C'est pour moi un honneur d'être auditionné par votre commission. En tant qu'élu municipal depuis plus de 25 ans, vous imaginez mon attachement aux collectivités. La politique du logement englobe de nombreux sujets. La conjoncture nous impose d'agir vite, fort et de façon globale. Elle ne doit pas minimiser les difficultés du secteur, liées à la demande - avec l'enjeu de solvabilité des ménages et l'accès au crédit - et à l'offre, alors qu'existent de nombreux freins à la construction.
Ma mission vise à faire que le logement ne devienne pas la bombe sociale de demain. Pour cela, nous nous donnons les moyens de nos ambitions. Le budget en faveur du logement prévoit d'abord d'accompagner les Français tout au long de leur parcours résidentiel, puis d'accompagner les territoires pour une politique du logement en lien avec la transition écologique. Je souhaite également mettre en oeuvre une politique alliant l'urbain et l'humain.
Lier la politique de la ville et celle du logement permet d'obtenir des résultats forts dans nos quartiers. La participation citoyenne y est favorisée. Nous y permettons l'émancipation et le plein emploi. Nous y menons une politique exigeante contre les fractures, les vulnérabilités et les discriminations. Pour que leurs habitants se sentent pleinement citoyens de la République, nous leur devons l'accès aux droits, à des logements dignes, au service public et aux transports. Je souhaite mener et construire cette politique avec les élus locaux.
Notre priorité, dans le contexte actuel d'inflation, concerne le pouvoir d'achat. Contre la hausse des prix, le gouvernement a voté le paquet « pouvoir d'achat » en juillet. Le logement est le premier poste de dépense des ménages. Conformément aux engagements de la Première ministre, vous avez adopté un plafonnement de la hausse des loyers de 3,5 % - alors qu'elle aurait pu atteindre 6 % en 2023 - et une revalorisation des APL de 3,5 %. Elle concerne 5,8 millions de foyers, dont 2,6 millions en logement social, pour 300 millions d'euros de dépense.
Ensuite, un ministre du logement est selon moi un ministre du parcours résidentiel, à chaque étape de la vie. Nous accompagnons la famille qui s'agrandit et souhaite devenir propriétaire avec la possibilité d'obtenir un prêt à taux zéro. Ce dispositif a soutenu 75 000 ménages en 2021. Sa pertinence est renforcée par les taux actuels. Le PLF 2023 le maintient inchangé. Nous devons travailler aux suites à lui donner à partir de 2024.
Ensuite, avec MaPrimeRénov', nous aiderons nos aînés à mieux vieillir chez eux, dans un logement adapté. C'était une promesse de campagne du Président de la République. Les crédits de l'Agence nationale de l'habitat (ANAH) sont renforcés de 35 millions d'euros dans le PLF pour enclencher cette dynamique dès 2023.
Ce parcours résidentiel doit également accompagner ceux qui n'ont pas de logement. Nous luttons quotidiennement contre le mal-logement et le sans-abrisme, avec des résultats. Le Président de la République avait initié dès 2027 la politique du logement d'abord. Cinq ans plus tard, près de 400 000 personnes ont pu accéder à un logement, et la production de logements adaptés a doublé. Nous poursuivrons cet effort avec un nouveau plan logement d'abord.
Je souhaite aussi que ce plan reste exemplaire en matière de territorialisation autour des Services intégrés de l'accueil et de l'orientation (SIAO) et des élus. Je veux me nourrir des idées des 45 territoires qui continuent à accélérer le logement d'abord. Ensuite, la performance et le suivi des résultats sont primordiaux. Le Sénat a produit en 2018 un rapport sur l'hébergement d'urgence. Quatre ans plus tard, une bonne part des efforts de pilotage demandés ont été mis en oeuvre. Il reste toutefois beaucoup à faire. Le PLF 2023 reflète déjà les dynamiques que je souhaite porter. 44 millions d'euros supplémentaires sont alloués à la production de logements et à la prévention des expulsions locatives. Face aux besoins inédits, il maintient pour 2023 un très haut niveau de places d'hébergement d'urgence.
Pour permettre ce parcours résidentiel, il est indispensable de travailler étroitement avec l'ensemble des acteurs du logement, et notamment les bailleurs sociaux. C'est l'idée du pacte de confiance annoncé par la Première ministre, que je souhaite construire rapidement pour qu'il donne une vision de long terme à l'ensemble des acteurs.
Dès 2023, le budget vient stabiliser le modèle de financement en soutenant la production de 110 000 logements sociaux. Nous soutiendrons également la rénovation, notamment thermique, du parc social avec une enveloppe dédiée de 200 millions d'euros. Pour atteindre ce niveau de construction, l'État doit pouvoir s'appuyer sur les maires, qui ont une obligation à travers la loi SRU. Je veux aller au-delà de cet aspect contraignant, dans le dialogue. C'est aussi l'idée de ce pacte de confiance.
La loi SRU a fait l'objet de débats importants dans cette chambre l'an dernier. L'équilibre trouvé me semble être le bon. Vous avez pérennisé la loi et ses exigences, en laissant toute sa place au dialogue. Je veux un dialogue local exigeant pour que la loi SRU soit respectée par toujours plus de communes. C'est le sens des contrats de mixité sociale que je souhaite signer avec toutes les communes volontaires.
