Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable sur les crédits relatifs à l’aménagement numérique du territoire compris dans le programme 343, « Plan France Très haut débit », de la mission « Économie ».
Nous lancerons toutefois cette année un appel à la vigilance sur le déploiement de la fibre optique, notamment sur trois points qui ont déjà été évoqués à cette tribune.
Premièrement, l’objectif de couverture de 80 % du territoire par la fibre optique, d’ici à la fin de l’année 2022, semble en bonne voie. De plus, le fort dynamisme des déploiements dans les réseaux d’initiative publique laisse également espérer l’atteinte de la cible dans un futur proche. Cependant, le ralentissement des déploiements en zone d’initiative privée est inquiétant : le nombre de logements rendus raccordables a par exemple chuté de 54 % par rapport à 2021 en zone Amii et de 47 % en zone très dense. Je rappelle que la zone Amii n’est couverte en fibre qu’à 87 %, alors que les opérateurs devaient initialement assurer une couverture intégrale avant la fin de l’année 2020.
Si les pouvoirs publics ne disposent pas de leviers d’intervention en zone très dense, l’Arcep – cela a été dit – a la responsabilité de rappeler les opérateurs aux engagements qu’ils ont pris s’agissant des zones Amii, en ayant recours à ses pouvoirs de sanction, si nécessaire.
Deuxièmement, pour les raccordements complexes, 150 millions d’euros ont été prévus par le Gouvernement afin d’apporter une rallonge financière via un mécanisme d’appel à projets animé par les collectivités territoriales dans les zones d’initiative publique. Ces moyens supplémentaires sont nécessaires, mais loin d’être suffisants : les raccordements complexes, caractérisés par un déficit de génie civil sur la partie terminale du raccordement, représenteraient de un à deux millions de prises ; les besoins financiers dépasseraient un milliard d’euros. Surtout, la pertinence même de cet outil est sujette à interrogation.
Monsieur le ministre, plutôt que de lancer un appel à projets, ne serait-il pas préférable d’instituer un dispositif de financement pérenne, permettant une péréquation entre les territoires, conformément aux principes fondateurs du plan France Très haut débit ?
Troisièmement, concernant la résilience des réseaux numériques, une réflexion doit être engagée sur les effets du dérèglement climatique sur les réseaux de fibre, qui sont en majorité installés par voie aérienne – cela a déjà été rappelé. Plus largement, il nous faut anticiper les dépenses liées à l’exploitation et à la maintenance des réseaux, qui sont particulièrement élevées en zone d’initiative publique. Or le plan France Très haut débit ne prévoit, pour l’heure, aucun mécanisme de solidarité financière entre les territoires sur ce point. Comme les déploiements de réseaux progressent, il convient à présent de réfléchir aux actions nécessaires pour assurer leur fonctionnement dans la durée.