Séance en hémicycle du 17 novembre 2022 à 10h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • CBD
  • bâtiment
  • chanvre
  • chômage
  • culture
  • filière
  • l’assurance
  • plante
  • réglementation

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à dix heures trente-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

J’informe le Sénat que des candidatures pour siéger au sein de l’éventuelle commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2022 ont été publiées.

Ces candidatures seront ratifiées si la présidence n’a pas reçu d’opposition dans le délai d’une heure prévu par notre règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Daphné Ract-Madoux

Lors du scrutin public n° 51, portant sur l’ensemble du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, notre collègue Jean-Marie Janssens souhaitait voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L’ordre du jour appelle l’examen de trois projets de loi tendant à autoriser la ratification ou l’approbation de conventions internationales.

Pour ces trois projets de loi, la conférence des présidents a retenu la procédure d’examen simplifié.

Je vais donc les mettre successivement aux voix.

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’accord relatif à la restructuration de la plate-forme douanière de Saint-Louis – Bâle sur l’autoroute A35, en France entre le Gouvernement de la République française et le Conseil fédéral suisse, signé à Berne le 31 mars 2021, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée (projet n° 48, texte de la commission n° 77, rapport n° 76).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

Le projet de loi est adopté définitivement.

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Singapour, signée à Singapour le 22 juillet 2020, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 517 [2021-2022], texte de la commission n° 6, rapport n° 5).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

Le projet de loi est adopté définitivement.

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de la déclaration relative à la phase d’exploitation des lanceurs Ariane, Vega et Soyouz au Centre spatial guyanais, adoptée à Paris le 30 mars 2007 et amendée le 4 décembre 2017, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Je mets aux voix le texte adopté par la commission sur ce projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale (projet n° 876 [2020-2021], texte de la commission n° 75, rapport n° 74).

La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées est favorable à l’adoption de ce texte.

Le projet de loi est adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L’ordre du jour appelle l’examen de la proposition de résolution portant sur le développement économique de la filière du chanvre en France et l’amélioration de la réglementation des produits issus du chanvre, présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Guillaume Gontard et plusieurs de ses collègues (proposition n° 769 [2021-2022]).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Guillaume Gontard, auteur de la proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est avec une grande satisfaction que je défends aujourd’hui devant le Sénat cette proposition de résolution, dont l’initiative revient au groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, mais qui est cosignée par plus de cinquante collègues issus de tous les groupes de la Haute Assemblée, que je tiens une nouvelle fois à remercier vivement.

Cette proposition de résolution vise à encourager le développement de la filière du chanvre et à clarifier la réglementation des produits issus de cette culture. Ce thème aura constitué l’un des fils rouges de mon mandat, à Paris comme dans l’Isère, de ma participation, en 2018, à la mission d’information sur l’herboristerie, constituée à la demande de notre collègue Joël Labbé, à l’accueil dans nos murs, au mois de mai dernier, de la deuxième rencontre de l’interprofession du chanvre.

Entre-temps, l’Assemblée nationale s’est saisie du sujet dans le cadre d’une mission d’information hors norme, la réglementation environnementale 2020 (RE2020), qui fait la part belle aux matériaux biosourcés, a été adoptée et la réglementation incompréhensible sur le cannabidiol (CBD) a défrayé la chronique judiciaire.

Je suis heureux de la place que prend la filière du chanvre dans le débat public et des progrès accomplis, même si beaucoup reste à faire. C’est tout l’objet de cette proposition de résolution, qui invite le Gouvernement à accompagner cette filière indispensable pour la transition écologique et à clarifier une fois pour toutes la réglementation sur le CBD.

Vous me pardonnerez, mes chers collègues, si je répète ce matin certains éléments de mon propos du 3 février dernier. C’est d’ailleurs le débat tenu ce jour-là en séance sur l’initiative de mon groupe, au cours duquel était apparue une large majorité de vues sur cette problématique, qui a motivé le dépôt de la présente proposition de résolution. Néanmoins, nous avons choisi, en lien avec les acteurs de la filière, de ne pas nous cantonner à l’imbroglio juridique relatif au CBD, mais d’évoquer l’ensemble de la filière, qui, même si elle se porte bien, mérite toute l’attention du Gouvernement.

Je le disais en février dernier, depuis l’antiquité, le chanvre a continuellement habillé, nourri, soigné les hommes et recueilli leurs écrits. Aujourd’hui, il fait encore tout cela, mais pas seulement : il nous loge aussi et il peut également représenter un substitut au plastique.

Les débouchés industriels de cette filière sont considérables, mais largement sous-exploités. La France est le troisième producteur mondial de chanvre et le premier producteur européen, avec pourtant 22 000 hectares seulement. Les surfaces cultivées ont triplé depuis dix ans et devraient doubler au cours des cinq prochaines années.

Rappelons-le, la culture du chanvre ne nécessite pas de produits phytosanitaires ni d’irrigation, elle restructure et dépollue les sols et elle s’inscrit opportunément dans la rotation des cultures. Mieux, elle capte plus de carbone que la forêt, avec 15 tonnes par hectare et par an.

Le chanvre peut constituer une chance formidable pour nos agriculteurs, tant en bio qu’en conventionnel, à condition de multiplier les débouchés. Cela tombe bien, ces derniers sont nombreux et toute la plante est valorisable : les fleurs et les feuilles servent à produire le CBD ou à extraire des arômes pour la parfumerie ; les graines, très riches en protéines, nourrissent l’humain et les animaux – bétail, oiseaux, poissons ; enfin, la paille permet de produire, avec la fibre, du textile, de l’isolant thermique, du bioplastique ou des papiers spéciaux, et, avec le corps solide – la chènevotte –, du béton végétal et de la litière.

En ce qui concerne le CBD, je laisse mon collègue Thomas Dossus préciser les choses.

Je précise toutefois que nous demandons au Gouvernement de ne pas attendre la décision au fond du Conseil d’État pour autoriser la vente au détail des fleurs et des feuilles du catalogue autorisé, que nous proposons d’élargir à toutes les variétés contenant moins de 1 % de tétrahydrocannabinol (THC), contre 0, 3 % actuellement. Des milliers d’acteurs économiques attendent la fin de cette mauvaise comédie judiciaire. Ce flou juridique n’est souhaitable pour personne. Nous avons besoin de règles claires, facilement contrôlables, et d’un encadrement adapté de la production, de la transformation et de l’utilisation du chanvre.

En outre, pour favoriser les contrôles, nous demandons la cartographie de toutes les cultures de chanvre, même celles qui ne font pas l’objet d’une déclaration dans le cadre de la politique agricole commune (PAC). Les agriculteurs et la filière le demandent.

Nous proposons par ailleurs d’équiper nos forces de l’ordre, comme en Suisse, de tests portatifs permettant de mesurer très rapidement le taux de THC de la fleur, afin de déterminer sa légalité.

Enfin, sur le volet alimentaire, l’arrêté de décembre 2021 ne règle pas toutes les questions posées par la consommation de CBD. Nous invitons donc le Gouvernement à définir les doses journalières recommandées de CBD, à exclure les produits qui ne sont pas enrichis en CBD de la réglementation relative aux nouveaux aliments et ingrédients alimentaires (Novel Food) et à définir clairement les produits issus du chanvre qui relèvent d’une consommation de bien-être et non du régime de la pharmacopée.

Venons-en à la filière textile, qui a, par rapport au coton, rappelons-le, un impact carbone cinq à huit fois inférieur et une consommation d’eau plus de deux fois moins importante, le différentiel de cette consommation, variable selon les climats, pouvant être beaucoup plus grand. Nous sommes en train de passer un cap sur cette question, avec une réglementation européenne plus exigeante sur l’origine des textiles et avec l’engagement de grands industriels du vêtement à utiliser la fibre de chanvre.

Néanmoins, les lignes de production et les outils industriels qui utilisent la fibre de coton ne sont pas toujours adaptés à la fibre de chanvre et ils exigent des réglages importants. Il faut donc procéder à de lourds investissements, qui doivent, selon nous, être accompagnés par la puissance publique. Nous pensons notamment aux crédits de France 2030, qui n’ont pas été intégralement consommés et qui, au-delà des technologies de rupture chères au Président de la République, doivent également financer le retour à des savoir-faire ancestraux, s’ils sont aussi bien adaptés que celui-ci au défi écologique.

Nous invitons également le Gouvernement à mettre en place un label pour le textile biosourcé, en s’appuyant sur la nouvelle réglementation européenne, sorte de « Nutri-score des textiles », puis à l’utiliser dans les critères environnementaux de la commande publique.

Le bioplastique, qui équipe principalement les tableaux de bord des voitures, est, je le rappelle, 30 % plus léger que le plastique, recyclable 7 fois et, sur le parc des 13 millions de véhicules équipés, il représente une économie de 100 000 tonnes d’équivalent CO2. Le Gouvernement devrait donc y accorder plus d’attention dans son soutien aux filières industrielles vertueuses, d’autant que la fibre de chanvre peut également remplacer aisément la fibre de verre dans de nombreux composites et faciliter le recyclage ; des études sont en cours pour la réalisation des pales d’éolienne.

Pour ce qui a trait au bâtiment, nous devons redoubler nos efforts, tant le chanvre répond aux exigences de la transition et de la rénovation énergétiques, et limite notre dépendance aux hydrocarbures. J’ai visité, en septembre dernier, l’une des premières entreprises produisant des modules préfabriqués en béton de chanvre. Mélangez de la chènevotte, de la chaux et du bois, et vous aurez un mur qui stocke 35, 5 kilogrammes de carbone au mètre carré, quand le béton classique émet 126 kilogrammes de CO2 au mètre carré…

En outre, ce mur permet d’obtenir une hygrométrie inégalée, nécessitant très peu de chauffage et de climatisation, et entraînant 70 % d’économie d’énergie selon le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema). J’ajoute qu’il est biodégradable ou recyclable, ce qui n’est pas un détail, le bâtiment étant responsable des trois cinquièmes des déchets du pays.

Pourtant, il reste des blocages réglementaires, issus notamment des réglementations professionnelles.

Le béton de chanvre étant plus qu’adapté aux exigences de la RE2020, il convient de massifier son développement et, pour ce faire, de former à l’utilisation des matériaux biosourcés les architectes mais également les métiers de la construction, les « accompagnateurs France Rénov’ » et les conseillers de l’Agence nationale de l’habitat (Anah).

Par ailleurs, grâce à la laine de chanvre, l’isolation thermique, dans le neuf ou dans la rénovation, n’est pas en reste. Actuellement, 90 % des matériaux du bâtiment sont issus de la filière pétrolière ou minière, et leur transformation est très énergivore. Selon une étude de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie), le polystyrène utilisé en isolation émet 2, 8 tonnes de CO2 par tonne produite, alors que la laine de chanvre permet au contraire de stocker du carbone et est, au surplus, recyclable et biodégradable.

Aussi, en cohérence avec la RE2020, nous invitons le Gouvernement à fixer des critères ou des bonus pour les aides à la rénovation thermique – MaPrimeRénov’, éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) – en lien avec la performance environnementale des matériaux utilisés. Au passage, cela vaut non seulement pour le chanvre, mais encore pour l’ensemble des autres matériaux biosourcés. Je vous annonce d’ailleurs en exclusivité un amendement au projet de loi de finances pour 2023 émanant de notre groupe écologiste et allant en ce sens sur le PTZ.

Il découle de tout ce qui précède, vous l’aurez compris, mes chers collègues, qu’il faut massifier la culture et l’utilisation du chanvre. Cela passe notamment par une grande campagne de communication publique à destination des collectivités, des professionnels et du grand public, campagne promise en 2018 via le plan d’action Une Stratégie bioéconomie pour la France, mais qui n’a jamais été mise en œuvre.

Cela étant, nos capacités de production agricole pour 2023 nous inquiètent. La guerre en Ukraine a fait tellement exploser le prix des grandes cultures, notamment des céréales, que nos agriculteurs n’auront pas d’incitation financière à planter du chanvre cette année. En 2023, le chanvre rapportera entre 20 % et 25 % de moins à l’hectare que le maïs, le blé ou le colza.

Par conséquent, la filière formule une demande supplémentaire, qui n’était pas saillante au moment de la rédaction de cette proposition de résolution, mais qui nous semble désormais ô combien légitime : la reconnaissance sur le marché carbone réglementé du carbone stocké par l’ensemble de la filière. J’ai suffisamment détaillé, je crois, le bilan carbone phénoménal de la culture et de l’usage du chanvre pour vous convaincre du bien-fondé d’une telle demande.

Dans cette perspective, la filière a demandé un accompagnement de la part des corps d’inspection de l’État, afin de créer un mécanisme de reconnaissance du stockage du carbone au bénéfice des producteurs, car les spécificités de la filière chanvre – profondeur racinaire, poursuite du stockage de carbone dans les débouchés – sont mal prises en compte par le modèle du label bas-carbone.

La stratégie nationale bas-carbone pourrait également être renforcée par une prime au stockage de carbone dans la rénovation thermique des bâtiments, afin d’inciter à l’utilisation d’isolants biosourcés.

Enfin, il conviendrait de favoriser les matériaux biosourcés via la réduction de la TVA. Nous comptons sur le Gouvernement pour obtenir satisfaction à Bruxelles sur ce point, dans le cadre de la refonte de la directive TVA.

Voilà, mes chers collègues, une présentation succincte de notre proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Notre collègue Thomas Dossus la complétera, afin d’envoyer un message fort au Gouvernement et de mettre davantage en lumière une filière pleine de promesses.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Nous avons un horaire à respecter, mon cher collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Dans bien des territoires, notre vote est attendu par des centaines d’acteurs économiques. Ne les décevons pas ! (Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER.)

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mon cher collègue, quand je vous demande de conclure, vous devez obtempérer. Si chacun se permet de dépasser son temps de parole, nous ne pourrons pas achever l’ordre du jour de ce matin.

Je vous demande donc, mes chers collègues, de vous respecter les uns les autres.

La parole est à Mme Corinne Imbert.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui permet de mettre en lumière une filière méconnue du grand public. Je salue donc cette initiative, qui permet d’évoquer un sujet d’avenir du point de vue économique pour nos territoires : la filière du chanvre.

L’opinion publique se passionne généralement pour les découvertes qui marquent une rupture avec leur temps. L’exemple du chanvre est au contraire symptomatique d’un engouement fort pour une redécouverte. En effet, si le sujet ne prend de l’ampleur que depuis quelques années, l’utilisation de ce matériau par l’être humain est multiséculaire.

L’évocation du chanvre fait souvent penser au cannabis et est donc souvent associée à la triste réalité du trafic de drogue et de ses conséquences tragiques, notamment chez les jeunes. La première des priorités sur ce sujet réside donc dans un travail de pédagogie. Il faut bien distinguer le drame que constitue le cannabis utilisé comme drogue de la filière du chanvre, qui représente une chance formidable dans de nombreux domaines économiques.

Le chanvre est une plante qui permet de stocker le carbone – son bilan carbone est excellent – et dont la production nécessite peu d’énergie, peu d’intrants et peu d’eau. Il peut s’utiliser dans les secteurs du bâtiment, des cosmétiques, de l’alimentaire ou encore du textile.

Dans le secteur du bâtiment, le crépi chaux-chanvre en intérieur, sur du bâti ancien ou récent, permet d’éviter l’usage de la climatisation. L’enduit chaux-chanvre absorbe l’humidité pendant les périodes froides et la restitue en période chaude. Dans la mesure où la sobriété énergétique s’impose comme une priorité nationale, le chanvre constitue une véritable solution de substitution à nos modes de fonctionnement traditionnels.

La nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs (RE2020) va dans le bon sens, puisqu’elle met en avant les matériaux biosourcés. Néanmoins, certains verrous réglementaires pourraient être levés ou allégés. On pourrait ainsi imaginer la prise en compte d’autres critères que le coefficient thermique, comme la quantité de polluants ou le confort de vie.

Il pourrait également être pertinent de mieux accompagner financièrement la production et l’usage des matériaux biosourcés. Compte tenu de l’envolée des prix des matières premières, le chanvre représente également un excellent substitut à la laine de verre, à la laine de roche ou au polystyrène.

Par ailleurs, la formation des professionnels du bâtiment représente un véritable défi, car il faut ouvrir ces métiers à de nouvelles perspectives, en matière d’utilisation de la fibre de chanvre dans l’isolation des combles et des parois des bâtiments, mais également dans l’usage de la chènevotte dans les crépis isolants.

Il est fondamental d’informer les décideurs publics de ces atouts extraordinaires.

Dans le département de la Charente-Maritime, qui m’est cher, le projet de territoire pour la gestion de l’eau de la rivière de la Boutonne repose sur plusieurs axes : les aspects qualitatif et quantitatif de l’eau et la protection des milieux. Il y a également une forte volonté locale de trouver une culture se passant de pesticide et nécessitant peu d’engrais, tout en dégageant un revenu correct pour les producteurs. La filière chanvre est la seule solution à même de répondre à l’ensemble de ces critères…

Il existe également une filière alimentaire du chanvre, grâce à l’utilisation et à la transformation des graines de cette plante en huile, en tourteaux, en farines ou en chocolat. À une époque où le circuit court est plébiscité par nos compatriotes, le chanvre permet de répondre à ces nouveaux modes de consommation.

La filière textile est encore trop peu développée par rapport à son potentiel. Je rappelle que, avant d’être en coton, le jean, la toile denim – « de Nîmes » –, était historiquement produit à partir de chanvre !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Par ailleurs, tandis que le revenu des agriculteurs suscite un émoi légitime dans l’opinion publique, cette filière constitue une source de rémunération très correcte pour les producteurs.

Le levier économique du chanvre complète ainsi une palette déjà remarquable de vertus.

Enfin, alors que nous venons d’examiner en première lecture le projet de loi de financement de la sécurité sociale, je tiens à saluer la prolongation de l’expérimentation de l’usage thérapeutique du cannabis. Nous en sommes encore à un stade embryonnaire, du point de vue de la prescription d’un produit qui n’a pas un véritable statut de médicament, mais l’intérêt médical de ce produit est encourageant.

Pour toutes ces raisons – utilisation dans le bâtiment, dans l’alimentation, dans le textile et dans la médecine – et en souvenir des cordages de chanvre fabriqués à la Corderie royale de Rochefort-sur-Mer, je voterai, à titre personnel, cette proposition de résolution.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, cette proposition de résolution est une excellente occasion de parler d’une filière, le chanvre, à la fois complexe et prometteuse.

Elle est complexe, parce qu’elle regroupe de nombreux acteurs, de toutes tailles, et qu’elle concerne des industries très diverses. Cela en fait sa force, mais aussi sa faiblesse.

Elle est prometteuse à plusieurs égards. La France est le premier pays producteur de chanvre en Europe. Le département dont je suis élue, l’Aube, qui est à la pointe dans cette filière, assure presque 50 % de la production française et un tiers de la production européenne. Nous développons cette culture depuis des décennies, dans ce territoire à forte tradition industrielle.

La « maison de la Turque », bâtisse toute flaubertienne au cœur de Nogent-sur-Seine, a été rénovée avec du béton de chanvre. L’industrie du bâtiment place de grands espoirs dans les matériaux de construction à base de ce matériau.

