Intervention de Caroline Cayeux

Délégation aux Collectivités territoriales et à la décentralisation — Réunion du 5 octobre 2022 à 16h45
Audition de Mme Caroline Cayeux ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires chargée des collectivités territoriales

Caroline Cayeux, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales :

Madame la Présidente, chère Françoise Gatel, Mesdames et Messieurs les membres de cette belle délégation que je connais bien pour y avoir siégé dans un temps pas trop ancien. Je sais le lien étroit que vous avez avec les collectivités et l'exigence que vous nourrissez par rapport à vos programmes, aux élus locaux et aux territoires.

Dès ma prise de fonction, j'ai reçu toutes les associations d'élus, seule ou avec Christophe Béchu. Je les ai écoutées, j'ai maintenu le dialogue, qui est le fil conducteur de ma feuille de route, comme il l'a toujours été dans ma vie d'élue locale. Je suis en effet persuadée qu'une politique publique concertée et partagée, le plus en amont possible, est une politique publique efficace, adaptée aux besoins du terrain et aux attentes des élus et de nos concitoyens.

Je ne vais pas davantage insister sur la méthode, car vos questions sont nombreuses. Je voudrais simplement vous parler de ma feuille de route à court et moyen terme.

En premier lieu, nos prochaines semaines seront occupées par le projet de loi de finances pour 2023, qui traduit l'accompagnement de l'État à aider les collectivités à faire face à la situation. Je sais que vous êtes des experts des finances publiques, notamment le sénateur Charles Guené qui, le premier, a suivi avec attention ce sujet en Commission des finances.

Je voudrais revenir sur la création, en loi de finances rectificative, du fonds de 430 millions d'euros pour aider les communes et les intercommunalités les plus fragiles à faire face à la hausse du point d'indice du coût de l'alimentation et de l'énergie. Son décret d'application est d'ailleurs passé ce matin en comité des finances locales. Pour 2023, le gouvernement maintient son soutien aux collectivités face à l'inflation et au prix de l'énergie, en prolongeant le bouclier tarifaire, afin de limiter à 15 % la hausse des prix de l'électricité et du gaz pour les plus petites communes, soit environ 28 000 collectivités. Pour être très transparente, je pense que nous ne saurons qu'après le compte administratif de 2023 le nombre exact de collectivités qui pourront en bénéficier. Nous allons également quadrupler l'enveloppe à destination des communes en très grande difficulté, à 10 millions d'euros. Les conditions d'obtention sont liées aux indicateurs sociaux, aux critères de charges et de ressources et au potentiel financier.

Par ailleurs, Christophe Béchu et moi avons proposé à la Première ministre une hausse de 210 millions d'euros de la DSU et de la DSR, financée par l'État et non par écrêtement des autres communes. Le PLF ne la prévoit pas encore, mais un amendement confirmera le financement de cette hausse de la péréquation verticale par des crédits nouveaux. Cette hausse, inédite depuis 13 ans, permettra à 70 % des collectivités de voir leur dotation augmenter ou se stabiliser. J'entends les critiques quant à la non-indexation de la DGF sur l'inflation mais je vous rappelle que cette décision a été prise en 2010. Cette augmentation s'inscrit dans un contexte contraint pour les finances de l'État et doit être interprétée comme une marque de confiance vis-à-vis des collectivités et des élus locaux.

D'autres mesures traduisent l'attention que l'État porte aux élus, comme l'augmentation d'un tiers des moyens consacrés à la dotation biodiversité pour 2023, après un doublement en 2022. Nous sommes passés de 24 millions d'euros en 2022 à 30 millions dans le PLF 2023. Je sais que certains d'entre vous y portent une grande attention, comme le sénateur Bernard Delcros.

Je souhaite enfin préciser que les élus pourront dorénavant bénéficier d'un remboursement forfaitaire des frais de garde et n'auront plus à déposer un dossier de remboursement des frais réels. L'enveloppe sera augmentée d'un million d'euros. C'est une mesure concrète que j'ai souhaité prendre pour inciter à l'engagement local de jeunes parents et leur permettre d'exercer leur mandat dans de bonnes conditions.

