Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, dans ce contexte économique et social extrêmement tendu, nous abordons aujourd’hui le budget pour l’année à venir.
Il est certain que ce projet de loi de finances ne remplit pas sa part du contrat en se fondant sur des projections financières irréalistes. Monsieur le ministre, c’est à se confondre et à se perdre dans un flot d’estimations, de chiffres et de pourcentages que vous seul semblez comprendre. Et ce d’autant plus que la Commission européenne annonce une récession pour la fin de l’année et un hiver particulièrement difficile pour la zone euro.
La dette publique française actuelle dépasse les 2 900 milliards d’euros, soit 115 % du PIB. Et même si le déficit public se stabilisait à 5 % en 2023, cela n’empêcherait pas une augmentation de la dette publique.
Dans ce sombre paysage économique, vous dites vouloir préserver les ménages de l’inflation, tout en contenant au maximum le déficit public.
Cette équation s’avère impossible à réaliser. Si votre intention est louable, vos actions manquent de crédibilité pour une simple et bonne raison : après une loi visant à protéger le pouvoir d’achat, un PLF de crise et un bouclier tarifaire sur l’énergie, les Français restent fortement lésés par la hausse des prix à tous les niveaux.
« Tous ceux qui n’ont jamais mis les pieds dans un hypermarché ne connaissent pas la réalité sociale de la France d’aujourd’hui ». Ces mots appartiennent à Annie Ernaux, prix Nobel de littérature. Monsieur le ministre, je vous pose donc la question : avez-vous fait les courses récemment ? Avec une inflation alimentaire autour de 12 %, il est légitime d’interroger vos habitudes.
Selon un récent sondage réalisé par Elabe, 85 % des Français estiment se priver dans leurs achats. Bon nombre d’entre eux se demandent si, oui ou non, ils pourront se permettre de prendre des fruits ou de la viande, alors qu’il faut payer les factures d’électricité et de gaz à la fin du mois. Ils privilégieront forcément les produits de première nécessité. Tout extra dans le panier de courses est proscrit.
C’est un calcul de tous les instants qui finit par hanter le quotidien de nos concitoyens. Comment se déplacer à moindre coût ? Comment réussir à économiser ? Est-ce envisageable de partir en vacances cet été ? Mettre ou ne pas mettre le chauffage, quitte à avoir froid…
Pourtant, les Français ont répondu positivement et joué le jeu de la sobriété énergétique, en modifiant lentement et progressivement leurs comportements : non pas grâce à vos petites sorties sur les cols roulés ou le wifi, mais grâce à une prise de conscience collective de leur consommation. Ne leur demandez pas plus d’efforts qu’ils ne peuvent en fournir !
Les choses ne vont pas aller en s’arrangeant comme vous le prétendez. L’épuisement des énergies fossiles, ainsi que la transition écologique vont continuer à mettre les prix de l’énergie sous pression. Il faudra alors prendre ses responsabilités, parce que la dette publique comme la dette écologique se creusent d’année en année. Nous léguons ce fardeau insupportable aux générations futures.
La dette publique ne doit plus être un prétexte empêchant de financer une réelle transition écologique. Si nous échouons à trouver conjointement des solutions sur ces deux sujets, les dégâts économiques et humains seront inévitables.
Malheureusement, au regard de ce que vous nous proposez et de votre volonté de passer en force sur ce PLF, lequel manque cruellement de justice sociale et fiscale, vous ne semblez pas mesurer toute la gravité de la situation économique des Français et vous actez pour le moins une véritable rupture de confiance entre l’exécutif et les parlementaires.
Je voterai bien évidemment contre ce budget.