L’industrie textile, très polluante, se tourne, elle aussi, de plus en plus vers le chanvre. À l’heure où la mode éthique fait son entrée dans les consciences, cette plante paraît pouvoir contribuer à changer la donne.

Plus largement, l’utilisation du chanvre dans certaines industries contribue activement à notre transition vers la neutralité carbone. Cette culture n’a besoin que de peu d’intrants et elle est très peu consommatrice d’eau, ce qui limite le besoin d’irrigation. C’est un atout agroécologique majeur dans le contexte de réchauffement climatique que nous connaissons.

Le chanvre a la capacité de stocker beaucoup de CO2, dans un laps de temps court. Un hectare de chanvre absorbe, en une année, environ 15 tonnes de CO2, autant qu’un hectare de forêt. Le chanvre est donc une culture aux multiples externalités positives, notamment pour les sols dans le cadre des rotations culturales.

Ce sont des atouts cruciaux pour notre agriculture, mais, pour que cette chance se transforme en marché, encore faut-il des débouchés stables pour la filière.

Bien sûr, les investissements sont indispensables. Être au fait des réalités du secteur nous permettra de gagner en compréhension et, donc, d’agir en conséquence.

Selon l’un des considérants de la proposition de résolution, dans cinq ans, cette filière pourrait avoir créé autour de 20 000 emplois et représenter un chiffre d’affaires annuel avoisinant 2, 5 milliards d’euros. La France doit transformer l’essai. La poursuite du développement de cette filière participera à la réindustrialisation de notre pays, à laquelle je suis très attachée. Nous devons continuer à nous battre pour faire émerger des champions industriels. Je profite de cette occasion pour saluer les annonces récentes du ministre délégué chargé de l’industrie sur les stratégies de relocalisation industrielle et le « produire en France » dans nos territoires. La filière du chanvre peut contribuer à ces impératifs.

Nous avons de l’avance et, pourtant, nous devons aider cette filière à se structurer. Le chanvre offre de belles perspectives pour une réindustrialisation décarbonée de notre pays. Consolider une filière, c’est permettre à l’offre de rencontrer la demande, d’où l’importance des matériaux biosourcés et de leur développement.

À ce titre, les alinéas 30, 31 et 32 du texte sont très intéressants. Les matériaux biosourcés ont toute leur place dans nos démarches de rénovation et de lutte contre les passoires thermiques. Nous devons faire en sorte de mieux faire connaître ces produits des professionnels et des citoyens.

Je veux aborder un dernier point : le CBD. Dès janvier dernier, j’ai posé une question au Gouvernement sur l’avenir de la filière, après le fameux arrêté du 31 décembre 2021. Oui, une régulation est nécessaire et la filière n’y est pas opposée. La proposition de résolution met en lumière les millions de consommateurs et les milliers de points de vente. Les acteurs ont besoin de stabilité.

Je le répète, la position de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) et la doctrine de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) s’inscrivent dans la même optique : avec un taux de THC inférieur à 0, 3 %, le CBD n’est pas un stupéfiant. Là encore, madame la secrétaire d’État, ne laissons pas nos voisins européens faire main basse sur le marché français, je vous en conjure ! Avançons ensemble dans un cadre respectant la santé publique et permettant à nos entrepreneurs d’innover.

En revanche, certains points de cette proposition de résolution me posent davantage problème. Je n’ai malheureusement pas le temps de les détailler. Je me contenterai donc d’indiquer que la pertinence de la multiplicité de labels proposés ne me paraît pas établie. De même, l’alinéa 26, par lequel on promeut l’« élargissement du catalogue des cultivars aux variétés contenant moins de 1 % de THC » me dérange.

Toutefois, pour toutes les raisons listées précédemment, le groupe Les Indépendants votera, dans sa majorité, en faveur de ce texte.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, GEST, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, Guillaume Gontard vient de vous présenter le potentiel de la filière française du chanvre du point de vue industriel. Pour ma part, je souhaite me focaliser sur un produit particulier de cette filière : le CBD (cannabidiol).

En préambule, un effort de définition s’impose, tant la confusion peut régner sur ce sujet.

Quand on évoque le chanvre, le CBD ou le THC, on parle de deux espèces de plantes très proches biologiquement. Si le chanvre est un produit issu du traitement de la fibre de ces plantes, le CBD et le THC sont des molécules provenant des fleurs.

Lorsque l’on parle de cannabis récréatif, on parle du THC. Rappelons-le pour éviter tout amalgame : le CBD n’a strictement rien à voir avec le THC. Nous parlons bien de deux molécules différentes, avec des effets différents. Si le THC est considéré, à juste titre, comme un psychotrope, avec tous les risques d’addiction afférents d’un point de vue médical, le CBD n’engendre pas d’addiction et les effets psychotropes sont inexistants. À ce titre, il n’est pas recherché lors des tests de dépistage des stupéfiants par les forces de l’ordre.

Lorsque l’on parle de CBD en tant que produit commercialisé, on parle d’extrait de fleur de chanvre, que certains trouvent apaisant, antistress, présentant un taux de THC inférieur à 0, 2 %, très largement au-dessous du seuil à partir duquel se manifestent les effets psychoactifs.

Pourtant, une certaine confusion existe parfois dans les esprits. Lorsque l’on regarde l’évolution de la législation autour du CBD, on constate que cette confusion règne jusqu’au sommet de l’État, et ce dès l’apparition de la filière en France, au grand dam du secteur agricole.

Les premières boutiques de vente de CBD apparaissent dans notre pays en 2018. La police en a fermé de manière régulière, en raison d’une mauvaise interprétation d’un arrêté de 1990, daté et inadapté à ce nouveau marché.

Pour y remédier, en juin 2018, la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives a eu la brillante idée de distinguer le CBD synthétique du CBD récolté naturellement.

Sans même mentionner le côté scientifiquement inepte de cette distinction, celle-ci a mis la France en situation de non-respect du droit européen, non-respect confirmé par la Cour de justice de l’Union européenne en novembre 2020, en raison d’une entrave aux principes d’égalité devant la loi et de libre-échange au sein de l’Union.

Pour y remédier, le Gouvernement a eu une nouvelle idée plus brillante encore, donnant lieu à un arrêté en décembre 2021 : autoriser le CBD en tant que molécule, mais interdire la commercialisation de la fleur de chanvre ainsi que son utilisation en infusion.

Ce nouveau trait – bien français – de génie administratif n’a pas mis longtemps à recevoir le jugement qu’il méritait, à savoir une suspension par le Conseil d’État en janvier 2022. Le jugement au fond est encore attendu.

Ces deux décisions du Gouvernement témoignent bien d’un malaise sur le sujet, d’une confusion, d’une instrumentalisation de la filière CBD à finalité morale et d’une forme de déni de la science. Nous le disons et le répétons : le CBD n’est pas une drogue, même s’il contient des traces infimes de THC.

Il faut d’urgence en finir avec cette confusion entretenue à dessein, car des emplois et des filières agricole, industrielle et commerciale sont en jeu. Le CBD satisfait la demande de 7 millions de consommateurs, au travers de 1 800 boutiques spécialisées, et représente plus de 30 000 emplois si l’on prend en compte la production, la distribution et la commercialisation. Tous ces commerçants vivent une grande insécurité à cause de ces revirements réglementaires et craignent pour leur avenir.

Si, au contraire, on en finissait avec cette confusion permanente et que l’on soutenait réellement la filière, on pourrait créer des dizaines de milliers d’emplois supplémentaires.

Le CBD n’est ni une drogue ni un produit addictif. Il est utilisé dans toutes les tranches de la société, à tous les âges. Les Françaises et les Français aiment ça !

Madame la secrétaire d’État, finissons-en avec la confusion permanente et revenons à la science, laquelle fait bien la distinction entre les molécules du THC et du CBD. Permettons l’essor de toute une filière composée d’emplois locaux et de commerces de proximité. Le pouvoir réglementaire est entre vos mains : utilisez-le à bon escient !

Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Duranton

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, lorsqu’on additionne toutes les vertus du chanvre, on ne peut être que conquis.

Aucune autre plante ne semble cumuler autant d’avantages, ne coche autant de cases en ce qui concerne les bénéfices environnementaux et économiques.

Nous sommes tous d’accord pour dire que le chanvre – cela a déjà été avancé par mes collègues – est avant tout une plante consommant peu d’eau. Au sortir d’une année marquée par la sécheresse, alors que la question de la préservation de la ressource en eau est de plus en plus aiguë, cet atout est considérable.

Notre climat est particulièrement propice à son développement ; ce dernier est rapide : entre la graine et la récolte, il ne s’écoule que quatre mois, pour un rendement maximal.

Cette plante n’a pas besoin d’herbicides, de fongicides ou d’insecticides. Là encore, c’est une bonne nouvelle pour la ressource en eau : pour se développer, cette plante n’a pas besoin de polluer les nappes phréatiques avec des traitements ou des intrants chimiques.

Autre atout : cette plante est tout indiquée dans la rotation des cultures. En effet, elle régénère la terre et permet, à la culture suivante, un gain de rendement de 5 % à 10 % pour les céréales.

En outre, le chanvre est un excellent piège à carbone ; on considère qu’un hectare de chanvre absorbe au moins autant de CO2 qu’un hectare de forêt.

Le chanvre a également l’avantage d’intéresser de multiples secteurs, ce qui lui garantit de nombreux débouchés, comme mes collègues l’ont déjà indiqué.

Dans l’alimentaire, les graines de chanvre et l’huile de graines sont des compléments alimentaires reconnus pour l’humain comme pour l’animal.

Dans l’industrie cosmétique, de nombreux produits utilisent de l’huile de graines de chanvre, dont les vertus sont reconnues.

Dans le bâtiment, la laine de chanvre est l’un des isolants naturels les plus efficaces. De même, le béton de chanvre est de plus en plus reconnu pour ses qualités naturelles.

Dans l’industrie automobile, le lin et le chanvre ont de nombreuses propriétés communes ; on les retrouve dans les matériaux composites.

Dans l’industrie textile, les tiges de chanvre, possédant une forte résistance, peuvent être utilisées pour faire des vêtements et des cordages.

Dans mon département, l’Eure, une coopérative du Neubourg vient d’inaugurer une toute nouvelle usine de teillage du lin : la French Filature. C’est une petite révolution dans le milieu textile. En effet, la Normandie, terre de lin, détient la moitié des surfaces de culture en Europe, mais elle n’avait plus aucune filature, le lin étant systématiquement expédié vers l’Asie. Avec cette filature, on peut désormais produire pour l’habillement du lin 100 % tracé made in France. Cette usine représente un investissement de 5 millions d’euros, qui va permettre de produire plus de 250 000 tonnes de fils de lin par an. À l’avenir, cette filature pourrait aussi servir au filage du chanvre.

En Normandie, l’enjeu est réel : 10 500 agriculteurs ont plus de 60 ans et se préparent à partir à la retraite d’ici à 2028. Autrement dit, un agriculteur sur trois va cesser son activité et devra être remplacé.

La culture du chanvre pourrait constituer un marché extrêmement prometteur, ouvrir de nouveaux horizons à nos agriculteurs et, même, motiver les plus jeunes à s’installer ou à reprendre les exploitations familiales.

Tout bien considéré, cette plante a un seul inconvénient, mais pas des moindres : il faut maîtriser et limiter son taux de THC, cette substance psychotrope qui la différencie de la marijuana. En dépit des propriétés formidables de cette plante, de ses nombreuses applications et de toutes ses perspectives prometteuses, il nous faut donc faire preuve de prudence sur les produits de consommation à base de cannabidiol.

En effet, le CBD n’est pas classé comme un stupéfiant, mais il demeure tout de même une substance à effet psychoactif, dont les risques pour la santé des consommateurs n’ont pas encore été complètement évalués. Malgré la pression de tout un secteur et le fait que ce sont les cultivateurs de chanvre de pays étrangers qui profitent à l’heure actuelle de notre marché intérieur, nous devons approfondir nos connaissances scientifiques sur le CBD avant de délimiter un cadre législatif.

Le CBD est autorisé à la commercialisation en France, mais des progrès doivent être faits pour mieux contrôler les produits mis sur le marché. La filière, qui voit dans ce débouché « bien-être » une opportunité de développement, pousse pour établir des normes, pour procéder à des contrôles de teneur, mais aussi pour encadrer les méthodes d’extraction et d’analyse, et fixer des seuils réglementaires transitoires.

Ce sujet est technique, mais il est fondamental et ne supporte pas l’approximation. En effet, lors de l’extraction du CBD de la plante – le chanvre –, il existe un risque, si l’extraction est mal maîtrisée, de concentrer l’extrait en THC. Or le seuil de toxicité aiguë de celui-ci est très bas.

Une réflexion interministérielle en cours vise à délimiter le cadre d’une politique de contrôle pour écarter du marché les produits les plus problématiques ; le ministère de la santé s’interroge sur la toxicité du CBD, le ministère de l’intérieur sur son caractère addictif. La proposition de résolution prévoit des orientations intéressantes sur une telle politique de contrôle ; elles méritent d’être approfondies.

L’Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA, ou EFSA, selon l’acronyme anglais) procède actuellement à des évaluations plus précises sur le CBD. Nous gagnerions, sans nul doute, à définir nos politiques publiques sur la base de ces données scientifiques affinées, même si les résultats de ces études ne seront pas connus avant plusieurs mois.

En outre, il faut être attentif à ce que le développement de la filière CBD n’assèche pas mécaniquement, par sa rentabilité, les autres débouchés, porteurs de souveraineté alimentaire ou énergétique.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI s’abstiendra sur cette proposition de résolution.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si, depuis la nuit des temps, la culture du chanvre a accompagné l’histoire de l’humanité, cette plante a bien failli disparaître au XXe siècle avec l’arrivée de la pétrochimie. La France est restée le seul pays à maintenir sa production. C’est pourquoi elle est leader sur le marché européen.

La nécessité actuelle de produire sain, sûr, durable et accessible à tous remet cette plante au goût du jour. Elle répond parfaitement aux attentes sociétales et environnementales, ne nécessitant pas de produits phytopharmaceutiques, d’irrigation et d’organismes génétiquement modifiés (OGM). Le chanvre est un réservoir à biodiversité et absorbe autant de CO2 que la forêt. De plus, sur notre territoire, la filière est, de la sélection variétale à la transformation, 100 % française. Ajoutons que les produits qui en sont issus sont compostables ou recyclables en fin de vie.

Toutefois, cette culture entraîne un travail important. Elle nécessite souvent de quatre à sept passages d’outils agricoles et du matériel spécifique très coûteux. La récolte est donc un frein au développement du chanvre auprès des agriculteurs.

Le chanvre est probablement la plante la plus polyvalente connue de l’humanité. Elle n’est malheureusement connue du grand public que par sa fleur !

Dans le secteur du bâtiment, le recours au chanvre y est en expansion depuis plusieurs années du fait de ses qualités en matière de régulation thermique, de résistance au feu ou de légèreté. L’interprofession se fixe comme objectif majeur la construction du village olympique de Paris 2024 avec du chanvre. Le recours à la paille ainsi qu’aux fibres de lin et de chanvre sera notamment accru ; il pourrait alors représenter un débouché important et une vitrine médiatique forte pour la filière.

Avec mes collègues de la délégation sénatoriale aux entreprises, j’ai visité, en mars dernier, l’entreprise de ciment Vicat située à Feyzin, dans la métropole de Lyon, au cœur de la vallée du Rhône. La solution de blocs de chanvre à emboîtement conçue par Vicat a été primée par l’Institut français pour la performance du bâtiment. Cette solution brevetée utilise des granulats de chènevotte et un liant à base de ciment, ce qui lui confère des performances exceptionnelles. Cela représente un débouché important pour ce secteur en total renouvellement.

Plus généralement, la culture du chanvre peut représenter l’un des piliers de notre réindustrialisation écologiquement responsable.

Elle peut être utilisée dans la filière de la construction locale, s’appuyant sur les cultures durables du chanvre et du bois. Elle peut intéresser l’industrie textile locale, étant beaucoup plus économe en eau et en intrants que celle du coton. Elle peut être employée dans le développement des bioplastiques, plus légers et compostables, ou dans la réinvention de la filière papier. Elle peut être exploitée pour le développement de protéines végétales, afin de diversifier notre alimentation. Elle peut servir dans les industries cosmétiques, pharmaceutiques et de bien-être.

Néanmoins, cette filière à usage industriel n’a pas bénéficié du plan de relance ; l’examen de ce texte me donne l’occasion de le souligner. En effet, les projets n’étaient pas prêts. Or l’accompagnement de l’État est nécessaire pour la massification industrielle de la filière. Cette dernière a l’avantage d’être en phase avec les objectifs de neutralité carbone de la France, tout en étant une industrie au savoir-faire local bien implantée territorialement.

Dans le secteur textile, le chanvre est une solution écologique qu’il est urgent de déployer pour transformer le modèle de production. Pour cela, des investissements industriels importants sont nécessaires.

La rémunération des producteurs est également un enjeu majeur pour permettre aux chanvrières de répondre à la demande en hausse face à de tels débouchés, et ne pas freiner leur développement.

En outre, si nous voulons que les qualités du chanvre et le dynamisme de sa filière soient reconnus, il faut accompagner le développement des matériaux biosourcés dans le cadre de la rénovation énergétique des bâtiments. Former, informer, inciter !

Madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le chanvre doit être au cœur de la relance de notre économie, pour accroître notre souveraineté, renforcer nos territoires et réduire les impacts environnementaux de nos activités. Qu’attendons-nous ?

Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le groupe CRCE votera en faveur de cette proposition de résolution visant au développement économique de la filière du chanvre et à l’amélioration de la réglementation des produits issus de ces plantes.

Tout devrait assurer un développement majeur de la culture et de la transformation du chanvre dans notre pays. Nos collègues l’ont déjà dit : la plante et sa culture sont parfaitement adaptées au climat français, consomment peu d’eau et d’intrants, n’entraînent pas de destruction des sols – bien au contraire – et retiennent efficacement le carbone.

Les usages sont variés, cela a également été dit : tissu, nourriture, bâtiment, substitut naturel au plastique et – bien sûr – vertus thérapeutiques.

Dès lors, pourquoi de telles opportunités ne se concrétisent-elles pas, ou, en tout cas, pas assez ?

La raison est qu’une variété de chanvre, à savoir le cannabis, produisant une fleur aux effets psychotropes, est considérée comme un stupéfiant. Au motif de combattre cette plante et son usage, les réglementations sont restrictives, bien au-delà de ce qui serait nécessaire ; elles sont également instables, freinant le développement de cette filière très utilisée pour la transition écologique.

Pourtant, il existe désormais – nous le savons, mais il faut le rappeler – des variétés avec un très faible taux de THC, sans effets psychotropes et stupéfiants. De surcroît, on sait qu’un autre principe actif, le CBD (cannabidiol), a des propriétés apaisantes, produisant, dans certains cas, un effet sur des douleurs que d’autres formes de produits ne parviennent pas à affaiblir. Il est issu d’une variété unique de cannabis, cannabis sativa L.

On ne sait pour quelle raison, dans le pays de la rationalité, on a instauré une réglementation aussi peu intelligente, et qui n’est cohérente ni avec les exigences de la législation contre les stupéfiants ni avec notre capacité à développer dans tous les domaines l’usage du chanvre, consommation de CBD comprise.

