Intervention de Daniel Salmon

Réunion du 24 novembre 2022 à 21h30
Loi de finances pour 2023 — Compte de concours financiers : prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés

Photo de Daniel SalmonDaniel Salmon :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le budget consacré cette année à la mission « Économie » est très représentatif d’une politique court-termiste du Gouvernement, composée de mesures disparates, conjoncturelles et curatives, une politique qui continue à aider en priorité les grands groupes. Les grandes promesses d’après-covid d’aller vers une plus grande résilience de notre système productif et de notre tissu économique et industriel ne sont pas là.

Le Gouvernement a retenu, dans le texte sur lequel il a engagé sa responsabilité, un amendement tendant à augmenter de 4 milliards d’euros les crédits du programme 134 afin de financer la compétitivité des entreprises électro-intensives face à la hausse du coût de l’énergie. Ce montant n’est pas sans poser question par son poids au sein de la mission et au regard d’autres secteurs d’activité également affectés par la crise.

Avant de revenir sur ce sujet, permettez-moi d’abord d’analyser ici les crédits initialement demandés pour 2023.

À périmètre constant, hors programme 367, les autorisations d’engagement augmentent de 20 % et les crédits de paiement de 8, 5 %. Cependant, cette hausse est en trompe-l’œil : elle est liée en grande partie à l’augmentation de la compensation carbone pour les entreprises et à la rebudgétisation des prestations réalisées pour l’État par la Banque postale, auparavant financées par la Caisse des dépôts et consignations.

Quant au commerce et à l’artisanat, comme le soulignait notre rapporteur pour avis, ils sont les parents pauvres de cette mission, plus aucun crédit ne venant abonder ces secteurs phares pour l’économie de nos territoires.

C’est pourquoi nous proposerons un amendement visant à rétablir le Fisac, qui jouait un rôle central dans la lutte contre la désertification économique et commerciale en zone rurale et contre la dévitalisation des centres-villes. Il apportait des aides ponctuelles et ciblées, dans un objectif de complémentarité, voire de rééquilibrage, avec une action locale parfois insuffisante, faute de crédits disponibles.

Nous voulons également alerter sur la DGCCRF : alors que ses missions, de plus en plus complexes, se sont démultipliées ces dernières années, le Gouvernement refusait de lui octroyer les moyens humains et financiers indispensables pour assurer ses objectifs d’intérêt général. Pis, elle a vu ses effectifs fondre en perdant près de 1 000 agents en quinze ans !

Si les treize ETPT supplémentaires prévus dans ce texte sont bienvenus et permettent de stopper l’hémorragie, ils sont clairement insuffisants. Nous soutiendrons vivement les amendements visant à lui octroyer des crédits supplémentaires, premier pas nécessaire si l’on veut amorcer enfin, comme nous l’espérons, une nouvelle dynamique pour cette administration clef, notamment pour la protection des consommateurs.

J’en reviens aux crédits relatifs à l’industrie.

Une part massive des crédits alloués à la mission « Économie » va donc servir à la « compensation carbone des sites électro-intensifs ». Au total, 856 millions d’euros financeront 500 sites – soit pratiquement 150 % de plus par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. À ce montant, il faut ajouter les 4 milliards d’euros du nouveau dispositif de soutien.

Si l’on entend, bien entendu, la nécessité d’assurer le maintien des capacités de production, on peut néanmoins s’interroger sur le niveau de cette hausse exponentielle, qui s’accroît d’année en année, et sur l’accumulation de dispositifs d’aides pour des entreprises qui ont un impact écologique très important.

Il faudrait bien plutôt amorcer une réelle transition et orienter l’action publique vers l’accompagnement de la transformation de nos modes de production et de consommation et vers la sobriété énergétique.

En ce sens, le budget de l’État doit soutenir davantage, entre autres, l’économie sociale et solidaire, un modèle de référence pour l’économie de demain, à travers le respect des écosystèmes et le partage de la valeur au service du bien commun. Un soutien bien plus massif doit être entrepris pour en faire un outil de résilience de l’économie dans les territoires.

En conclusion, si nous saluons la préservation globale des crédits, la mission « Économie » ne permettra ni de créer des emplois ni de faire progresser nos entreprises dans la voie de la bifurcation écologique. Hélas, nous n’avons toujours pas pris la mesure de la gravité de la situation !

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