Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les interventions des rapporteurs, j’aimerais, au nom du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, vous faire part de notre appréciation globale sur l’ensemble du projet de budget de la mission « Économie » dans le projet de loi de finances pour 2023.
Nous étudions les crédits de cette mission dans un contexte de retour inédit de l’inflation.
Notre rapporteur pour avis Franck Montaugé vient d’exposer, dans ce contexte, l’utilité de la compensation carbone des entreprises électro-intensives. C’est un effort massif, mais indispensable.
Cependant, notre rôle de parlementaire est de voir et d’anticiper au-delà de la conjoncture immédiate. L’enjeu majeur, pour notre économie, particulièrement pour notre industrie, est l’investissement technologique et matériel dans la décarbonation. La compétitivité de demain est conditionnée à la sortie du monde thermo-fossile.
Quels outils budgétaires et publics met-on en place au service du renouveau des politiques industrielles et pour l’accélération des transitions énergétiques ? Comment prolonger l’effort nécessaire engagé par les crédits du plan de relance avec des outils et des moyens adaptés, y compris pour les PME et les ETI ? Cela n’apparaît pas clairement à la lecture du budget. Je ne vois pas aussi distinctement que M. Lemoyne la « main visible » de l’État !
Si nous voulons que notre économie recouvre sa souveraineté industrielle, sa position industrielle, nous ne devons pas manquer de relever ces nouveaux défis.
Nous devons tirer les leçons d’hier, qui ont conduit à désindustrialiser. Or nous payons très cher cette désindustrialisation, comme en témoigne le déficit abyssal de notre commerce extérieur. Cette année, ce déficit catastrophique dépassera 150 milliards d’euros ! Il importe que nous retrouvions des spécialisations industrielles compétitives décarbonées. C’est une première étape essentielle.
Outre les politiques macroéconomiques visant à accroître la compétitivité, la question de l’efficience des dispositifs de soutien à l’exportation se pose.
Franck Montaugé a évoqué, à juste titre, la nécessité de renforcer les moyens de Business France. Le précédent contrat d’objectifs et de moyens conclu entre cette agence et l’État a conduit à une baisse importante du financement de Business France au cours des cinq dernières années.
Cela a été compensé, nous dit-on, par divers financements exceptionnels dans le cadre de mesures d’urgence, puis au travers du plan de relance. Il n’en demeure pas moins que le financement global de Business France n’est pas à la hauteur, surtout si on le compare à ses homologues étrangers, notamment européens.
Le rapport de la Cour des comptes sur Business France qui a été publié en 2021 est, à cet égard, édifiant : le différentiel de financement public est quasiment de 1 à 4 entre l’agence et son homologue britannique. L’agence italienne ICE bénéficie, quant à elle, d’un financement public d’un montant double de celui de Business France.
La Cour des comptes relève également, dans un rapport d’octobre 2022 sur les dispositifs de soutien à l’exportation, que le contrat d’objectifs et de moyens incite Business France à maximiser ses recettes, principalement via les volontariats internationaux en entreprise (VIE). Cette recherche de ressources pénalise la mise en œuvre d’une stratégie fondée sur des priorités sectorielles et géographiques. Elle pénalise aussi l’accompagnement des entreprises dans la durée. Un financement public plus large, à la hauteur de nos homologues européens, est donc indispensable pour rendre cette politique de soutien plus performante en matière de chiffre d’affaires réalisé à l’export.
Un autre sujet nous tient à cœur : les crédits liés à la consommation, qui ont attiré toute notre attention.
Dans la droite ligne du rapport d’information que Fabien Gay, Françoise Férat et moi-même avons présenté, en juin dernier, sur l’information du consommateur, je souhaite faire écho aux propos du rapporteur pour avis Serge Babary concernant la DGCCRF. Alors que les effectifs de celle-ci ont baissé de 15 % depuis près de dix ans, nous soutenons l’amendement de la commission des affaires économiques visant à augmenter ses moyens.
Concernant l’Institut national de la consommation et les associations de consommateurs, les moyens des uns et des autres sont, depuis des années, très malmenés. Ils contribuent pourtant largement et régulièrement à alerter les consommateurs sur les risques et dangers. Ils sont, dans leur diversité, un facteur important de formation et d’information de nos concitoyens. Il y a urgence à les soutenir davantage !
Enfin, je veux achever mon propos en évoquant la situation générale de l’économie sociale et solidaire (ESS). Je dois regretter que la feuille de route ministérielle sur l’ESS, adoptée à la suite du séminaire gouvernemental d’août 2022, ne soit pas suivie d’effets budgétaires suffisants dans le projet de loi de finances pour 2023.
Dans le cadre des travaux du groupe d’études ESS du Sénat, nous avons pu constater le manque de moyens des chambres régionales de l’économie sociale et solidaire (Cress) pour développer l’ESS dans nos territoires. Nous défendrons un amendement visant à y remédier.
J’ajoute que nous avons besoin, pour l’avenir, d’un document budgétaire retraçant l’effort de l’État en faveur de toute l’économie sociale et solidaire. Cela permettrait un pilotage plus fin et plus sûr. Mon groupe a déposé plusieurs amendements visant à soutenir ce pan très important de l’activité économique, qui fait montre d’une grande résilience.
L’ESS est vraiment une filière de transformation écologique, économique et sociale de notre pays ; c’est un formidable creuset d’innovation sociale. Soutenons-la plus fortement !