Soyons clairs : nous n’ouvrons pas ici ni ne contournons le débat sur la légalisation du cannabis. Le sujet est tout autre ; il ne faut pas entretenir la confusion. Pourtant, chaque fois que le chanvre est évoqué, j’ai l’impression que nous avons les yeux rivés, avec une sorte d’angoisse, sur le cannabis. Je le répète : il faut avoir une attitude rationnelle et ne pas tout confondre.

Sur la réglementation du CBD, nos collègues ont déjà évoqué les imbroglios, les enjeux, les incompréhensions, comme nous-mêmes l’avons fait maintes fois dans cet hémicycle. À mon sens, en l’état actuel de la situation, il faut nous en tenir à la réglementation européenne. Les autres pays ne sont pas plus insouciants par rapport aux risques de santé ou au problème des stupéfiants.

Il faut nous saisir de cette réglementation, l’adapter, de manière claire, à notre pays et permettre, en particulier, l’usage direct de la fleur et des tisanes à base de cette plante, car ces dernières ne sont pas stupéfiantes.

J’entends nos collègues nous répliquer que l’Europe s’interroge sur la révision de cette législation. Prenons cette dernière telle qu’elle est : nous la ferons évoluer quand l’Europe l’aura fait évoluer ! L’argumentaire prétextant qu’il faut attendre l’Europe avant de faire évoluer une réglementation, nous l’avons entendu au sujet des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft)… et nous attendons toujours ! Je suggère d’agir dans le cadre de la législation actuelle et de la faire évoluer le moment venu.

Cela suppose de développer, conformément à l’objectif mentionné dans la proposition de résolution, des organes de contrôle. Ils donneraient l’occasion de se pencher sur les tests de dépistage des stupéfiants, certains séparant désormais les agents actifs – cannabis d’un côté, CBD de l’autre – selon les teneurs en THC. Établir une cartographie des plantations de chanvre permettrait, d’une part, de contrôler plus facilement les cultures illégales et, d’autre part, de voir comment la filière évolue pour vérifier si elle est au rendez-vous de son développement.

Je voudrais insister sur un point : la consommation de CBD en France, qui se développe énormément, provient à 90 % de produits de l’étranger. Franchement, c’est aberrant, et d’autant plus aberrant qu’il est répété à longueur de temps qu’il faut regagner notre souveraineté…

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Mes chers collègues, pour les autres usages du chanvre, le consensus me semble assez large et d’aucuns auront peut-être l’occasion de nuancer leur propos.

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Daphné Ract-Madoux

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les multiples qualités du chanvre semblent, ce matin, faire l’unanimité. Mon propos reprendra peu ou prou ce que vous avez précédemment entendu dans les différentes interventions.

Des tout premiers livres imprimés au XVe siècle aux voiles de bateaux qui ont permis de découvrir l’Amérique, le chanvre a eu, au fil des siècles, le vent en poupe. La culture du chanvre a ainsi, discrètement mais sûrement, accompagné notre histoire. Fleurs, fibres, granulés ou chènevottes, la plante, sous toutes ses formes, est utilisée dans des secteurs aussi nombreux qu’éclectiques : agriculture, pharmacie, BTP, alimentation, cosmétiques, textile et, même, oisellerie.

De 2900 avant notre ère à la fin des années 1930, la culture millénaire du chanvre est un impondérable des sociétés humaines. Le chanvre est même qualifié de produit de première nécessité, au même titre que le pain, jusqu’au XIXe siècle !

Pourtant, peu avant la moitié du XXe siècle, cet âge d’or se termine : la filière dépérit progressivement, souffrant de la concurrence des plastiques et de l’amalgame fait avec la production du cannabis, avant de connaître un nouveau souffle dans les années 1990.

Mes collègues du groupe Union Centriste et moi-même souhaitons d’ores et déjà être clairs : nous voterons aujourd’hui cette proposition de résolution afin de promouvoir la filière économique du chanvre. THC, cannabis, substances psychotropes, là n’est pas le sujet.

Oui, la culture du chanvre, sous ses différentes formes, est une filière économique d’avenir pour notre pays. Leader européen en la matière, la France peut voir plus grand. La filière doit, à ce titre, être pleinement soutenue dans le cadre du plan France 2030.

Oui, nous pouvons nous appuyer sur le chanvre pour contribuer, dès maintenant, à bâtir notre transition écologique. Préservant la qualité de nos sols, faiblement vorace en eau et requérant peu ou pas de produits phytosanitaires, le chanvre présente des qualités écologiques évidentes, que nous ne pouvons ignorer.

Oui, la culture du chanvre peut être un atout pour notre agriculture en offrant une diversification des activités et des revenus complémentaires.

Non, le chanvre n’est pas portion congrue dans l’équation économique actuelle. En 2020, cette culture comptait près de 1 414 producteurs et représentait environ 30 000 emplois directs et indirects.

Dans mon département, l’Essonne, la culture du chanvre passe par l’entreprise Gâtichanvre, laquelle travaille avec près de cent agriculteurs partenaires pour produire 1 000 hectares de chanvre, dont la moitié en bio. Cette société réalise la première transformation de la plante : le défibrage de la paille. Cela permet, par la suite, la production de papier, d’isolants, de routes ou encore de biocomposites. Preuve de la variété des productions de la filière, l’entreprise produit également de la chènevotte, qui alimente les marchés du paillis, de la litière, mais également le bâtiment pour des enduits, bétons et blocs de chanvre. Je tiens à saluer le travail d’excellence fait par l’ensemble des acteurs du groupe, en Gâtinais et, dorénavant, dans les départements limitrophes.

À l’aune des atouts de cette filière méconnue, je souhaite féliciter nos collègues du groupe écologiste pour la qualité de leur travail sur cette proposition de résolution. Loin des clichés éculés et d’un inventaire à la Prévert dépourvus d’intérêt, c’est un texte de qualité, qui permet d’alerter les pouvoirs publics sur les changements nécessaires pour développer sereinement la filière.

Cependant, nous devons rester vigilants et nous assurer que nous posons les bases d’une filière souveraine et écoresponsable, en construisant des écosystèmes économiques locaux et des débouchés industriels en France.

Chers collègues, c’est pour cela que, avec ma collègue Annick Billon et le groupe Union Centriste, je voterai ce texte afin de développer, dès demain, avec exigence et ambition, la filière chanvre.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et INDEP.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il a fallu attendre un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, en 2020, pour que la France autorise enfin les extraits de chanvre et le CBD en tant que molécule. Néanmoins, il nous faudra encore compter sur le Conseil d’État pour que la commercialisation de la fleur de chanvre soit possible.

Les auteurs de la proposition de résolution l’ont souligné, ce dont je tiens à les remercier : les revirements insécurisent la filière, laquelle représente déjà 30 000 emplois directs et indirects. Si ces aléas juridiques ne cessent pas, la France prendra un retard considérable dans le développement de la culture du chanvre, alors même que notre pays en est le premier exploitant d’Europe grâce à des conditions climatiques favorables.

Bien entendu, nous savons qu’en toile de fond il y a l’image du chanvre et de ses usages psychotropes. En effet, les enjeux sanitaires n’échappent à personne.

Mon groupe soutient toutes les politiques de lutte contre les addictions aux stupéfiants. La consommation régulière de cannabis met en péril la santé physique et psychique de nombreux jeunes ; il est important de le souligner. Toutefois, ne nous trompons pas de débat, car la légalisation du cannabis en est un autre.

Par conséquent, je le rappelle clairement : ce qui nous intéresse, au travers de ce texte, c’est l’avenir des produits CBD dépourvus d’actif psychotrope ou contenant moins de 0, 3 % de THC. Il s’agit d’apprécier le large potentiel de développement du chanvre au regard de ses atouts sur le marché : textile, construction, papier ; il ne faut pas non plus oublier ses vertus cosmétiques et pharmaceutiques.

Face à cela, comme nous y invitent les auteurs de la proposition de résolution, l’agriculture française pourrait profiter d’une filière plus dynamique encore, à condition que le Gouvernement prenne une position claire et éclairée.

Mes collègues ont parfaitement présenté les qualités du chanvre : économe en eau, adapté pour la rotation des cultures, et offrant une qualité de drainage. Son exploitation peut donc s’inscrire dans une démarche durable et bénéficier de labels, comme cela est proposé.

En outre, le développement du chanvre peut être, dans certains territoires ruraux, un pilier de la reconquête industrielle.

Le RDSE souhaite toutefois poser quelques conditions.

La première est que son exploitation ne concurrence pas d’autres cultures essentielles à l’objectif de souveraineté alimentaire, que nous sommes nombreux à défendre sur ces travées. Sa bonne rotation avec d’autres cultures apporte une première garantie.

La seconde condition est que sa production et sa commercialisation répondent à des critères de sécurité et de contrôle.

L’interprofession se dit prête à un contrôle renforcé des parcelles de chanvre et à leur déclaration pour la traçabilité des fleurs. Je retiens également les propositions, présentes dans le texte, relatives à la conduite de tests sur les teneurs en CBD et en THC des produits bruts.

Les flux de marché doivent être surveillés. Pour cela, le développement de la filière doit s’exercer dans un environnement réglementaire sécurisé sur le plan national – comme je l’ai dit – ainsi que sur le plan européen par une uniformisation du taux de THC.

Le fameux arrêt Kanavape impose à chaque pays, au nom de la libre circulation des marchandises, la reconnaissance des teneurs légalement fixées par ses partenaires, ce qui crée des normes différentes d’un pays à l’autre. Cette situation peut compliquer la tâche des services de contrôle, que ce soit la douane ou la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes.

Au titre des services que les producteurs de chanvre pourraient rendre, au travers du stockage de carbone ou le développement de matériaux biosourcés, je souhaite que l’amont de la filière soit soutenu comme le sont les autres filières.

Mes chers collègues, la culture du chanvre présente un intérêt certain pour notre économie. Disons-le aussi : ses produits dérivés répondent à une demande sociétale autour du bien-être. Dans ces conditions, la majorité de notre groupe approuve la proposition de résolution et vous demande, madame la secrétaire d’État, de ne pas laisser la filière perdre pied au profit d’autres pays mieux préparés.

Applaudissements sur les travées des groupes RDSE, INDEP, UC, SER, CRCE et GEST.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui la proposition de résolution de nos collègues du groupe écologiste, lesquels souhaitent alerter le Gouvernement sur les contraintes réglementaires pesant sur la culture du chanvre.

Je vous surprendrai certainement en vous disant que je partage une partie de leurs préoccupations et de leurs attentes.

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

En effet, le chanvre est une plante disposant d’un formidable potentiel d’avenir, mais dont les débouchés sont actuellement limités pour des raisons dont la logique m’échappe.

Pour nos agriculteurs, elle représente une possibilité de revenus complémentaires. Je parle bien de revenus complémentaires : il serait totalement illusoire d’imaginer qu’elle se substitue aux autres cultures.

Pour notre pays, le chanvre peut être un des moyens d’atteindre une partie des objectifs en matière de transition énergétique, grâce à son utilisation massive dans le cas de la construction et de la rénovation des logements.

Toutefois, la proposition de résolution de nos collègues met l’accent sur les principes actifs de cette plante et sur les usages récréatifs qu’elle permet. C’est sa principale faiblesse.

Or son utilisation dans de nombreux secteurs de l’économie est possible, en particulier le bâtiment, comme je viens de le souligner.

Beaucoup de chemin a été parcouru depuis la première rénovation d’une maison d’habitation avec un enduit constitué de chaux et de chanvre en 1986.

La filière est aujourd’hui parfaitement structurée avec un unique producteur de semences certifiées, qui investit puissamment dans l’innovation variétale afin de créer les nouvelles variétés de haute qualité adaptées aux marchés.

L’association Construire en chanvre est, quant à elle, un acteur majeur pour les professionnels du bâtiment. Elle est à l’origine des règles professionnelles d’exécution d’ouvrages en bétons de chanvre, qui constituent le premier et, à ce jour, le seul texte de référence sur l’utilisation du chanvre dans le secteur de la construction.

Dans ce cadre sécurisant et sécurisé, de plus en plus d’agriculteurs optent pour cette voie de diversification agronomique, respectueuse de l’environnement et prometteuse en termes de retombées économiques.

Mon département, l’Essonne, est d’ailleurs l’un des plus importants producteurs de chanvre industriel, avec un millier d’hectares en culture et une centaine d’exploitants agricoles mobilisés.

Entreprise essonnienne emblématique, Gâtichanvre assure le défibrage de la paille, première étape de la transformation du chanvre permettant la réalisation d’isolants, d’enduits, de bétons et de blocs de chanvre.

Comment, dans ces conditions, expliquer les difficultés de mise en œuvre des produits issus du chanvre dans le bâtiment ?

Certes, la décision de l’Agence Qualité Construction, qui avait rejeté l’an dernier les règles professionnelles édictées dans le but de massifier la construction en chanvre, est derrière nous. Et nous devons nous féliciter du soutien apporté aux nouvelles règles professionnelles, dont la validation devrait intervenir prochainement.

Mais une autre entrave à l’usage du chanvre dans le bâtiment résulte de l’impossibilité pour les maîtres d’ouvrage de valoriser financièrement le béton de chanvre par le biais des certificats d’économies d’énergie. Ce dispositif requiert en effet une certification sur les matériaux employés, garantie par l’Association pour la certification des matériaux isolants. Les règles professionnelles ne sauraient tenir lieu de certification.

Or les performances thermiques remarquables du chanvre, ses capacités hygrothermiques inégalées, son pouvoir d’absorption des sons et sa résistance au feu sont amplement démontrés.

Un sujet d’inquiétude supplémentaire tient au fait que la plupart des maîtres d’œuvre sont des entreprises artisanales ou des PME spécialisées ne disposant pas toujours des moyens de financer la démarche de qualité permettant l’obtention du label « reconnu garant de l’environnement ». Les maîtres d’œuvre ne peuvent donc prétendre aux aides de l’État au titre de la rénovation de l’habitat.

En outre, la filière manque singulièrement de moyens pour financer des fiches de déclaration environnementale et sanitaire, nécessaires au respect de la nouvelle réglementation environnementale 2020, la RE2020.

Tous ces freins normatifs ont une conséquence majeure : l’amélioration de la performance énergétique des bâtiments n’est obtenue que par l’emploi de matériaux issus de grands groupes industriels, dont l’impact environnemental et énergétique à la production est plus défavorable que pour les matériaux biosourcés.

Alors que l’optimisation des ressources naturelles est indispensable pour assurer la transition énergétique et que la France peut se prévaloir d’être le leader européen de la production de chanvre, je souhaiterais que le Gouvernement prenne des initiatives importantes pour obtenir la levée des contraintes pesant sur son utilisation dans le secteur de la construction.

En particulier, il me paraît indispensable d’accompagner cette levée des restrictions par des mesures fiscales propres à soutenir le développement significatif des filières locales biosourcées, dont celle du chanvre. Permettez-moi de vous demander, madame la secrétaire d’État, d’engager une concertation interministérielle sur le sujet.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, secrétaire d’

C’est fait !

Debut de section - PermalienPhoto de Laure Darcos

Mme Laure Darcos. C’est à ces conditions que notre pays pourra participer pleinement et rapidement à la transition énergétique, rendue indispensable par la hausse exponentielle du prix de l’énergie, dont souffrent nos concitoyens et des pans entiers de notre économie.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Marie-Noëlle Lienemann ainsi que MM. Guillaume Gontard et Patrick Kanner applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, pour commencer, je tiens à saluer les auteurs de cette proposition de résolution, notamment notre collègue Guillaume Gontard et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Alors que le sujet de la filière chanvre semble être récemment revenu sur le devant de la scène, il est important de rappeler qu’il s’agit d’une culture très ancienne, qui a connu une institutionnalisation en France dès 1932, avec la création de la Fédération nationale des producteurs de chanvre.

Grâce à la multiplicité de ses usages et ses nombreuses vertus, la filière chanvre possède déjà un poids économique non négligeable et, surtout, des perspectives de développement particulièrement importantes.

En effet, en 2020, la filière française du chanvre comptait plus de 1 400 producteurs pour 17 000 hectares exploités, avec une surface de production multipliée par trois en quinze ans. Grâce à ce dynamisme, la France est le premier producteur européen de chanvre et le quatrième mondial.

Pour une fois – je pense notamment aux auteurs du récent rapport sénatorial sur la compétitivité de la ferme France –, nous pouvons collectivement nous féliciter du dynamisme de cette filière.

Malheureusement, cette culture a toujours eu mauvaise presse, principalement à cause de la production de sa fleur aux effets psychotropes, le cannabis. Avec les connaissances scientifiques et techniques que nous avons aujourd’hui, il convient de sortir des clichés et de se rendre compte de la diversité des usages et des bénéfices du chanvre.

En tant qu’agriculteur, je souhaite insister sur les opportunités agroécologiques de la production du chanvre. En effet, cette dernière ne nécessite ni insecticides, ni fongicides, ni herbicides. Elle est également particulièrement économe en eau.

Par sa hauteur et sa densité, cette plante est également un formidable réservoir à biodiversité, qui peut pleinement s’inscrire dans l’indispensable rotation des cultures et dans l’entretien des sols.

C’est donc une culture particulièrement saine, qui peut être une puissante créatrice de vocations pour les jeunes agriculteurs ayant la volonté de développer une agriculture plus vertueuse sur le plan environnemental. Cela apporterait une partie de la solution aux problèmes du renouvellement des générations.

Face aux difficultés économiques que rencontrent de nombreux agriculteurs, le prix de revente du kilo de fleurs CBD, fixé à environ 600 euros pour l’année 2022, peut également être une opportunité de développement pour le monde agricole.

Bien sûr, pour permettre cela, et c’est l’objectif principal de cette proposition de résolution, il est nécessaire d’avoir une réglementation adaptée à la filière, notamment en permettant la vente de fleurs et de feuilles brutes, et un juste accompagnement par les pouvoirs publics.

Sur ces derniers points, je rejoins pleinement les recommandations figurant dans la proposition de résolution, tout particulièrement sur l’ouverture du label Agriculture biologique à cette filière et l’obligation de déclaration des cultures pour être en compatibilité avec les obligations de la PAC.

Comme pour toutes les filières, la labélisation et la mise en conformité avec les critères PAC permettront de réaliser un cadrage et, ainsi, d’éviter des dérives, qui peuvent être facilement associées à cette culture.

Enfin, sur un plan économique plus global, il est important de le souligner : grâce à la diversité de ses usages, le chanvre peut avoir des perspectives de débouchés dans des filières très variées.

Mon collègue Gilbert-Luc Devinaz a justement évoqué les secteurs du textile et du bâtiment. Nous pourrions également citer l’alimentation humaine, avec des graines particulièrement riches en protéines, l’alimentation animale, avec les graines de chènevis, ou, bien sûr, la filière papier.

Avec près de 7 millions de consommateurs, le CBD peut également être une réelle opportunité pour les buralistes, dont le nombre a diminué de 27 % en vingt ans et qui possèdent l’expertise et les compétences pour assurer la vente d’un tel produit.

Ainsi, madame la secrétaire d’État, alors que le Gouvernement s’est engagé à plusieurs reprises à soutenir le développement de la filière du chanvre, il est aujourd’hui essentiel d’apporter une clarification sur la réglementation autour du CBD.

