Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 21 juin 2011 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2011 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, le directeur du centre de politique et d’administration fiscales – une référence donc – de l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, Jeffrey Owens, décrit ainsi la fiscalité française : « Vous aimez les impôts : vous en avez tant qu’il nous faut chaque année six pages pour présenter les statistiques françaises quand il en faut trois pour les autres pays ».

Sous ce trait d’humour, qui ne nous fait pas obligatoirement rire, il met l’accent sur la principale tare de notre fiscalité : sa complexité, qui la rend quasi illisible par tous et incompréhensible pour beaucoup.

Les comparaisons internationales et les exemples de nos partenaires, surtout l’Allemagne, les Pays-Bas et la Suède, pays auxquels on peut peut-être ajouter aujourd'hui la Grande-Bretagne, sont toujours riches d’enseignements. Il ressort sans surprise de ces comparaisons que la France a, persiste Jeffrey Owens, « le plus d’impôts, la plus forte imposition, la plus forte progressivité » et que c’est le pays « où les taux nominaux sont les plus élevés ».

Pour préparer la réforme fiscale, le bureau de la commission des finances a effectué des missions d’évaluation chez nos voisins allemands, belges et hollandais ; l’Allemagne, notre principal partenaire, reste le modèle à la mode avec qui une tentative de rapprochement fiscal existe, mais le système hollandais nous a aussi révélé ses nombreuses vertus.

Pourtant, ces modèles, même s’ils sont séduisants, sont-ils transposables en France ? Les experts sont sceptiques.

La commission des finances, qui a lancé, dès le début du mois de février, des cycles d’auditions, a mené une réflexion de fond. « Complexe », « pénalisante », « incompréhensible », « contradictoire », les qualificatifs meurtriers ne manquent pas pour décrire notre fiscalité. Je n’ai cessé, en tant que commissaire des finances, de faire appel à la simplicité et au bon sens dans les finances publiques, mais je ne suis pas certain d’avoir été entendu.

Monsieur le ministre, comme vous le savez, depuis des années, je soutiens le triptyque de la commission des finances : suppression du bouclier fiscal, suppression de l’ISF et création d’une nouvelle tranche d’impôt pour réduire les écarts parfois scandaleux des salaires, écarts qu’aucun talent ou compétence ne saurait justifier. Le projet de loi de finances rectificative ne répond qu’en partie à mes attentes.

Il supprime enfin le bouclier fiscal, qui, soulignons-le, n’existe que chez nous et qui est ressenti en temps de crise comme une injustice, car les plus gros revenus sont exclus de tout effort contributif supplémentaire exigé par celle-ci. Je me demandais pourquoi les effets de sa suppression ne devaient se faire sentir qu’à partir de 2013, mais vous venez de répondre à cette question en ramenant l’échéance à 2012.

Le projet de loi de finances rectificative ne supprime pas l’ISF ; il le réforme en essayant de remédier à ses principaux défauts, en particulier en frappant les ménages, dont le patrimoine immobilier est souvent constitué par la seule résidence principale dont ils ne veulent et ne peuvent se séparer, et en utilisant un système de barèmes beaucoup trop alambiqué.

Pourquoi ne pas avoir tout bonnement supprimé l’ISF ? Nous y viendrons tôt ou tard, car la commission des finances va être prophète en son pays.

Le projet de loi de finances rectificative modifie l’imposition du patrimoine et, plutôt que de taxer le stock, il taxe les flux : les donations et droits de succession ciblés sur les plus hauts revenus. Cette orientation me paraît juste.

Pourtant, nombre de problématiques sont restées sans réponse.

Je pense à une refonte de la fiscalité du patrimoine englobant l’ISF et la taxe foncière, qui doit s’appliquer à des valeurs actualisées et non plus obsolètes, comme c’est le cas aujourd’hui.

Je pense également à la simplification et à la modernisation de notre système d’imposition des revenus, trop complexe et morcelé. À cet égard, je vous rappelle le constat d’Einstein : « la chose la plus difficile à comprendre au monde, c’est l’impôt sur le revenu. » Alors, simplifions enfin l’impôt sur le revenu afin que même Einstein puisse le comprendre !

Je pense encore à la suppression des niches fiscales. Quel est votre sentiment, monsieur le ministre, sur la retenue à la source pratiquée chez nos voisins ? Pensez-vous la mettre en œuvre ? Ses avantages vous semblent-ils supérieurs aux inconvénients ?

Par ailleurs, envisagez-vous une réforme de la fiscalité sur la consommation, sachant que la TVA est un levier de réforme ? Quelle est votre position sur la TVA anti-délocalisations ?

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