Intervention de Christophe Béchu

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 2 novembre 2022 à 16h30
Audition de M. Christophe Béchu ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et de Mme Dominique Faure secrétaire d'état chargée de la ruralité

Christophe Béchu, ministre :

Le canal Seine-Nord Europe ne fera pas partie du décompte territorial de la région Hauts-de-France.

Il reste cependant un débat : le président des Hauts-de-France plaide pour que l'opération soit sortie du compteur d'artificialisation des sols du pays mais ce n'est pas la ligne du ministère de la transition écologique. Ma position est de compter à part les projets nationaux et de diviser la superficie entre tous les territoires pour qu'un territoire ne porte pas seul l'effort. Prétendre que le canal Seine-Nord ou la ligne à grande vitesse Toulouse Bordeaux ne seraient pas de l'artificialisation reviendrait à modifier la trajectoire qui a été fixée il y a un an et demi. L'idée est bien que ces 2200 hectares soient partagés et divisés entre toutes les régions françaises en recalculant les enveloppes régionales : c'est ce que je proposerai et j'attire votre attention sur le fait que cela nécessitera modification législative, car ce n'est pas conforme à la loi en vigueur.

Un mot rapide sur les retenues de substitution : tous les projets ne sont pas équivalents. Le premier sujet est de savoir comment notre agriculture peut consommer moins d'eau. En vérité, qu'une retenue soit collinaire ou utilise des pompes, il faut de la ressource. Si on s'illusionne sur le fait qu'on aura demain autant d'eau qu'aujourd'hui, on risque de faire de mauvais investissements : l'évolution des pratiques est donc nécessaire. Ceci dit, les retenues restent une partie de la solution et, en l'espèce, quand on dispose des études scientifiques nécessaires ainsi que des accords approuvés par des associations environnementales et que par la suite, des radicaux ou des jusqu'au-boutistes interviennent, c'est la cause qui est menacée. Franchement ce qui s'est passé est d'autant plus grave que le territoire concerné abrite de la polyculture et de l'élevage et que la canalisation coupée dessert une exploitation familiale à proximité : l'image que ces actions renvoient est déplorable. Si ces gens-là considèrent que M. Jadot n'est pas écologiste, cela donne une petite idée du prisme avec lequel ils regardent la société. On ne fera pas la transition écologique contre les citoyens. Nous devons nous méfier d'une forme d'extrémisme, quel que soit son domaine, qui aurait les yeux uniquement tournés vers ce que nous faisons chez nous. En se focalisant uniquement sur nos émissions, on en viendrait à fermer toutes nos usines et on serait alors excellents en décarbonation ; mais si, en parallèle, on continue à importer des produits, on aggravera notre situation. Il faut donc un double système dans lequel nous soyons vertueux sur notre territoire avec, en complément, des mécanismes carbone à nos frontières : c'est indispensable pour réussir la transition. N'acceptons pas d'importer des produits moins vertueux que ceux que nous fabriquons : c'est une forme de protectionnisme climatique, certes, mais légitime s'il permet d'éviter la déforestation ainsi que l'arrivée de produits contenant des perturbateurs endocriniens. Je rappelle que quarante pièces de textile sont achetées par français et par an : indépendamment des conditions de fabrication, quand on connaît l'énorme quantité d'eau nécessaire pour produire des vêtements, on mesure là aussi l'intérêt de la sobriété.

Sur les panneaux photovoltaïques, je ne suis pas en mesure de répondre précisément à votre question. En revanche, j'indique que l'élaboration d'un budget annexe sur les énergies renouvelables est le meilleur moyen d'accélérer leur déploiement, sans être encadré par des ratios contrôlés par la Cour des comptes. Le montage de sociétés publiques locales (SPL), quand j'étais président du département, a permis aux communes de solvabiliser leurs investissements dans les énergies renouvelables avec une mise de départ très faible. Cela nous a permis d'accompagner de très nombreux projets photovoltaïques et même éoliens à plusieurs endroits du territoire, en faisant également appel à des cotisations de citoyens. Nous avons également mis en place, avec Joël Bigot, la plus grande ferme photovoltaïque de France en utilisant cette société qui, sans dégrader nos ratios financiers, a permis de recourir à l'emprunt de façon efficace. Inversement, nous avons financé de très petits projets photovoltaïques : 63 mètres carrés, par exemple, sur le toit d'un vestiaire de sport - cela n'aurait pas été possible sans moyenner les tarifs d'achat grâce à notre SPL.

S'agissant des annonces portant sur les ZFE, je rappelle que nous avons mis en place : un comité interministériel qui se réunit tous les six mois, un référent interministériel rattaché au ministère de l'Intérieur mais aussi à la Santé et à Bercy pour faciliter le travail des artisans et veiller à la cohérence de la logistique urbaine. S'ajoutent deux groupes de travail, l'un sur l'harmonisation logistique et l'autre sur l'accessibilité sociale ainsi que plusieurs annonces très concrètes : les allocations du Fonds vert, les mille euros de surprime qui ne sont plus soumis à des conditions de réciprocité et l'ouverture de l'État pour garantir des prêts à taux zéro. J'ajoute que le retrofit fera bien partie des opérations finançables.

S'agissant des petites installations d'hydroélectricité, je me permets de m'abstenir sur ce sujet car j'ai lu des arguments contradictoires.

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