Comme le prévoit l’alinéa 49 de cette proposition de résolution, seuls un appui aux acteurs de la filière et une précision sur le cadre légal et réglementaire permettront un réel développement de la filière française du chanvre.

Mes chers collègues, en soulignant sa qualité et ses différents objectifs mis en avant, je vous invite à largement soutenir l’adoption de cette proposition de résolution, comme nous le ferons au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE, RDSE, INDEP et UC. – M. Guillaume Gontard applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Billon

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, si, aujourd’hui, les voiles des monocoques du Vendée Globe ne sont pas constituées de fibres de chanvre, celles de la flotte de Louis XIV l’étaient.

La filière économique et industrielle du chanvre a ainsi connu ses heures de gloire aux XVIIe et XVIIIe siècles, avant de péricliter, la confusion, compréhensible, entre le cannabis et la fleur de chanvre ayant conduit à une marginalisation de sa production.

À partir des années 1990, s’émancipant complètement de l’ombre du cannabis, la filière renaît en s’appuyant sur des acteurs locaux créateurs d’emplois.

Nous examinons aujourd’hui une proposition de résolution présentée par nos collègues du groupe écologiste. Je salue une telle initiative, car elle nous permet de mettre en lumière de belles entreprises dans nos territoires, d’encourager une filière, tout en ne donnant aucun signal en faveur de la légalisation ou de la dépénalisation du cannabis.

Agriculture, textile ou BTP, la filière du chanvre sous ses différentes expressions a ainsi un véritable potentiel économique, qu’il ne faut pas négliger.

Cela fait plus de vingt ans que le secteur de la construction et du bâtiment s’appuie sur le chanvre, tant pour ses propriétés isolantes que pour la restauration d’habitations. Je tiens à saluer à ce titre la création, voilà bientôt vingt-cinq ans, de l’association Construire en chanvre, qui œuvre pour la valorisation de la filière.

Depuis deux décennies, c’est ainsi toute une économie qui s’est développée pour favoriser l’utilisation du chanvre en s’appuyant sur ses qualités hygrothermiques, sa durabilité et sa très bonne régulation de l’humidité. Qu’il s’agisse de chènevotte ou de la fibre de chanvre, cette plante possède des débouchés économiques qu’il convient de valoriser.

En Vendée, cela fait plus de dix ans que la coopérative Cavac, que je connais bien, a fait du chanvre un matériel essentiel dans le cadre de la construction biosourcée. À l’heure où la rénovation énergétique des bâtiments est un pilier de la relance verte appelée de ses vœux par le Gouvernement, il nous faut donner les moyens aux entreprises de la filière.

Les matériaux biosourcés doivent contribuer à la décarbonation de nos bâtiments. Cette proposition de résolution pourrait, à ce titre, être utilement complétée par trois dispositifs.

Premièrement, il convient d’élargir la formation des accompagnateurs France Rénov’ aux matériaux biosourcés, afin que les rénovations financées par l’outil MaPrimeRénov’ s’appuient également sur le chanvre.

Deuxièmement, il est nécessaire de mieux valoriser la capacité de stockage de carbone du chanvre, dans le cadre de la stratégie nationale bas-carbone.

Troisièmement, une réflexion doit être lancée au sujet de la mise en œuvre d’un taux de TVA prenant mieux en compte les atouts des matériaux biosourcés.

Pour conclure, je souligne que l’adoption de cette proposition de résolution est un geste fort pour dire clairement notre soutien aux acteurs économiques de la filière : producteurs, coopératives, industriels, ainsi que l’ensemble des transformateurs.

Avec plus de 17 000 hectares en France, il est temps de donner à la filière chanvre un cadre légal stable permettant à l’activité de prospérer durablement et de se développer sainement.

C’est la raison pour laquelle, avec ma collègue Daphné Ract-Madoux et l’ensemble du groupe Union Centriste, je voterai en faveur de cette proposition de résolution.

Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP, RDSE, GEST, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Klinger

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « tout est bon dans le cochon » a-t-on coutume dire. Aujourd’hui, j’ai envie de dire « tout est bon dans le chanvre », à la lecture de cette proposition de résolution !

Au sortir d’un été marqué par la sécheresse et à l’heure des économies de chauffage, le développement en France de la filière du chanvre, plante sobre en eau et aux usages multiples, paraît donc une évidence. C’est une plante qui pousse vite, résiste à la sécheresse et ne réclame pas d’apports en produits chimiques. Les chiffres de la filière démontrent son intérêt.

De moins de 4 000 hectares en 1990, nous sommes passés à près de 22 000 hectares en 2022. Cultiver du chanvre, mais pour quoi faire ? Tout ou presque, si l’on en croit ses zélateurs. Tee-shirts, nappes, papiers, le chanvre est encore utilisé pour produire des fibres textiles et permet aussi de fabriquer du papier sans abattre d’arbres. Est apparu également le béton de chanvre, un matériau de construction biosourcé, dont les propriétés isolantes en font aujourd’hui un précieux atout. Puis des fibres encore plus techniques, notamment dans l’industrie automobile, sont devenues des substituts aux fibres de verre beaucoup plus polluantes.

Les graines riches en protéines sont utilisables dans l’alimentation animale comme humaine.

Cette plante est donc au cœur de nombreuses innovations, d’une forte demande sociale et d’opportunités économiques. J’ai relevé plus de 600 produits dérivés brevetés dans le monde, dont la moitié proviennent malheureusement toujours de Chine.

D’autres pays ont bien compris l’intérêt de cette culture et se sont d’ores et déjà saisis de cette chance de développement. À titre d’exemple, lorsque les États-Unis ont décidé de soutenir la filière, ils sont passés de 9 000 à 33 000 hectares en un an.

À notre tour, nous devons soutenir la filière et créer un écosystème favorable, avec des règles claires. Surtout, dépassionnons le débat autour du caractère psychotrope du cannabis. Fibres, graines… la plante, vous le savez, a aussi des feuilles et des fleurs. Se pose dès lors un problème de réglementation au sujet du chanvre « bien-être », réglementation qui paraît, à ce jour, assez confuse. Autorisée par l’Europe, la commercialisation des fleurs et des feuilles a été suspendue par un arrêté, lequel a été invalidé par le Conseil d’État en janvier dernier. Quant à la Cour de cassation, elle a légalisé la commercialisation de ces produits.

Bref, si nous voulons une nouvelle filière française d’excellence, celle des extraits de chanvre, il s’agit de donner à nos entreprises la possibilité d’investir sereinement et pleinement ces marchés d’avenir, en clarifiant les réglementations applicables aux différents produits finis et en les alignant sur celles de nos homologues européens et britanniques, pour jouer à armes égales.

Si le chanvre a une croissance très simple depuis la plantation jusqu’à la récolte, cette dernière nécessite un matériel spécifique et un temps d’intervention plus long que pour la majorité des cultures, la graine étant fragile et la paille demandant plusieurs interventions avant sa transformation.

La culture du chanvre nécessite donc des outils spécialisés et, partant, des investissements. Or les investisseurs demeureront frileux tant que les règles ne seront pas claires ni pérennes.

La position de la France, si elle reste figée, reviendra donc à favoriser ses pays voisins, sans aucune justification rationnelle.

Voilà un an, nous avons débattu ici même de ce sujet. Le Gouvernement annonçait sa volonté de « mettre en place un cadre réglementaire pour permettre le développement sécurisé de la filière ». Force est de le constater, le dossier n’a pas bougé. Pourquoi attendre ?

La loi relative à la transition énergétique prévoit la conception de bâtiments à énergie positive. Faisons en sorte que ces matériaux de construction biosourcés soient disponibles sur le marché.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, si tout est bon dans le cochon, c’est aussi le cas du chanvre !

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains, RDSE et GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je dois reconnaître au groupe Écologiste – Solidarité et Territoires et à son président, Guillaume Gontard, une constance qui l’honore, puisque le Sénat avait lancé ce débat important sur l’avenir de la filière du chanvre en février dernier, sur son initiative.

Cette proposition de résolution nous permettra d’approfondir les échanges que vous aviez alors eus avec le Gouvernement. Elle montre, par la diversité des soutiens qu’elle a recueillis sur ces travées, toute l’importance de ce sujet, ainsi que sa complexité.

Cela a été dit, il s’agit d’un point de consensus. Toutefois, je me permets de le souligner de nouveau : le chanvre est une filière dont nous devons soutenir le développement, en raison des opportunités qu’elle offre d’un point de vue agroécologique.

Il s’agit en effet d’une culture qui nécessite une quantité relativement limitée d’azote et pas d’irrigation, hors conditions climatiques exceptionnelles, du fait de ses racines profondes.

Elle ne nécessite aucun traitement phytosanitaire, ce qui, du fait également de la biomasse produite, en fait un réservoir de biodiversité d’insectes et d’arthropodes, dont notamment des espèces régulatrices des ravageurs de cultures.

En outre, le chanvre participe à l’allongement des rotations des exploitations de grandes cultures et à la diversité des assolements.

Enfin, l’utilisation de plus en plus répandue de ses produits dans le bâtiment en fait un produit agricole contribuant à stocker du carbone au lieu d’en émettre.

En cela, il sera important de veiller à ce que l’amont agricole soit bien considéré dans le calcul des « crédits carbone » générés. L’enjeu est que les producteurs soient équitablement rémunérés par la vente de ces crédits carbone, ce qui participera à l’attractivité de la culture du chanvre pour les agriculteurs.

Nous veillerons donc à ce que cela soit bien pris en compte par le Groupe scientifique et technique du label bas-carbone dans les méthodologies de calcul, pour le chanvre et, plus globalement, pour les biomasses agricoles valorisées dans les autres secteurs industriels.

Des bruits de conversation se font entendre sur diverses travées.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Je voudrais vous assurer que mon collègue Marc Fesneau œuvre significativement en faveur du développement de la filière au ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, au travers du dialogue constant qu’il entretient avec Interchanvre, l’interprofession.

Le Gouvernement intervient aussi financièrement : outre les aides classiques de la politique agricole commune, la filière chanvre bénéficie d’une aide couplée de 96 euros à l’hectare, si la production est contractualisée et que la variété est certifiée.

Les bruits de conversation persistent.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Les enjeux sont majeurs pour la France, premier producteur de chanvre au niveau européen, mais aussi mondial. Le développement de la filière chanvre n’est d’ailleurs pas uniquement un objectif que nous devons nous fixer en matière agricole et alimentaire, puisque les débouchés qu’elle offre peuvent constituer des atouts intéressants pour notre pays en matière énergétique, écologique ou industrielle.

Les bruits de conversation se font plus intenses.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Chers collègues, je vous demande, par respect, d’écouter Mme la secrétaire d’État !

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Dans un contexte d’accroissement des surfaces, multipliées par trois en dix ans, la culture du chanvre alimente ainsi de nombreux marchés, qui vont de la papeterie à l’automobile, du bâtiment au jardinage, en passant par la plasturgie, l’alimentation animale et humaine ou encore le textile.

J’ajoute – il s’agit d’un point absolument essentiel du point de vue du dynamisme et de la vitalité économique de nos territoires, notamment ruraux – que la filière se caractérise, notamment, par l’existence d’un grand nombre d’acteurs de taille modeste, fonctionnant en circuits courts, avec un ancrage territorial particulièrement fort. J’y suis, comme vous, profondément attachée.

La proposition de résolution examinée aujourd’hui s’inscrit résolument dans cette logique de soutien au développement de la filière chanvre en France. Le Gouvernement estime que cette initiative sénatoriale viendra utilement enrichir les réflexions à mener dans cette perspective.

Le ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire est prêt à continuer à travailler en lien très étroit avec le Sénat sur la dimension agricole du sujet.

J’en viens maintenant au second volet de cette proposition de résolution, qui concerne un sujet dépassant largement le champ de l’agriculture, celui de l’amélioration de la réglementation des produits issus du chanvre.

Il s’agit d’un sujet auquel le Gouvernement apporte une attention toute particulière et sur lequel, loin des caricatures qui peuvent parfois caractériser ces débats – tel n’est pas ici le cas –, nous souhaitons poser les enjeux avec exigence et méthode.

Je voudrais aller dans le sens de ce qui a été dit par plusieurs orateurs. Oui, il existe incontestablement des enjeux autour de la réglementation des produits issus du chanvre, dont la consommation de cannabidiol est naturellement le plus évident, mais pas le seul.

Ces sujets importants ont été posés avec plus d’acuité encore avec la suspension, par le Conseil d’État, du cadre réglementaire global dont la France s’était dotée.

Ce dernier devait permettre le développement sécurisé de la filière agricole du chanvre, ainsi que des activités économiques liées à la production d’extraits de chanvre, à la commercialisation de produits qui les intègrent, tout en garantissant la protection des consommatrices et des consommateurs ainsi que le maintien de la capacité opérationnelle des forces de sécurité intérieure dans la lutte contre les trafics de stupéfiants.

L’absence d’une réglementation claire soulève, il est vrai, un certain nombre de difficultés. J’en citerai trois.

Tout d’abord, je pense à une forme d’instabilité pour les acteurs de la filière, que ce soit le monde agricole et industriel, les laboratoires ou le commerce de détail, qui manquent de visibilité dans la conduite de leurs projets économiques.

Ensuite, si la commercialisation est possible en France, elle concerne une immense majorité de fleurs et d’extraits commercialisés issus de l’importation, ce qui constitue un enjeu pour notre filière et sa place de leader.

Enfin, il s’agit d’assurer la sécurité en termes de consommation. En effet, je tiens à le souligner ici, si le cannabidiol n’est pas classé comme un stupéfiant, il s’agit tout de même d’une substance à effet psychoactif, dont les risques pour la santé continuent d’être expertisés.

Partant de ces constats, je voudrais partager avec vous quelques éléments de réflexion.

Premièrement, que nous dit le Conseil d’État ? Que les produits dont la teneur en tétrahydrocannabinol n’est pas supérieure à 0, 3 % ne revêtent pas un degré de nocivité pour la santé justifiant une mesure d’interdiction générale et absolue de leur vente et de leur consommation.

En effet, à ce stade, il n’a pas été établi que le CBD est dangereux. Mais il n’a pas non plus été établi scientifiquement qu’il ne l’est pas ni dans quelle limite de consommation il ne l’est pas.

C’est la raison pour laquelle je nous invite collectivement à faire preuve de prudence sur ce sujet, mais aussi à suivre le travail scientifique que mène actuellement l’Autorité européenne de sécurité des aliments, car seule la science, me semble-t-il, doit éclairer nos décisions s’agissant d’un sujet aussi délicat. Il s’agit, je crois, du chemin que nous devons emprunter, sans précipitation.

Deuxièmement, je tiens à le souligner, en l’état actuel de la réglementation, les services de police et de gendarmerie sauront rechercher et relever les infractions comme la provocation, même non suivie d’effet, à l’usage illicite de stupéfiants. Il n’est pas acceptable, par exemple, que des publicités en faveur du cannabidiol entretiennent la confusion avec le cannabis, faisant ainsi indirectement la promotion de ce stupéfiant.

En dépit de la suspension de certaines dispositions de l’arrêté du 31 décembre 2021, nous ne sommes donc pas dans un no man ’ s land juridique. Nous sommes bel et bien en mesure de lutter contre tout ce qui peut s’apparenter à la promotion et à la banalisation du cannabis. Il s’agit, je le rappelle, de la manière la plus claire possible, de la position ferme et constante du Gouvernement sur ces sujets.

Naturellement, au-delà de ces réponses, qui sont absolument nécessaires, des réflexions interministérielles sont en cours sur ce qui pourrait constituer une politique de contrôle aboutie de la commercialisation des extraits de chanvre. Certaines des orientations de cette proposition de résolution pourraient d’ailleurs en partie être intégrées dans le cadre de ces réflexions.

Je vois trois enjeux à ces contrôles, qui relèvent de la compétence à la fois de nos services et des services de la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes).

Le premier est de contrôler l’absence de pratiques commerciales trompeuses et de tromperie sur les qualités substantielles du produit relevant du code de la consommation, notamment en cas d’allégations trompeuses, par exemple en matière de santé, non autorisées ou thérapeutiques, en lien avec l’utilisation d’extraits de chanvre.

Le deuxième enjeu est de donner des informations claires aux consommateurs sur les « bonnes pratiques d’utilisation » et sur les publics pour lesquels la consommation d’extraits de chanvre est à éviter, à savoir les jeunes enfants et les femmes enceintes.

Le troisième enjeu concerne la réalisation de contrôles aléatoires sur les produits commercialisés en France, afin de vérifier notamment l’absence de contamination des extraits par le THC et d’éviter ainsi des risques de santé publique. Ces produits n’échapperont pas aux retraits et rappels en cas de non-conformité.

J’ajoute, s’agissant du ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, qu’un nouveau conseil scientifique, piloté par l’interprofession Interchanvre, a été créé en février 2022, afin d’accompagner au mieux les agriculteurs qui souhaitent produire des fleurs de chanvre. Trois groupes de travail ont été constitués sur la génétique, sur l’itinéraire technique du chanvre à destination de la production de fleurs, sur la mécanisation de la récolte des fleurs. Une feuille de route est donc en cours de définition.

Enfin, je tiens tout de même à vous faire partager des interrogations sur les conséquences agricoles, alimentaires et environnementales que pourrait avoir un développement débridé des débouchés liés à la consommation de cannabidiol et autres extraits de chanvre qui se vendent à prix d’or. Allons-nous nous nourrir d’extraits de chanvre ? À ce jour, la production de chanvre à fleurs est bien distincte de celle du chanvre destiné à la production de graines et de fibres.

Il nous appartient ainsi de peser les conséquences d’un tel choix sur les autres débouchés, qui pourraient mécaniquement perdre de leur attractivité, parfois déjà fragile. Je pense en particulier à l’alimentation humaine et animale, enjeu de souveraineté alimentaire, ou encore à l’isolation des bâtiments, enjeu d’indépendance énergétique et de transition écologique. Or ce sont bien ces priorités qui sont à l’agenda des priorités du Gouvernement.

Vous l’aurez compris, mesdames, messieurs les sénateurs, sans en partager toutes les orientations, en particulier s’agissant des préconisations formulées sur la réglementation des produits issus du chanvre, le Gouvernement considère que cette proposition de résolution est très utile au débat et se saisira du vote du Sénat pour poursuivre et accélérer les réflexions indispensables à un développement maîtrisé et ambitieux de cette filière.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et GEST, ainsi que sur des travées du groupe SER. – Mme Daphné Ract-Madoux et M. Emmanuel Capus applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

La discussion générale est close.

Nous allons procéder au vote sur la proposition de résolution.

