Intervention de Aymeri de Montesquiou

Réunion du 21 juin 2011 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2011 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Aymeri de MontesquiouAymeri de Montesquiou :

Les taux élevés, parfois confiscatoires, de la fiscalité du capital dans son ensemble conduisent les assujettis à rechercher une optimisation fiscale. La réforme vise à éviter de tels contournements fiscaux, mais on peut faire confiance aux cabinets spécialisés dans l’optimisation et aux contribuables pour trouver des échappatoires...

L’évasion fiscale est une spécialité française et les exilés fiscaux se sentent mieux en Suisse. À l’instar de l’Allemagne ou du Royaume-Uni, ne devrait-on pas conclure une convention avec la Suisse afin que ce pays collecte un impôt forfaitaire sur les dépôts dont il bénéficie ou bien s’inspirer des États-Unis et faire dépendre l’impôt non du lieu de résidence, mais du passeport ?

Le bilan sur les gagnants et les perdants, en gageant le coût de la réforme, fait apparaître que les perdants sont les non-résidents disposant d’une résidence secondaire et les exilés fiscaux. Cela ne me perturbe pas, il faut encourager par ce biais la solidarité nationale.

Enfin, la réforme de la fiscalité du patrimoine a pour objectif l’efficacité économique. Le rôle central de l’épargne étant de permettre l’accumulation du capital dans le pays pour financer l’économie, profitons que l’épargne des Français soit l’une des plus importantes de l’OCDE. Avec la productivité, elle constitue un potentiel majeur d’accroissement de la richesse nationale. Mais la compétitivité fiscale, comme le reste de la réforme, doit s’envisager globalement et non impôt par impôt.

Le financement des entreprises et leurs investissements, nous en convenons tous, sont déterminants pour la compétitivité française. Nous évoluons dans un contexte d’ « économie entrepreneuriale de la connaissance », où l’innovation et la créativité sont indispensables, et dans un environnement européen, ce qui est un élément fondamental. Il faut donc favoriser le rôle de l’entrepreneur dans notre système productif.

« La fiscalité est pour ainsi dire une passion française très ancienne » a déclaré le Premier ministre. Il ne peut être, hélas ! plus juste. Il pratique aussi l’autodérision : une semaine seulement après le vote du projet de loi constitutionnelle relatif à l’équilibre des finances publiques, nous voici saisis d’un projet de loi de finances rectificative réformant la fiscalité du patrimoine.

Je m’étonne de la modestie de cette réforme. On annonçait un « Grenelle », un « Grand Soir » de la fiscalité. Finalement, c’est une réformette sur la fiscalité du patrimoine qui nous est présentée dans ce projet de loi de finances rectificative.

Je regrette le manque d’ampleur de la réforme, qui aurait dû être une réforme d’ensemble de la fiscalité française. Elle n’est, je l’espère, qu’une première étape, ou plutôt une première orientation. Les experts conviennent de la nécessité et de l’urgence d’une réforme globale de notre système fiscal. Christian Saint-Etienne, référence pour beaucoup, pense que nous sommes à la veille d’une crise historique des finances publiques. Il n’a pas peut-être pas tort.

La fiscalité, sujet éminemment politique, héritière d’une longue et turbulente histoire, est donc victime des scories partisanes qui rendent difficile la séparation de l’idéologie et de la fiscalité.

Il faut toujours du courage pour entamer une réforme fiscale, par crainte des élections qui vont suivre. A contrario, l’absence de courage n’a jamais été perçue par les électeurs comme étant positive. Monsieur le ministre, je ne dis pas que vous manquez de courage, mais nous espérions un calendrier des différentes étapes de la réforme, laquelle est indispensable après les lâchetés qui se sont succédé au cours des trente dernières années. Une telle réforme demandant du temps, un calendrier est nécessaire.

Monsieur le ministre, démontrez-nous qu’équité et efficacité ne sont pas antagonistes, indiquez-nous que le projet de loi de finances rectificative contient les prémices d’une réforme d’ensemble de notre fiscalité, prouvez-nous qu’il vise à faire œuvre de justice en instaurant une véritable proportionnalité de l’impôt.

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