Intervention de Christian Klinger

Réunion du 17 novembre 2022 à 10h30
Développement économique de la filière du chanvre — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Christian KlingerChristian Klinger :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « tout est bon dans le cochon » a-t-on coutume dire. Aujourd’hui, j’ai envie de dire « tout est bon dans le chanvre », à la lecture de cette proposition de résolution !

Au sortir d’un été marqué par la sécheresse et à l’heure des économies de chauffage, le développement en France de la filière du chanvre, plante sobre en eau et aux usages multiples, paraît donc une évidence. C’est une plante qui pousse vite, résiste à la sécheresse et ne réclame pas d’apports en produits chimiques. Les chiffres de la filière démontrent son intérêt.

De moins de 4 000 hectares en 1990, nous sommes passés à près de 22 000 hectares en 2022. Cultiver du chanvre, mais pour quoi faire ? Tout ou presque, si l’on en croit ses zélateurs. Tee-shirts, nappes, papiers, le chanvre est encore utilisé pour produire des fibres textiles et permet aussi de fabriquer du papier sans abattre d’arbres. Est apparu également le béton de chanvre, un matériau de construction biosourcé, dont les propriétés isolantes en font aujourd’hui un précieux atout. Puis des fibres encore plus techniques, notamment dans l’industrie automobile, sont devenues des substituts aux fibres de verre beaucoup plus polluantes.

Les graines riches en protéines sont utilisables dans l’alimentation animale comme humaine.

Cette plante est donc au cœur de nombreuses innovations, d’une forte demande sociale et d’opportunités économiques. J’ai relevé plus de 600 produits dérivés brevetés dans le monde, dont la moitié proviennent malheureusement toujours de Chine.

D’autres pays ont bien compris l’intérêt de cette culture et se sont d’ores et déjà saisis de cette chance de développement. À titre d’exemple, lorsque les États-Unis ont décidé de soutenir la filière, ils sont passés de 9 000 à 33 000 hectares en un an.

À notre tour, nous devons soutenir la filière et créer un écosystème favorable, avec des règles claires. Surtout, dépassionnons le débat autour du caractère psychotrope du cannabis. Fibres, graines… la plante, vous le savez, a aussi des feuilles et des fleurs. Se pose dès lors un problème de réglementation au sujet du chanvre « bien-être », réglementation qui paraît, à ce jour, assez confuse. Autorisée par l’Europe, la commercialisation des fleurs et des feuilles a été suspendue par un arrêté, lequel a été invalidé par le Conseil d’État en janvier dernier. Quant à la Cour de cassation, elle a légalisé la commercialisation de ces produits.

Bref, si nous voulons une nouvelle filière française d’excellence, celle des extraits de chanvre, il s’agit de donner à nos entreprises la possibilité d’investir sereinement et pleinement ces marchés d’avenir, en clarifiant les réglementations applicables aux différents produits finis et en les alignant sur celles de nos homologues européens et britanniques, pour jouer à armes égales.

Si le chanvre a une croissance très simple depuis la plantation jusqu’à la récolte, cette dernière nécessite un matériel spécifique et un temps d’intervention plus long que pour la majorité des cultures, la graine étant fragile et la paille demandant plusieurs interventions avant sa transformation.

La culture du chanvre nécessite donc des outils spécialisés et, partant, des investissements. Or les investisseurs demeureront frileux tant que les règles ne seront pas claires ni pérennes.

La position de la France, si elle reste figée, reviendra donc à favoriser ses pays voisins, sans aucune justification rationnelle.

Voilà un an, nous avons débattu ici même de ce sujet. Le Gouvernement annonçait sa volonté de « mettre en place un cadre réglementaire pour permettre le développement sécurisé de la filière ». Force est de le constater, le dossier n’a pas bougé. Pourquoi attendre ?

La loi relative à la transition énergétique prévoit la conception de bâtiments à énergie positive. Faisons en sorte que ces matériaux de construction biosourcés soient disponibles sur le marché.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, si tout est bon dans le cochon, c’est aussi le cas du chanvre !

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