Intervention de Michelle Gréaume

Réunion du 20 octobre 2022 à 10h30
Aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Michelle GréaumeMichelle Gréaume :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le sujet des violences conjugales revient régulièrement devant notre assemblée, et force est de constater qu’il reste beaucoup à faire pour éradiquer ce mal qui ronge notre société.

Le Nord est le deuxième département de France métropolitaine le plus touché ; c’est dire si Valérie Létard et moi connaissons bien la problématique. Une réalité locale qui rejoint les statistiques nationales des violences faites aux femmes.

En 2019, selon l’Observatoire national des violences faites aux femmes, 213 000 femmes ont été victimes de violences physiques et sexuelles commises par leur partenaire ou ex-partenaire. Selon le bilan du ministère de l’intérieur paru cet été, le nombre de féminicides a augmenté de 20 % en 2021 par rapport à l’année précédente : 122 de nos sœurs, de nos mères, de nos cousines, de nos voisines, de nos filles sont décédées sous les coups d’un conjoint ou ex-conjoint, contre 102 en 2020.

Ce qui retient les femmes de quitter le domicile conjugal, outre l’emprise exercée par le conjoint, c’est le manque de ressources financières. En effet, il est fréquent que les victimes n’aient pas accès au compte bancaire du foyer ou qu’elles n’aient pas de source de revenus personnelle.

Le départ est alors synonyme de difficultés à assurer, pour elles et pour leurs enfants, les achats de première nécessité. Très souvent, ces difficultés contribuent à un retour contraint au domicile conjugal. La mise en place d’une aide financière d’urgence aux victimes permettra d’encourager cette démarche salvatrice de départ.

J’avais moi-même formulé cette proposition dans un texte déposé en février 2021 : il s’agissait d’attribuer le RSA en urgence aux victimes de violences intrafamiliales. Ce dispositif sera d’ailleurs expérimenté dès le mois prochain dans mon arrondissement du Valenciennois, sur l’initiative du département du Nord. On pourra au passage regretter que l’évaluation de cette expérimentation n’ait pas été attendue avant de débattre d’un dispositif alternatif.

Dans le texte qui nous est soumis, l’aide prend la forme d’un prêt accordé par les caisses d’allocations familiales, déclenché dans un délai porté à trois jours ouvrés par la commission et versé en trois mensualités. Les modifications apportées par la commission ont permis de cadrer les conditions d’accès à cette aide sans qu’elles soient trop restrictives, et nous devons l’en remercier et saluer le travail de notre collègue Guidez, en tant que rapporteure de ce texte.

Ce principe de soutien au départ d’urgence n’a pas vocation à remettre en cause le principe d’éloignement des auteurs des violences ni à résoudre à lui seul l’ensemble de la problématique des violences faites aux femmes.

Je rappelle que les associations féministes demandent un investissement massif, à hauteur d’un milliard d’euros, afin d’engager efficacement une véritable lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants dans l’esprit de la grande cause nationale décrétée et annoncée par le Président de la République à l’aube de son précédent mandat.

La prévention et la protection des femmes et des enfants victimes de violences sont également indispensables pour éviter que ces comportements ne se reproduisent de génération en génération.

Néanmoins, il s’agit d’un premier pas, qui doit être salué, pour accompagner les victimes de violences conjugales. Avec cette proposition de loi, le Sénat a l’occasion d’envoyer un signal, en montrant que nous sommes capables de nous réunir et de dépasser nos divergences partisanes pour lutter contre les violences conjugales.

Pour cette raison, le groupe CRCE votera ce texte modifié par la commission.

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