D'abord, tous les échanges menés depuis de nombreux mois avec Action Logement sont au coeur des réflexions sur ce que sera la nouvelle convention quinquennale. J'ai reçu son Président et sa directrice générale le 6 juillet, deux jours après ma nomination. Compte tenu de mes anciennes fonctions de président de l'ANRU, nos échanges ont été nombreux. Personne n'ignore mes prises de position de l'époque, lorsque j'indiquais que le rôle d'Action Logement était, à mes yeux, déterminant dans un certain nombre de politiques : le renouvellement urbain, Action coeur de ville, les logements sociaux. À ce stade, malgré les évolutions et le classement d'Action Logement en administration publique, je continue à penser que la structure actuelle est la meilleure pour faire vivre le monde du logement social.
Pour autant, nous devrons ensemble définir les responsabilités des uns et des autres sur la production, sur la réhabilitation. Un débat est toujours ouvert sur le Fonds national d'aide à la pierre (FNAP). Je ne sais pas comment nous aurions pu agir autrement s'agissant du maintien du prélèvement tel qu'il a existé à la suite des échanges sur le plan d'investissement volontaire, de 3 fois 300 millions d'euros - et, cette fois-ci, une quatrième fois 300 millions d'euros. Si nous n'avions pas choisi cette voie, Action Logement proposait que les bailleurs eux-mêmes contribuent à l'aide à la pierre, ou l'État.
Ce dernier pense encore qu'il est important de participer à la rénovation thermique. Ce sujet est sur la table dans le cadre du pacte de confiance que nous construisons avec les bailleurs sociaux, et de la convention quinquennale. Les deux débats sont liés et doivent être portés simultanément, dans un nouveau cadre. Lors de l'émergence des premières volontés de budgéter la PEEC, Action Logement n'était pas classée en administration publique. Le contexte a changé. Nous portons une responsabilité collective sur sa dette. Nous devons y travailler ensemble. Nous recevrons avec Christophe Béchu l'ensemble des partenaires sociaux d'Action Logement le 15 novembre pour lancer officiellement, peut-être, la négociation sur la prochaine convention quinquennale. Nous y travaillons depuis trois mois. Chacun doit se mobiliser sur la production neuve et sur la réhabilitation. Ces deux chantiers doivent être menés avec la même acuité, sans opposition.
Nous le savons, 80 % des logements dans lesquels nous vivrons en 2050 existent déjà. La question de la rénovation et de la réhabilitation est donc primordiale.
Ensuite, je crois en notre objectif de tenir les échéances fixées sur le plan de la rénovation énergétique, mais pas dans une logique culpabilisatrice. Les propriétaires occupants et bailleurs sont aussi bien aidés les uns que les autres par MaPrimeRénov'. L'ensemble des aides doivent être connues pour le logement individuel. Nous devons dépasser la massification par une rénovation plus performante, voire globale, là où elle est possible. Pour autant, aucun geste n'est gâché. Ils sont utiles au portefeuille des occupants de ces logements, mais aussi de la planète. Une rénovation performante et globale n'est qu'une somme de gestes. Avec les conseillers France Renov et les accompagnateurs agréés, nous devons lancer tous ces chantiers en toute connaissance de cause. Nous avons besoin d'éclairer chaque porteur de projet, individuel ou collectif, et de renforcer notre effort sur le logement collectif, et notamment les copropriétés dégradées, qui compose la part la plus importante du parc, notamment locatif.
Nous devrons être très attentifs au fait qu'un propriétaire bailleur ou occupant d'un logement classé F ou G risque de rencontrer des difficultés pour changer d'étiquette si celle-ci est liée à la structure du bâti. Nous devrons, le moment venu, prévoir un accompagnement adapté aux copropriétés pour que les travaux nécessaires puissent être votés par l'assemblée générale. Nous étudierons les différents cas. Je ne souhaite pas, à ce stade, faire d'exception possible en leur donnant du temps. Les occupants de passoires thermiques n'ont pas ce temps. Nous travaillons sur la qualification des diagnostiqueurs et la formation des artisans pour engager cette dynamique. L'ANAH et ses partenaires nous accompagnent sur une montée en charge pour trouver de nouvelles aides, afin de rendre MaPrimeRénov'Copropriétés la plus efficace possible.
Madame Estrosi Sassone, le projet de loi de finances prévoyait une baisse de l'hébergement d'urgence de 7 000 places en 2023, suivant une première baisse en 2022. Ceci dit, la réalité nous rattrape, et le besoin reste très important en sortie du Covid. Le plan logement d'abord a toutefois permis de sortir 390 000 personnes de la rue. Compte tenu des conditions politiques ou géopolitiques, de nombreuses personnes ont encore besoin d'un hébergement d'urgence. Le gouvernement a donc décidé d'ajouter ces 40 millions d'euros visant à maintenir 197 000 places environ, pour éviter une remise à la rue.
Le programme Logement d'abord sera relancé avec une vraie volonté. Le gouvernement ne peut agir seul. Nous devons convaincre les élus et habitants de la nécesssité de l'acte de construire, mais nous devons également les convaincre que l'installation d'une pension de famille ou d'une résidence sociale à côté de chez soi est loin d'être un drame, au contraire. Nous avons besoin que le regard sur ces lieux d'accueil évolue.
Ensuite, il est très difficile de disposer du nombre précis de sans-abris. Néanmoins, nous travaillons, sur proposition de l'association Aurore, à la mise en place d'un observatoire qui nous apportera une vision dynamique de la situation. L'ensemble des associations souhaitent sa création. J'ai demandé à la DIHAL et la DHUP de s'en charger. Cette question a également été évoquée récemment à l'occasion d'un Conseil de défense en présence du Président de la République. Nous savons qu'environ la moitié des 200 000 personnes aujourd'hui en hébergement d'urgence n'est pas en capacité d'accéder à un logement, en raison d'une situation irrégulière ou équivalente. Pour un hébergement d'urgence réussi, un accompagnement social des familles sera par ailleurs primordial.
Madame Estrosi Sassone, le travail des écoutants du SIAO est extrêmement difficile et frustrant, parfois. Tard dans la nuit, ils n'ont plus de places à proposer. La Première ministre nous a demandé de travailler sur une prime exceptionnelle pour ces professionnels. Nous la leur proposerons prochainement. Nous devons aussi les accompagner de manière plus structurelle.
Sur les résidences sociales, en effet, le bouclier tarifaire existant ne s'applique pas. Nous recherchons une aide exceptionnelle sur le sujet. La question du chèque énergie dépasse cette population, puisqu'il pourrait être utilisé au sein d'une copropriété. Nous devons toutefois éviter d'éventuelles dérives sur son utilisation.
Évidemment, il n'y a pas de choix entre rénovation et construction neuve. Notre ambition vise la production neuve d'environ 110 000 logements sociaux, et la rénovation annuelle de 120 à 140 000 autres. Nous affichons également une ambition très forte dans l'habitat privé.
Ensuite, nous travaillons sur un statut du bailleur privé. Dans le parcours résidentiel, nous avons besoin de tous types de logements, en accession, mais aussi en location, dans le patrimoine social mais aussi dans des copropriétés privées. Ces investisseurs, surtout petits, doivent disposer d'un statut et être protégés et aidés dans les rénovations thermiques. Des contreparties s'appliquent, telles qu'un plafonnement des loyers. Nous devons continuer à développer la protection des propriétaires à travers l'usage de Visale. Nous y travaillerons dans les mois à venir.
Ensuite, j'ai compris que le fonds vert serait à la main des préfets et qu'il devrait être partagé le plus équitablement possible, tant sur la renaturation des friches que sur les équipements publics dans nos villes, dans l'objectif d'adapter la ville au réchauffement climatique. Je ne doute pas que ses dispositifs de redistribution seront les plus efficaces et faciles possible.
Dans le cadre du fonds friche, 1 400 projets ont pu être accompagnés. C'est un résultat très encourageant. Je souhaite que nous puissions continuer à travailler avec la même dynamique.
Vous avez raison, nous devons mener une discussion sur le déficit foncier et son éventuelle adaptation à l'inflation dans le cadre du PLFR. Ce dispositif fonctionne bien pour les propriétaires bailleurs. D'autres aides sont également disponibles, telles que l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ). Je rencontrais ce matin la Caisse d'épargne, extrêmement volontariste en la matière. Tous ces dispositifs n'ont de sens que s'ils contribuent à la rénovation énergétique et en sont des leviers.
MaPrimeRénov' doit, à mon sens, poursuivre sa dynamique sur l'habitat individuel et continuer à se développer en direction de l'habitat collectif. Nous avons passé plusieurs heures à travailler sur le sujet cette semaine, notamment avec l'ANAH. Je crois beaucoup à l'accompagnement des copropriétés, qui répartiront ensuite le reste à charge à leurs copropriétaires. L'accompagnement de ces derniers est parfois plus difficile à cibler et à développer. Je ne doute pas que le prochain conseil d'administration de l'ANAH aura la même attention que nous sur la manière dont nous aiderons les propriétaires, notamment les plus modestes.
