Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Réunion du 25 novembre 2022 à 14h30
Loi de finances pour 2023 — Justice

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, vous ne serez pas étonnés que le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, comme tous les autres dans cet hémicycle, salue l’augmentation de crédits prévue pour cette mission, même si, j’y reviendrai, nous aurons des questions à poser concernant la réalité de cette augmentation.

Je souhaite simplement souligner quelques points.

En ce qui concerne tout d’abord la méthode, le comité des États généraux de la justice avait affirmé dans son rapport le besoin de ce rehaussement budgétaire, mais il précisait aussi la nécessité de repenser de façon systémique et articulée l’institution judiciaire, en soulignant que, avant de poser la question des moyens, il fallait clarifier les objectifs assignés à la justice. Comment avez-vous appréhendé cette démarche, monsieur le garde des sceaux ?

Mon groupe apprécie l’effectivité de l’augmentation du budget de la justice au regard du contexte inflationniste. S’il convient de souligner cette augmentation, a fortiori parce qu’elle intervient à la suite d’autres augmentations, notre collègue Lefèvre, dans l’excellent rapport de la commission des finances, note que le budget de la justice augmente certes de 7, 7 % en valeur, mais de 3, 2 % seulement en euros constants. Il importe de le souligner.

Par ailleurs, monsieur le garde des sceaux, pouvez-vous nous éclairer sur vos prévisions d’exécution au regard de la sous-exécution des crédits consacrés à l’investissement dans le budget précédent ?

Au sein de notre groupe, nous avons une divergence d’appréciation concernant votre vision quelque peu sécuritaire de la justice, qui s’inscrit dans la continuité des budgets des précédentes années.

Je ne rappellerai pas que le nombre de magistrats et de personnels de justice en France est insuffisant par rapport aux autres pays. Je saluerai plutôt, au nom de mon groupe, les créations d’emplois et les revalorisations salariales qui, même si elles ne résolvent pas les problèmes liés au défaut d’attractivité des métiers, ont toute leur importance.

Nous notons la hausse du budget dédié au bracelet anti-rapprochement, mais nous souhaiterions savoir, monsieur le garde des sceaux, si cela est dû au changement de prestataire ou s’il s’agit d’un renforcement du dispositif.

Mon groupe présentera plusieurs amendements.

Le premier, partagé me semble-t-il sur l’ensemble des travées, vise à revaloriser l’unité de valeur de l’aide juridictionnelle à 42 euros, comme cela était proposé dans le rapport de la mission Perben. En tant qu’ancien avocat, monsieur le garde des sceaux, vous savez combien cette revalorisation est indispensable pour améliorer l’accès au droit des justiciables en difficulté financière.

Par ailleurs, en cette journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, nous présenterons un amendement visant à instaurer une juridiction spécialisée en charge des violences sexuelles, intrafamiliales et conjugales. Nous avons déjà formulé cette proposition par le passé, et nous continuerons inlassablement de la porter.

Vous le savez, notre modèle est le modèle espagnol, dont je rappellerai quelques résultats, car vous semblez douter de son efficacité, monsieur le garde des sceaux. Depuis 2004, l’Espagne enregistre 25 % de féminicides en moins. Chaque année, quelque 56 000 femmes sont protégées dans ce pays, où deux fois plus de condamnations qu’en France sont par ailleurs prononcées. Enfin, un magistrat espagnol sur trois est formé à cette matière extrêmement particulière.

Sur ce point, qui n’est pas très coûteux – vous en êtes convenu lors de nos travaux en commission des lois, monsieur le garde des sceaux –, nous souhaitons, nonobstant, qu’une mission visant à définir les contours d’une telle juridiction soit prévue, que vous nous précisiez vos ambitions budgétaires.

Sous ces différentes réserves, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicains – Jean-Pierre Sueur n’a pas eu le temps de le dire tout à l’heure – s’apprête à voter les crédits de cette mission.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion