Intervention de Marie-Pierre Monier

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 15 novembre 2022 à 9h30
Projet de loi de finances pour 2023 — Crédits « patrimoines » - examen du rapport pour avis

Photo de Marie-Pierre MonierMarie-Pierre Monier :

Nous partageons complètement les positions de notre rapporteur. Avec 1,1 milliard d'euros, les crédits du programme 175 augmentent à un rythme équivalent à celui de l'ensemble de la mission par rapport à l'an dernier.

Mais il faut souligner que cette hausse des crédits dédiés au patrimoine pour 2023 doit être relativisée. D'une part, l'inflation s'élève environ à 6% ; d'autre part, les 77 millions supplémentaires du programme sont à comparer avec les 227 millions d'euros de plus qui avaient été budgétés au titre du plan de relance pour le secteur « Patrimoines » en 2022. On peut donc dire que cela revient à une réduction de 150 millions d'euros des moyens.

L'envolée des prix de l'énergie va continuer à peser fortement en 2023 sur l'équilibre financier des musées et des monuments. On peut craindre que l'ensemble du secteur du patrimoine se retrouve à nouveau en difficulté, alors qu'il sort à peine de celles liées à la crise sanitaire. Le patrimoine risque de ne pas être la priorité de nombreuses collectivités, notamment les plus petites. Elles auront besoin de plus de soutien pour assurer la sauvegarde et l'entretien du patrimoine dont elles ont la charge.

Je continue à plaider pour un meilleur équilibre de la répartition territoriale des crédits.

L'action 1 prévoit 490 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) de crédits pour les monuments historiques et le patrimoine monumental. Les crédits en faveur de l'entretien et de la restauration des monuments historiques hors « grands projets » s'élèvent à 382 millions d'euros. Cette augmentation d'environ 24 millions d'euros par rapport à 2022 profite principalement aux crédits déconcentrés mis à disposition des Drac pour la restauration de monuments historiques appartenant à l'État, au plan Cathédrale et au projet de revalorisation du château de Gaillon.

Mais les moyens du fonds incitatif et partenarial (FIP) pour les monuments historiques des collectivités à faibles ressources sont, quant à eux, accrus de 2 millions d'euros, ce dont nous pouvons nous féliciter. Les crédits déconcentrés bénéficient d'un coup de pouce cette année, et j'espère que celui-ci sera durable.

Les crédits de l'action 2, qui avaient augmenté de près de 9% en 2022, retrouvent l'état de stagnation des exercices budgétaires précédents. Compte tenu de l'inflation, le maintien du niveau atteint en 2022 pour les crédits déconcentrés destinés aux CAUE ou au réseau du label Villes et Pays d'art et d'histoire constitue, en réalité, une baisse de leurs moyens, alors qu'ils contribuent par leur travail remarquable à soutenir les efforts des collectivités en faveur de la revalorisation du patrimoine.

Je m'étonne aussi de la stabilité, pour le sixième exercice budgétaire consécutif, des moyens consacrés au développement des sites patrimoniaux remarquables (SPR), outil créé par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (LCAP) et dont les ministres de la culture successifs, depuis 2017, n'ont apparemment pas souhaité se saisir pour rénover les centres anciens.

En ce qui concerne les crédits de l'action 3, « Patrimoine des musées de France », ils sont en hausse, mais je regrette que les crédits en faveur des musées territoriaux stagnent encore, alors qu'ils doivent être justement mobilisés dans le cadre de la nouvelle génération des contrats de plan État-Région (CPER) 2021-2027. Cette stagnation ne favorise pas le rééquilibrage territorial souhaité et va à l'encontre du développement touristique et économique de nos communes et de nos territoires.

Un dernier mot sur l'action 9, « Patrimoine archéologique », dont les crédits sont en hausse de 8,42 %, à hauteur de près de 158 millions d'euros. La mission de service public de l'Inrap est revalorisée à 4,8 millions d'euros en raison de l'inflation et de la réforme du régime indemnitaire des agents contractuels. Parallèlement, les crédits destinés à subventionner les collectivités habilitées à réaliser des diagnostics archéologiques ont aussi été relevés de 2,4 millions d'euros.

Enfin, je salue les fortes augmentations des crédits à destination des centres de conservation et d'étude (CCE) et pour soutenir les fouilles archéologiques programmées, en partenariat avec le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et les universités. Néanmoins, l'Inrap prévoit le maintien d'une forte activité des chantiers de diagnostic, pour lesquels le respect des délais de réalisation est l'une des conditions de la prospérité du projet d'aménagement concerné. Pour tenir les délais, il est donc nécessaire que les services d'archéologie préventive disposent de moyens suffisants, notamment en personnels qualifiés, et la seule augmentation mécanique des moyens de l'Inrap ne sera pas suffisante.

Pour conclure, on peut se demander si la hausse des crédits du programme « Patrimoines » sera suffisante. Avec l'inflation et les hausses attendues du coût de l'énergie et des matériaux, ce n'est pas certain. Les moyens consacrés à la mission « Patrimoine » seront donc en baisse cette année, après les embellies du plan de relance. En dépit de quelques évolutions positives, il manque une orientation marquée en faveur d'un rééquilibrage au profit des territoires. Toutefois, nous suivrons votre avis et voterons en faveur de l'adoption des crédits de la mission.

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