Le Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu le chapitre XVI du Règlement du Sénat,

Vu le règlement (UE) 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 relatif aux nouveaux aliments, modifiant le règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant le règlement (CE) n° 258/97 du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) n° 1852/2001 de la Commission,

Vu l’article L. 228-4 du code de l’environnement, tel que modifié par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets,

Vu le décret n° 2020-26 du 14 janvier 2020 relatif à la prime de transition énergétique,

Vu le décret n° 2021-1004 du 29 juillet 2021 relatif aux exigences de performance énergétique et environnementale des constructions de bâtiments en France métropolitaine,

Vu l’arrêté du 30 décembre 2021 portant application de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique,

Vu l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 19 novembre 2020 dans l’affaire C-663/18,

Vu l’ordonnance du Conseil d’État du 24 janvier 2022 (n° 460055),

Vu l’avis de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA) du 11 juin 2018 concernant l’arrêté du 22 août 1990 portant application de l’article R. 5132-86 du code de la santé publique pour le cannabis,

Vu le plan d’action 2018-2020 « Une stratégie bioéconomie pour la France »,

Vu le rapport d’étape sur le « chanvre bien-être » du 10 février 2021 de MM. Jean-Baptiste Moreau et Ludovic Mendes, députés, au nom de la mission d’information commune sur la réglementation et l’impact des différents usages du cannabis,

Vu le rapport n° 727 (2017-2018) du 25 septembre 2018 de M. Joël Labbé, sénateur, fait au nom de la mission d’information sur le développement de l’herboristerie et des plantes médicinales, des filières et métiers d’avenir,

Considérant l’insécurité juridique de l’ensemble des acteurs de la filière du chanvre (agriculteurs, industriels, laboratoires, détaillants) ;

Relevant les non-conformités des dispositions réglementaires pour les produits issus du chanvre aux normes législatives du code de la santé publique et à la réglementation européenne ;

Considérant les perspectives économiques offertes par le développement de la filière du chanvre, à savoir une projection d’ici à 5 ans d’un marché de 1, 5 à 2, 5 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel et l’emploi, directs et indirects, de 18 000 à 20 000 personnes supplémentaires ;

Relevant que la culture française du chanvre constitue une diversification de la production des agriculteurs à même de procurer des ressources financières complémentaires ;

Constatant le potentiel d’attractivité de la culture du chanvre pour les nouveaux professionnels du secteur agricole, alors que 45 % des agriculteurs actuels auront pris leur retraite d’ici 2026 ;

Considérant les projections de recettes fiscales et sociales supplémentaires issues de la filière du chanvre estimées entre 0, 7 et 1, 1 milliard d’euros par an ;

Considérant que 90 % des produits à base de cannabidiol (CBD) vendus dans les 2 000 points de vente auprès de 7 millions de consommateurs ne sont pas issus d’une production sur le territoire français ;

Observant le retard économique de la France dans la filière CBD comparativement aux autres États européens et aux États d’Amérique alors même qu’elle est le premier producteur européen de chanvre ;

Constatant l’existence de tests opérationnels permettant la mesure du taux de tétrahydrocannabinol (THC) contenu dans les fleurs de cannabis et la détermination en conséquence de leur légalité ;

Invite le Gouvernement à instaurer une obligation de déclaration des cultures de chanvre et de leur destination compatible avec les obligations de la politique agricole commune (PAC) et permettant la réalisation d’une cartographie de la production française de chanvre dans la perspective d’une vision précise de la réalité de la filière et d’une meilleure compréhension de ses enjeux, mais également afin de permettre la mise en place de contrôles par les autorités publiques et de fournir aux consommateurs la plus grande sécurité sanitaire ;

Propose l’ouverture de l’obtention du label « Agriculture biologique » à tous les produits du chanvre destinés à la consommation humaine et animale ;

Souhaite un élargissement du catalogue des cultivars aux variétés contenant moins de 1 % de THC, tel que pratiqué notamment en République tchèque, en Suisse, en Australie et, vraisemblablement, prochainement aux États-Unis, au Canada et dans de nombreux autres pays ;

Encourage l’autorisation de l’usage de techniques agricoles de base par les producteurs de chanvre, notamment la sélection variétale, le bouturage et la capacité de replantation des graines ;

Invite le Gouvernement à faire de la commande publique, par son devoir d’exemplarité, un levier de la massification des filières biosourcées locales ;

Pour ce faire, dans le respect du droit communautaire, propose la création d’un label public exigeant pour les produits biosourcés français ainsi que la prise en compte des économies d’énergie dans les critères des marchés publics ;

Demande de corréler l’obtention des aides à la rénovation énergétique (MaPrimeRénov ’, éco -PTZ…) à des critères liés aux caractéristiques environnementales des matériaux, en cohérence avec les objectifs de la réglementation environnementale 2020 (RE2020) sur les bâtiments neufs ;

Propose d’intégrer dans l’ensemble des cursus de formation des architectes et des métiers du bâtiment des cours portant sur la construction biosourcée et les critères environnementaux ;

Invite le Gouvernement à lancer une campagne de communication à grande échelle à destination des collectivités territoriales, du grand public et des professionnels, mettant en avant les produits de la bioéconomie, tel que le prévoyait le plan d’action 2018-2020 du ministère de l’Agriculture « Une stratégie bioéconomie pour la France » ;

Appelle le Gouvernement à s’assurer que les représentants de la filière définissent une feuille de route, un planning, et des règles professionnelles stabilisées s’agissant des matériaux biosourcés afin de répondre au cahier des charges de la RE2020 avant la fin de l’année 2022 ;

Propose au Gouvernement la création d’un label qualité textile biosourcé et à terme l’intégration de ce label dans les critères des marchés publics relatifs aux textiles ;

Invite le Gouvernement à une harmonisation des analyses de cycle de vie qui corresponde aux exigences européennes en matière d’empreinte environnementale et à déployer le plus rapidement possible les dispositifs d’affichage environnemental des textiles actuellement imaginés au niveau européen ;

Propose que le Gouvernement mette en place des dispositifs de subventions et d’investissement pour répondre aux besoins d’équipement de la filière française du chanvre afin de contribuer à la décarbonation de l’économie en soutenant l’industrialisation d’une filière vertueuse ;

Appelle le Gouvernement à soutenir la recherche en appui à la filière chanvre industrielle mais également la recherche sur les bienfaits du CBD pour le bien-être, le confort et l’entretien de la bonne santé des consommateurs ;

Propose l’élaboration par le Gouvernement de normes homogènes, pour les procédures d’analyse des produits CBD, pouvant se baser sur le modèle d’agrément du Comité français d’accréditation ou de la norme « appellation d’origine protégée » ;

Suggère au Gouvernement la fixation de normes d’étiquetage et d’un seuil de résidus de THC dans les produits finis issus du chanvre ;

Appelle le Gouvernement à définir des doses journalières recommandées (DJR) non contraignantes de consommation de CBD, à mentionner sur les emballages des produits, afin de prévenir toute forme de consommation problématique des produits à base de CBD ;

Appelle le Gouvernement à mettre rapidement en place un encadrement de l’utilisation du CBD dans les compléments alimentaires ;

Invite le Gouvernement, en ce qui concerne la réglementation européenne dite « Novel Food » (règlement (UE) 2015/2283 du Parlement européen et du Conseil du 25 novembre 2015 précité), à considérer que seuls les produits alimentaires enrichis en CBD au-delà de ce que comporte naturellement la plante (soit 5 % de CBD) relèvent de la catégorie « Novel Food », comme le prévoyait la Commission européenne jusqu’en 2019, date à partir de laquelle tous les produits alimentaires contenant des extraits de chanvre sont considérés comme relevant de la catégorie « Novel Food » ;

Suggère d’ajuster les taux de la taxe sur la valeur ajoutée concernant les différentes typologies de produits contenant du CBD selon leur usage ;

Invite le Gouvernement à catégoriser clairement les produits issus du chanvre à principe actif afin d’identifier ceux relevant du bien-être et de la consommation courante et ceux relevant du soin médical et du régime de la pharmacopée ;

Suggère de mettre à la disposition des forces de l’ordre (douane, police, gendarmerie) des tests portatifs permettant de distinguer précisément les teneurs respectives en CBD et en THC des produits brut ;

Suggère au Gouvernement de préciser les modalités d’autorisation et d’extraction, en particulier concernant le dépassement temporaire en cours de processus de THC et de contrôle de l’élimination des résidus THC ;

Demande l’autorisation de la vente au détail de la fleur et de la feuille de chanvre (du catalogue des variétés autorisées) sous toutes leurs formes ;

Propose au Gouvernement de créer un label de qualité pour les produits français de CBD ;

Invite le Gouvernement à un assouplissement, un complément et une précision du cadre légal et réglementaire pour la filière du chanvre et à un appui des acteurs de la filière pour son développement économique en prenant appui sur les propositions susmentionnées.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mes chers collègues, je rappelle que la conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explication de vote.

Je mets aux voix la proposition de résolution.

J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 55 :

Nombre de votants208Nombre de suffrages exprimés186Pour l’adoption179Contre 7Le Sénat a adopté.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER. – Mme Éliane Assassi, M. Martin Lévrier et Mme Vanina Paoli-Gagin applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à douze heures deux, est reprise à douze heures quatre.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L’ordre du jour appelle l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire chargée d’élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi (texte de la commission n° 112, rapport n° 111).

Avant de vous donner la parole, madame le rapporteur, je demande à ceux de nos collègues qui souhaitent discuter de le faire dans le couloir.

La parole est à Mme le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Puissat

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la commission mixte paritaire (CMP) réunie le 9 novembre dernier est parvenue à un accord sur le projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, un texte auquel le Sénat s’est attaché à donner du sens au-delà d’une prorogation des règles actuelles du régime d’assurance chômage.

Avec mon collègue rapporteur Olivier Henno, je tiens à saluer Marc Ferracci, rapporteur pour l’Assemblée nationale, avec qui nos échanges en amont de la CMP ont été nourris et empreints de sincérité, mais aussi de beaucoup d’exigence.

Je ne reviendrai ici que sur les points les plus saillants du texte qu’il vous est proposé d’adopter aujourd’hui.

À l’article 1er, point central des discussions, la CMP a adopté une rédaction de compromis, qui répond à la volonté du Sénat de restaurer la place des partenaires sociaux dans la définition des règles de l’assurance chômage.

Comme le prévoyait le texte initial, le Gouvernement sera autorisé à prendre par décret en Conseil d’État les mesures d’application du régime d’assurance chômage jusqu’au 31 décembre 2023, ainsi qu’à prolonger l’application du « bonus-malus » sur les contributions d’assurance chômage jusqu’au 31 août 2024.

En revanche, la rédaction issue de la CMP conserve l’apport du Sénat prévoyant que le Gouvernement devra, conformément à l’article L. 1 du code du travail, engager une concertation avec les partenaires sociaux sur la gouvernance de l’assurance chômage, mais aussi sur les conditions de l’équilibre financier du régime, concertation qui pourra déboucher sur une négociation. Le document d’orientation prévu au même article L. 1 invitera notamment les partenaires sociaux à négocier sur l’opportunité de maintenir le document de cadrage issu de la réforme de 2018, que le Sénat avait entendu supprimer.

L’inscription par le Sénat dans la loi du principe de contracyclicité, que le Gouvernement souhaitait mettre en œuvre par décret, a été maintenue par la CMP.

Par ailleurs, afin de revenir à la vocation première de l’assurance chômage, qui est d’indemniser la privation involontaire d’emploi, le Sénat avait introduit deux articles visant à supprimer l’allocation en cas de refus de CDI.

La CMP a pris en compte le risque juridique que comportait la différence de traitement entre différentes catégories de salariés et a donc adopté, à l’article 1er bis AA, une rédaction de compromis concernant à la fois les fins de CDD et les fins de mission d’intérim : dans les deux cas, l’indemnisation du chômage sera supprimée après deux refus d’une proposition de CDI sur un emploi similaire.

Elle a également renvoyé les modalités d’application du dispositif à un décret en Conseil d’État et clarifié son articulation avec le projet personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE). Nous pouvons nous féliciter que le Sénat ait été entendu sur ce point.

Nous serons néanmoins particulièrement attentifs, madame la ministre, à ce que son application donne lieu non pas, comme j’ai pu le lire dans la presse, à une « usine à gaz », mais bien à des solutions opérationnelles, permettant une mise en œuvre effective de cette mesure. La balle est dorénavant dans le camp du Gouvernement !

À l’article 2, le Sénat avait proposé des évolutions substantielles du bonus-malus sur les contributions d’assurance chômage. La CMP est revenue à la rédaction de l’Assemblée nationale, qui apporte une transparence bienvenue aux employeurs concernés. Il conviendra toutefois, après deux ans d’application du dispositif, de tirer les conséquences qui s’imposent s’il s’avère inadapté.

À l’article 4, concernant la validation des acquis de l’expérience (VAE), le Sénat avait souhaité sortir d’une approche par statut en posant le principe d’une VAE ouverte à toute personne dont l’expérience est en lien avec la certification visée. La CMP a conservé cet apport, qui doit contribuer à donner un nouveau souffle à cette voie d’obtention d’une certification. Elle a également maintenu la précision en vertu de laquelle les missions du groupement d’intérêt public (GIP) national créé par le projet de loi pour mettre en œuvre le service public de la VAE seront exercées « en tenant compte des besoins en qualifications selon les territoires ».

À l’inverse, la CMP est revenue sur l’ajout par le Sénat de deux membres de droit supplémentaires au sein du GIP et sur le principe de sa présidence par un président de conseil régional : ces précisions pourront être définies dans le cadre de la convention constitutive du GIP sans que la loi en fige excessivement la gouvernance. Mon collègue Olivier Henno, qui a travaillé sur ce point, en parlera bien mieux que moi.

Au total, ce texte reflète notre ambition de redonner une chance au paritarisme et notre préoccupation d’adapter les règles d’indemnisation du chômage aux réalités actuelles du marché du travail. Au nom de la commission mixte paritaire, je vous propose donc, mes chers collègues, de l’adopter.

Et je profite de cette intervention pour remercier les administrateurs du Sénat et adresser un petit clin d’œil à celui qui fut sur ce texte mon fidèle compagnon, Olivier Henno.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

MM. Martin Lévrier et Emmanuel Capus applaudissent.

Debut de section - Permalien
Carole Grandjean

Madame la présidente, madame la présidente de la commission, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens en premier lieu à excuser Olivier Dussopt, qui n’a pas pu être présent aujourd’hui.

Je me réjouis de l’accord trouvé entre votre chambre et celle des députés en commission mixte paritaire. Cet accord s’explique notamment par la qualité constante des débats tout au long de l’examen de ce projet de loi.

Je remercie l’ensemble des parlementaires qui ont œuvré à rendre possible un compromis au profit de l’intérêt général. L’esprit de responsabilité et, précisément, le sens de l’intérêt général ont permis de parvenir à un texte qui est à la fois équilibré et à la hauteur des enjeux ; une étape supplémentaire est ainsi franchie vers le plein emploi.

Je salue également le travail exigeant des deux rapporteurs, Mme Frédérique Puissat et M. Olivier Henno. Vous avez, par voie d’amendement, apporté au texte de nombreuses modifications importantes, et nous pouvons tous vous en remercier.

Par ce texte, nous préservons les droits des demandeurs d’emploi.

Le projet de loi confère au Gouvernement la possibilité de prolonger les droits d’indemnisation pour quatorze mois, jusqu’au 31 décembre 2023. Quant au bonus-malus, il est prolongé jusqu’au 31 décembre 2024 ; ce dispositif nous permet d’encourager les entreprises à moins recourir aux contrats de très longue durée.

Par ailleurs, à la faveur d’un amendement proposé par votre chambre, le texte issu de la commission mixte paritaire prévoit explicitement la possibilité de faire varier les règles de l’assurance chômage en fonction de la situation du marché du travail. Cette disposition est non seulement utile par ses vertus de lisibilité, mais il témoigne de la volonté commune des législateurs de sécuriser, de soutenir et d’encourager la réforme que nous sommes en train de mener en concertation avec les partenaires sociaux. Olivier Dussopt réunira d’ailleurs les partenaires sociaux le 21 novembre prochain, afin de conclure les concertations que nous avons conduites depuis le 17 octobre dernier. La solution que nous retiendrons, qui sera juste et équilibrée, s’appuiera sur une modulation de la durée d’indemnisation des demandeurs d’emploi au regard des offres disponibles sur le marché du travail.

Cette modulation permettra de soutenir notre activité économique dans un contexte où le besoin s’en fait considérablement ressentir : par exemple, 30 % des entreprises renoncent à une partie de leur activité pour des raisons de pénurie de main-d’œuvre.

Contrairement à ce qu’il nous est arrivé d’entendre, cette réforme ne pénalisera pas les demandeurs d’emploi les plus fragiles. Elle ne reviendra pas sur les conditions d’affiliation minimale et ne diminuera donc pas le nombre de personnes dont s’ouvrent les droits à l’assurance chômage.

Vous avez également apporté, mesdames, messieurs les sénateurs, une clarification législative relative à l’abandon de poste. Désormais, l’abandon de poste vaudra présomption – il s’agit bien d’une « présomption », j’y insiste – de démission. La nuance étant importante, je m’y arrête quelques secondes.

Cette disposition sera suivie d’un décret : l’abandon de poste n’étant pas vraiment formalisé par le code du travail, elle aboutissait par défaut à une situation de faute grave ; or il n’est pas anodin d’être licencié pour faute grave, et ce processus excluait la possibilité de toucher des indemnités de licenciement.

La nouvelle procédure qui verrait le jour en cas d’adoption du projet de loi permettrait d’expliciter les véritables causes sous-jacentes à l’abandon de poste. La démission s’imposera lorsque le salarié arrête sans prévenir d’exécuter son contrat de travail. Une procédure de mise en demeure par l’employeur est prévue ; ainsi la démission pourra-t-elle être écartée lorsque l’abandon de poste se justifie par des motifs de santé ou de sécurité par exemple.

Prenons également acte de la volonté des législateurs d’encadrer les refus de proposition d’embauche en CDI qui font suite à des contrats d’intérim ou à des contrats à durée déterminée. Les ajustements et encadrements nécessaires proposés en commission mixte paritaire et l’investissement transpartisan sur ce sujet ont permis d’aboutir à un compromis. Vous avez ainsi pris soin de préciser que les CDI refusés doivent être conformes au profil de l’offre raisonnable d’emploi prévu par le projet personnalisé d’accès à l’emploi du demandeur.

Cette précision paraît nécessaire afin de ne pas risquer de réduire la proportion de demandeurs d’emploi qui acceptent d’occuper un emploi dans l’attente de trouver un poste plus conforme à leur projet professionnel.

Cette disposition a également été l’occasion d’ouvrir un débat intéressant sur l’attractivité de certains métiers et les conditions de fidélisation des salariés, ainsi que sur les nouveaux comportements observés, chez les jeunes notamment, sur le marché du travail.

Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, vous avez souhaité intégrer les centres de gestion de la fonction publique territoriale dans le processus d’accès à l’assurance chômage des agents territoriaux démissionnaires qui, dans la suite de leur trajectoire, sont susceptibles de percevoir une allocation de l’assurance chômage.

Selon la réglementation de l’assurance chômage, dans certains cas, les collectivités locales se retrouvent en situation de devoir payer le montant des allocations versées. Nous sommes sensibles à cette curiosité du droit, qui peut mettre certaines collectivités dans la difficulté financière. Une telle évolution a ainsi naturellement trouvé place dans ce texte. Je précise que cette nouvelle disposition ne suffira sans doute pas totalement. Olivier Dussopt s’est engagé devant votre chambre à examiner ce sujet avec mes collègues ministres respectivement chargés de la fonction publique et des collectivités territoriales, afin de trouver une solution définitive.

