Intervention de Bruno Le Maire

Réunion du 26 mai 2010 à 21h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 10

Bruno Le Maire, ministre :

Je n’irai pas jusqu’à dire que cette disposition est historique, parce que je pense qu’il faut réserver ce terme à des sujets plus graves, mais elle constitue tout de même une avancée très importante.

Quels sont les deux risques auxquels nous voulions parer ?

Le premier risque était de favoriser le développement de l’assurance dans le domaine agricole sans prévoir en même temps aucune disposition de réassurance publique. Tel a été la situation pendant des années. Autant dire que, dans ce cas, on n’aurait pas permis le développement de produits d’assurance, notamment pour les fourrages, parce que les assureurs ne se seraient pas engagés dans ce domaine.

Le second risque était de prévoir dans tous les cas de figure une réassurance publique. Les réassureurs privés – essentiellement Groupama, pour ne pas le nommer – auraient alors joui d’un effet d’aubaine considérable : ils auraient été amenés à estimer que, dès lors que l’État prenait de toute façon en charge les conséquences de calamités exceptionnelles, ce n’était pas la peine de faire de la réassurance privée. Bref, ils se seraient mis en retrait en se disant : « On ne finance pas, c’est l’État qui paiera ! »

Nous avons procédé à l’évaluation des capacités de réassurance privée existant aujourd’hui sur la base des données d’assureurs privés qui interviennent en France dans le domaine agricole. Christine Lagarde a travaillé, en faisant preuve d’une volonté très bienveillante, je tiens à le souligner, sur ce dossier. Ainsi, nous estimons les capacités de réassurance privée dans le domaine agricole en France à 700 millions d’euros.

Cette somme doit être mise en regard des besoins minimaux de réassurance privée, que nous estimons à 741 millions d’euros, dans la perspective d’un développement normal de l’assurance agricole dans les mois à venir, c’est-à-dire si nous atteignons les taux de 37 % dans les grandes cultures, 15 % dans les vignes, 5 % dans les fruits et 10 % dans les fourrages.

Mais nous fixons des objectifs beaucoup plus ambitieux, tels que, à échéance de cinq ans, les taux devraient atteindre : 57 % dans les grandes cultures, 37 % dans les vignes, 33 % dans les fruits et 50 % dans les fourrages. Dans cette hypothèse-là, les besoins de réassurance s’élèvent à 1, 125 milliard d’euros. Ils ne sont donc pas couverts par les capacités actuelles de réassurance privée ; d’où la nécessité absolue d’avoir un dispositif de réassurance publique.

Pour mettre en place ce dispositif de réassurance publique, nous appliquons, comme l’indiquait M. le rapporteur, le modèle du dispositif existant pour le risque terroriste, c’est-à-dire qu’il se déclenche uniquement lors de circonstances exceptionnelles.

Par ailleurs, nous débloquons les 700 millions d’euros de réassurance privée qui existent déjà pour éviter l’effet d’aubaine.

Tous ces éléments réunis permettent de mettre en place un dispositif assurantiel performant, immédiat, et qui couvre pour la première fois l’ensemble des filières agricoles en France.

Pardonnez-moi d’avoir été un peu long, mais c’est un sujet qui me tient à cœur !

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