Je crois que le succès de MaPrimeRénov' et de France Rénov repose sur un engagement partagé. Les Français ne sont pas égaux devant la rénovation car les collectivités locales n'ont pas le même engagement. Plus celles-ci ont fait des efforts au préalable, plus nos concitoyens bénéficieront d'un reste à charge faible.
Ensuite, comme vous, je crois au dispositif seconde vie, dans lequel pourraient entrer 5 000 à 10 000 logements. Le pacte de confiance avec le monde HLM devrait permettre de recharger l'exonération de la TFPB et redonner un agrément au logement social. Cette rénovation profonde me paraît extrêmement vertueuse.
Pour ce qui est de la TFPB, les bilans sont insuffisants et extrêmement inégaux d'un bailleur à l'autre et d'un territoire à l'autre. On critique beaucoup les bailleurs en outre-mer, mais la mise en oeuvre de l'exonération que j'ai pu voir à La Réunion était extrêmement dynamique. Elle l'est moins sur certains territoires de l'hexagone. L'ONPV étudie d'ailleurs son utilisation dans ses indicateurs, à juste titre. Cette exonération doit perdurer, et doit être utilisée en sur-entretien, en présence de gardien ou autres actions sur le territoire. À Clichy, les bailleurs participent à la prévention par des patrouilles ou des médiateurs de nuit, mais aussi à des actions durant l'été, par exemple.
Nous ne sommes pas sur un stop & go, je l'espère. Je ne peux prévoir ma durée de vie, mais je peux vous assurer de mon engagement et de ma mobilisation. Le Conseil national de la refondation (CNR), qui se réunira fin novembre, définira un cadre autour d'Action Logement. J'ai demandé à Véronique Bédague et Christophe Robert d'y être présents à mes côtés. Ils me survivront. Il est important que le CNR s'occupe du logement et porte les racines de ce que je veux construire. Nous le savons, il n'y a pas d'un côté les bailleurs sociaux, et de l'autre les promoteurs. Tout le monde est dans le même bateau. La construction du pacte de confiance et de la convention quinquennale doit contribuer à la vision de ce que doit être le logement. Le pacte de confiance passe également par la mise en place d'une conférence des financeurs. Aucun sujet, ni actuel ni passé, ne sera tabou, pour ma part. Pour l`action de l'État, la rénovation et l'accompagnement des bailleurs en ce sens constitueront une réelle priorité. Ils ont besoin que nous leur redonnions des moyens et que nous les aidions à refaire leurs fonds propres, qui ne leur permettent pas aujourd'hui d'être aussi ambitieux qu'ils le souhaitent.
Concernant les meublés touristiques, ma volonté est telle que nous trouverons le vecteur législatif pour empêcher ceux qui le voudraient de s'infiltrer dans ce petit trou dans la raquette. Nous avons besoin de logements, et de logements classiques, même si l'offre d'accueil de notre beau pays touristique reste présente. Nous le savons, nous peinons déjà à loger les habitants de certaines zones ou leurs enfants. Nous devons d'abord trouver des moyens fiscaux pour que la location de meublés touristiques ne soit pas trop incitative.
Ensuite, la Première ministre ne veut oublier personne en termes de bouclier tarifaire. Le chauffage électrique collectif et les parties communes des logements sociaux étaient au départ hors des radars. Nous avons, je crois, trouvé les moyens de résoudre ces problèmes qui concernent un nombre important de copropriétés. Tous les chauffages collectifs, au gaz et à l'électricité, auront un bouclier tarifaire jusque la fin de cette année. La sortie de ces textes est imminente.
Il est vrai que malgré le bouclier, un certain nombre de nos concitoyens vont voir une augmentation, parfois très importante, de leurs charges. Bon nombre de bailleurs avaient négocié des tarifs extrêmement bas. Nous ne pouvons le leur reprocher, mais lorsqu'on payait 20 euros du mégawattheure, le bouclier fixé à 65 euros du mégawattheure occasionnerait tout de même une augmentation de 200 ou 300 %. Ces prix seraient multipliés par cinq ou six sans ce bouclier. Nous devons être attentifs aux augmentations touchant nos concitoyens. Par ailleurs, certains abonnements de bailleurs ou copropriétés arrivent à échéance, et les tarifs proposés par les fournisseurs sont parfois inacceptables.
