Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 est le premier que nous examinons sous l’empire d’un cadre organique rénové, qui était censé, en particulier, améliorer nos délais d’examen et renforcer l’information du Parlement.
Or je pense que nous n’avons jamais connu de délais d’examen aussi courts et dégradés. À cet égard, je tiens à rendre hommage à nos rapporteurs, qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour présenter à la commission, puis au Sénat, une position cohérente sur ce texte.
Quant à l’information du Parlement, nous aurons sans doute encore à y travailler, la loi organique n’étant pas suffisante pour atteindre les objectifs fixés.
Sur le fond, nous aurions pu attendre, dans les circonstances de l’engagement de la responsabilité du Gouvernement, un texte resserré sur l’essentiel, traçant quelques axes stratégiques pour l’avenir de la sécurité sociale.
L’article 49, alinéa 3, de la Constitution ne nous aura pourtant pas épargné un texte bavard, dont le volume a encore une fois plus que doublé. Le PLFSS est lesté non seulement de quelques fonds de tiroir des ministères, mais aussi de nombreuses demandes de rapports, dont l’effet concret sur le cours des choses est inversement proportionnel à l’émotion suscitée par leur adoption.
Je n’évoquerai pas dans le détail des dispositions, certes sympathiques, mais dont la place dans le texte n’est pas toujours évidente. C’est sans doute qu’il demeure un malentendu assez fort sur ce qui nous occupe aujourd’hui.
Le PLFSS n’est pas le lieu d’une discussion prospective sur notre système de santé, ni même sur l’organisation de notre protection sociale en général. Il devrait être un des points d’orgue de notre vie démocratique, le moment où le Gouvernement et le Parlement justifient, devant nos concitoyens, du bon emploi des sommes qui leur sont demandées pour le financement de la protection sociale.
Rappelons que nous allons franchir, l’année prochaine, le cap symbolique des 600 milliards d’euros de dépenses. C’est bien plus que le budget de l’État ; c’est bien plus que le financement d’autres politiques publiques, qui ont toutes leur importance, que l’on songe à la défense, à l’éducation et à la recherche, ou encore à la justice, pour n’en citer que quelques-unes.
Dans un contexte où les Français souffrent de la hausse des prix et de conditions de vie de plus en plus difficiles, nous sommes ici pour justifier des prélèvements qui sont effectués sur leurs revenus afin de leur assurer une protection solidaire.
En effet, malgré les sommes très importantes qui lui sont consacrées, notre modèle social est en crise structurelle. L’hôpital semble en plus mauvaise posture qu’au plus fort de la crise, l’accès aux soins souffre d’inégalités insupportables, qu’elles soient sociales ou territoriales. Les retraites sont mises à l’épreuve de la démographie et nous abordons, non sans inquiétude et dans l’impréparation, le mur de la dépendance des générations du papy-boom.
Alors que le modèle solidaire de notre protection sociale est menacé, que nous propose ce texte ? Un statu quo quelque peu incompréhensible en ce que le tableau d’équilibre avant mesures nouvelles est identique à celui après mesures, à cela près que des dépenses nouvelles sont venues absorber les recettes nouvelles.
Nous sommes responsables devant les Français de l’efficacité de la dépense publique et de la préparation du pays aux défis de demain. C’est à cela que nous devrions consacrer nos débats d’aujourd’hui.
Comment sortir d’une économie de crise ? Comment faire face à l’inflation et à la remontée des taux d’intérêt, alors que la dette sociale s’est accumulée ? Comment accueillir l’innovation et favoriser le vieillissement en bonne santé ?
Nous n’avons trouvé aucune réponse à ces questions dans le PLFSS. Néanmoins, en responsabilité, portée par l’exigence que nous devons aux Français et par un attachement profond à la soutenabilité de notre modèle social afin de pouvoir le laisser aux générations futures, la commission des affaires sociales vous en proposera quelques-unes.
Ces réponses passent par une adaptation de notre modèle social aux défis du moment, mais aussi par un renforcement de la reddition des comptes du Gouvernement devant le Parlement et, à travers lui, devant l’ensemble de nos concitoyens.