Vous avez également confirmé la volonté parlementaire forte de refonder un dispositif de validation des acquis de l’expérience plus moderne, plus simple, plus sécurisant pour les candidats, en offrant un nouveau cadre de coopération. Nous réussirons ainsi à concilier, j’y ai été sensible, les objectifs nationaux et des stratégies locales de développement des emplois et des compétences.

Ce texte fonde un nouveau service public pour notre pays, celui d’une reconnaissance élargie des compétences des actifs, organisé selon une véritable logique d’universalité, celle-là même que la majorité sénatoriale a promue tout au long des débats. Nous sommes fiers d’avoir ouvert grand les portes de la validation des acquis de l’expérience !

Les avancées à mettre au compte de ce projet de loi sont nombreuses et importantes ; elles constituent des jalons sur le chemin du plein emploi, aux côtés d’autres leviers que nous souhaitons actionner.

Cette réforme est une première réalisation, dont nous pouvons collectivement nous féliciter. Vous l’aurez compris, le Gouvernement est évidemment favorable à l’adoption des conclusions de la commission mixte paritaire.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Olivier Henno applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Nous passons à la discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

Je rappelle que, en application de l’article 42, alinéa 12, du règlement, le Sénat examinant après l’Assemblée nationale le texte élaboré par la commission mixte paritaire, il se prononce par un seul vote sur l’ensemble du texte en ne retenant que les amendements présentés ou acceptés par le Gouvernement.

En conséquence, le vote sur les amendements et sur les articles est réservé.

Je donne lecture du texte élaboré par la commission mixte paritaire.

I. – Par dérogation aux articles L. 5422-20 à L. 5422-24 et L. 5524-3 du code du travail, un décret en Conseil d’État, pris après concertation avec les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel, détermine, à compter du 1er novembre 2022, les mesures d’application des dispositions législatives relatives à l’assurance chômage mentionnées au premier alinéa de l’article L. 5422-20 du même code. Ces mesures sont applicables jusqu’à une date fixée par décret, et au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023, et peuvent faire l’objet de dispositions d’adaptation en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Toutefois, les mesures d’application des deuxième à avant-dernier alinéas de l’article L. 5422-12 dudit code peuvent recevoir application jusqu’au 31 août 2024. Le décret en Conseil d’État mentionné au premier alinéa du présent article précise notamment les périodes de mise en œuvre de la modulation du taux de contribution des employeurs concernés ainsi que les périodes au cours desquelles est constaté le nombre de fins de contrat de travail et de contrat de mise à disposition pris en compte pour le calcul du taux modulé.

II. –

Supprimé

III. – À compter de la publication de la présente loi, le Gouvernement engage, dans les conditions prévues à l’article L. 1 du code du travail, une concertation avec les organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel sur la gouvernance de l’assurance chômage, suivie le cas échéant d’une négociation. Le document d’orientation prévu au même article L. 1 invite les partenaires sociaux à négocier notamment sur les conditions de l’équilibre financier du régime et sur l’opportunité de maintenir le document de cadrage prévu à l’article L. 5422-20-1 du même code.

Le code du travail est ainsi modifié :

1° Après l’article L. 1243-11, il est inséré un article L. 1243-11-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1243 -11 -1. – Lorsque l’employeur propose que la relation contractuelle de travail se poursuive après l’échéance du terme du contrat à durée déterminée sous la forme d’un contrat à durée indéterminée pour occuper le même emploi, ou un emploi similaire, assorti d’une rémunération au moins équivalente pour une durée de travail équivalente, relevant de la même classification et sans changement du lieu de travail, il notifie cette proposition par écrit au salarié. En cas de refus du salarié, l’employeur en informe Pôle emploi en justifiant du caractère similaire de l’emploi proposé.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » ;

bis Après l’article L. 1251-33, il est inséré un article L. 1251-33-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1251 -33 -1. – Lorsque, à l’issue d’une mission, l’entreprise utilisatrice propose au salarié de conclure un contrat à durée indéterminée pour occuper le même emploi, ou un emploi similaire, sans changement du lieu de travail, elle notifie cette proposition par écrit au salarié. En cas de refus du salarié, l’employeur en informe Pôle emploi en justifiant du caractère similaire de l’emploi proposé.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application du présent article. » ;

2° La sous-section 1 de la section 1 du chapitre II du titre II du livre IV de la cinquième partie est ainsi modifiée :

a) Le I de l’article L. 5422-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« S’il est constaté qu’un demandeur d’emploi a refusé à deux reprises, au cours des douze mois précédents, une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l’article L. 1243-11-1, ou s’il est constaté qu’il a refusé à deux reprises, au cours de la même période, une proposition de contrat de travail à durée indéterminée dans les conditions prévues à l’article L. 1251-33-1, le bénéfice de l’allocation d’assurance ne peut lui être ouvert au titre du 1° du présent I que s’il a été employé dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée au cours de la même période. Ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque la dernière proposition adressée au demandeur d’emploi n’est pas conforme aux critères prévus par le projet personnalisé d’accès à l’emploi mentionné à l’article L. 5411-6-1 si celui-ci a été élaboré antérieurement à la date du dernier refus pris en compte. » ;

b) Il est ajouté un article L. 5422-2-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 5422 -2 -2. – Les conditions d’activité antérieure pour l’ouverture ou le rechargement des droits et la durée des droits à l’allocation d’assurance peuvent être modulées en tenant compte d’indicateurs conjoncturels sur l’emploi et le fonctionnement du marché du travail. »

(Supprimé)

Le code général de la fonction publique est ainsi modifié :

1° À l’article L. 263-3, après la référence : « L. 553-2 », est insérée la référence : «, L. 557-1-1 » ;

2° Après l’article L. 557-1, il est inséré un article L. 557-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 557 -1 -1. – Pour l’application de l’article L. 5424-1 du code du travail aux agents territoriaux, s’agissant des décisions individuelles prises dans les cas prévus au deuxième alinéa de l’article L. 5312-10 du même code, l’agent territorial ou la collectivité ou l’établissement mentionné à l’article L. 4 du présent code concerné peut saisir sous deux mois le président du centre de gestion de la fonction publique territoriale, qui statue dans un délai de deux mois, après avis rendu par la commission administrative paritaire compétente. »

La sous-section 1 de la section 1 du chapitre VII du titre III du livre II de la première partie du code du travail est complétée par un article L. 1237-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1237 -1 -1. – Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste, par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge, dans le délai fixé par l’employeur, est présumé avoir démissionné à l’expiration de ce délai.

« Le salarié qui conteste la rupture de son contrat de travail sur le fondement de cette présomption peut saisir le conseil de prud’hommes. L’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui se prononce sur la nature de la rupture et les conséquences associées. Il statue au fond dans un délai d’un mois à compter de sa saisine.

« Le délai prévu au premier alinéa ne peut être inférieur à un minimum fixé par décret en Conseil d’État. Ce décret détermine les modalités d’application du présent article. »

I. – L’article L. 5422-12 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les données nécessaires à la détermination du nombre mentionné au 1°, y compris celles relatives aux personnes concernées par les fins de contrat prises en compte qui sont inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi, peuvent être communiquées à l’employeur par les organismes chargés du recouvrement des contributions d’assurance chômage, dans des conditions prévues par décret. »

I bis. –

Supprimé

II. – Le I est applicable aux taux notifiés aux employeurs pour les périodes courant à compter du 1er septembre 2022.

I. – À titre expérimental et par dérogation au 1° des articles L. 1242-2 et L. 1251-6 du code du travail, dans les secteurs définis par décret, un seul contrat à durée déterminée ou un seul contrat de mission peut être conclu pour remplacer plusieurs salariés.

L’expérimentation ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

II. – Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard trois mois avant le terme de l’expérimentation prévue au I du présent article, un rapport d’évaluation de cette expérimentation évaluant en particulier, dans les secteurs mentionnés au premier alinéa du même I, les effets de l’expérimentation sur la fréquence de la conclusion des contrats à durée déterminée et des contrats de mission ainsi que sur l’allongement de leur durée et les conséquences des négociations de branche portant sur les thèmes mentionnés au 7° de l’article L. 2253-1 du code du travail, afin de déterminer notamment les conditions appropriées d’une éventuelle généralisation du dispositif prévu au premier alinéa du I du présent article.

III. – La durée de l’expérimentation prévue au I du présent article est de deux ans à compter de la publication du décret mentionné au même I.

L’article L. 1251-58-6 du code du travail est ainsi rédigé :

« Art. L. 1251 -58 -6. – La durée totale du contrat de mission prévue à l’article L. 1251-12-1 n’est pas applicable au salarié lié par un contrat à durée indéterminée avec l’entreprise de travail temporaire. »

I. – L’article L. 2314-18 du code du travail est ainsi rétabli :

« Art. L. 2314 -18. – Sont électeurs l’ensemble des salariés âgés de seize ans révolus, travaillant depuis trois mois au moins dans l’entreprise et n’ayant fait l’objet d’aucune interdiction, déchéance ou incapacité relative à leurs droits civiques. »

II. – Le premier alinéa de l’article L. 2314-19 du code du travail est complété par les mots : « ainsi que des salariés qui disposent d’une délégation écrite particulière d’autorité leur permettant d’être assimilés au chef d’entreprise ou qui le représentent effectivement devant le comité social et économique ».

III. – Le I est applicable à compter du 31 octobre 2022.

Par dérogation aux articles L. 2121-1 et L. 2122-5 du code du travail, jusqu’à la deuxième mesure de l’audience prévue au 3° du même article L. 2122-5 suivant la publication de la présente loi, le ministre chargé du travail arrête la liste et le poids des organisations syndicales reconnues représentatives dans les branches regroupant des établissements mentionnés aux articles L. 442-5 du code de l’éducation et L. 813-8 du code rural et de la pêche maritime sur le fondement de l’ensemble des suffrages exprimés au premier tour des élections des titulaires aux comités sociaux et économiques de ces établissements et au scrutin concernant les entreprises de moins de onze salariés lors de la période prise en compte pour la dernière mesure de l’audience prévue au 3° de l’article L. 2122-5 du code du travail.

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 335-5 est ainsi modifié :

aa) Au I, les mots : « ou les titres à finalité professionnelle » sont supprimés ;

a) Les II et III sont abrogés ;

b)

Supprimé

ter Au deuxième alinéa de l’article L. 611-4, les mots : « et L. 613-3 à L. 613-5 » sont supprimés et sont ajoutés les mots : « et au livre IV de la sixième partie du code du travail » ;

quater Le I de l’article L. 612-3 est ainsi modifié :

a) À la fin de la première phrase du premier alinéa, les mots : « premier alinéa de l’article L. 613-5 » sont remplacés par les mots : « livre IV de la sixième partie du code du travail » ;

b)

quinquies Au premier alinéa de l’article L. 612-6, les mots : « de l’article L. 613-5 » sont remplacés par les mots : « du livre IV de la sixième partie du code du travail » ;

sexies À la deuxième phrase du deuxième alinéa de l’article L. 613-1, les mots : « des dispositions des articles L. 613-3 et L. 613-4 » sont remplacés par les mots : « du livre IV de la sixième partie du code du travail » ;

Supprimé

3° La section 2 du chapitre III du titre Ier du livre VI est abrogée ;

4° À l’article L. 641-2, les mots : « et du quatrième alinéa du II » sont supprimés ;

5° Au dernier alinéa de l’article L. 671-1, les mots : « à L. 613-5 » sont remplacés par les mots : « et L. 613-2 » ;

6° Les vingt et unième, vingt-deuxième et vingt-troisième lignes du tableau du second alinéa du I des articles L. 685-1, L. 686-1 et L. 687-1 sont supprimées ;

7° À la première phrase de l’article L. 711-6 et au premier alinéa de l’article L. 752-1, les mots : « à L. 613-5 » sont remplacés par les mots : « et L. 613-2 ».

II. – La sixième partie du code du travail est ainsi modifiée :

1° AA Au troisième alinéa de l’article L. 6111-1, les mots : « engagée dans la vie active » et, à la fin, les mots : «, liée à l’exercice d’un mandat d’élu au sein d’une collectivité territoriale ou liée à l’exercice de responsabilités syndicales » sont supprimés ;

1° A Au second alinéa de l’article L. 6113-9, les mots : « au sens de l’article L. 6412-2 » sont supprimés ;

1° Après le mot : « candidats », la fin de la deuxième phrase du 4° de l’article L. 6121-1 est supprimée ;

Supprimé

bis L’article L. 6313-5 est complété par les mots et un alinéa ainsi rédigé : « ou d’un bloc de compétences d’une certification enregistrée dans ce répertoire.

« Le parcours de validation des acquis de l’expérience comprend les actions d’accompagnement prévues à l’article L. 6423-1 et, le cas échéant, les actions de formation mentionnées à l’article L. 6313-1 ou les périodes de mise en situation en milieu professionnel mentionnées à l’article L. 5135-1. » ;

3° Après le premier alinéa de l’article L. 6323-17-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Cette commission peut, sous réserve du caractère réel et sérieux du projet, financer les dépenses afférentes à la validation des acquis de l’expérience du salarié, dans des conditions définies par voie réglementaire. » ;

4° Le chapitre Ier du titre Ier du livre IV est ainsi modifié :

a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Service public de la validation des acquis de l’expérience » ;

b) L’article L. 6411-1 est ainsi rédigé :

« Art. L. 6411 -1. – Le service public de la validation des acquis de l’expérience a pour mission d’orienter et d’accompagner toute personne demandant la validation des acquis de son expérience et justifiant d’une activité en rapport direct avec le contenu de la certification visée. » ;

c) Il est ajouté un article L. 6411-2 ainsi rédigé :

« Art. L. 6411 -2. – Un groupement d’intérêt public met en œuvre, au niveau national, les missions du service public de la validation des acquis de l’expérience mentionné à l’article L. 6411-1.

« Le groupement contribue à l’information des personnes et à leur orientation dans l’organisation de leur parcours. Il contribue également à la promotion de la validation des acquis de l’expérience, en tenant compte des besoins en qualifications selon les territoires, ainsi qu’à l’animation et à la cohérence des pratiques sur l’ensemble du territoire et permet d’assurer le suivi statistique des parcours.

« L’État, les régions, dans le cadre de leurs compétences définies aux articles L. 6121-1 et L. 6121-2, Pôle emploi, l’organisme mentionné à l’article L. 5315-1, les opérateurs de compétences et les commissions paritaires interprofessionnelles régionales sont membres de droit du groupement, auquel peuvent adhérer d’autres personnes morales publiques ou privées. » ;

5° Le chapitre II du titre Ier du livre IV est ainsi modifié :

a) L’intitulé est ainsi rédigé : « Régime juridique de la validation des acquis de l’expérience » ;

b) L’article L. 6412-1 est abrogé ;

c) Après le même article L. 6412-1, il est inséré un article L. 6412-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 6412 -1 -1. – Le ministère ou l’organisme certificateur prévu à l’article L. 6113-2 qui se prononce sur la recevabilité d’une demande peut prendre en compte des activités mentionnées à l’article L. 6411-1, de nature différente, exercées sur une même période, les périodes de stage et les périodes de formation initiale ou continue en milieu professionnel mentionnées à l’article L. 124-1 du code de l’éducation ainsi que les périodes de mise en situation en milieu professionnel mentionnées à l’article L. 5135-1 du présent code. » ;

d) L’article L. 6412-2 est abrogé ;

e) Il est ajouté un article L. 6412-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 6412 -3. – La validation des acquis de l’expérience est prononcée par un jury dont la composition et les modalités de fonctionnement sont fixées par décret. » ;

6° L’article L. 6422-2 est ainsi modifié :

a) À la première phrase, le mot : « vingt-quatre » est remplacé par le mot : « quarante-huit » ;

b) Après le mot : « collectif », la fin de la seconde phrase est supprimée ;

7° La section 4 du chapitre II du titre II du livre IV est abrogée ;

8° Le chapitre III du même titre II est ainsi modifié :

a) L’article L. 6423-1 est abrogé ;

b) Il est ajouté un article L. 6423-3 ainsi rédigé :

« Art. L. 6423 -3. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’application du présent livre, notamment les modalités de collecte, de traitement et d’échange des informations et des données à caractère personnel, parmi lesquelles le numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques, nécessaires à l’orientation des personnes et au suivi de leur parcours au niveau national, par l’organisme mentionné à l’article L. 6411-2. »

III. – Au 18° de l’article L. 444-2 du code de l’action sociale et des familles, la référence : «, L. 6412-1 » est supprimée.

IV. – Au dernier alinéa de l’article L. 812-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots : « à L. 613-5 » sont remplacés par les mots : « et L. 613-2 ».

V. – Au dernier alinéa de l’article L. 120-1 du code du service national, les mots : « aux articles L. 335-5 et L. 613-3 » sont remplacés par les mots : « à l’article L. 335-5 ».

Afin de favoriser l’accès à la certification et à l’insertion professionnelles dans les secteurs rencontrant des difficultés particulières de recrutement, à titre expérimental, pour une durée de trois ans à compter d’une date fixée par décret, et au plus tard le 1er mars 2023, les contrats de professionnalisation conclus par les employeurs de droit privé peuvent comporter des actions en vue de la validation des acquis de l’expérience.

Pour la mise en œuvre de cette expérimentation, il peut être dérogé aux articles L. 6314-1, L. 6325-1, L. 6325-2, L. 6325-11, L. 6325-13 et L. 6332-14 du code du travail.

Les conditions de mise en œuvre de cette expérimentation, notamment les qualifications ou blocs de certifications professionnelles pouvant être obtenus par la validation des acquis de l’expérience, sont déterminées par décret.

Au plus tard six mois avant son terme, le Gouvernement remet au Parlement un rapport d’évaluation de cette expérimentation.

