Intervention de Gabriel Attal

Réunion du 25 novembre 2022 à 21h30
Loi de finances pour 2023 — Remboursements et dégrèvements

Gabriel Attal :

Je remercie d’emblée les rapporteurs spéciaux, les rapporteurs pour avis et les orateurs des groupes de la qualité de leurs interventions. Je m’efforcerai de répondre dans le temps imparti aux principaux sujets soulevés et organiserai mon propos autour des trois blocs de politique publique examinés à l’occasion de la discussion des crédits de ces missions.

D’emblée, je précise que nous partageons bien évidemment la préoccupation exprimée par le rapporteur spécial Jérôme Bascher et plusieurs d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, sur l’évolution des taux d’intérêt. La programmation budgétaire du Gouvernement intègre déjà une hausse des taux d’intérêt en cohérence avec un scénario pluriannuel de normalisation des conditions monétaires. Le scénario de taux retenu pour le projet de loi de finances pour 2023 est celui d’une remontée des taux longs.

Ainsi, le projet de loi de finances fait l’hypothèse que le taux à dix ans serait à 2, 5 % fin 2022, puis à 2, 6 % fin 2023. Mme Briquet s’est interrogée sur la prévision des taux et a remis en cause celle du Gouvernement de 2, 6 % à fin 2023. Ce soir, le taux des obligations assimilables du Trésor (OAT) à dix ans est à 2, 43 % ; la prévision des marchés pour la fin 2022 est égale ou inférieure à 2, 5 % et le projet de loi de finances pour 2023 est bâti sur des hypothèses structurelles et non sur les dernières données du marché, qui est évidemment très volatil en ce moment.

À M. Bilhac qui a formulé le souhait que l’Agence France Trésor revienne sur son marché domestique, je réponds que la diversité des investisseurs internationaux est un atout et non une menace, qui nous permet d’emprunter moins cher, de diversifier les détenteurs et de les mettre en concurrence. Je rappelle d’ailleurs que détenir une OAT n’ouvre qu’un seul droit, celui d’être remboursé.

Mme Goulet a demandé des précisions sur l’impact qu’aurait une augmentation des taux. Un choc de taux de 1 point par rapport au scénario de référence à 2, 6 % entraînerait une hausse de la charge de la dette de 2, 5 milliards d’euros la première année, de 6 milliards d’euros la suivante et de 16 milliards d’euros à horizon 2027. Il s’agit donc d’un enjeu absolument majeur.

Le scénario de hausse progressive des taux d’intérêt est cohérent avec le scénario macroéconomique du Gouvernement, comme avec la cible d’inflation à long terme de la Banque centrale européenne, dont le mandat est de maintenir l’inflation de long terme proche de 2 %.

Je rappelle que le calibrage d’un montant retenu pour les appels en garantie des prêts garantis par l’État en 2023, qui a été critiqué par Mme Briquet, prend appui sur les calculs réalisés par la Banque de France pour la direction générale du Trésor et actualisés au moins deux fois par an. L’évolution des appels en garantie dépend étroitement de l’évolution de la conjoncture économique et financière, de la dynamique des défaillances d’entreprises et de la bonne santé financière des entreprises. Je pense au prix des intrants, aux coûts de production, à l’accès au financement, aux liquidités, au niveau d’endettement. C’est pourquoi aucun autre élément que les prévisions susmentionnées ne permet de présager un montant final d’avances sur indemnisation pour l’année 2023.

L’isolement budgétaire de la dette covid dans un programme dédié, qui a été relevé, si ce n’est critiqué par le président de la commission des finances et le rapporteur spécial Jérôme Bascher, a pour objectif prioritaire de retracer dans les comptes publics de manière lisible et claire le montant des dettes d’État résultant de la crise sanitaire et d’afficher une trajectoire de remboursement de cette dette entre 2022 et 2042. L’intégration de la charge des intérêts avec la dette elle-même, qui matérialise le coût complet de l’effort national, est en effet inhabituelle, mais s’apprécie au regard de sa vertu pédagogique.

J’en viens au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». Je rappelle d’emblée que, de manière constante, tous les gouvernements ont fait le choix de retenir un montant notionnel de prévisions de recettes et de dépenses, afin de ne pas donner de signaux au marché. Le Gouvernement est en effet soumis à plusieurs obligations : d’abord – et c’est la première d’entre elles –, l’information et la transparence à l’égard du Parlement, ensuite, gérer au mieux les données publiques et défendre les intérêts du contribuable, ce qui suppose de ne pas révéler ses intentions au marché, enfin, protéger la réputation d’entreprises, dont les difficultés potentielles pourraient nécessiter en cours d’année des opérations de recapitalisation.

C’est cette tension entre ces différents impératifs qui s’impose au Gouvernement et qui justifie l’inscription de crédits notionnels qu’a soulignée Mme Jacques dans son intervention. Malgré ces contraintes, l’effort de transparence de l’État est chaque année particulièrement important, avec la publication du projet annuel de performance du compte d’affectation spéciale ainsi que d’un rapport d’activité et d’un rapport financier de l’Agence des participations de l’État, en annexe du projet de loi de finances.

Madame Jacques, notre vision d’un État stratège existe bel et bien. Elle se concrétise en recourant à trois outils d’intervention en fonds propres, dont les doctrines sont complémentaires.

Premièrement, la Caisse des dépôts et consignations investit sans horizon de temps en tant qu’actionnaire stratégique d’influence ou de contrôle dans certains secteurs prioritaires – la transition écologique, le développement économique, la cohésion territoriale, l’habitat, la cohésion sociale –, mais elle reste évidemment également attachée à des niveaux de rentabilité minimaux.

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