Intervention de Jean-François Longeot

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 30 novembre 2022 à 9h30
Économie circulaire dans le secteur du bâtiment — Audition de M. Jacques Vernier président de la commission des filières de responsabilité élargie des producteurs Mme Yolaine Paufichet membre du conseil national de l'ordre des architectes et M. Franck Perraud président du conseil des professions de la fédération française du bâtiment

Photo de Jean-François LongeotJean-François Longeot, président :

À l'occasion de cette table ronde sur l'économie circulaire dans le secteur du bâtiment, nous accueillons M. Jacques Vernier, président de la Commission des filières de responsabilité élargie des producteurs, Mme Yolaine Paufichet, membre du Conseil national de l'ordre des architectes et M. Franck Perraud, président du conseil des professions de la Fédération française du bâtiment.

Je salue la présidente du groupe d'études « Économie circulaire », notre collègue Marta de Cidrac, ainsi que l'ensemble des membres de ce groupe d'études, qui nous ont proposé la tenue de cette table ronde pour tirer un bilan de la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, promulguée en février 2020, dite loi « Agec ».

À l'origine de 15 % des déchets produits en France, le secteur du bâtiment est - après celui des travaux publics - une des principales sources de déchets dans notre pays. Ce secteur occupe à ce titre une place stratégique dans notre politique d'économie circulaire. Depuis la loi de transition énergétique de 2015, le bâtiment et les travaux publics font ainsi l'objet de cibles spécifiques : d'une part, ce secteur est identifié par la loi comme contributeur à l'objectif de réduction de 5 % des quantités de déchets d'activités économiques en 2030 par rapport à 2010 ; d'autre part, le législateur de 2015 avait prévu une valorisation sous forme de matière de 70 % des déchets du bâtiment et des travaux publics en 2020.

Selon les travaux préparatoires de la loi « Agec », le taux de valorisation matière des déchets du secteur du bâtiment n'atteignait pourtant que 54 % en 2019, soit 16 points de moins que l'objectif qui lui était assigné.

Cette trop faible valorisation matière des déchets du bâtiment est dommageable d'un point de vue environnemental et économique. Ces déchets exercent une double pression foncière : « en aval », car ils contribuent à la saturation des sites de stockage ; « en amont », car l'absence de circularité induit l'ouverture de nouveaux sites d'extraction de matériaux. Il faut également rappeler le bilan carbone associé à certains matériaux neufs : la seule production de ciment génère 7 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2).

Autre élément de contexte qui avait nourri les travaux préparatoires de la loi « Agec » : la multiplication des dépôts sauvages, alimentés notamment par les déchets du bâtiment.

Pour répondre à ces défis, la loi « Agec » a mis en place une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) pour les produits et les matériaux de construction du secteur du bâtiment. Le législateur a confié plusieurs missions aux éco-organismes en charge de l'organisation de cette filière REP : le développement du réemploi, de la réutilisation et du recyclage de ces déchets, par l'instauration d'objectifs contraignants inscrits dans le cahier des charges des éco-organismes ; le principe d'une reprise sans frais de ces déchets lorsqu'ils font l'objet d'une collecte séparée ; l'instauration d'un maillage territorial des points de collecte, afin que chaque artisan soit en mesure de trouver à proximité une solution de reprise de ses déchets.

Parmi les autres mesures introduites par la loi « Agec » affectant directement le secteur du bâtiment, je citerai l'amélioration du diagnostic déchets, et notamment son extension aux opérations de démolition ou de réhabilitation significative, ou encore l'amélioration de la traçabilité des déchets du bâtiment dans les devis de construction et de démolition.

Malheureusement, la mise en oeuvre de ces avancées prend du retard. Le délai législatif initial était au 1er janvier 2022, il a été repoussé au 1er janvier 2023. Les pouvoirs publics ont justifié ce retard par la crise sanitaire et la situation actuelle de tension sur l'approvisionnement pour certaines matières premières de construction ; des motifs qui, aussi légitimes soient-ils, ne doivent pas cacher la lenteur initiale des travaux préparatoires. Notre commission est consciente des difficultés inhérentes au lancement de la plus grande filière REP, mais il faut avancer.

Cette table ronde doit donc nous permettre de faire un bilan d'étape de la mise en oeuvre de la loi « Agec » et des difficultés d'application qui persistent. J'espère qu'elle ouvrira également des perspectives : en matière de réemploi et de réutilisation, notamment, nous devons et nous pouvons faire beaucoup mieux, alors que le contexte géopolitique et économique nous pousse à réduire notre dépendance à certaines matières premières.

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