Intervention de Hussein Bourgi

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 6 octobre 2022 : 1ère réunion
Audition de Mme Isabelle Lonvis-rome ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes de la diversité et de l'égalité des chances

Photo de Hussein BourgiHussein Bourgi :

Je suis réticent aux appels à projets tant européens que nationaux, car leurs effets de seuil ne permettent pas aux associations du monde rural d'y répondre. En effet, elles ont beau faire un travail remarquable au niveau local, elles n'appartiennent pas à une fédération nationale, ce qui les dissuade de déposer des dossiers. Je n'ai rien contre les fédérations nationales mais souvent les subsides qu'elles perçoivent de l'État vont prioritairement aux frais de structure et frais de gestion des associations. Cet argent ne descend pas ou rarement dans les territoires, et comme il se fait de plus en plus rare, lorsque les associations ont un projet et qu'elles s'adressent à vos déléguées régionales ou départementales aux droits des femmes, on leur dit « Mais votre fédération nationale a touché tant de millions d'euros ! ». C'est bien une réalité, mais l'argent reste à Paris et descend rarement sur le terrain. C'est pourquoi je voudrais savoir s'il est envisageable, dans les conventions que vous signez avec les fédérations, tout en respectant la souveraineté des associations, de prévoir un volet décentralisé d'actions à mener assorties des moyens qui vont avec ? Je veux bien voter des millions d'euros pour telle ou telle structure, mais si tout reste à Paris et rien ne descend dans mon département, l'effet sera tout relatif.

Je souhaite également vous questionner au sujet de la formation des fonctionnaires de l'État. J'ai été confronté dans mon département à une affaire sordide, dans laquelle plusieurs jeunes femmes ont été victimes d'agressions sexuelles commises par le videur d'une boîte de nuit pendant plusieurs mois d'affilée. Lorsque, encouragées par le mouvement #MeToo, elles se sont décidées à porter plainte, trois d'entre elles ont été particulièrement bien reçues, mais la quatrième s'est retrouvée face à un policier qui lui a tout bonnement fait du rentre-dedans, lui proposant d'aller se promener au bord d'un lac pour se changer les idées, des chocolats - dont son tiroir était plein -, etc. J'ai contacté le directeur départemental de la sécurité publique (DDSP) pour lui signaler cette attitude non professionnelle et me suis heurté de sa part à un déni absolu.

Dans mon département, il y a aussi deux tribunaux judiciaires. L'un d'entre eux fonctionne très bien s'agissant des violences faites aux femmes, mais le second ignore systématiquement mes signalements. Lorsque je finis par croiser le procureur qui ne me répond pas, j'ai invariablement le droit à la même réponse : « La séparation des pouvoirs m'interdit de répondre aux courriers des parlementaires » ! Quant à vos déléguées départementales et régionales, Madame la Ministre, je les croise souvent sur le terrain, mais surtout pour les inaugurations, les colloques et, une fois par an, pour la « grand-messe » à la préfecture, où nous sommes 50 à 60 autour de la table pour une durée maximale de deux heures. Le service minimum est fait mais nous n'avons pas pris la parole sur les sujets sensibles.

J'aurais donc une proposition très simple à vous faire, Madame la Ministre. Pourquoi ne pas remettre en place une cellule très agile qui communiquait efficacement avec le parquet, la délégation aux victimes (DAV) qui existait sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy et qui dépendait du ministère de l'intérieur ? Nous avions alors un interlocuteur unique que nous contactions directement dans les tribunaux pour toutes sortes d'infractions. Dans l'affaire que j'ai citée, il a fallu que j'agite la presse pour que, six mois après les faits, une dizaine de témoins soient convoqués. Un parlementaire qui écrit à un procureur ou qui contacte un DDSP a donc moins poids pour les faire réagir qu'un article du Midi Libre ! Comment remédier à cet état de fait ? Je veux bien qu'on parle des problèmes dans le monde privé, mais commençons par balayer devant notre porte, où des dysfonctionnements perdurent, tant dans la police que dans la justice.

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