Depuis plusieurs années, nous voyons la majorité et le Gouvernement exprimer la volonté commune d’en finir avec l’ISF. Mais ils ne peuvent pas le faire pour des raisons électorales évidentes. Et puis, cela ravive de mauvais souvenirs !
Moi, je voudrais, une fois encore, défendre cet impôt, que vous proposez d’alléger très sensiblement.
M. Collin l’a rappelé, il est payé par moins de 2 % de la population. J’ajouterai que son rendement représente à peine 8 % de la fiscalité du patrimoine et 0, 4 % des recettes de l’État. Néanmoins, vous vous focalisez sur cet impôt ; c’est bien la preuve que vous mettez en œuvre une certaine idéologie. Nous sommes prêts à admettre que nous en soutenons une, qui se situe à l’opposé, mais reconnaissez au moins que, vous aussi, vous agissez par idéologie !
Par ailleurs, je tiens à rappeler que la taxation du capital en France se situe à peu près dans la moyenne européenne. François Marc l’a montré, votre argument selon lequel nous serions les seuls à avoir instauré un impôt sur la fortune est faux : d’autres pays ont également décidé de taxer le capital. Ainsi, pour ne considérer que la fiscalité du foncier, elle représente 4 milliards d'euros en France contre 14 milliards d'euros dans des pays européens équivalents.
Vous prétendez que cette réforme est juste et exonérera de cet impôt – qui vous est odieux – les contribuables qui relèvent actuellement de ses premières tranches. N’oublions pas que le patrimoine médian s’élève à 110 000 euros en France ! Donc, votre réforme n’est pas faite pour ces ménages moyennement fortunés, et ce que vous affirmez n’est rien d’autre qu’un très gros mensonge.
L’ISF est juste parce que patrimoines les plus importants captent une part croissante de la valeur ajoutée, cela a été démontré. Il est moderne parce qu’il est déclaratif. C’est justement parce que, en Allemagne, l’impôt sur la fortune était non pas déclaratif, mais assis sur des bases locatives qui n’avaient pas été réévaluées depuis plus de trente ans, qu’il a été supprimé. En revanche, dans ce pays, la taxation sur le foncier est beaucoup plus importante que chez nous.
Voilà une première raison de voter ces amendements de suppression. Mais il en est une autre, et nous attendons toujours, monsieur le ministre, que vous nous montriez en quoi elle ne serait pas fondée.
Vous mettez en parallèle l’ISF et le bouclier fiscal ; au sein de la majorité, certains considèrent même le second comme l’« enfant » ou le « frère » du premier. Vous n’avez d’yeux que pour cet impôt emblématique qui rapporte au budget de l’État 4 milliards d'euros par an. Il reste que vous amputez encore les recettes et que vous n’équilibrez pas votre réforme. Autrement dit, vous allez payer l’allégement de l’ISF avec un peu plus de déficit budgétaire ! Encore une fois, la France devra emprunter pour financer un allégement dont profiteront les plus riches.
Vous pouvez faire les calculs dans tous les sens : le compte n’y est pas ! Je vous en ai fait la démonstration tout à l’heure, et vous n’y avez pas répondu, mais peu importe, car elle est imparable.
Bref, cette réforme n’est pas financée et elle est injuste : CQFD !