçues, à plusieurs reprises, jusqu’à la présentation du projet de loi de finances (PLF) au Comité des finances locales le 26 septembre, quelques heures après sa présentation en conseil des ministres.
Après le temps de la concertation, nous sommes désormais entrés dans celui de la construction d’un budget protecteur, bien sûr, mais aussi d’un budget sincère, qui prend en compte l’impératif de maîtrise de nos finances publiques et la participation indispensable de chacun à cet effort.
Cet esprit de responsabilité et cet impératif d’action ont été nos deux guides dans la conception du PLF pour 2023. Ce sont aussi, je n’en doute pas, les deux principes qui guideront son examen par le Sénat.
Face à la progression inédite de l’inflation et à l’envolée des coûts de l’énergie, les défis auxquels les collectivités territoriales doivent faire face imposent un soutien accru de l’État.
Dès cet été, le Gouvernement a proposé des mesures fortes dans la loi de finances rectificative, que vous avez enrichie et votée, mesdames, messieurs les sénateurs.
Je pense en particulier au filet de sécurité de 430 millions d’euros pour aider les communes et les intercommunalités les plus fragiles à faire face à la hausse du point d’indice et des prix de l’alimentation et de l’énergie.
Nous savons que certaines collectivités ont besoin de cette aide au plus vite. C’est pourquoi, comme l’a annoncé Gabriel Attal, dès la parution du décret le 13 octobre et jusqu’au 15 novembre, elles pourront déposer une demande qui leur permettra d’obtenir un acompte de 50 %, lequel sera versé avant le 15 décembre.
Nous avons par ailleurs alloué 120 millions d’euros aux départements, qui versent le revenu de solidarité active (RSA), afin de compenser intégralement la hausse de 4 % de cette prestation prévue par l’État. Nous avons également instauré le recouvrement total par l’État auprès des régions de la hausse de 4 % des rémunérations des stagiaires de la formation professionnelle.
Nous accentuons encore cet accompagnement de l’État dans le cadre du PLF pour 2023.
Un amendement du rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale vise à prolonger le filet de sécurité pour les dépenses énergétiques en 2023. Le bouclier tarifaire sera prolongé, ce qui permettra de limiter à 15 % la hausse des prix de l’électricité pour 80 % des communes. Nous prévoyons aussi de quintupler l’enveloppe à destination des communes en grande difficulté, à hauteur de 10 millions d’euros, et surtout de ne pas plafonner les bases fiscales, afin de laisser toute autonomie aux collectivités sur leur dynamique fiscale.
Ces mesures permettront aux collectivités de faire face dans l’immédiat à leurs surcoûts financiers, mais il nous faudra aussi agir à d’autres échelles.
Au niveau du marché européen de l’énergie, tout d’abord, nous devrons chercher à réguler les prix et à capter les superprofits réalisés par les grands groupes énergétiques du fait de cette situation de tension.
Nous devons aussi, chacun à notre échelle, suivre les recommandations formulées par la Première ministre dans le plan de sobriété.
Toutefois, résoudre durablement la crise que nous connaissons impose aussi d’effectuer des changements profonds de notre modèle, en favorisant la transition écologique et la transition énergétique dans tous les territoires.
C’est pourquoi il est prévu dans le projet de loi de finances pour 2023 d’augmenter d’un tiers les moyens consacrés à la dotation de biodiversité pour 2023, qui avaient déjà été doublés en 2022, pour atteindre un montant de 30 millions d’euros.
Il est également prévu de mettre en œuvre un fonds vert d’un montant inédit de près de 2 milliards d’euros. Ses crédits seront attribués selon des règles simples, décentralisées et sans appel à projets. Tout partira des initiatives des élus, selon une méthode lisible et reconnue, celle du dialogue entre les élus et leur préfet de département ou de région.
La Première ministre a par ailleurs annoncé vendredi dernier que 200 millions d’euros seront spécifiquement alloués aux départements.
Accompagner les collectivités territoriales, c’est avant tout leur donner les moyens d’agir, en sécurisant leur financement et en leur assurant une visibilité à long terme.
Ainsi, avec la Première ministre, nous avons souhaité porter une hausse de 320 millions d’euros de la dotation globale de financement (DGF), les augmentations de la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) et de la dotation de solidarité rurale (DSR) étant financées par l’État et non par écrêtement des crédits des autres communes. Cette augmentation, inédite depuis treize ans, est un acte fort du Gouvernement.
La suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, quant à elle, permettra à notre pays de gagner en compétitivité sans amoindrir les ressources des collectivités. Elle sera en effet intégralement compensée et territorialisée par l’attribution d’une part supplémentaire de TVA, mais aussi par sa dynamique, dès 2023.
La compensation, l’année prochaine, correspondra aux sommes que l’État aurait dû reverser aux collectivités en 2023 au titre de la CVAE. Il n’y aura pas d’année blanche, rien ne sera conservé par l’État.
Elle sera également territorialisée : ceux qui accueillent davantage d’activités seront davantage compensés, sur le fondement de critères précisés dans un décret en Conseil d’État. Un travail est d’ailleurs en cours avec les associations d’élus. Sur ce sujet comme sur les autres, l’écoute et la concertation devront primer.
Notre souci de préserver les marges de manœuvre des collectivités transparaît enfin dans le maintien de leurs dotations d’investissement, pour un montant de près de 2 milliards d’euros, comme l’année précédente.
Mesdames, messieurs les sénateurs, voici les principaux éléments des concours de l’État aux collectivités pour 2023.
Notre pays et nos collectivités ne manquent pas d’atouts pour relever les défis qui sont les nôtres. Nous avons toujours su construire, au cours de notre histoire, dans ces situations de crise, des consensus responsables, au service de l’intérêt général. Je sais que ce sera une nouvelle fois le cas, car, au-delà du débat démocratique indispensable, les postures et les effets de manche ne font plus illusion aux Français. Nos concitoyens ne se satisferont pas d’une nouvelle représentation du spectacle sempiternellement rejoué du combat entre les Montagnards et les Girondins.
C’est collectivement que les Français nous jugeront : sur notre bilan, nos réussites et notre capacité à améliorer concrètement leur qualité de vie.