Pour résumer, nous essayons de boucher tous les trous dans la raquette, de trouver les textes adéquats et de les mettre en oeuvre au plus vite, le plus efficacement possible. La Première ministre y est très attentive.
Vous savez mon attachement aux programmes de l'ANRU, dotés de 12 milliards d'euros de subventions pour cette année. En 2022, la participation de l'État s'établit à 15 millions d'euros. 450 des 453 projets présentés ont été validés et passés en comité d'engagement, sur des programmes nationaux ou régionaux. C'est presque parfait. Pour ce qui est de la participation de l'État et des différents partenaires, la trésorerie actuelle permet aujourd'hui très largement d'absorber des décaissements. L'engagement du Gouvernement d'accompagner l'ANRU à hauteur de près de 1,2 milliards d'euros doit être tenu, sans quoi il ne pourra pas mener ses programmes à leur terme. Selon moi, l'État sera au rendez-vous. Le pic de décaissement est prévu pour 2026, compte tenu des retards pris à cause du covid. Nous devrons, dès l'année prochaine, commencer à y mettre plus d'argent.
Ensuite, le nombre de postes d'adultes relais ouverts avoisine les 6 500. Un certain nombre de difficultés liées au turnover nous empêchent d'atteindre la cible souhaitée. Ce n'est pas un problème d'argent ou de postes ouverts, mais de temps de recrutement. S'y ajoute peut-être un sujet concernant l'attractivité de ces postes, notamment dans une période où le plein emploi est plus présent qu'à d'autres. Ce point doit être discuté. Ces postes sont très importants, en particulier dans le monde associatif.
J'ai fait une proposition pour une nouvelle présidente de l'ONPV, car cette situation est inacceptable. La politique de la ville doit être évaluée scientifiquement. Je souhaite moi-même m'entourer d'un conseil scientifique. Nous ne comptons pas suffisamment de contrats CIFRE dans ce secteur. De nombreux doctorants pourraient accompagner nos sujets. Nous devons recréer du lien avec la recherche. Par moments, l'ONPV était très dotée. Sa fusion avec l'ANCT a un peu changé la donne.
L'année à venir sera structurante puisque nous réfléchirons à la refonte des contrats de ville. Cette démarche devra être participative, contributive. La politique de la ville a eu tendance à oublier les petites associations et les petits projets. Nous devons lui redonner les moyens d'accompagner les projets locaux et de réinventer la participation des habitants. Je ne dis pas que nous devons arrêter les conseils citoyens, mais là où ils ne fonctionnent pas, nous devons nous laisser la possibilité de revenir à des formats plus informels tels que des tables de quartier, déjà accompagnées par l'ANCT. Nous avons besoin d'une démarche ascendante, avec des débats dans chaque quartier en politique de la ville.
En 2014, nous avons inventé les quartiers de veille de la politique de la ville, qui bénéficiaient d'une veille, mais d'aucun fonds. Nous avons, je pense, besoin d'une cartographie. Les critères utilisés à l'époque peuvent rester pertinents, bien qu'il faille en ajouter d'autres. Je sais également qu'il peut toujours y avoir des effets de bords. Un quartier oublié peut plonger très vite. Au-delà du travail de l'INSEE, je souhaite avancer avec les préfets et les élus locaux. Le transfert de la compétence aux intercommunalités peut également nous permettre de mieux travailler cette cartographie, au plus près des besoins. Vous affirmer que nous le ferons avec plus d'argent serait mentir, mais nous aurons en tout cas la possibilité d'utiliser l'argent de la politique de la ville là où il est nécessaire.
Enfin, le ZAN est d'abord un objectif de long terme. Christophe Béchu a pris cette question à bras le corps. Il a annoncé, avec la Première ministre, reprendre le dialogue avec les collectivités locales sur ce que serait une politique de zéro artificialisation nette. Je crois que nous devons faire, le plus souvent possible et là où c'est possible, avec l'existant. Le gouvernement cherche, à juste titre, à étudier ce sujet en dialogue avec les élus et les associations, pour continuer à faire la ville et à faire du logement. Je disais plus tôt que nous devions construire plus pour loger plus. Nous avons besoin de créer de l'attractivité. Pour autant, dans un certain nombre de cas, l'imperméabilisation a été une facilité par le passé. Nous n'avons plus cette facilité dans le contexte actuel d'urgence climatique. Nous devons être plus vigilants à nos espaces verts et de nature, y compris en ville. La Première ministre a annoncé la notion d'une « France Nation verte ». J'essaierai de m'associer à cet objectif de valeur.