Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, en six ans, la politique de santé des différents gouvernements n’a amélioré ni les conditions de travail du personnel ni le sort de nos concitoyens – bien au contraire !
Il y a eu la crise du covid et ses conséquences, me direz-vous. Certes, mais vous avez préféré faire payer à la sécurité sociale les dépenses liées à la crise, alors qu’elles auraient dû être imputées sur le budget de l’État.
Nous vous proposerons, à travers ceux de nos amendements qui ont survécu aux irrecevabilités des articles 40, 45 et j’en passe – car c’est l’hécatombe ! – de changer de braquet.
Ces amendements ont été rédigés en lien avec des personnels de santé, des représentants du secteur médico-social, des associations et des citoyens. Ils ne sont pas dogmatiques, mais visent à mettre en place une politique qui rompe avec votre logique libérale, qui n’a pas fait ses preuves.
Lorsque quelque chose ne fonctionne pas – à l’image de votre politique de santé –, on change de méthode, on essaye d’améliorer, d’écouter, de prendre en considération les remarques. On n’a jamais raison seul. Avec ce PLFSS pour 2023, vous avez encore, si vous le souhaitez, l’occasion de revoir votre copie.
Partout dans le pays, notre système de soins craque. Les soignants manquent à l’appel ; ils sont fatigués de ne pas être entendus. Nos concitoyens ont de plus en plus de mal à trouver un médecin de ville, même en cas d’urgence. Aujourd’hui, 6 millions de Français n’ont plus de médecin traitant.
Les maires, les élus, sont nombreux à tirer la sonnette d’alarme pour leur population tant en zone urbaine que rurale. Nous vous proposons, pour pallier l’urgence, d’augmenter les moyens des territoires et des hôpitaux, ce qui passe évidemment par un budget ambitieux.
Une des seules options que vous nous proposez, dans une course de vitesse avec la droite sénatoriale, est d’ajouter une année supplémentaire aux études de médecine générale, qui passent de neuf à dix ans. Cette mesure, proposée sans concertation, incite les internes en neuvième année à aller dans les déserts médicaux, à moindre coût, encadrés par un médecin senior.
Mais savez-vous que la plupart des territoires manquent cruellement de médecins seniors pour encadrer ces internes ? Pensez-vous réellement régler le problème de cette façon ?
Le comble, c’est que cette mesure va entraîner une année blanche pour l’installation de nouveaux médecins. En faisant cela, vous aggravez donc la situation. À l’inverse, nous vous proposons d’augmenter les moyens des universités pour former chaque année davantage de médecins.
L’Ondam est lui aussi sous-évalué : il est fixé à 3, 7 %, quand la commission des comptes de la sécurité sociale estime l’évolution naturelle des dépenses de santé à 4 %, soit 0, 3 point de plus. Et si l’on compare cet Ondam à l’inflation, qui est de 6, 2 %, le compte n’y est pas ! Au total, c’est 1, 7 milliard d’euros pour la santé qui disparaît.
C’est donc un budget au rabais que vous nous présentez aujourd’hui ; un budget décevant qui n’est pas à la hauteur des besoins.
Ce manque d’ambition se traduit également dans le secteur de l’autonomie. Vous mettez en avant le recrutement de 3 000 infirmiers et aides-soignants dans les Ehpad, ce qui est largement insuffisant par rapport aux besoins estimés, notamment pour atteindre un taux d’encadrement équivalent à un agent pour un résident.
Ce PLFSS prévoit 170 millions d’euros pour recruter dans les Ehpad, ce qui représente un demi-poste de plus dans les 7 000 établissements de France, alors que les besoins sont estimés à 300 000 postes.
Ce premier PLFSS depuis la publication du livre de Victor Castanet Les Fossoyeurs sur la gestion calamiteuse des Ehpad est décevant.
À ce titre, le renforcement des pouvoirs de l’inspection générale des affaires sociales n’est pas suffisant. Nous demandons le remboursement automatique des subventions publiques indûment perçues par Orpea.
Malheureusement, vous avez jeté aux orties la loi sur le grand âge et l’autonomie, pourtant promise voilà quelques mois par votre gouvernement.
Dans son rapport annuel sur le financement de la sécurité sociale, la Cour des comptes dénonce l’étatisation de la sécurité sociale via le remplacement croissant des cotisations sociales par l’impôt. De 90 % à la fin des années 1980, la part de ses recettes issues du travail est tombée à 50 % depuis 2019.
Le système de tuyauterie entre le budget de l’État et la sécurité sociale est devenu tellement multiple et complexe que la Cour des comptes appelle elle-même à y mettre fin.
Dans la même veine des tours de passe-passe, le Gouvernement a inscrit dans ce projet de loi le transfert précipité du recouvrement des cotisations Agirc-Arrco vers l’Urssaf, alors que le 21 juin 2022 le rapport de la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale et de la commission des affaires sociales du Sénat sur l’unification du recouvrement social, que nous avons réalisé avec mon collègue René-Paul Savary, avec lequel je n’ai donc pas que des désaccords