Intervention de Elsa Schalck

Réunion du 20 octobre 2022 à 10h30
Aide universelle d'urgence pour les victimes de violences conjugales — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Elsa SchalckElsa Schalck :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, comment, dans notre pays, pouvons-nous contrer ce véritable fléau que constituent les violences conjugales ? Cette question, nous l’évoquons régulièrement au sein de cet hémicycle, tant le sujet est majeur, complexe et revêt plusieurs réalités.

Le constat est unanime : seule une mobilisation collective de tous les acteurs de la société permettra d’y arriver.

Je souhaite ce matin rappeler trois chiffres : les violences conjugales ont augmenté de 20 % en 2021. Quelque 87 % des victimes de violences sont des femmes, mais seulement 3 % des victimes de violences conjugales avaient porté plainte en 2020.

En février dernier, nous débattions ici même des mesures issues du Grenelle des violences conjugales de 2019. Nous mettions alors en évidence l’importance d’une réponse judiciaire rapide et efficace, mais également la question de la sensibilisation et de la formation des professionnels, ainsi que le sujet ô combien essentiel de l’accompagnement des victimes, qui recouvre de très nombreux aspects, notamment sociaux, psychologiques ou économiques.

Même si le principe premier doit être l’éviction de l’auteur des violences, il convient de rappeler que 59 % des victimes souhaitent quitter le domicile. Une réalité, qui ressort des témoignages des victimes, s’impose à nous : « Sans argent, on ne part pas ! ».

La dépendance économique de certaines femmes demeure actuellement l’un des freins pour quitter le domicile conjugal. Par ailleurs, les violences économiques, qui vont du contrôle financier jusqu’à la dépossession totale de moyens financiers, sont souvent invisibles et mal identifiées.

Ce type de comportement, qui fait partie intégrante des violences conjugales, mériterait d’être clairement défini dans notre droit interne. Il est indispensable que les victimes puissent faire confiance aux institutions et qu’elles puissent trouver et rencontrer des interlocuteurs de proximité, mais aussi échanger avec eux. Il nous appartient, à nous, législateurs, de faciliter et de sécuriser au mieux leur parcours.

Aussi, je salue aujourd’hui cette proposition de loi et le travail mené par notre collègue Valérie Létard. Instaurer une aide universelle d’urgence pour les victimes de violences conjugales, c’est tout simplement une réponse concrète, qui peut se mettre rapidement en place – une réponse à un besoin identifié.

Cette aide financière viendra ainsi compléter des initiatives locales qui ont émergé pour permettre d’accompagner les victimes sur le plan matériel. Je cite, pour exemple, l’association d’aide aux victimes Viaduq 67 dans le Bas-Rhin, qui distribue des produits de première nécessité aux femmes ayant quitté leur domicile.

Je tiens à saluer le principe même de cette aide d’urgence, qui prendra la forme d’un prêt financier sans intérêt versé par les caisses d’allocations familiales.

Je suis pleinement en accord avec les modalités envisagées par le texte, que le travail parlementaire a permis d’enrichir. Le mécanisme de subrogation des CAF dans les droits des victimes, pour demander réparation du préjudice subi et faire payer l’auteur des violences, me paraît tout à fait pertinent, tout comme l’information de la victime dès son dépôt de plainte, prévue à l’article 2. Il s’agit là d’une condition nécessaire pour que cette aide d’urgence soit effective dans de brefs délais, ce qui est indispensable pour que le dispositif puisse fonctionner.

Comme le souligne également l’auteure du rapport, cette aide d’urgence devra être accompagnée du déploiement d’intervenants sociaux en commissariat et unité de gendarmerie. Nous convergeons ici vers un constat déjà établi au moment du Grenelle : nous avons besoin de moyens humains au plus près des territoires, notamment dans la ruralité, pour combattre efficacement les violences conjugales.

Je tiens enfin à rappeler, pour m’en féliciter, que cette proposition de loi est le fruit d’une expérimentation de terrain, inspirée par des initiatives locales. Il s’agit là, à mon sens, de la meilleure manière de légiférer utilement et de manière pragmatique.

À ce titre, je souligne le travail mené quotidiennement sur le terrain par les acteurs locaux, associations, élus locaux, parquets, services de police et de gendarmerie. Notre message collectif est clair : inciter les femmes à porter plainte, les encourager à dénoncer l’inacceptable et leur permettre de quitter le domicile, étape souvent cruciale et délicate, notamment lorsqu’il y a des enfants.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains salue ce texte et votera bien évidemment en sa faveur.

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