Sur cet article 28, j’en appelle aujourd’hui à notre vigilance collective face à ce que je considère comme une dérive marchande et une « ubérisation » de notre système de santé.
La télémédecine contribue indéniablement à faciliter l’accès aux soins et à enrichir l’offre de santé, notamment pour le suivi de patients atteints de pathologies chroniques ou de cancers ou vivant en Ehpad.
Néanmoins, le recours à la télémédecine doit être strictement encadré. Un médecin ne doit pas pouvoir prendre en charge un patient sans avoir la possibilité de procéder à un examen clinique chaque fois que cela est souhaitable, sans avoir d’ancrage dans un territoire ni de connaissance de son tissu sanitaire et médico-social, sans se préoccuper du parcours de soins du patient ou encore sans apporter la garantie que la continuité des soins pourra être assurée.
J’aborde ici uniquement la problématique des plateformes commerciales se présentant comme des offreurs de soins en dehors de toute organisation territoriale reconnue et de tout parcours de soins.
Le circuit financier de ces plateformes pose par ailleurs question. En effet, sur certaines d’entre elles, comme vous le savez, la rémunération des médecins est facturée et perçue non par le médecin lui-même, mais par la société commerciale. Certaines plateformes encaissent même le montant de la consultation avant qu’elle soit réalisée ; d’autres subordonnent l’accès aux soins au versement de frais d’abonnement. Or cet encaissement direct des honoraires par la société commerciale est contraire au principe du paiement direct de l’acte par le patient au médecin, principe destiné à préserver l’indépendance professionnelle et morale de ce dernier.
De plus, certains médecins voient leurs actes rémunérés de façon dégradée – 12 ou 15 euros la consultation – ou se voient inciter à faire davantage de consultations à l’heure pour obtenir une majoration de leur rétribution. La téléconsultation n’apparaît alors plus comme un acte médical, mais comme un bien consommable que le patient peut acquérir sur le Net.
Le scandale des Ehpad du groupe Orpea a montré où mène cette logique marchande : à des soins de moindre qualité, à la mise en danger de patients. Voulons-nous la même chose pour les soins primaires ? La santé n’est pas un bien marchand : nous devons donc répondre à cette problématique de la téléconsultation marchande.