Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis afin d’aborder le retour de commission mixte paritaire du PLFR de fin de gestion.
Je me félicite qu’un accord ait été trouvé entre les deux chambres. Alors que les 49.3 s’enchaînent, il est important de constater que, sur ce texte, la représentation parlementaire s’en sort par le haut.
Il est notable, tout d’abord, de constater que les aides accordées aux associations de distribution de denrées alimentaires, aux foyers qui se chauffent au bois ou aux pellets, aux universités, aux armées, à l’Ukraine ou aux agriculteurs ont été maintenues.
Un autre motif de satisfaction vient du travail que le Sénat a fait sur le nouvel article 9 DA du présent texte.
En effet, auparavant, les communes pouvaient reverser tout ou partie du produit de la part locale de la taxe d’aménagement aux structures intercommunales. L’article 109 de la loi de finances pour 2022 est venu modifier les mots « peut-être » pour les remplacer par le mot « est ». Ce faisant, le reversement, jusque-là simple faculté pour les communes, est devenu obligatoire. Cette obligation de reversement niait le fondement même de la dynamique de coopération intercommunale.
C’est à la commune de garder la capacité d’apprécier librement, en bonne intelligence avec l’intercommunalité, la pertinence d’un partage éventuel de la taxe d’aménagement avec l’EPCI, en fonction des équipements publics intercommunaux qu’elle accueille sur son territoire.
Faire de cette faculté une obligation relevait de l’infantilisation des maires, à qui il fallait imposer ce que la loi leur permettait déjà de faire s’ils jugeaient une telle répartition légitime.
Le nouveau texte vise à revenir à la situation antérieure à celle qui a été créée par l’article 109 de la loi de finances pour 2022 ; c’est louable.
Les maires ne méritaient pas une telle infantilisation ; ils méritent au contraire toute notre considération, laquelle doit se transcrire par l’apport de moyens nécessaires à l’exercice de leurs missions.
Sur ce point, une étude du cabinet d’audit S&P estime que les collectivités locales vont perdre 3 milliards d’euros par an de budget avec la stabilisation de la dotation globale de fonctionnement (DGF), la suppression de la taxe d’habitation issue de la réforme de la fiscalité locale en 2021 et la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE).
Monsieur le ministre, vous prévoyez que les collectivités locales contribuent pour un quart à la réduction des dépenses publiques de 2023 à 2027. Je le dis sans ambages, c’est pour elles un lourd fardeau, étant donné qu’elles ne représentent que 19 % des dépenses, 8 % de la dette et qu’elles n’ont pas de déficit.
Je pense aussi que cela pourrait affecter négativement le tissu économique local, car il n’est pas inutile de rappeler que les collectivités représentent plus de 60 % de l’investissement public total. De fait, leur investissement devrait baisser de 12 % hors inflation d’ici à 2024 par rapport à son pic de 2019.
Tous vos dogmes mènent donc à la baisse des impôts de production, qui, sous couvert de garantie de compétitivité des entreprises, n’ont de cesse de baisser.
Car le mythe d’une spirale des petits entrepreneurs écrasés par la fiscalité locale n’existe pas. Cette baisse des impôts de production est en réalité la poursuite d’une logique plus générale de baisse des prélèvements, qui conduit à sacrifier l’investissement public sur l’autel de la compétitivité.
Pour s’en convaincre, la littérature scientifique ne met pas en évidence un lien entre niveau de fiscalité et dynamisme des entreprises, et l’on sait que la création d’emplois par les entreprises dépend autant de leur lieu d’implantation, qui est modelé par l’investissement public, que de leurs caractéristiques individuelles.
Vous le savez, la baisse des impôts de production affecte le financement de nos collectivités locales.
Si l’État déclare la compenser à l’euro près, il devient malgré tout décideur et revient sur l’autonomie financière des collectivités. C’est précisément pour cette raison que, dans sa note, le Conseil d’analyse économique recommande d’affecter aux régions une part des recettes de la TVA en fonction du poids des collectivités dans la valeur ajoutée globale des entreprises.
Dans une certaine mesure, ce PLFR de fin de gestion va dans le bon sens. Néanmoins, parce qu’il traduit encore l’idéologie qui est la vôtre, notamment eu égard à la mise sous tutelle des finances des collectivités locales et à la baisse chronique des impôts de production, le groupe SER s’abstiendra.