Sont ratifiées :

1° L’ordonnance n° 2020-322 du 25 mars 2020 adaptant temporairement les conditions et modalités d’attribution de l’indemnité complémentaire prévue à l’article L. 1226-1 du code du travail et modifiant, à titre exceptionnel, les dates limites et les modalités de versement des sommes versées au titre de l’intéressement et de la participation ;

2° L’ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de congés payés, de durée du travail et de jours de repos ;

3° L’ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421-2 du code du travail ;

4° L’ordonnance n° 2020-346 du 27 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

5° L’ordonnance n° 2020-386 du 1er avril 2020 adaptant les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail à l’urgence sanitaire et modifiant le régime des demandes préalables d’autorisation d’activité partielle ;

6° L’ordonnance n° 2020-388 du 1er avril 2020 relative au report du scrutin de mesure de l’audience syndicale auprès des salariés des entreprises de moins de onze salariés et à la prorogation des mandats des conseillers prud’hommes et membres des commissions paritaires régionales interprofessionnelles ;

7° L’ordonnance n° 2020-389 du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence relatives aux instances représentatives du personnel ;

Supprimé

9° L’ordonnance n° 2020-770 du 24 juin 2020 relative à l’adaptation du taux horaire de l’allocation d’activité partielle ;

10° L’ordonnance n° 2020-1255 du 14 octobre 2020 relative à l’adaptation de l’allocation et de l’indemnité d’activité partielle ;

11° L’ordonnance n° 2020-1441 du 25 novembre 2020 portant adaptation des règles relatives aux réunions des instances représentatives du personnel ;

12° L’ordonnance n° 2020-1442 du 25 novembre 2020 rétablissant des mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421-2 du code du travail ;

13° L’ordonnance n° 2020-1502 du 2 décembre 2020 adaptant les conditions d’exercice des missions des services de santé au travail à l’urgence sanitaire ;

14° L’ordonnance n° 2020-1597 du 16 décembre 2020 portant mesures d’urgence en matière de congés payés et de jours de repos, de renouvellement de certains contrats et de prêt de main-d’œuvre ;

15° L’ordonnance n° 2020-1639 du 21 décembre 2020 portant mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

16° L’ordonnance n° 2021-135 du 10 février 2021 portant diverses mesures d’urgence dans les domaines du travail et de l’emploi ;

17° L’ordonnance n° 2021-136 du 10 février 2021 portant adaptation des mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

18° L’ordonnance n° 2021-797 du 23 juin 2021 relative au recouvrement, à l’affectation et au contrôle des contributions des employeurs au titre du financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage ;

19° L’ordonnance n° 2021-1013 du 31 juillet 2021 modifiant l’ordonnance n° 2020-324 du 25 mars 2020 portant mesures d’urgence en matière de revenus de remplacement mentionnés à l’article L. 5421-2 du code du travail ;

20° L’ordonnance n° 2021-1214 du 22 septembre 2021 portant adaptation de mesures d’urgence en matière d’activité partielle ;

21° L’ordonnance n° 2022-543 du 13 avril 2022 portant adaptation des dispositions relatives à l’activité réduite pour le maintien en emploi.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Nous passons à la présentation des amendements de la commission avant d’en venir aux explications de vote des groupes.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Sur l’article 1er, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Le vote est réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L’amendement n° 1, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 6, seconde phrase

Remplacer le mot :

employeur

par les mots :

entreprise utilisatrice

La parole est à Mme le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Frédérique Puissat

Il s’agit d’un amendement de précision rédactionnelle, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Sur les articles 1er bis ABA à 3 bis, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Le vote est réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

L’amendement n° 2, présenté par Mme Puissat et M. Henno, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 24

Remplacer les mots :

les actions d’accompagnement prévues à l’article L. 6423-1

par les mots :

un accompagnement

La parole est à Mme le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Sur les articles 4 bis et 5, je ne suis saisie d’aucun amendement.

Le vote est réservé.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements de la commission, je vais donner la parole, pour explication de vote, à un représentant par groupe.

La parole est à M. Emmanuel Capus, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – Mme le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Emmanuel Capus

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, atteindre le plein emploi, c’est évidemment un objectif économique. Le plein emploi, c’est plus de ressources et moins de dépenses. C’est la formule la plus simple pour équilibrer le régime sans diminuer le montant des allocations.

Mais atteindre le plein emploi, c’est surtout un objectif social, d’abord parce que, pour trouver sa place dans la société, mieux vaut un travail que des allocations, ensuite parce que, lorsque le marché du travail est tendu, le pouvoir de négociation des travailleurs augmente, c’est un fait.

Notre groupe soutient la politique menée par le Gouvernement en ce sens. La réforme de l’assurance chômage en constitue évidemment un axe incontournable. Pour atteindre cet objectif, il faudra aussi réformer les retraites ; ajuster la politique en faveur de l’apprentissage ; développer l’enseignement professionnel ; recadrer la formation continue. Toutes ces réformes font partie de l’agenda du Gouvernement, et nous les soutiendrons.

Mais la priorité était bien de réformer l’assurance chômage, et ce d’abord pour des raisons de calendrier : les règles qui sont en vigueur devaient être prolongées.

La majorité sénatoriale souhaitait anticiper le retour au paritarisme de gestion. Mon sentiment est qu’il vaut mieux laisser davantage de temps aux partenaires sociaux pour définir les règles qui s’appliqueront à l’avenir. C’est pourquoi la prolongation des règles actuelles jusqu’au 31 décembre 2023 va dans le bon sens : elle donne de la visibilité tant aux partenaires sociaux qu’aux demandeurs d’emploi.

Cette prolongation permet aussi d’anticiper les nouvelles modalités de négociation prévues par le texte. À cet égard, la version issue de la commission mixte paritaire est claire : les partenaires sociaux devront chercher à équilibrer les finances du régime. Tel était l’objet d’un amendement de précision que nous défendions ; je me réjouis donc qu’il figure bien dans le projet de loi.

Certains points du texte ont provoqué quelques interrogations. Je pense notamment à la présomption de démission pour les abandons de poste : si, à titre personnel, je comprends la logique de la mesure, je doute de son effet réel sur le marché du travail… Je crains, je dois l’avouer, qu’elle ne fasse peser sur les PME des risques contentieux plus importants qu’auparavant. Et les distinguos exposés par Mme la ministre quant aux multiples exceptions au principe de la démission présumée – motifs de santé, harcèlement moral, etc. – me font redouter que, à partir d’une bonne idée, on ne finisse par créer une situation où les PME qui ne disposent pas d’un service de ressources humaines subiront le coût d’éventuels contentieux prud’homaux et se retrouveront obligées de se défendre devant la justice.

Je pense également aux refus de CDI en fin de CDD. Le compromis issu de la CMP me semble plutôt modéré. J’espère qu’il suffira pour atténuer ce phénomène, qui désespère autant les chefs d’entreprise souhaitant recruter de façon pérenne que les demandeurs d’emploi cherchant un CDI.

Cela a été dit et répété par Mme la rapporteure pour le Sénat, notre collègue Frédérique Puissat : l’assurance chômage doit rester un filet de sécurité pour les salariés involontairement privés d’emploi. Nous soutenons cette ligne de bon sens.

Concernant la contracyclicité des règles d’assurance chômage et l’application du bonus-malus, c’est au Gouvernement d’agir. Nous espérons qu’il suivra cette ligne, avec un objectif clair : garantir l’équilibre financier du régime et engager le désendettement de l’Unédic.

Vous l’aurez compris, mes chers collègues, le groupe Les Indépendants votera pour ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi qu ’ au banc des commissions.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymonde Poncet Monge

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, après le vote récent, par le Sénat, d’un amendement de report de l’âge de la retraite, ce volet du projet néolibéral relatif au fonctionnement du marché du travail marque un nouveau recul pour les droits des travailleurs. Il pervertit le système assurantiel en le mettant au service, non de la protection contre le risque de licenciement, mais d’une politique de baisse des allocations visant à affaiblir la capacité des demandeurs d’emploi de négocier des conditions d’emploi dignes.

Ainsi en est-il des dispositions qui ont été introduites au Sénat et validées par la CMP, comme la suppression des allocations après deux refus d’un CDI à l’issue de CDD : en plus d’être une usine à gaz, cette mesure perpétue la politique du soupçon et de la menace envers les chômeurs, accusés de préférer les prestations de chômage au travail, travail par lequel, on feint de l’oublier, ils ont acquis ces droits !

Opposer prestation et travail est un non-sens, mais je vous accorde, mes chers collègues, que cette petite musique de division répétée à satiété par les médias finit par pénétrer les esprits ; la majorité sénatoriale, bien sûr, y contribue, après d’autres, malheureusement…

À la faveur d’un effet de loupe sur une extrême minorité de cas, on prétend justifier un durcissement des modalités d’accès à l’assurance chômage et une diminution des allocations ou de la durée d’indemnisation, qui ont pour effet et, disons-le, pour objet de réduire les marges de manœuvre et d’arbitrage des demandeurs d’emploi en vue de les contraindre à accepter plus vite des emplois de piètre qualité.

Un tel scénario s’est vérifié au Canada, pays qui sert de modèle, où les études ont montré que la contracyclicité et le durcissement de l’accès à l’assurance chômage conduisent les chômeurs à accepter des emplois moins rémunérés, bloquant durablement leurs perspectives d’évolution de carrière.

Voilà quel est l’objectif, avec la baisse des dépenses.

Ce texte offre un blanc-seing au Gouvernement, désormais libre de moduler les règles de l’assurance chômage, après un simulacre de concertation avec les partenaires sociaux, qui sont privés de négociations, car ils sont unanimement opposés à la contracyclicité.

Il faut avancer vite pour libérer le marché du travail et reprendre leurs droits aux travailleurs !

Tout à son objectif d’un « plein emploi » apparent, fixé à 5 % de taux de chômage, le Gouvernement ignore les faits et la recherche.

Il refuse de s’interroger sur les causes réelles des tensions dans certains secteurs.

Répétons-le, en effet, 6 % seulement des 3 millions d’offres déposées auprès de Pôle emploi étaient non pourvues en 2021, soit 186 000 emplois. Or, selon Pôle emploi, « les trois quarts des recruteurs [d’une offre non pourvue] reconnaissent que les conditions de travail du poste proposé peuvent décourager le candidat ». Quant à la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), elle souligne que les difficultés d’embauche dans certains secteurs en tension sont liées aux conditions de travail dégradées et aux salaires insuffisants.

Les offres non pourvues ont donc essentiellement à voir avec la qualité de l’offre, ce qui explique que, comme le note l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), les 60 % de chômeurs non indemnisés n’acceptent pas non plus ces emplois.

Cette réforme aggravera la situation de précarité de beaucoup de chômeurs : non, les allocations chômage ne « désincitent » pas au travail ; non, on ne gagne pas plus au chômage qu’en activité !

Selon l’Unédic, les personnes indemnisées par l’assurance chômage perçoivent en moyenne une allocation inférieure au seuil de pauvreté. Sept chômeurs indemnisés sur dix reçoivent une allocation durant moins d’un an. Près de la moitié des bénéficiaires de l’allocation chômage travaillent déjà partiellement et, selon la Dares, le taux de non-recours est compris entre 25 % et 42 %.

Pour eux, comme pour les 2 millions de personnes qui grossissent chaque année les rangs du « halo du chômage », cette réforme n’apporte rien ; elle aggrave leur situation.

En somme, en réduisant le problème du chômage à la notion d’aléa moral et en l’imputant à des comportements individuels calculateurs à la petite semaine, vous refusez de mettre en question ses causes structurelles, qui ont trait à la dégradation des salaires et des conditions de travail ainsi qu’à la perte de sens de nombreux emplois.

Comme l’écrivait le sociologue Charles Wright Mills, « lorsque, dans une nation, plusieurs millions de salariés sont au chômage, on a affaire à un enjeu collectif. L’énoncé correct du problème réclame l’examen préalable des institutions économico-politiques de la société, et non plus des seuls caractères propres aux individus ».

Ce projet de loi aurait pu servir la cause du travail et des droits des travailleurs, mais ses auteurs ont choisi d’endosser le raisonnement partial et intéressé du patronat, qui se lamentera ensuite de la non-motivation des travailleurs que vos réformes auront poussés à accepter des emplois non attractifs…

En France pas plus qu’au Canada, cette réforme ne résoudra la crise de l’attractivité. Le groupe écologiste votera contre.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

La parole est à M. Martin Lévrier, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Debut de section - PermalienPhoto de Martin Lévrier

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il n’y avait rien d’inéluctable : ce mois-ci encore, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) a reculé de 0, 1 point. Ce chiffre corrobore le constat de la création de 84 000 emplois dans le secteur privé au troisième trimestre 2022. Concrètement, depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Élysée, le taux de chômage est passé de près de 10 % à 7, 3 %. Ces résultats sont le fruit des actions menées par les gouvernements qui se sont succédé depuis 2017 ; ils démontrent que le plein emploi n’est pas une utopie.

Initialement composé de cinq articles, ce texte s’est enrichi, au cours de la navette parlementaire, de dix articles, parmi lesquels deux ont été adoptés conformes. Treize articles restaient donc en discussion lors de la réunion de la commission mixte paritaire le 9 novembre 2022.

Le chemin vers l’accord en CMP n’était pas tout tracé, et pourtant…

Le compromis trouvé témoigne de la volonté des rapporteurs chargés de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de ce projet de loi d’agir en commun pour aller vers le plein emploi. Je salue à cet égard le travail accompli par Mme la sénatrice Frédérique Puissat, M. le sénateur Olivier Henno et M. le député Marc Ferracci.

Notre route est droite et la pente s’adoucit.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Mme Catherine Deroche, présidente de la commission des affaires sociales. C’est beau !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Martin Lévrier

L’accord trouvé en commission mixte paritaire, tout en conservant les grands principes du texte initial – je pense notamment à la modulation des indemnités, ou encore au rétablissement de la base légale relative aux conditions requises pour être électeur aux élections professionnelles –, reprend les apports du Sénat sur la gouvernance de l’assurance chômage, sur les incitations à accepter un CDI dans le contexte d’un marché du travail en forte tension et sur la validation des acquis de l’expérience.

La commission mixte paritaire a ainsi acté, d’une part, l’ouverture d’une négociation interprofessionnelle sur la gouvernance de l’assurance chômage, qui portera notamment sur l’équilibre financier du régime et l’opportunité de maintenir le document de cadrage.

Elle a acté, d’autre part, la suppression de l’allocation chômage après deux refus d’un CDI à l’issue de contrats à durée déterminée ou de missions d’intérim, tenant compte du risque juridique que comportait la différence de traitement entre salariés en CDD et intérimaires.

Par contre, si je me réjouis que la réforme de 2019 ait permis de réduire la part de contrats courts dans les offres d’emploi disponibles, je concède ne pas être convaincu par ce durcissement des règles. Et pour cause, il tend à stigmatiser les personnes qui n’accepteraient pas un contrat à durée indéterminée et laisse à penser que seul ce type de contrat garantit la sécurité de l’emploi. Pourtant, force est de constater que plus de la moitié des CDI sont rompus sous deux ans, preuve que la flexibilité « gagnant-gagnant » est plus efficace que la stigmatisation.

Enfin, la CMP a acté le principe de l’ouverture de la VAE à toute personne dont l’expérience est en lien avec la certification visée : non seulement les proches aidants, dans le domaine médico-social, mais également, entre autres, les bénévoles, qui pourront eux aussi valoriser leurs expériences dans les associations.

En promouvant la VAE au rang de voie de formation à part entière, l’article 4 du projet de loi, considérablement enrichi par le Gouvernement et les parlementaires, vient concrétiser la création d’un véritable service public de la formation. Rappelons que cette réforme a pour ambition d’atteindre l’objectif de 100 000 VAE chaque année, contre 30 000 actuellement.

Vous l’aurez compris, notre groupe se réjouit de l’accord trouvé en commission mixte paritaire, et il en votera les conclusions, issues d’un bicamérisme équilibré, qui évitent un blocage des débats entre nos assemblées. Ce texte tend à répondre à la pénurie de main-d’œuvre en augmentant le nombre de personnes aptes à occuper un métier en tension et en accompagnant les reconversions professionnelles des salariés.

Applaudissements sur les tra vées des groupes RDPI et INDEP. – Mme le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à Mme Monique Lubin, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique Lubin

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen du présent projet de loi aura été l’occasion pour le Gouvernement de montrer son vrai visage. Il n’est plus dans le « en même temps » et confirme qu’il n’est ni de gauche ni de gauche !

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain n’était déjà pas d’accord avec l’évolution de l’assurance chômage résultant de la réforme de 2018. C’est peu de dire que nous sommes aujourd’hui opposés à la radicalisation de ses dispositions et au sort dévolu aux partenaires sociaux !

Le texte dont nous discutons aujourd’hui qui, d’emblée, tournait le dos au paritarisme et dégradait les droits des travailleurs actait dès le début la contracyclicité qui sera inscrite dans le code du travail. Celle-ci a pourtant été un désastre dans les pays qui l’ont pratiquée, comme le Canada. Au vu de l’expérience de ce pays, l’instabilité qu’une telle disposition promet aux travailleurs et l’arbitraire qu’elle ouvre à leur détriment est, pour nous tous, une promesse de difficultés accrues dans de brefs délais.

Ce texte déjà peu enthousiasmant est arrivé au Sénat encore durci par les débats de l’Assemblée nationale. Les apports de la chambre basse aboutissent notamment à considérer comme démissionnaire tout salarié présumé fautif d’un abandon de poste et, ainsi, à le priver de toute indemnisation au titre du chômage.

Cela atteste du choix de gouverner au préjugé, en incriminant le travailleur. Aucune donnée objective, a fortiori chiffrée, n’est avancée pour étayer une telle mesure, ne serait-ce que par les rapporteurs.

Avec une telle disposition, nous risquons de compliquer la mise au jour des raisons pour lesquelles l’abandon de poste aura eu lieu. Ces raisons sont potentiellement liées aux caractéristiques inhérentes au management de l’organisation que le travailleur s’est résolu de quitter ou aux conditions de travail qui lui sont imposées.

De maigres protections ont, certes, été ajoutées dans le texte, mais elles sont très insuffisantes. En tout état de cause, devant les prud’hommes, la charge de la preuve incombera au salarié : cela revient à inscrire dans la loi la logique du pot de terre contre le pot de fer. La procédure sera de facto difficilement opérante au vu des délais et des coûts qu’elle implique.

Cerise sur le gâteau, nous avons toutes les raisons d’estimer que la mesure comporte en réalité pour l’employeur plus de risques juridiques que de garanties, à l’opposé de l’objectif des partisans du dispositif. Sous prétexte de clarifier l’abandon de poste, le régime même de la démission devient en effet équivoque !

Au Sénat, la majorité sénatoriale a encore aggravé le texte, et le Gouvernement a décidé de la suivre.

Les demandeurs d’emploi sont envisagés ici non pas comme des citoyens ayant cotisé à l’assurance chômage de manière à bénéficier d’une indemnisation en cas de perte d’emploi, mais comme des suspects en puissance, des profiteurs qui n’auraient en rien participé au financement d’une assurance perçue comme une manne pour se laisser aller à la paresse.

Il est remarquable que les amendements visant à durcir les conditions faites aux personnes en recherche d’emploi ne soient basés sur aucune – je dis bien aucune – étude rigoureuse donnant une quelconque assise aux projections que traduisent les choix de la majorité et du Gouvernement. Ce qui donne le ton ici, c’est une certaine vox populi, et certainement pas des données fiables.

Le choix de la majorité du Sénat, validée par le Gouvernement, de sanctionner une personne ayant refusé un CDD à trois reprises est ainsi désastreux.

J’ai mentionné au cours des débats l’exemple d’une personne de 50 ans qui, à cause de la fermeture de son entreprise, perdrait son emploi après trente ans de carrière alors qu’elle bénéficiait d’un salaire correspondant à son ancienneté. Cela arrive tout le temps, partout en France. Au bout de quelques mois, n’ayant pas retrouvé d’emploi équivalent à celui qu’elle a perdu, arrivant en fin de droits, cette personne accepte un emploi en deçà de ses aspirations légitimes : un emploi moins rémunéré, moins intéressant ou peut-être difficile, si bien que lorsque l’on va lui proposer un CDD, cette personne ne l’acceptera pas. La situation peut se répéter plusieurs fois avant qu’une occasion permettant une forme de « retour à la normale » pour elle ne puisse enfin être saisie.

À cet âge, n’est-il pas légitime de vouloir disposer de temps pour retrouver un emploi correspondant à une expérience, à des compétences et compatible avec son état de santé ? Je repose la question : qui sommes-nous pour graver dans le marbre des dispositions qui l’interdiront et qui mettront en difficulté des personnes dont nous ne connaissons pas la vie ?

