Intervention de Jean-François Husson

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 27 octobre 2022 à 10h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson, rapporteur :

J'abonde dans votre sens, monsieur le président.

On ne peut pas tourner le dos à l'Europe. Ce serait suicidaire. Quand ça souffle, il faut tenir le cap, et je ne veux pas me tromper de combat. Il nous faut un texte. Aussi, faisons entendre la voix du Sénat : c'est la voix de la responsabilité en ces temps graves. Notre assemblée a une représentativité différente, mais nous sommes tout aussi légitimes dans ce débat.

Monsieur Delcros, je vous l'indique, les grands sujets régaliens sont la justice, la sécurité, l'éducation et la santé.

S'agissant des économies possibles, nous avons rendu 109 rapports depuis 2015 : nous avons donc des pistes.

J'entends les critiques et je les respecte, mais nous devons tous faire des efforts ; nous avons connu l'époque du rabot, méthode imparfaite qui avait toutefois le mérite de trancher quand personne ne voulait prendre de décision.

La guerre aux portes de l'Europe aura des conséquences qui pourraient exiger une forme de ralentissement des lois de programmation, d'autant plus qu'avant même que ne commence cette guerre, à l'été 2021, une crise énergétique majeure a débuté. Je suis intervenu à de nombreuses reprises, ces dernières années, pour rappeler au Gouvernement le terrible impact de la crise énergétique sur le commerce extérieur. Il y a quelques années, plus de la moitié du déficit de la balance commerciale extérieure était liée à celui de la balance énergétique.

Après dix ans d'errements et de renoncements sur la question du nucléaire, chacun doit balayer devant sa porte. Les Français, s'ils ne trouvent pas mille et une vertus au nucléaire, ont le sentiment d'avoir été dépossédés de leur indépendance et de leur souveraineté énergétiques - et que cela leur coûte très cher ! Nous sommes tous interpellés sur cette question, et le ralentissement ne se fera pas du jour au lendemain.

Il est normal de tenir des comptes et de tenter d'alléger le poids de la dette, mais nous avons également la responsabilité de régler la dette écologique et environnementale, dont nous n'évaluons pas très bien le montant à l'échelle du pays et du monde.

Nous devons sortir des débats d'estrade et du bavardage intempestif et privilégier les résultats. Dans le cas contraire, cela pourrait se terminer dans la rue, à l'image de l'épisode des « gilets jaunes ».

Les semaines et les mois qui viennent comportent leur lot d'imprévisibilité et nous poussent à adopter une méthode solide et à nous exprimer clairement pour trouver la bonne ligne d'action. Il est important de bien définir notre trajectoire budgétaire.

Des réformes structurelles sont nécessaires. Sur les retraites, ma conviction est la suivante : l'espérance de vie en bonne santé a augmenté depuis le sortir de la Seconde Guerre mondiale et nous entrons plus tard sur le marché du travail ; nous devons donc cotiser plus longtemps pour toucher une meilleure retraite. En revanche, il n'est pas acceptable de faire travailler les gens plus longtemps pour une retraite plus faible. Les Français ont eu l'impression d'être pris dans une souricière sur cette question. Un débat serein doit être mené, avec pédagogie.

En ce qui concerne les recettes, je souscris aux déclarations du président du Sénat sur la suppression de la CVAE. Nous sommes dans une économie de guerre où la question énergétique est primordiale ; le bouclier énergétique prévu par le Gouvernement doit être à la hauteur. Soit nous mettons les moyens sur ce bouclier énergétique, soit nous supprimons la CVAE.

J'assume cet arbitrage et le dis aux chefs d'entreprises que je rencontre : nous devons maîtriser la dépense publique pour redresser notre balance commerciale et limiter notre endettement. Si notre effort démarre dès 2023, il sera moins douloureux que si nous attendons 2027.

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