Intervention de René-Paul Savary

Commission des affaires sociales — Réunion du 2 novembre 2022 à 8h35
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 — Examen du rapport

Photo de René-Paul SavaryRené-Paul Savary, rapporteur :

Nous pouvons nous rassembler sur certains points.

Nous faisons tous confiance au paritarisme, qui est important. Les partenaires sociaux ont déjà fait la preuve de leur responsabilité et de leur courage dans la prise de décisions. Ainsi, l'Agirc-Arrco a pris des mesures de décote, transitoires, mais importantes pour l'équilibre des comptes.

Autre point sur lequel nous pouvons nous rassembler : l'emploi des seniors. Je crois que nous sommes tous d'accord sur le fait que notre société doit changer de vision. Le rapport d'information que j'ai rendu avec Monique Lubin traçait véritablement des pistes. Le Gouvernement serait bien inspiré d'en suivre certaines préconisations. Nous sommes tous d'accord sur l'importance d'améliorer le taux d'emploi des seniors compte tenu de l'espérance de vie plus longue et du rapport entre nombre de cotisants et nombre de retraités, qui va en se dégradant, et sur la nécessité d'être dans la norme des pays européens.

Autre point de convergence, nous ne saurions mettre en doute les travaux réalisés, notamment ceux du COR, avec toutes les précautions qu'a soulevées Monique Lubin : les prévisions se fondent sur un certain nombre de paramètres amenés à évoluer avec les années. Ainsi, le COR a réalisé de nouvelles simulations avec un taux de chômage à 5 %, au lieu de 7 %. De même, il a modifié le critère de la productivité, à moins de 1 %, contre 1,4 % précédemment. La démographie doit aussi être revue régulièrement. Et l'on sait bien que le régime des fonctionnaires n'est pas couvert à terme du fait de la pyramide des âges.

Je souscris également à ce qu'a dit Monique Lubin sur le caractère contreproductif du Ségur. Ce dernier a des effets très positifs quant à l'équilibre des retraites pour l'année, puisqu'il amène des cotisations supplémentaires, mais, à terme, quand les personnes concernées partiront à la retraite, il entraînera des dépenses supplémentaires.

Oui, il faut prendre en compte la pénibilité, mais 30 % de ceux qui sont en cumul emploi-retraite ont bénéficié du dispositif carrière longue, qui correspond déjà à une prise en charge de la pénibilité. Au reste, méfions-nous des idées préconçues : un maçon de mon voisinage considère qu'un métier n'est jamais pénible pour celui qui aime l'exercer...

Il nous a paru important d'essayer de prendre en compte tous les paramètres. Les partenaires sociaux doivent pouvoir nous proposer, en confiance, des mesures prenant en compte l'égalité hommes-femmes, la pénibilité, le cumul emploi-retraite, la retraite progressive, les carrières longues. S'ils n'y parviennent pas, il faut bien que nous mettions des bornes, pour ne pas être hors sujet.

Puisque la réforme Touraine allonge progressivement l'âge de départ moyen jusqu'à 64 ans, pourquoi prendre une mesure d'âge de départ à 63 ou 64 ans ? Pour que les gens ne partent pas avant, avec des retraites plus faibles et des décotes. La réforme Touraine et son accélération conduisent à une baisse de la pension moyenne, tandis que le décalage de l'âge officiel de départ à la retraite permet aux salariés de toucher une retraite à taux plein.

Les cotisations supplémentaires qui résulteront de la mesure amélioreront considérablement l'équilibre dans les dix à quinze prochaines années. Cet effet sera neutralisé au bout de quinze ans, lorsque les gens partiront en retraite, puisqu'ils toucheront des retraites plus élevées - la mesure garantit davantage le pouvoir d'achat des futurs retraités. Il s'agit à la fois d'équilibrer le système, d'améliorer les pensions, de prendre en compte un certain nombre de facteurs, de générer des recettes supplémentaires. Au reste, l'augmentation des cotisations sociales et fiscales se chiffrera en dizaines de milliards d'euros - c'est en cela que la mesure est la plus productive. Elle permet, parallèlement, de sauver notre modèle social, de tenir compte des difficultés relatives au report d'âge et de prendre en compte l'autonomie.

J'ai mené, avec Cathy Apourceau-Poly, de nombreuses auditions sur le transfert du recouvrement. Nous sommes convaincus que le recouvrement, tel qu'il est organisé actuellement par le régime Agirc-Arrco, est un régime très intégré : il assure à la fois le recouvrement et le paiement des prestations. Ce lien est tout à fait important, surtout dans un régime par points, où l'argent cotisé amène des points de retraite au compte du cotisant. Il faut une fiabilité des données nominatives, que sait contrôler l'Agirc-Arrco, alors que l'Urssaf contrôle plutôt les données globales dites « agrégées ». C'est la raison pour laquelle nous avions recommandé le report du transfert, qui ne paraissait pas mûr. Nous proposons de rester sur cette ligne. Depuis, il y a eu des faits nouveaux : le Gouvernement, après avoir affirmé que les choses étaient prêtes sur le plan technique, notamment pour les grandes entreprises, a préféré reculer. Nous aurons l'occasion de rediscuter de l'arrêt définitif du transfert lors de l'examen des amendements et de prendre les décisions de sagesse qui s'imposeront.

Madame Gerbaud, effectivement, des mesures ont déjà été prises pour faire travailler les médecins retraités. Nous proposons de supprimer l'interdiction d'exercer dans un délai de six mois après la liquidation de la retraite. Cette interdiction ne sert à rien et représente un manque à gagner de 600 millions d'euros pour la Cnav, que l'État s'est engagé à compenser. Pour une meilleure incitation, il faudra revoir le plafond de chiffre d'affaires pour le médecin retraité qui cumule.

Je pense que cela permettra, dans certains secteurs, que les médecins travaillent davantage. On peut d'ailleurs élargir la mesure au-delà des seules zones sous-dotées : s'il y a plus de médecins en zones dotées, cela libère aussi des postes...

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