À l'État prescripteur, que nous avons souvent dénoncé collectivement, succède l'État accompagnateur. En 2023 l'État sera aux côtés des élus pour les accompagner dans la réalisation de leurs projets de territoire. Nous consacrerons un effort majeur à la préparation de l'avenir, puisque les dotations d'investissement atteindront presque 2 milliards d'euros. Nous irons aussi plus loin. En effet, nous ne pourrons surmonter durablement les difficultés du temps présent sans accélérer les transitions énergétiques et écologiques dans les territoires. L'État va s'engager fortement, avec la création d'un fonds vert, qui mobilisera 1,5 milliard d'euros en 2023, pour développer les projets de transition écologique. Il pourra s'agir de rénovation thermique des bâtiments publics, de renaturation en ville ou dans des cours d'école, d'aménagements des friches ou du trait de côte.

En termes de méthode, nous souhaitons privilégier, avec Christophe Béchu, des règles simples et décentralisées, sans appel à projets. Tout partira des projets des élus locaux, selon une méthode simple et reconnue, celle du dialogue entre les élus et leur préfet de département ou de région.

Un appui à l'ingénierie sera également proposé aux communes les moins outillées. Cet appui existait déjà, gratuitement, par le biais de l'ANCT pour les communes de moins de 3 500 habitants.

L'État accompagnateur accompagnera les territoires selon une logique différenciée, grâce au programme d'appui porté par l'ANCT. Ce sont des sujets sur lesquels plusieurs d'entre vous ont travaillé autour de Rémy Pointereau, dont je salue le rapport présenté la semaine dernière et sur lequel nous aurons sûrement l'occasion d'échanger.

Je vous annonce que je présiderai ce vendredi un Comité exécutif du programme « Action Coeur de Ville 2 » réunissant l'ensemble des partenaires, la Banque des territoires, Action logement et l'ANAH, afin de d'examiner les accompagnements financiers de la phase 2 qui sera annoncée dans les prochaines semaines par la Première ministre. Je peux d'ores et déjà vous dire que nous souhaitons que cette seconde phase soit ambitieuse, qu'elle portera en priorité sur la transition écologique et énergétique dans les villes, mais qu'elle traitera aussi de la question des entrées de ville et des quartiers de gares. Cela répond à la demande formulée par les 234 maires bénéficiaires du premier volet du plan.

Nous consoliderons également le programme « Petites Villes de demain » qui s'adresse à 1 600 communes de moins de 20 000 habitants. J'ai à ce titre missionné les équipes de l'ANCT pour une feuille de route plus opérationnelle, afin de répondre aux attentes remontées par les élus. Je ne manquerai pas de vous en faire part car je connais, pour m'être déplacée dans un certain nombre de départements, votre attachement à ce programme qui accompagne de nombreux territoires ruraux.

En conclusion, avant d'ouvrir le débat, je souhaite, Mesdames et Messieurs les sénateurs, aborder une question qui nous tient toutes et tous à coeur, le quotidien des élus. Je me permets de prendre la Présidente Gatel à témoin, tant elle oeuvre activement sur la mise en oeuvre de la loi 3DS et sur ses suites. J'aurai à coeur de travailler sur ce sujet et je serai aux côtés des élus pour simplifier leur relation avec l'État. Je souhaite en effet porter des politiques publiques différenciées, dans l'esprit de la loi 3DS, adaptées aux réalités locales. Les outils existent et les élus doivent s'en saisir. Certains départements ont souhaité que leur compétence RSA soit partagée avec l'État. Ils sont en train d'expérimenter ce nouveau dispositif. Certains ont voulu prendre en charge la gestion de routes nationales, dans un intérêt local reconnu. Je crois que c'est avec ce type d'initiative que l'action publique gagnera en efficacité et en cohérence.

Vous avez également réfléchi à la place de l'État dans nos territoires. Je tiens à remercier les sénateurs Canayer et Kerrouche pour leur rapport fournissant de nombreuses pistes de travail. L'efficacité de nos politiques publiques territorialisées passe par un État déconcentré, en mesure de les accompagner et de répondre aux élus locaux.

Enfin, je voudrais vous redire que la confiance du gouvernement dans les élus locaux est totale. Au-delà de cette confiance, je rappelle que je me tiens évidemment, avec l'ensemble de mes collègues, aux côtés des élus locaux pour les accompagner dans leurs projets mais aussi pour les défendre et les soutenir quand ils sont victimes d'agressions scandaleuses. Je suis frappée par le fait d'être amenée, plus d'une fois par semaine, à prendre contact avec des maires qui ont été attaqués ou dont les permanences ou les cabinets médicaux ont été brûlés. Le ministre de l'Intérieur assure que la loi sera fermement et pleinement appliquée.

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