Monsieur le président, madame la présidente de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure générale, mesdames, messieurs les rapporteurs, madame, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les sénateurs, au nom de mes collègues du Gouvernement et de Gabriel Attal, dont je vous prie de bien vouloir excuser l’absence, puisqu’il est retenu à l’Assemblée nationale pour l’examen du second projet de loi de finances rectificative pour 2022, permettez-moi d’abord d’exprimer une pensée pour nos professionnels de santé.
Aujourd’hui est une journée particulière pour moi, à titre personnel : en 1985, le 7 novembre, mon père a été victime d’un très grave accident ; depuis lors, je sais dans ma chair ce que nous devons à ces femmes et ces hommes. Au-delà de la considération que nous éprouvons, toutes et tous, pour eux, les épisodes extrêmement douloureux de la crise du covid-19 nous ont montré à quel point leur présence et leur engagement étaient absolument irréprochables.
L’État a bien évidemment répondu présent, à travers le « quoi qu’il en coûte », et a ainsi évité à notre pays un cortège de difficultés. C’est ensemble que nous avons pu traverser l’épreuve si difficile de la pandémie. Bousculée par le choc, notre société a su trouver les ressources et les ressorts nécessaires pour résister. La responsabilité qui nous incombe désormais est de poursuivre la reconstruction.
Dès lors, comme vient de l’exprimer mon collègue François Braun, il nous faut bâtir ensemble un système plus solide, plus accessible, plus efficace et plus juste.
Un système plus accessible, cela implique avant tout d’améliorer l’accès aux soins. L’effort ne débute pas aujourd’hui. Depuis 2017, nous avons investi 53 milliards d’euros supplémentaires dans notre système de santé, avec un Ondam passé de 191 milliards d’euros en 2017 à 244 milliards d’euros en 2023.
Nous avons mis fin aux baisses de tarifs hospitaliers, déployé l’offre 100 % Santé, supprimé le numerus clausus et soutenu l’aide à domicile et nos Ehpad. Nous allons poursuivre cet effort, conformément aux engagements pris devant les Français.
Voilà pourquoi, avec ce PLFSS, l’Ondam progressera en 2023 à un niveau historique de 3, 7 %. C’est une progression plus rapide de 50 % qu’au cours de la décennie 2010.
Quant à l’Ondam hospitalier, son augmentation sera de 4, 1 % en 2023. C’est deux fois plus qu’au cours de la décennie 2010. Cette augmentation finance notamment une enveloppe exceptionnelle de 800 millions d’euros en 2022, puis 800 millions d’euros supplémentaires en 2023, fruit d’une concertation de François Braun avec les fédérations hospitalières et médico-sociales.
En ville, nous encouragerons le cumul emploi-retraite des médecins proches de la retraite ou en retraite, comme durant la crise sanitaire. Cette incitation prendra la forme d’une exonération de cotisations vieillesse pour 2023, dans l’attente des conclusions du volet santé du CNR.
Renforcer l’accès aux soins, c’est aussi mieux prendre en charge nos aînés dépendants, comme vient de le rappeler mon collègue Jean-Christophe Combe. Avec un Ondam médico-social à +5, 1 % en 2023, nous finançons le plein effet des augmentations de salaire, l’embauche de milliers de soignants et l’investissement pour les services à domicile. Rappelons que les augmentations salariales décidées depuis la crise sanitaire représentent un effort de 3, 2 milliards d’euros par an pour la cinquième branche de la sécurité sociale, que nous avons créée en 2021.
Nous agissons pour faciliter l’accès aux modes de garde, parce que nous savons combien le destin de nos jeunes enfants se joue dès leurs 1 000 premiers jours.
Ce PLFSS pose la première pierre d’un véritable service public de la petite enfance en réduisant drastiquement le reste à charge des familles pour le recours aux assistants maternels : concrètement, un couple de classe moyenne, qui confie son enfant cinquante heures par semaine, économisera quasiment 2 000 euros sur une année – autant de pouvoir d’achat supplémentaire pour des dizaines de milliers de familles. Cette réduction s’ajoutera à la hausse du plafond du crédit d’impôt pour frais de garde des jeunes enfants que vos collègues députés ont relevé de 2 300 à 3 500 euros lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2023.
Tous ces progrès ne sont possibles que si nous continuons à donner la priorité au travail et à la production.
Les cotisations, socle du financement de notre sécurité sociale, vont passer de 391 milliards d’euros en 2022 à 407 milliards d’euros en 2023. Nous devons cette progression aux 310 000 créations d’emplois prévues en 2022, dont 220 000 ont déjà été réalisées lors du seul premier semestre et alors que 117 000 créations supplémentaires sont attendues en 2023. Au total, de 2020 à 2023, malgré la crise, notre pays pourrait créer 1, 2 million d’emplois. Ne l’oublions jamais : c’est le travail qui finance notre système social.
Voilà pourquoi nous entendons, par ce PLFSS, rendre notre système social plus efficace. Les besoins sont immenses, aussi ne devons-nous ménager aucun effort pour trouver des marges d’efficience et pour réaliser des économies là où elles sont pertinentes – et elles peuvent être substantielles.
Gouverner, c’est choisir, vous le savez comme moi. C’est la raison pour laquelle nous assumons de demander des efforts à certains acteurs, qui peuvent contribuer à l’effort commun.
Nous assumons ainsi de demander des efforts aux laboratoires de biologie, qui ont réalisé 7, 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en commercialisant des tests covid en 2020 et 2021 – même si nous saluons évidemment leur mobilisation sans faille durant la crise sanitaire. Leur rentabilité était par ailleurs déjà très élevée avant la crise, à un taux de près de 30 %. La Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) négociera dès 2023 une baisse de prix avec le secteur, au moins à hauteur de 250 millions d’euros.
Nous assumons aussi de demander des efforts au secteur de l’imagerie médicale, qui représente près de 5 milliards d’euros de dépenses. Nous pouvons limiter les examens redondants, inappropriés ou parfois inutiles. Nous demanderons à la Cnam de négocier un nouveau protocole pour juguler la dépense de 150 millions d’euros en 2023.
Nous assumons enfin de demander des efforts aux fabricants de médicaments. Les dépenses dans ce secteur sont dynamiques du fait du vieillissement démographique et de l’arrivée de nouvelles molécules sur le marché. Nous devons redoubler l’effort sur la pertinence des prescriptions et les baisses de prix ciblées sur les médicaments les plus anciens afin de mieux récompenser l’innovation. Ces baisses de prix s’élèveront à 800 millions d’euros en 2023.
Ces efforts, nous ne les demandons pas par plaisir de faire des économies, mais parce qu’ils sont indispensables pour dégager des marges de manœuvre budgétaires et mieux investir dans l’hôpital, en ville comme dans le médico-social. Soyons très clairs : lorsque nous parlons d’économies, il s’agit d’efforts de maîtrise par rapport à des dépenses qui continueront d’augmenter. C’est la condition indispensable pour garantir la soutenabilité et la résilience de nos comptes sociaux.
Je rappelle, à l’intention de ceux qui l’oublieraient, que les taux d’intérêt à 10 ans sur la dette française frôlent les 3 %, alors que ceux du Royaume-Uni dépassent les 4 % et que ceux de l’Italie approchent les 5 %. La parenthèse de l’argent gratuit sur les marchés s’est bel et bien refermée. Retrouver une trajectoire maîtrisée de nos comptes publics est la condition sine qua non de notre indépendance financière.