Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’issue de la restructuration débutée en 2009, le Centre national d’enseignement à distance, le CNED, aura-t-il encore les moyens d’assurer ses missions de service public d’origine ? Pour l’intersyndicale du CNED de Vanves, dont certains membres sont présents dans les tribunes du public, la réponse est « non ». Je partage leur analyse, tant les motifs d’inquiétude sont nombreux.
Historiquement, le service public de l’enseignement à distance s’adresse aux personnes de tous les âges, aux enfants d’âge scolaire comme aux adultes. Il assure l’instruction des enfants « empêchés » d’aller à l’école, par la maladie ou toute autre difficulté, et leur évite de subir une interruption de scolarité. Il est également destiné aux adultes, qui représentent aujourd'hui les deux tiers des 210 000 inscrits : demandeurs d’emplois en reconversion, bénéficiaires de la formation permanente, femmes au foyer, prisonniers, malades.
La vocation première du CNED est en effet de favoriser la promotion sociale en fournissant des formations qualifiantes et diplômantes de qualité, à des tarifs accessibles à tous.
Une autre des missions du CNED est de permettre à des enseignants « accidentés de la vie », du fait d’une maladie ou d’un handicap, de continuer de travailler.
Cette double articulation entre apprenants et enseignants « empêchés » est en train de disparaître. Alors même que les discours officiels font la promotion de l’emploi des personnes handicapées et des dispositifs de seconde carrière, c’est l’inverse qui se produit au CNED. Ce double langage est source de fortes souffrances pour ses personnels.
Les missions de service public du CNED sont remises en cause depuis la publication du décret 2009-238 du 27 février 2009 relatif au service public de l’enseignement à distance : la révision générale des politiques publiques, la RGPP, venait de faire son entrée au CNED !
Si ce décret a instauré la gratuité de l’inscription pour les élèves âgés de six à seize ans, il a surtout réduit le périmètre du service public à la seule scolarité obligatoire. Désormais, 80 % des formations, y compris l’enseignement supérieur, relèvent du secteur concurrentiel de la formation professionnelle.
Dès lors, il s’agit de développer non plus « une politique d’inscrits », mais une « politique du chiffre d’affaires ». Priorité est donc donnée au développement du soutien scolaire, aux formations dites « rentables ».
Bilan : cinquante formations ont déjà été supprimées pour la période 2010-2011 ; les tarifs sont en augmentation de 20 % en moyenne, ce taux pouvant atteindre 48 % pour certaines formations. Des aberrations sont constatées : le tarif du diplôme d’accès aux études universitaires a bondi de 40 % en deux ans, en faisant l’un des plus chers et entraînant une chute des inscriptions. Les tarifs préférentiels pour les chômeurs ont quant à eux été supprimés.
Cette politique tarifaire est en décalage avec la sociologie actuelle des inscrits.
Des postes d’enseignants, de personnels administratifs et techniques sont supprimés chaque année, ce qui ne sera pas sans conséquence sur la qualité des formations.
Contrairement aux engagements pris en 2009, la fermeture de plusieurs sites – deux ou trois – est prévue, sans que les personnels en soient informés ou soient associés à ces décisions. La transformation du CNED en établissement public à caractère industriel ou commercial parachèverait ce démantèlement. Une étude a d’ailleurs été lancée.
Que pouvez-vous nous dire, madame la secrétaire d’État, sur ces fermetures de sites et sur le statut du CNED ?