Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 15 novembre 2022 à 21h30
Soutien aux édiles victimes d'agression — Suite de la discussion et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est présentée vise à permettre aux différentes associations nationales d’élus de se constituer partie civile pour accompagner, au pénal, tout édile qui aurait donné préalablement son accord.

Les élus, plus spécifiquement les élus locaux, sont les premiers contacts de nos concitoyens avec l’autorité publique.

Aujourd’hui, l’article 2-19 du code de procédure pénale n’autorise l’action des associations qu’en cas de faits commis contre l’élu « à raison de ses fonctions » particulières, et non de son mandat. La proposition de loi que nous examinons est sur ce point utile et égalitaire. En effet, grâce à son apport, les associations d’élus pourront accompagner tous les élus victimes de harcèlement ou d’agression, même ceux qui ne sont pas investis de fonctions particulières. C’est en cela qu’elle nous semble pertinente.

Néanmoins, nous ne pouvons l’ignorer, le climat politique, économique et social actuel est tendu. Notre société va mal ; de plus en plus d’hommes et de femmes sont inquiets et en colère contre les responsables politiques. Dans ce contexte, nous ne pouvons faire l’autruche. Un élu incarne des idées, des prises de position, des revendications. Nous sommes dans une démocratie, et il est tout à fait sain de ne pas faire l’unanimité.

Pour autant, cette nécessaire opposition dans le débat d’idées ne doit pas justifier une attaque personnelle, physique ou verbale. C’est bien parce qu’un mandat expose personnellement l’élu que cette proposition de loi est à notre sens objective.

Si la qualité d’élu est depuis longtemps une circonstance aggravante pour plusieurs infractions, il convient également de se soucier de l’accompagnement des élus victimes tout au long d’une procédure devant le juge pénal.

Cet accompagnement ne sera pas exorbitant du droit commun, nos concitoyens victimes pouvant également être soutenus dans leurs procédures pénales par des associations à but non lucratif. Il est donc adéquat, pour répondre à cette attente d’accompagnement, d’étendre le champ des associations susceptibles de se constituer partie civile.

Au-delà du soutien à l’élu lui-même, nous considérons qu’une telle action participe de la lutte en faveur d’un exercice serein des mandats locaux, donc au bon fonctionnement des assemblées locales. Un élu ne doit pas craindre pour sa personne dans l’exercice de son mandat. Le risque d’une agression ne doit pas être dissuasif dans l’expression de ses opinions politiques ; à défaut, l’existence même de la démocratie pourrait être compromise.

En droit pénal général, le fait qu’une personne chargée d’une mission de service public, à l’occasion de l’exercice de ses fonctions ou de sa mission, soit victime d’une infraction constitue une circonstance aggravante pour la majorité des infractions contre les personnes. Cette aggravation des peines permet une réponse pénale satisfaisante en cas d’agression.

Aujourd’hui, le propos est celui non pas de l’efficacité de la justice, mais de l’accompagnement de l’élu, qui, en tant que personne, peut être traumatisé à la suite d’une agression. Or aucun citoyen ne doit être isolé dans une procédure pénale qui pourrait le dépasser. L’enjeu sous-jacent est de garantir le droit des élus à la liberté d’expression.

L’exercice de nos mandats ne saurait être un motif de crainte. Le débat politique ne doit pas être vecteur de violence. L’art du débat doit être respecté en toute décence.

Permettre aux associations d’élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, un édile victime d’agression est utile à un exercice serein des mandats électoraux. Nous voterons donc en faveur de cette proposition de loi.

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