Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, de toutes parts monte la même complainte : il faut plus !
Plus d’argent pour l’hôpital, plus de médecins et de soignants, plus de crèches, plus d’argent pour les retraites, plus de moyens pour la cinquième branche – sujet dont vous parlera ma collègue Jocelyne Guidez.
Bref, autant de questions, mesdames, messieurs les ministres, pour le Gouvernement. Et pour nous, une seule question : le PLFSS pour 2023 y répond-il vraiment ?
En apparence, je dirais oui.
Avec 601 milliards d’euros pour les cinq branches, les dépenses sont supérieures de plus de 12 milliards à la prévision de 2022 et le déficit total est ramené à 6, 8 milliards contre 17, 8 milliards cette année.
L’Ondam progresse de 3, 7 % hors crise covid, donc à champ constant, ce qui est significatif.
Mais les apparences ne sont-elles pas trompeuses ? Seules deux branches sont à l’équilibre : famille et AT-MP. Quant aux hypothèses, ne sont-elles pas trop optimistes ?
L’assurance maladie accuse encore un déficit de 6, 5 milliards d’euros et l’hôpital va de crise en crise, que ce soit aux urgences, en pédiatrie ou en psychiatrie. Et ce n’est pas en ponctionnant 2 milliards à la branche famille qu’on le sauvera.
L’hôpital est malade, mais c’est tout notre système de santé qu’il faut soigner. Il est à bout de souffle ! Son mode de fonctionnement est à revoir.
Emmanuel Macron a promis de ramener la tarification à l’activité (T2A) à 50 % pour mieux rémunérer la qualité et le travail en équipe.
Nous attendons donc, monsieur le ministre, un plan d’action, et surtout des actes pour apporter à l’hôpital un financement sain et pérenne.
Le mode de gouvernance est aussi à revoir, et point n’est besoin d’une loi supplémentaire à cette fin. Nous avons vu que des établissements sont parvenus à le faire seuls.
Le centre hospitalier de Valenciennes, en particulier, expérimente un mode de fonctionnement antipyramidal, antibureaucratique, et ça marche ! Plus d’autonomie, plus de délégation ; on fait confiance aux médecins et à leurs équipes pour raccourcir les circuits de décision au bénéfice des patients et du budget, qui ne comporte plus qu’une part de 5 % dédiée à l’administratif, contre cinq fois plus ailleurs ! Le directeur canalise les énergies, équilibre le budget et entretient la paix sociale.
Monsieur le ministre, la solution est là. N’attendons pas pour la généraliser.
Il faut aussi, vous le savez, fluidifier le système de soins pour désengorger l’hôpital et ses urgences. La clé existe, c’est la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS). La coordination ville-hôpital est essentielle pour lutter contre les déserts médicaux. Et quand je dis hôpital, je pense aussi aux établissements privés. L’amélioration de la permanence des soins et de l’accès aux soins passe par la mise en place, partout, de CPTS.
Comment accepter que 40 % des médecins de ville seulement assurent les gardes de nuit et du week-end ? Si les médecins veulent retrouver du temps médical, ils doivent déléguer aux autres soignants une partie de leur travail. Je salue d’ailleurs l’accord conclu en ce sens entre les différents ordres.
Monsieur le ministre, vous parlez souvent de votre « boîte à outils »… Les solutions existent et elles marchent. Il faut les diffuser. Les élus locaux sont prêts à faire les efforts nécessaires pour que l’égalité, inscrite au fronton des mairies, s’applique aussi à l’accès aux soins !
La question essentielle est celle de l’économie du système.
Les professionnels réclament des plans pluriannuels pour anticiper les évolutions thérapeutiques et permettre à notre pays de rester à la pointe du progrès dans ce domaine. Cela mérite la plus grande attention.
Enfin, j’en viens aux ressources.
La première piste, que tous les ministres ont utilisée, est celle des économies. La source n’est pas tarie. Elle reste même abondante, mais encore faut-il ne pas se tromper.
Longtemps, la ressource humaine a été pressurée, mal rémunérée. Le Ségur de la santé a produit un effet salvateur, mais il doit être poursuivi, et cela coûte !
D’autres pistes sont donc à privilégier. Les actes redondants et inutiles représentent 20 % à 30 % de notre système de soins, soit 40 à 60 milliards d’euros de dépenses à revisiter. La Haute Autorité de santé (HAS) s’y emploie, mais vous avez ciblé à peine plus d’un milliard d’euros d’économies sur la radiologie, la biologie et les médicaments dans votre projet. C’est bien, mais c’est insuffisant.
Par ailleurs, à notre demande, l’estimation des fraudes aux cotisations et aux prestations est en cours.
La Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) et la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), bons élèves, ont rendu leurs résultats. En revanche, la Caisse nationale de l’assurance maladie (Cnam) est très en retard. Si nous voulons éviter l’exploitation fantasmée du montant de ces fraudes, il faut des chiffres, et rapidement !
Enfin, un mot sur les retraites. Le déficit et la dette se creusant, une réforme s’impose, mais, attention, si nous ne voulons pas mettre des millions de personnes dans la rue, il faut qu’elle soit comprise et acceptée.