Intervention de Thierry Cozic

Réunion du 17 novembre 2022 à 14h30
Loi de finances pour 2023 — Discussion générale

Photo de Thierry CozicThierry Cozic :

Les collectivités payent votre volonté de rigueur. Votre cadrage budgétaire est d’ailleurs symptomatique : vous souhaitez de toute force atteindre les 5 % de déficit en 2023 tout en baissant les impôts des entreprises. Mais qui peut croire un instant que ces mesures, pourtant si antinomiques, permettraient de financer les services publics ou de dégager les marges de manœuvre nécessaires au financement de la transition écologique ?

Si je devais résumer votre ambition budgétaire en matière environnementale, il me suffirait d’une phrase : un peu plus de vert et beaucoup plus de gris. Qu’on se le tienne pour dit : je peine à voir ce qu’il y a de « vert » à poursuivre les baisses d’impôts sans contreparties environnementales, tout en subventionnant massivement la consommation d’énergies fossiles.

Depuis cinq ans, votre politique de l’offre a permis la disparition de 50 milliards d’impôts de production au bénéfice des entreprises afin, selon vos propres mots, monsieur le ministre, de « favoriser la croissance et l’emploi ». Le tout sans jamais demander de contreparties sociales et environnementales !

La Chambre Haute n’a pas ignoré les 1, 5 milliard d’euros destinés, par le biais du fonds vert, à accompagner les efforts des collectivités territoriales en matière de transition écologique. Nous serons attentifs à ce que, comme s’y est engagé le Gouvernement, ce montant soit intégralement engagé en 2023. Nous serons tout aussi vigilants pour vérifier jusqu’où la mesure vient s’ajouter, et non se substituer, aux dépenses préexistantes.

Je note que, d’ores et déjà, la dotation annoncée de 150 millions d’euros pour la stratégie nationale pour la biodiversité en 2023 sera portée par le fonds vert. Or, en tout état de cause, ce fonds est très insuffisant pour permettre aux collectivités de réaliser les investissements de leur compétence afin d’atteindre les objectifs nationaux de neutralité carbone. Selon l’Institut de l’économie pour le climat, il faudrait investir chaque année environ 10 milliards d’euros, soit près du triple de ce qui est actuellement réalisé.

Nos collectivités territoriales ne sont absolument pas réticentes à engager le virage écologique que l’époque nous intime urgemment d’amorcer. Elles ont toutefois besoin d’être soutenues en accélérant les décaissements du fonds vert en matière de rénovation thermique des bâtiments.

Nos collectivités ont surtout besoin de retrouver des marges de manœuvre fiscales. Nous vous proposons de leur permettre, si elles le souhaitent, d’augmenter la taxe d’habitation pour les résidences secondaires.

Les grands changements sociétaux et écologiques de l’époque nous obligent à regarder l’avenir non pas avec les lunettes du passé, mais avec celles de demain. Nous soutiendrons plusieurs amendements guidés par le souci de défendre une vision du monde plus altruiste, mais tout aussi exigeante. Durant des semaines, vous nous avez vanté votre sens du compromis et de la coconstruction. Par votre soutien à nos amendements, nous pourrons vérifier si tout cela n’était qu’incantatoire.

Winston Churchill disait : « Mieux vaut prendre le changement par la main avant qu’il ne nous prenne par la gorge. » Avec ce budget, monsieur le ministre, je crains que vous ayez mordu l’avenir seul et que nous soyons, à la fin, tous pris à la gorge.

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