Pour conclure, ce n’est pas légiférer dans un esprit de justice et avec le souci de notre démocratie sociale que de ramener les demandeurs d’emploi à une seule et même entité, à un seul et même préjugé, selon lequel tous seraient peu empressés de retrouver un travail et il faudrait les forcer à revenir vers l’emploi.

Il y aurait sans doute eu de belles choses à faire dans le cadre d’un projet de loi de réforme de l’assurance chômage pour aller vers une assurance chômage négociée par les partenaires sociaux, fondée sur un mécanisme assurantiel, dotée de financements propres et ouverte à ceux qui en sont exclus aujourd’hui. Tel n’est pas le cas ici. Nous nous opposerons donc à ce texte.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Applaudissements sur les travées des groupes CRCE et SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, une petite heure a suffi à mettre d’accord le Gouvernement et la majorité sénatoriale sur ce texte censé permettre le plein emploi, mais dont l’objectif principal est la reprise en main de l’assurance chômage par le Gouvernement.

L’article 1er du projet de loi vise à autoriser le Gouvernement à fixer seul, et à la place des organisations syndicales et patronales, les conditions d’indemnisation de l’assurance chômage.

Une telle remise en cause de la gouvernance paritaire marque une nouvelle étape du processus d’étatisation de l’assurance chômage pour moduler l’indemnisation selon la conjoncture économique.

Le Gouvernement module la durée d’indemnisation selon que la situation de l’emploi est au vert, à l’orange ou au rouge. Avec les indicateurs choisis par le Gouvernement, le vert entraînera une réduction de 25 % de la durée des allocations ; pour l’orange, la réduction sera de 15 % ; et si c’est rouge, la durée d’indemnisation sera maintenue. Selon les calculs des organisations syndicales, la modulation entraînera une baisse moyenne de 25 % du nombre de mois d’indemnisation.

Concrètement, un demandeur d’emploi inscrit à partir du mois de février 2023 et ayant bénéficié de vingt-quatre mois d’indemnisation chômage avec les anciennes règles verra ses droits réduits à dix-huit mois. Pour les plus précaires, qui pouvaient bénéficier de six mois d’indemnisation avec les anciennes règles, cela passera à seulement quatre mois. Enfin, les seniors, dont on parle beaucoup en ce moment, qui avaient droit à trente-six mois, chuteront à vingt-huit mois. Cette modulation va précariser davantage les travailleurs et aggraver les disparités géographiques.

Cette loi, véritable coup de force sur la démocratie sociale, s’accompagne d’une remise en cause du principe d’égalité. Cette atteinte grave aux droits des salariés a été rendue possible grâce à la droite sénatoriale, qui a obtenu en contrepartie de son soutien des régressions sociales majeures.

Les Républicains ont obtenu l’encadrement de l’abandon de poste. Désormais les salariés qui abandonnent leur poste seront considérés comme présumés démissionnaires. Ils perdront par conséquent le bénéfice de l’indemnisation chômage. Bravo !

Je rappelle simplement que ni le ministère du travail ni Pôle emploi ne disposent d’études statistiques et d’études sur les abandons de postes en France. Cette disposition repose uniquement sur une instrumentalisation de l’abandon de poste par certains employeurs. Surtout, elle crée une procédure déséquilibrée pour les salariés et totalement inadaptée à la réalité de la justice prud’homale.

Enfin, le Gouvernement a accepté de supprimer l’indemnisation chômage des salariés en CDD ou en contrat de mission qui refusent deux contrats à durée indéterminée.

Après avoir favorisé et financé par des milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales les contrats courts, la droite sénatoriale et le Gouvernement pénalisent aujourd’hui celles et ceux qui refusent un contrat à durée indéterminée. Encore une fois, bravo !

Le député Marc Ferracci, rapporteur du texte à l’Assemblée nationale, a lui-même reconnu que les abandons de poste et les refus de CDI étaient des situations non massives. Pourquoi pénaliser des comportements minoritaires ?

Avec ce texte, vous inversez le sens même de l’assurance chômage, dont l’objectif est de protéger les salariés contre la perte de leur travail. Désormais, ce sont les employeurs qui sont protégés contre les salariés du choix de leur contrat de travail !

En conclusion, ce projet de loi constitue une attaque contre les droits des travailleurs et des chômeurs. Il nous donne un avant-goût des mauvais coups à venir de la part du Gouvernement, qui pourra désormais compter sur la droite au Sénat pour conserver une majorité parlementaire.

Les sénateurs du groupe communiste républicain citoyen et écologiste défendent, vous le savez, un autre projet de société reposant sur une véritable sécurité sociale professionnelle. Pour toutes ces raisons, nous voterons contre ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Monique Lubin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées des groupes UC et RDPI. – Mme le rapporteur applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Henno

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi avant toute chose de saluer ma complice Frédérique Puissat, énergique rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire. Nos discussions ont été amicales, presque fraternelles, et empreintes de vérité. Les échanges avec Marc Ferracci ont été « virils, mais corrects », comme on dit au rugby.

Nous avons abouti à un projet de loi équilibré. C’est le meilleur texte possible ; il est adapté aux réalités du quotidien. Les tensions sur le marché du travail sont importantes. De nombreuses entreprises ne peuvent pas répondre à tous les marchés auxquels elles pourraient prétendre par manque de personnel. Certains restaurants ferment plus tôt.

Le projet de loi est un texte empreint de pragmatisme. Il ne s’agit en aucun cas pour nous de défendre une position morale ; le texte vise plutôt à adapter notre législation à la réalité du marché du travail. Il importe de mettre en place dans notre pays des incitations plus fortes au travail tout en prévoyant, bien sûr, une juste rémunération. La question de valeur travail a été au cœur de nos discussions tout au long de l’examen du texte.

Au-delà, notre marqueur est la défense du paritarisme, conformément à l’ADN du Sénat, mais aussi des groupes UC et LR. Nous soutenons l’idée que le paritarisme est l’un des piliers du modèle français de solidarité, qu’il s’agisse de l’assurance chômage, de la retraite ou de la protection sociale. Le modèle français de protection sociale, ce n’est pas l’étatisation !

Autre marqueur pour nous, l’assurance chômage doit, certes, protéger des accidents, mais elle n’a pas non plus vocation à protéger de toutes les situations de la vie. Il n’y a rien de choquant à assimiler un abandon de poste à une démission. De la même manière, il n’est pas illégitime de s’interroger en cas de deux refus consécutifs de CDI. Toutes ces mesures sont mises en place au bénéfice des salariés, qui sont les principaux contributeurs de l’assurance chômage : l’argent ne tombe pas du ciel !

La commission mixte paritaire a conservé l’assouplissement des règles du CDI intérimaire, introduit par la commission des affaires sociales du Sénat.

Nous pouvons également nous réjouir que soit maintenu l’article issu d’un amendement de notre collègue Philippe Bas, visant à introduire un parallélisme des procédures en cas d’indemnisation du chômage d’un ancien agent par une collectivité territoriale. Nous n’avons pas oublié que le Sénat représentait les territoires et les collectivités !

En matière d’élections professionnelles, le Sénat avait introduit, sur l’initiative de Catherine Procaccia, un article visant à sécuriser la mesure de la représentativité des organisations syndicales dans les branches de l’enseignement privé. La commission mixte paritaire a conservé l’essentiel du dispositif.

Je m’arrêterai sur les dispositions relatives à la validation des acquis de l’expérience, que j’ai tout particulièrement suivies en tant que rapporteur. Je salue vos propos sur la VAE, madame la ministre.

Le Sénat avait souhaité s’inscrire dans la démarche engagée par le Gouvernement et par l’Assemblée nationale, qui visait à donner un nouveau souffle à la VAE en la rendant plus accessible et en renforçant l’accompagnement des candidats.

Dans cette perspective, nous avons souhaité sortir d’une approche par statut en posant le principe d’une VAE ouverte à toute personne dont l’expérience est en lien avec la certification visée. La commission mixte paritaire a conservé cet apport du Sénat à l’article 4, ce qui permettra d’éviter les risques d’exclusion de certaines personnes.

Les missions du groupement d’intérêt public national créé pour mettre en œuvre le service public de la VAE devront être assurées en tenant compte des besoins en qualifications selon les territoires, comme nous l’avions souhaité.

Enfin, le Sénat avait introduit, sur l’initiative du Gouvernement, un article 4 bis visant à prévoir l’expérimentation d’une VAE « inversée », qui permettra de combiner, dans le cadre de contrats de professionnalisation, formation en alternance et parcours de VAE.

La VAE est un sujet dont nous n’avons pas fini de parler. On l’aborde souvent sous l’angle des aidants et des proches aidants. Certes, cela les concerne. Mais c’est une grande thématique, qui inclut aussi la question de la formation à tous les âges de la vie. Il y a, certes, la formation initiale et la formation continue, mais il y a aussi la valorisation des acquis de l’expérience !

Au Danemark, plus de 30 %, voire parfois plus de 50 % des personnes se forment jusqu’à l’âge de 65 ans. Au moment où nous nous interrogeons sur les questions de retraites et d’emploi des seniors, la formation tout au long de la vie est un enjeu majeur. La VAE doit permettre à chacun d’aller plus loin en matière de formation.

Nous voterons évidemment ce texte, car il fait œuvre utile !

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

La parole est à Mme Guylène Pantel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Guylène PANTEL

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons à la fin de l’examen du projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi, après la commission mixte paritaire du 9 novembre dernier.

Force est de reconnaître qu’au moment de l’inscription de ce texte à l’agenda parlementaire, le choix des mots opéré par le Gouvernement pour le qualifier nous a paru ingénieux, dans l’optique de conquérir une adhésion massive. Qui peut donc bien s’opposer publiquement à l’aspiration au plein emploi ? Peu de monde !

Toutefois, nous avons rapidement saisi qu’il s’agissait en réalité du commencement d’une série de réformes d’ampleur visant le marché du travail.

Bien que l’intention soit partagée par bon nombre d’entre nous sur ces travées, il aurait été préférable que nous puissions aborder ces travaux avec un peu plus de transparence sur les étapes qui doivent suivre dans les prochains mois. Bien que nous progressions dans un contexte incertain affectant les projections économiques, l’exposition initiale d’une feuille de route claire aurait certainement suscité des débats plus sereins, notamment avec les partenaires sociaux : syndicats professionnels et organisations patronales.

Au-delà des considérations sur la méthode, nous souhaitons saluer l’investissement de chacun pour que le chômage de masse ne soit plus une fatalité, comme l’a exprimé ma collègue Maryse Carrère en première lecture.

Nous parvenons à reconnaître que la principale disposition inscrite à l’article 1er permettra de préserver le système d’assurance chômage pendant une période transitoire durant laquelle une phase de concertation, puis de négociation sur les règles de gouvernance s’ouvrira avec les partenaires sociaux. Cela octroiera une certaine agilité au Gouvernement pour disposer d’une base permettant d’intégrer dans le futur décret les modulations des règles d’indemnisation tenant compte de la conjoncture économique. Quoi qu’il en soit, la prudence que nous exprimions à l’origine sur le potentiel détricotage de la gestion paritaire du régime d’assurance chômage reste d’actualité.

M. le ministre Olivier Dussopt s’est engagé devant les députés à ne pas modifier les conditions d’affiliation au système de l’assurance chômage et à ne pas diminuer le nombre de personnes éligibles à l’ouverture des droits. C’est naturellement une bonne nouvelle. Ainsi, la durée de six mois travaillés au cours des vingt-quatre derniers mois, issue de la réforme de 2019, est maintenue.

Nous en sommes conscients, la présomption de démission pour les salariés en abandon de poste, qui les prive de l’accès à l’indemnisation chômage, est une mesure qui répond à une préoccupation de terrain. Les apports du Sénat tendent à sécuriser le dispositif pour que le salarié puisse contester la rupture de contrat devant le conseil des prud’hommes. Soyons tout de même attentifs à ce que le jugement prononcé soit le plus rapide possible, car les salariés ne doivent pas être laissés dans l’intervalle dans une situation précaire !

Par ailleurs, la majorité sénatoriale aura réussi, dans le cadre d’un compromis avec le Gouvernement, à mettre en place l’absence d’indemnisation en cas de refus d’un contrat de travail à durée indéterminée après un CDD. Cette mesure constitue selon nous une véritable usine à gaz : au regard d’une procédure de vérification alambiquée, sa mise en œuvre risque d’être compliquée.

Le groupe du RDSE se félicite en revanche de la réforme de la validation des acquis de l’expérience, qui permet à toute personne d’obtenir une certification, un véritable diplôme, grâce à son expérience. La VAE ne s’est pas suffisamment imposée dans le paysage de la formation professionnelle. Or il s’agit d’un outil permettant de réaffirmer que l’acquisition de compétences techniques dans le cadre d’une activité professionnelle est tout aussi intéressante que la validation d’une formation initiale.

Pour conclure, nous partageons l’idée que les droits sociaux des travailleurs et des demandeurs d’emploi doivent pouvoir être préservés, sous le regard attentif d’instances de dialogue social sanctuarisées et pérennes.

Néanmoins, nous sommes quelques-uns au sein de notre groupe à éprouver un sentiment d’inachevé et à rester sur notre faim quant à la propension de ce projet de loi à répondre de manière ambitieuse aux besoins des plus exposés aux risques sociaux, en particulier au chômage, de même qu’aux besoins des secteurs d’activité qui éprouvent des difficultés de recrutement.

Ainsi, en fidélité avec leur tradition de liberté du vote, les membres du RDSE feront des choix pluriels au moment de se prononcer sur le texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Mme le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’accord trouvé en commission mixte paritaire a permis au Sénat d’élargir l’ambition du présent projet de loi.

Nous avons tout d’abord souhaité rétablir le respect du paritarisme, mis à mal par la réforme de 2018. La loi du 5 septembre 2018 dessaisit en effet en grande partie les partenaires sociaux de leurs pouvoirs, selon des règles strictement définies par le Gouvernement.

Le texte adopté en commission mixte paritaire vise donc à prévoir l’ouverture d’une négociation interprofessionnelle l’année prochaine, qui portera sur la gouvernance de l’assurance chômage, ainsi que sur les conditions de l’équilibre financier du régime. Le document d’orientation transmis pour la négociation invitera par ailleurs les partenaires sociaux à négocier sur l’opportunité de maintenir le document de cadrage issu de la réforme de 2018. Il est en effet nécessaire de tirer les leçons de l’échec de cette réforme.

Le projet de loi a ainsi pris une direction imprévue, engageant une vraie réflexion sur la gouvernance de l’assurance chômage, dans un esprit opposé à l’étatisation du régime.

Par ailleurs, lors de ses débats, le Sénat s’est attaché à protéger les droits des demandeurs d’emploi en garantissant le fait que les indemnités chômage seront octroyées de manière équitable.

Nous avons validé et sécurisé le dispositif introduit par l’Assemblée nationale sur les abandons de poste, qui sont présumés être des démissions. En effet, sauf motif légitime, l’arrêt volontaire de travail ne doit pas pouvoir donner lieu à une indemnisation au titre du chômage.

Nos rapporteurs ont également souhaité traiter la question des refus répétés d’offres d’emploi. La commission des affaires sociales avait prévu que ne puisse être ouvert le bénéfice de l’allocation d’assurance chômage au salarié qui aurait refusé un CDI à trois reprises, la même année, à la suite d’un CDD. Le constat de nombreux refus d’emplois stables à l’issue de missions d’intérim nous avait également conduits en séance à supprimer l’indemnisation de l’intérimaire refusant de poursuivre son activité en CDI.

Je tiens à féliciter nos rapporteurs Frédérique Puissat et Olivier Henno, qui ont su parvenir à un compromis en commission mixte paritaire sur ce sujet sensible. En accord avec les députés, ils ont fixé à deux le nombre de refus ne pouvant être considérés comme acceptables.

Il ne s’agit pas de sanctionner l’abandon de poste ou le refus d’un CDI. Il s’agit de faire respecter la nature assurantielle du régime d’assurance chômage. Dans le cadre de ce régime, les indemnités chômage ne peuvent s’adresser qu’aux personnes involontairement privées d’un accès à l’emploi.

Ainsi que l’a indiqué notre rapporteur Frédérique Puissat, à partir du moment où nous avons adopté ces dispositions, elles devront entrer en application. Il vous appartiendra, madame la ministre, d’accompagner les chefs d’entreprise pour leur éviter une surcharge administrative.

De même, vous aurez la responsabilité de mettre en œuvre le principe de modulation que nous avons souhaité inscrire en toutes lettres dans le projet de loi.

L’existence de nombreux emplois non pourvus et les difficultés financières du régime justifient que les règles d’indemnisation soient adaptées à la situation économique en cours, sous réserve que soient trouvés les bons paramètres de cette modulation. Nous serons donc particulièrement attentifs aux conclusions que vous rendrez sur ce point le 21 novembre prochain.

Comme l’indique son intitulé, le projet de loi vise à atteindre le plein emploi. Je tiens à souligner les apports du Sénat en ce sens, qu’il s’agisse des précisions sur l’expérimentation du CDD multi-remplacement ou du déplafonnement de la durée du CDI intérimaire.

Concernant la problématique des contrats courts, nous regrettons que la réunion en commission mixte paritaire n’ait pas permis de recentrer comme nous le souhaitions le dispositif de bonus-malus sur les cas de contrats précaires initialement visés. À un moment où les charges pèsent particulièrement sur les entreprises, il nous semblait également nécessaire de revoir le taux de leur taxation, ce que n’ont pas souhaité les députés de la majorité.

Enfin, afin de renforcer l’accès à l’emploi, le Gouvernement a souhaité créer un service public de la validation des acquis de l’expérience. Lors de l’examen du texte, nous avons décidé de l’ouvrir à tous, supprimant les aléas de statut et simplifiant davantage les procédures.

En conclusion, ce projet de loi n’est pas un texte décisif pour atteindre le plein emploi. Son ambition première était d’ailleurs d’assurer la continuité du régime d’assurance chômage au-delà du mois de novembre.

Le travail de nos rapporteurs, que je tiens tout particulièrement à saluer, a permis d’étoffer le texte en prônant le respect du travail, la protection de notre régime d’assurance chômage et la défense du paritarisme. C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera ce projet de loi.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Conformément à l’article 42, alinéa 12, du règlement, je mets aux voix, dans la rédaction résultant du texte élaboré par la commission mixte paritaire, modifié par les amendements de la commission, l’ensemble du projet de loi portant mesures d’urgence relatives au fonctionnement du marché du travail en vue du plein emploi.

J’ai été saisie de deux demandes de scrutin public émanant, l’une, du groupe Les Républicains et, l’autre, du groupe Union Centriste.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 56 :

Le Sénat a adopté définitivement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

La parole est à Mme Guylène Pantel, pour une mise au point au sujet de votes.

Debut de section - PermalienPhoto de Guylène PANTEL

Madame la présidente, lors du scrutin n° 55, portant sur l’ensemble de la proposition de résolution en application de l’article 34-1 de la Constitution, portant sur le développement économique de la filière du chanvre en France et l’amélioration de la réglementation des produits issus du chanvre, les membres du groupe du RDSE souhaitaient voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascale Gruny

Acte vous est donné de votre mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Mes chers collègues, l’ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.