Monsieur le président, messieurs les ministres, mes chers collègues, nous abordons un projet de loi de finances rectificative qui va nous conduire à évoquer trois ordres de sujets.
Tout d’abord, nous serons amenés à parler de la situation internationale, avec les conséquences, pour nos finances publiques, des mesures qu’il est nécessaire de prendre au sein de la zone euro.
Ensuite, nous traiterons de l’aspect classique de tout collectif budgétaire à travers une série de dispositions de crédits et de ressources permettant de faire le point sur la mise en œuvre des orientations de nos finances publiques pour l’année 2011 et de nous situer sur la trajectoire de convergence.
Enfin, nous aborderons le sujet spécifique qui a motivé ce projet de loi de finances rectificative, c’est-à-dire la réforme de la fiscalité du patrimoine, avec un aménagement raisonnable de l’impôt de solidarité sur la fortune. §
Je commencerai par le contexte international.
La commission des finances a analysé avec une grande attention les propositions qui lui sont faites, observant que la situation de la Grèce nous place à proximité immédiate d’un grand péril, pour notre économie réelle, pour le regain de croissance que nous connaissons.
La Grèce est sans doute plus près du défaut qu’elle ne l’a jamais été. Si pareil défaut ou un événement de crédit devait survenir dans la période actuelle, nul doute que cela serait très lourd de conséquences : il y aurait un effet de contagion sur d’autres économies de la zone euro et sur celle-ci tout entière.
À côté de la Grèce, tout en souhaitant que les modalités soient trouvées pour une association, que l’on qualifiera de « volontaire », des bailleurs de fonds privés aux efforts à entreprendre, il faut aussi garder un œil sur l’Irlande.
Mes chers collègues, on ne le dit pas assez, l’Irlande est tout aussi responsable que la Grèce de ce qui lui arrive. Cela saute aux yeux : des erreurs de fonctionnement dans la gouvernance et la régulation du système bancaire irlandais se sont traduites par une bulle immobilière invraisemblable dans ce pays de 4, 4 millions d’habitants, dont le secteur financier va probablement constater une hémorragie de fonds propres avoisinant, au total, 100 milliards d'euros. Or l’Irlande semble toujours se refuser à mener une politique coopérative en matière de convergence des fiscalités en Europe, et c’est un vrai sujet de préoccupation pour la commission des finances.
Il serait utile, monsieur le ministre du budget, que vous puissiez nous éclairer sur les conséquences de la décision, prise hier par les ministres des finances de la zone euro, de ne pas accorder au futur Mécanisme européen de stabilité le statut de créancier privilégié et sur les effets possibles d’une telle décision quant aux conditions d’accès au marché de l’Irlande, de la Grèce et du Portugal.
Comme vous le savez, mes chers collègues, le Mécanisme européen de stabilité est censé se mettre en place en 2013. Dès lors, une distinction doit être faite entre les efforts conduits d’ici là et la situation qui prévaudra ultérieurement.
On nous présente l’après-2013 comme une période de sérénité que l’on atteindrait après trois années de « gros temps ». Espérons-le ! Souhaitons surtout que les modalités de fonctionnement dudit Mécanisme européen de stabilité soient déterminées à bref délai, sans la moindre ambiguïté, et qu’elles soient de nature à restaurer réellement la confiance sur les marchés.
Le Conseil européen qui se tiendra à la fin de la semaine devrait décider de porter, pour ce qui est du dispositif actuellement à l’œuvre, à 440 milliards d'euros la capacité de prêt effective du Fonds européen de stabilité financière. C’est dans cette perspective qu’il est proposé, dans le cadre du projet de loi de finances rectificative, d’autoriser un relèvement du plafond de la garantie accordée par la France aux émissions du FESF, plafond qui passerait de 115 milliards d'euros à 155 milliards d'euros. Il conviendra d’évoquer à quelles conditions le Parlement est susceptible d’accepter un tel relèvement.
N’oublions pas non plus que nous devrons contribuer au financement en capital du Mécanisme européen dès son entrée en vigueur. La part de la France à cet égard est de l’ordre de 18 milliards d'euros ; si ce montant ne sera pas comptabilisé dans la détermination du solde dit « maastrichtien », il alourdira bien sûr l’endettement public et devra être pris en compte dans les perspectives pluriannuelles de nos finances publiques.
Je ferai une dernière remarque sur le volet international.
À la date de passage en Conseil des ministres du projet de loi de finances rectificative, le 11 mai dernier, les conclusions du Conseil européen des 24 et 25 mars précédents étaient connues depuis un mois et demi. Il eût donc été possible d’inscrire dans le projet initial le relèvement de garantie auquel je viens de faire allusion. La commission des finances regrette que cela n’ait pas été fait.
J’en viens maintenant aux aspects qui relèvent traditionnellement d’un collectif budgétaire.
Je ferai tout d’abord observer que le texte était d’une taille assez modeste au départ, comprenant 23 articles, et que l’Assemblée nationale en a ajouté 39.