Favoriser le parcours résidentiel passe tout d'abord par une amélioration des logements existants. Nous pouvons pour cela nous saisir de quatre leviers. D'abord, le nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) est aujourd'hui largement mobilisé. 450 projets sont validés. Des chantiers sont engagés dans près de 400 quartiers. 12 milliards d'euros seront bientôt alloués, mais pas intégralement dépensés. Je rappelle que l'investissement pour les quartiers en renouvellement urbain s'élèvera, tous leviers confondus, à 50 milliards d'euros à la fin du programme. Je salue à ce titre l'action de l'ANRU et de l'ensemble des maires et présidents d'intercommunalités des quartiers politiques de la ville (QPV), qui s'engagent pleinement dans ces opérations de reconstruction, de démolition, de construction d'équipements publics.
L'accélération de la rénovation énergétique est une priorité du gouvernement. Les résultats sont là. MaPrimeRénov', c'est la réussite de la massification des travaux de rénovation. 1,5 million de projets ont été soutenus depuis 2020, dont plus de 160 000 rénovations globales, contrairement aux 2 500 régulièrement citées. 2,1 milliards d'euros ont bénéficié en 2021 à plus de 80 % de ménages modestes ou très modestes, contre seulement 10 % avec le crédit d'impôt dans la version antérieure. Le gain énergétique moyen par logement est également en hausse de 30 % par rapport au crédit d'impôt pour la transition énergétique (CITE) antérieur. En un mot, MaPrimeRénov' fonctionne et est une réussite, mais nécessite maintenant une accélération. On reproche souvent au logement de représenter 20 % des émissions de gaz à effet de serre. Je crois que nous devons en faire l'avant-garde éclairée de la transition écologique. Nous en avons les moyens. Le PLF 2023 prévoit 2,45 milliards d'euros sur le dispositif de MaPrimeRénov', un renforcement d'environ 130 millions d'euros des autres aides de l'ANAH en faveur de la rénovation énergétique pour consolider la dynamique inédite de la relance. Cette accélération se traduira par des évolutions des aides, pour plus de rénovations performantes et globales. Une attention accrue doit être portée aux passoires thermiques, notamment par un meilleur accompagnement des ménages. C'est l'enjeu du service public France Renov. Nous devons rendre accessibles aux Français une information et un conseil sous cette bannière unique. Un réseau d'accompagnateurs agréés, qui se déploiera tout au long de 2023, sera chargé d'emmener les ménages vers des projets ambitieux et de leur faire connaître les aides auxquelles ils ont droit.
Enfin, l'enjeu de la rénovation énergétique est celui de l'habitat collectif. L'aide MaPrimeRénov'Copropriétés sera prolongée pour accentuer l'effort de rénovation des logements collectifs, de sorte à diminuer les restes à charge des travaux, et aider à la décision en assemblée générale.
Nous ne pouvons continuer à voir des gens vivre dans des conditions insupportables dans des passoires thermiques. Depuis la fin du mois d'août, les loyers des logements classés F et G sont gelés. La prochaine échéance prévue par la loi « Climat et résilience » conduira progressivement à leur interdiction de remise en location. Pour tenir ce calendrier, nous travaillerons avec l'ensemble des acteurs. Cette interdiction s'appliquera à tous les logements, y compris aux biens destinés à la location en meublé touristique. Nous ne devrions pas créer un effet d'aubaine pour que ces logements, qui ne pourraient être conservés en location, soient transformés en logis touristiques.
Ensuite, nous devons réconcilier la France avec l'acte de construire pour que chacun puisse se loger en fonction de son parcours de vie. Il faut construire plus de logements, de tous types, là où sont les besoins les plus importants. D'abord, nous devrons rétablir collectivement un discours positif sur l'acte de construire avec les maires et l'ensemble des acteurs. Si vous me permettez l'expression, il faut construire plus pour loger plus. Plus de 2,2 millions de Français sont aujourd'hui en recherche d'un logement social. Nous ne pouvons donc penser que le besoin est couvert. Nous pourrons arriver à nos fins en étant exemplaires en matière environnementale. La dynamique est en cours. Les promoteurs, architectes, entreprises du bâtiment et des travaux publics transforment leur activité en profondeur pour répondre à cette ambition environnementale et à l'exigence de la nouvelle réglementation RE2020. Celle-ci pose un cadre ambitieux en donnant à la construction neuve plusieurs objectifs de sobriété énergétique, de sortie des énergies fossiles ou de diminution des impacts carbone.
Enfin, la Première ministre a annoncé un fonds vert doté de 2 milliards d'euros pour les collectivités locales. Cet engagement fort vise à accélérer la transition écologique de nos villes et de nos territoires. L'été 2022 nous a montré que l'exceptionnel risquait de devenir la norme. Nous devons agir. Ce fonds accompagnera les collectivités dans leurs projets, pour adapter la ville aux changements climatiques, pour régénérer des friches urbaines, pour réaménager des surfaces commerciales et services devenus obsolètes, et pour rénover des équipements et bâtiments publics. C'est du concret. Ce fonds est destiné aux élus locaux, les plus à même de porter des projets de transition écologique adaptés à leur territoire.
Les sujets sont nombreux. Les urgences aussi. Je compte mettre toute mon énergie pour relever ces défis, sur lesquels j'aurais l'occasion d'échanger lors du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement. Ces discussions ne remplaceront en rien le travail parlementaire, mais permettront de créer du consensus, de bâtir des solutions et de remettre les citoyens au coeur des grands choix de notre pays.