Intervention de Hervé Marseille

Réunion du 26 octobre 2022 à 15h00
Traité de coopération bilatérale renforcée avec l'italie — Adoption définitive en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Hervé MarseilleHervé Marseille :

Connu sous le nom de « traité du Quirinal », le traité de coopération bilatérale renforcée entre l’Italie et la France a fait l’objet de nombreuses et longues négociations.

Après une crise diplomatique et une crise sanitaire, il a finalement été conclu le 26 novembre dernier au palais du Quirinal et vient sceller une relation dense et privilégiée, une longue amitié entre nos deux pays.

Comme vous le savez, l’Italie et la France font partie des pays fondateurs de la communauté européenne du charbon et de l’acier (Ceca), puis de la Communauté européenne économique (CEE) – nous voyons bien que l’Europe, depuis son origine, c’est aussi l’énergie.

Le traité de Rome, signé en 1957 dans la capitale italienne, illustre le rôle essentiel joué par l’Italie dans la construction du projet européen. Nos échanges politiques avec l’Italie existent depuis longtemps, et des sommets bilatéraux ont été organisés sur différents sujets.

Pour autant, le manque de cadre et d’habitudes dans les relations politiques et administratives entre nos deux États expose trop dangereusement les relations bilatérales aux variations de majorité, tant en Italie qu’en France.

La ratification permettra à nos représentants respectifs d’afficher sur les scènes internationale et européenne des positions mieux accordées, donc plus influentes.

Le traité du Quirinal s’inscrit dans l’esprit du traité de l’Élysée de 1963. Celui-ci avait posé les jalons du couple franco-allemand, offert une base solide à une coopération régulière et lancé un dialogue systématique entre l’Allemagne et la France.

La France et l’Italie comptent 515 kilomètres de frontières communes. Elles partagent à la fois des espaces naturels, des infrastructures et des bassins de vie. Les enjeux de cet espace frontalier sont donc multiples : sécurité, environnement, économie ou encore transport de voyageurs et de marchandises.

L’objectif du traité du Quirinal est simple : organiser la relation bilatérale en lui donnant un cadre et des orientations stratégiques qui permettront de l’inscrire dans la durée.

Les négociations, entamées dès 2018, avaient alors montré la grande proximité de nos deux gouvernements et notre convergence sur de nombreux objectifs, notamment européens.

Je rappellerai quelques propositions essentielles et concrètes formulées dans le traité.

La politique étrangère qui sera menée aura vocation à stabiliser et à préserver la mer Méditerranée occidentale et orientale et s’appuiera sur une meilleure concertation de nos pays pour la défense de positions communes au sein de l’Otan et de l’Union européenne.

La politique de défense instaurera une collaboration stratégique étroite et de haut niveau, impliquant une assistance mutuelle en cas d’agression sur le territoire de l’un des deux États.

Le traité vise également à promouvoir une politique de sécurité, au travers de la création d’une unité opérationnelle franco-italienne, afin de mieux coordonner les actions contre les réseaux d’immigration clandestine, la criminalité, la corruption et la fraude. Je rappelle combien l’Italie, sur le plan de l’immigration, a souvent été abandonnée à elle-même : nous devons accompagner ses efforts.

Une politique agricole privilégiera et protégera la qualité des produits, les appellations d’origine protégée (AOP) ou les indications géographiques protégées (IGP).

Un service civil commun pour les jeunes sera instauré.

De plus, les ministres des deux pays seront invités aux conseils des ministres de chaque côté des Alpes, sur le modèle du traité d’Aix-la-Chapelle.

Le traité comporte également un volet parlementaire, en reconnaissant l’importance de la coopération entre nos parlements respectifs – je vous remercie, madame la secrétaire d’État, monsieur le rapporteur, de l’avoir souligné dans vos propos liminaires.

Le 25 septembre dernier, les Italiens ont choisi de placer à la tête de leur pays Mme Giorgia Meloni. Cette dernière avait déclaré à propos du traité du Quirinal que cet accord n’était pas démocratique, car le Parlement italien n’avait pas été consulté, et qu’il servait d’abord les intérêts français. Elle avait même dénoncé un « impérialisme français ». De même, lors de l’examen de la ratification au Sénat italien, le parti Fratelli d’Italia et ses alliés ont voté contre la ratification ou se sont abstenus.

Nous considérerons qu’il ne s’agissait que de péripéties de campagne, même si elles étaient préoccupantes.

Si la position initiale de Giorgia Meloni peut faire naître des doutes sur l’application du traité, des signes encourageants ont été donnés depuis lors. Ainsi, hier, lors de sa déclaration de politique générale, la présidente du Conseil italien a rappelé, à dessein, que l’Italie faisait pleinement partie de l’Europe et qu’elle souhaitait une intégration européenne plus efficace.

Madame la secrétaire d’État, le Président de la République a rencontré Mme Meloni lors de son déplacement en Italie le week-end dernier – je considère que c’est une bonne chose. Le sujet européen a-t-il bien été évoqué lors de leurs échanges ? La mise en œuvre du traité est-elle bien à l’ordre du jour des agendas politiques respectifs ? Peut-être pourrez-vous nous éclairer sur cet aspect des choses. Vous l’avez compris, le groupe Union Centriste appelle de ses vœux toute action en ce sens.

À l’heure où les équilibres mondiaux sont bouleversés et où la guerre a fait son retour sur le sol européen, il est plus que nécessaire de sceller durablement entre la France et l’Italie une coopération historique porteuse d’ambitions communes.

L’impulsion décisive du gouvernement de M. Draghi et le précieux concours du président Mattarella ont abouti au traité du Quirinal. Il ne doit pas être entravé, pour le bien de l’Union européenne auquel nos deux pays travaillent depuis longtemps.

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe Union Centriste votera en faveur de la ratification du traité de coopération entre la France et l’Italie.

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