Intervention de Jean-François Husson

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 27 octobre 2022 à 10h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson, rapporteur :

Nous avons aujourd'hui à examiner le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, qui, comme vous le savez, a été rejeté mardi par l'Assemblée nationale.

De mon côté, tout en émettant certaines critiques, je ne proposerai pas le rejet du texte. Au contraire, je vais vous soumettre des amendements reflétant ce que je crois être la trajectoire corrigée et la bonne programmation de nos finances publiques pour les années à venir.

Commençons par le scénario macroéconomique retenu par le Gouvernement, détaillé au rapport annexé au projet de loi, à commencer par le taux de croissance retenu et l'objectif de plein emploi.

À court terme, le Gouvernement retient une hypothèse de croissance de 2,7 % en 2022 et de 1 % en 2023. Sur cette base, il estime que la croissance du PIB entre 2021 et 2023 aura principalement été portée par la consommation des ménages et, dans une ampleur moindre mais tout de même remarquable, par la consommation des administrations publiques.

À moyen terme, c'est-à-dire entre 2023 et 2027, le scénario gouvernemental s'appuie sur l'hypothèse d'une croissance de 1,7 % par an en volume et en moyenne, ce qui est au-dessus de sa prévision de croissance potentielle de 1,35 % et permettrait de refermer l'écart de production à la fin de la période de programmation.

Comme nos auditions l'ont montré, la prévision de croissance du Gouvernement à l'horizon 2027 s'appuie sur les effets attendus d'un certain nombre de réformes structurelles, notamment sur l'emploi. Sont principalement citées les réformes de l'assurance-chômage et des retraites.

À cet égard, d'après les données transmises au Conseil d'orientation des retraites, le Gouvernement considère que le taux de chômage refluera au niveau de 5 % de la population active en 2027, ce qui serait une première depuis 1978.

En parallèle, le rapport annexé indique que la population active pourrait augmenter à la faveur d'une réforme des retraites. Ainsi, d'après nos calculs fondés sur les travaux réalisés par l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et la direction générale du Trésor, une réforme visant à reculer de deux ans l'âge d'ouverture des droits à raison d'un trimestre par génération pourrait faire augmenter la population active d'environ 0,6 % en 2027 par rapport aux projections de l'Insee.

Enfin, le Gouvernement estime que l'inflation devrait se normaliser progressivement à compter de 2025, c'est-à-dire revenir à des niveaux proches de 2 % ou inférieurs. Les taux souverains se stabiliseraient en conséquence, mais demeureraient à des niveaux très importants. Ainsi, en comparaison de la situation à la fin de l'année 2021, le taux de l'obligation assimilable du Trésor (OAT) à dix ans serait supérieur, en 2027, d'après le Gouvernement, de plus de 255 points de base.

À l'exception des prévisions en matière d'inflation, et si l'on écarte à ce stade la question des taux d'intérêts, le scénario macroéconomique du Gouvernement repose sur des hypothèses très - pour ne pas dire « trop » - favorables.

Pour commencer, la prévision de croissance de 1 % en 2023 semble en réel décalage avec le consensus des économistes. Ainsi, au mois d'octobre 2022 le Consensus Forecasts estimait la croissance du PIB à 0,3 % pour l'année 2023. Certes, l'intervalle des prévisions est large, mais celle du Gouvernement se situe dans la limite très haute, ce qui n'en renforce pas la crédibilité.

Concernant la croissance potentielle, le président Raynal et moi-même avons sollicité les estimations de plusieurs instituts de conjoncture afin de les comparer à celle du Gouvernement, qui est, je le rappelle, de +1,35 % par an. En l'occurrence, les réponses des conjoncturistes, que nous avons complétées des évaluations du Fonds monétaire international (FMI) et de la Commission européenne, convergent vers une croissance potentielle moyenne de 1,05 % par an, ce qui est très en dessous de l'estimation du Gouvernement.

On peut l'expliquer, entre autres, par le fait que le Gouvernement surestime, dans son projet de loi de programmation, les effets à court terme des réformes structurelles qu'il souhaite engager.

Que l'on me comprenne bien : l'ensemble des réformes structurelles évoquées par le Gouvernement sont absolument nécessaires. Nous avons besoin d'une réforme des retraites qui permette d'en assurer l'équilibre à long terme. Nous avons besoin de renforcer le taux d'activité des seniors. Nous avons besoin de réformer le fonctionnement de l'assurance chômage et du service public de l'emploi pour réduire le taux de chômage.

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