Intervention de Jocelyne Guidez

Réunion du 7 novembre 2022 à 16h00
Financement de la sécurité sociale pour 2023 — Discussion générale

Photo de Jocelyne GuidezJocelyne Guidez :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mesdames les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais évoquer la cinquième branche de la sécurité sociale, dont l’objectif de dépenses pour 2023 s’élève à 37, 3 milliards d’euros, en augmentation de 5, 3 % par rapport à l’année précédente, afin de répondre aux besoins croissants de financement.

Je tiens à souligner deux points importants : l’un concerne la prévention, l’autre la possibilité de vieillir à domicile.

D’abord, le PLFSS pour 2023 accorde une importance particulière à une « meilleure prévention », avec la mise en place de « rendez-vous de prévention » à certains âges clés de la vie, sans obligation toutefois.

Chez les adultes de 60-65 ans, ce rendez-vous permettra de prévenir les maladies chroniques, les troubles de la vision, les fragilités ou la perte d’autonomie. J’ai déposé un amendement visant à repérer les aidants lors de ces rendez-vous et à prévenir les conséquences de la situation d’aidant sur leur état de santé.

Ensuite, le PLFSS pour 2023 donne priorité au « vieillir à domicile », le plus longtemps possible, pour les personnes âgées en perte d’autonomie.

« Vivre, c’est vieillir, rien de plus », écrivait Simone de Beauvoir dans L ’ Invitée. Rappelons que 90 % des Français souhaitent vieillir et être accompagnés dans leur vieillissement ou leur handicap à domicile.

Afin de répondre à cette attente de la société civile, quelques mesures phares ont été prises.

L’article 33 vise ainsi à sécuriser la réforme de la tarification des services de soins infirmiers à domicile, qui devrait entrer en vigueur au 1er janvier 2023. Aussi, 4 000 places supplémentaires seront créées.

L’article 34 permet au département de compléter, voire dépasser le plafond des plans d’aide personnalisée à l’autonomie par deux heures d’accompagnement et de temps social, lorsque cela est nécessaire.

Même si cette mesure constitue une avancée importante, dans l’intérêt des professionnels, ainsi que des personnes âgées, les sénateurs de l’Union Centriste regrettent profondément la restriction de son périmètre aux seuls bénéficiaires de l’APA, excluant de facto les bénéficiaires de la prestation de compensation du handicap.

Par ailleurs, les plans d’aide actuellement tendus des bénéficiaires de l’APA ne permettant pas de répondre en tout ou partie aux gestes de la vie quotidienne dont ils ont besoin, il est à craindre que ces heures ne se limitent à répondre aux besoins vitaux des personnes âgées, au détriment du lien social, pourtant nécessaire. Par conséquent, nous nous interrogeons sur la soutenabilité de son financement par les départements.

Malgré les besoins grandissants de la population en matière de recours aux services à la personne, le secteur, à forte intensité de main-d’œuvre, est confronté à de vives tensions dans les recrutements sur l’ensemble des métiers. Ce sont 1 million d’emplois qui sont à pourvoir d’ici à 2030 !

Toutefois, le PLFSS pour 2023 ne contient aucune mesure à application immédiate pour ce secteur. Le texte présente des éléments positifs, comme le « bouclier inflation » et le « bouclier énergie » ; il faudra élargir ce dernier aux services à domicile, pour lesquels les factures d’essence pèsent lourdement, surtout dans les territoires ruraux.

Pour améliorer la prise en charge des personnes âgées dans les Ehpad, ce projet de loi prévoit plusieurs mesures : revalorisations salariales, actualisation des coupes Pathos, déploiement de centres de ressources territoriaux, simplification des modalités de financement de l’habitat inclusif. L’aide à la vie partagée est une bonne solution, qui retardera les entrées dans les Ehpad.

Par ailleurs, les Ehpad bénéficieront de 3 000 aides-soignants et infirmiers supplémentaires en 2023. Même si ces annonces vont dans le bon sens, une réflexion sur les problèmes rencontrés par le secteur s’avère nécessaire : attractivité, formation, validation des acquis de l’expérience, postes vacants. Comment donner envie à des femmes et des hommes de s’engager dans les services d’aide à domicile, de devenir auxiliaire de vie ou infirmier en pratiques avancées en gériatrie ?

Nous saluons enfin l’inscription du « bien vieillir » dans les travaux du Conseil national de la refondation, avec trois axes dédiés : adapter la société au vieillissement, promouvoir la citoyenneté des personnes âgées et le lien social, revaloriser les métiers. Dix ateliers de concertation sont prévus dans dix départements de métropole et d’outre-mer. La feuille de route issue de la concertation sera présentée en mai 2023.

Je profite de cette occasion pour mettre l’accent sur la participation des aidants à ces échanges et la nécessité d’améliorer les mesures en faveur du répit, qui jouent un rôle important dans la lutte contre l’isolement social des personnes âgées ou handicapées.

S’agissant des aidants, les articles 34 bis et 34 ter du PLFSS pour 2023, que le Gouvernement a choisi de retenir lors de son usage de l’article 49.3 de la Constitution, traitent de l’élargissement de la durée et de l’indemnisation du congé de proche aidant, ainsi que de l’identification des moyens d’élargir l’allocation journalière du proche aidant (Ajpa) aux aidants des personnes malades du cancer. Ce que le Gouvernement propose, sur ces sujets, c’est de nous remettre des rapports. Je soutiendrai le maintien de ces articles dans le texte, puisque c’est une demande que j’exprime moi-même depuis plusieurs années.

L’article 35 ter, issu de l’adoption d’un amendement, ouvre une expérimentation permettant la création d’un véritable parcours d’accompagnement harmonisé des aidants familiaux, parcours qui pourrait notamment passer par la prise en charge d’une consultation médicale spécifique.

Rappelons aussi qu’une politique de l’autonomie ne se réduit pas au grand âge et au « bien vieillir ». Sur le champ du handicap, le PLFSS encourage la transformation des établissements médico-sociaux et promeut les démarches inclusives.

Nous nous réjouissons de l’augmentation des moyens budgétaires : près de 70 millions d’euros destinés à développer l’offre pour le public atteint de troubles du spectre de l’autisme. Je préférerais parler de troubles du neurodéveloppement, afin de mieux prendre en charge le trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) et les troubles « dys ».

L’article 33 quater organise la revalorisation annuelle du tarif plancher, qui passera à 23 euros en 2023. L’article 35 bis, issu d’un amendement du Gouvernement, crée un parcours de rééducation et de réévaluation des enfants en situation de polyhandicap ou de paralysie cérébrale.

Enfin, nous regrettons la non-présentation, par le Gouvernement, d’une loi consacrée au grand âge et l’absence de projections pluriannuelles indispensables pour relever les défis de cette branche.

Mes chers collègues, le secteur médico-social souffre du contexte d’inflation et de la crise du recrutement. Des oubliés du Ségur de la santé mettent en cause une forte inégalité de traitement. Le temps des constats et des propositions est révolu. Il est l’heure d’agir sur le terrain, d’y déployer un plan d’action, des dispositifs d’urgence et des modalités concrètes.

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