Intervention de Éric Gold

Réunion du 20 octobre 2022 à 10h30
Aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Éric GoldÉric Gold :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, il est difficile de ne pas partager l’ambition de cette proposition de loi déposée par notre collègue Valérie Létard, qui a eu l’amabilité de nous inviter à la cosigner, ce que plusieurs d’entre nous ont fait au sein du groupe RDSE.

Il y a eu 143 victimes de morts violentes au sein du couple en 2021, dont 122 femmes. L’année 2022 ne semble malheureusement pas marquer de recul, ce qui a sans doute poussé le Président de la République à déclarer grande cause nationale du quinquennat, pour la seconde fois, la lutte contre les violences faites aux femmes.

Le sujet a d’ailleurs fait la une des médias récemment, prouvant une fois de plus qu’aucun milieu n’était épargné par la violence et que, parmi les hommes politiques, certains avaient encore un long chemin à parcourir sur cette question.

Poussés par la société civile et de nombreuses activistes, les pouvoirs publics tentent, avec des moyens et des résultats encore insuffisants, de réduire la violence au sein des couples. Le Grenelle contre les violences conjugales de 2019 a accouché de 54 mesures, dont 46 sont aujourd’hui en vigueur. Des outils existent, comme le téléphone grave danger ou le bracelet anti-rapprochement. En les assortissant d’un budget à la hauteur et en les accompagnant de mesures telles qu’une formation adaptée des forces de l’ordre ou l’éducation à la vie affective et sexuelle dès le plus jeune âge, nous pouvons espérer que la situation s’améliore dans les années à venir.

Dans l’immédiat, et afin de compléter l’arsenal aujourd’hui disponible, cette proposition de loi vise à répondre à une problématique récurrente pour les victimes de violences conjugales : la dépendance financière. Elles sont en effet nombreuses à demeurer ou à retourner au domicile conjugal faute de ressources suffisantes, notamment lorsqu’elles ont des enfants à charge, qu’elles refusent naturellement de laisser derrière elles. Les aides, telles que le RSA, lorsqu’elles y sont éligibles, sont assorties d’un délai souvent rédhibitoire.

Il est donc proposé, ici, de donner les moyens financiers aux victimes de s’extirper d’un environnement violent, en leur accordant une aide d’urgence, sous forme de prêt à taux zéro, délivré par la CAF en trois mensualités, dont la première débloquée sous trois jours.

Cette avance est subordonnée à une ordonnance de protection délivrée par le juge, un dépôt de plainte de la victime ou un signalement d’un professionnel de santé adressé au procureur. Elle pourra être récupérée par la CAF, si celle-ci se constitue partie civile, directement auprès de l’auteur des violences, pour demander, au nom de la victime, la réparation de la créance sur les dommages et intérêts prononcés. La victime n’aurait plus alors à rembourser le prêt.

La PPL prévoit, par ailleurs, que les allocataires de l’avance bénéficient automatiquement des droits accessoires à la prestation du RSA, comme la complémentaire santé solidaire ou les droits décidés par les collectivités, tels que le tarif réduit pour les transports en commun. Cependant, cette aide n’est pas subordonnée à un accès au RSA, ce qui la rend universelle.

Ce texte s’appuie sur une expérimentation menée par le conseil départemental du Nord, la CAF, le parquet et d’autres acteurs, notamment associatifs. Cette expérience sera particulièrement utile à sa généralisation.

Une telle généralisation est souhaitable, voire indispensable puisqu’elle aboutira à la création d’un droit supplémentaire sur la question hautement sensible de la dépendance financière. Les auteurs de violences, eux, ne manquent pas de ressources. Le chantage financier et la confiscation des moyens de paiement sont fréquents. Ils aggravent le climat de violence, restreignent le champ de liberté des victimes et les éloignent de la perspective d’une fuite pourtant vitale.

Pour toutes ces raisons, le groupe du RDSE votera d’une seule voix pour cette proposition de loi.

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