Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la commission des finances a constaté que le PLFSS comportait peu de mesures ayant des impacts financiers significatifs pour 2023. L’évolution des recettes et des dépenses résulte essentiellement de paramètres inchangés par rapport à cette année et des hypothèses macroéconomiques retenues par le Gouvernement.
Les hypothèses concernant la masse salariale ont été jugées plausibles par le Haut Conseil des finances publiques, mais nous savons qu’il existe un aléa sur la prévision de croissance et que des signes de ralentissement apparaissent.
La prévision de dépenses table sur une quasi-extinction des prises en charge dérogatoires liées au covid-19. Cette moindre dépense escomptée, mais incertaine, explique à elle seule la diminution du déficit de la sécurité sociale en 2023.
Hors crise sanitaire, le déficit en 2023 sera simplement stabilisé par rapport à 2022, malgré des hypothèses de revalorisation des prestations pour l’an prochain sensiblement inférieures à l’inflation, et à condition de conserver une évolution positive de l’emploi et une bonne dynamique de la masse salariale.
Le déficit de l’assurance maladie se réduit fortement. C’est l’effet du faible montant de la provision pour la crise sanitaire. S’y ajoute la ponction de 2 milliards sur la branche famille, injustifiée et inopportune, au moment où le fléchissement de la natalité exigerait une politique familiale plus ambitieuse.
Les mesures de maîtrise des dépenses d’assurance maladie paraissent conjoncturelles, plus que structurelles. Certaines économies attendues sont peu documentées, notamment les actions sur la pertinence des actes et des prescriptions.
La commission des finances relève néanmoins plusieurs dispositions du texte visant à renforcer la lutte contre les abus et les fraudes. Dans l’enquête qu’elle a remise voilà deux ans à la commission des affaires sociales du Sénat, la Cour des comptes avait dressé un constat sévère sur l’insuffisance des contrôles réalisés par l’assurance maladie. Les modifications proposées vont dans le bon sens, mais il faudra amplifier ces actions.
Les prévisions pour 2024 et au-delà nous paraissent inquiétantes pour plusieurs raisons.
Premièrement, le déficit persiste et s’accentue à partir de 2024, alors que les hypothèses de croissance, d’emploi et de recettes sont optimistes.
Deuxièmement, les prévisions de dépenses d’assurance maladie sont elles aussi optimistes, le rythme d’évolution étant inférieur à celui de la croissance majorée de l’inflation. Ce résultat supposerait une maîtrise des dépenses particulièrement efficace, mais les instruments sur lesquels s’appuyer ne sont pas véritablement précisés.
Troisièmement, enfin, la trajectoire des dépenses de retraite, marquée par une nette dégradation dès 2024, est d’autant plus préoccupante que le Gouvernement indique avoir en partie pris en compte, à un niveau qu’il n’a cependant pas clairement précisé, les effets d’une nouvelle réforme.
Le relèvement de l’âge de départ est désormais jugé absolument indispensable, alors que cette idée avait été totalement écartée en 2017. Le Sénat, lui, a été constant sur ce point, en inscrivant depuis 2014, dans chaque PLFSS, une mesure en ce sens.
En tout état de cause, cette réforme, constamment repoussée, sera engagée trop tardivement pour avoir un effet sensible sur le rythme de progression des dépenses de retraites d’ici à 2027.
En résumé, le PLFSS pour 2023 comporte peu de mesures de nature à rééquilibrer les comptes sociaux. L’amélioration affichée pour l’an prochain n’est due qu’à une quasi-disparition escomptée de toute mesure spécifique de gestion du covid-19. Les déterminants des déficits persistent et ils sont sans doute sous-évalués.
En outre, le PLFSS est fondé sur une perspective de dégradation des comptes sociaux durant plusieurs années et sur une remontée des déficits dès 2024. La question de leur financement se posera donc inévitablement d’ici à deux ans, quand les possibilités de reprise par la Cades auront été épuisées, dans un contexte de taux d’intérêt sans doute plus difficile que celui de ces dernières années.
Pour ces raisons, la commission des finances a considéré que le projet de loi de financement de la sécurité sociale n’était pas acceptable en l’état. Elle a donc conditionné son avis favorable à l’adoption des amendements présentés par la commission des affaires sociales, dont elle partage pleinement l’objectif.