Les crédits de paiements (CP) du programme 178 augmentent de 1,2 milliard d'euros, essentiellement pour financer l'effort en faveur de l'entretien programmé du matériel (EPM). Concernant la disponibilité technique opérationnelle (DTO), 71 % des indicateurs sont en stagnation ou en diminution en 2023.
Pour l'armée de terre, la situation était fragile en 2022, elle se détériore en 2023, avec désormais cinq des sept indicateurs en diminution ; il s'agit de ceux concernant les hélicoptères, les chars Leclerc, les engins blindés de reconnaissance et de combat (EBRC) - avec le retard de livraison des Jaguar - et enfin les Caesar, en raison de la cession de 18 canons et rechanges à l'armée ukrainienne.
Pour la marine nationale, trois des sept indicateurs sont en recul ; il s'agit de ceux qui concernent le porte-avion - en raison de la programmation prévue des arrêts techniques -, la chasse - avec le passage au standard F4 du Rafale - et les hélicoptères - du fait des problèmes de corrosion des Caïman.
Pour l'armée de l'air et de l'espace, les difficultés tiennent aux exportations des Rafale, dont les compensations sont très progressives, et, dans une moindre mesure, au retrait du C160, à la déflation de la flotte C135, ainsi qu'à celle des Puma et Super Puma. Les contrats « verticalisés » devraient permettre une amélioration des DTO des Rafale et des moteurs de Mirage 2000 ; ils doivent donc faire l'objet d'une attention de la commission.
L'hypothèse d'engagement majeur (HEM) et la perspective d'économie de guerre conduisent à réfléchir à la mise à niveau du système de soutien aéronautique afin de répondre à la haute intensité. Des études ont été lancées par la direction de la maintenance aéronautique (DMAé) avec les principaux représentants de la base industrielle et technologique de défense (BITD) du maintien en condition opérationnelle (MCO) aéronautique - notamment Dassault Aviation, Safran, Thales et Airbus Helicopters -, dont les premiers résultats permettent d'identifier des leviers d'action qui contribueront à améliorer la réactivité du système de soutien autour de deux axes : un axe « matériels », qui intègre la réflexion sur les stocks de rechanges et les normes de MCO ; et un axe « ressources humaines », qui vise la constitution d'un noyau dur de compétence autour de la réserve opérationnelle et l'usage de nouveaux systèmes d'information - Brasidas par exemple - permettant une meilleure maîtrise de la donnée et un pilotage plus efficient du MCO aéronautique.
J'en viens à l'entretien programmé du matériel (EPM).
En 2023, selon les réponses au questionnaire budgétaire, le niveau de crédits consacrés à l'EPM s'élève à 5,5 milliards d'euros. Cela correspond au niveau d'annuité prévu par la LPM, soit 4,4 milliards d'euros, et aux 900 millions d'euros manquants faute d'inscription par le Gouvernement en loi de finances initiale depuis le début de la période de programmation.
Pourtant, ce n'est pas satisfaisant. Ce montant de crédit ne rattrape pas les retards, mais finance principalement les 500 millions d'euros supplémentaires destinés aux munitions. L'augmentation des crédits destinés aux munitions est indispensable, et les leçons tirées de la guerre en Ukraine s'imposent en la matière. Mais cela signifie que, une fois de plus, les crédits d'EPM financent des besoins non prévus par la LPM 2019-2025, au détriment des besoins initialement retenus, alors que le gabarit était déjà taillé au plus juste.
Nous devrons donc être attentifs à la pleine satisfaction des besoins en EPM dans la prochaine période de programmation. Ils comprennent des besoins du service interarmées des munitions (SIMu), qui doit consolider son organisation avec la création éventuelle d'un nouvel établissement principal des munitions (EPMu) et le renforcement de son dispositif à l'outre-mer et à l'étranger.
Le SIMu devra également, pour répondre à l'ambition 2030, renforcer la fonction défense et sécurité, et sa capacité de pilotage des projets majeurs. Pour cela, il lui faudra gagner en épaisseur organique en sécurisant la remontée en puissance des ressources humaines, notamment en matière de personnel militaire ; des créations évaluées à environ 80 postes sont donc à prévoir.
La capacité de stockage offerte par les dépôts du SIMu semble suffisante pour répondre aux exigences des contrats opérationnels. La modernisation de cette capacité doit se poursuivre afin de garantir des conditions optimales de la préservation du potentiel des munitions et de sécurité. Les magasins en tôle sont ainsi remplacés par des igloos, et la sécurité est encore renforcée.
L'HEM pourrait conduire à un besoin de stockage accru et à une diversification des modes de mise à disposition des munitions, en multipliant, par exemple, les possibilités d'acheminement ferroviaire via l'installation terminale embranchée (ITE) spécifique. Nous approfondirons, dans le cadre de nos travaux de préparation de la prochaine LPM, ces premières réflexions sur les munitions.
Sous réserve de ces observations, nous proposons d'adopter les crédits du programme 178.