La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de Mme Laurence Rossignol.
La séance est reprise.
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (et article 41 B).
La parole est à Mme la rapporteure spéciale.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la promesse du Gouvernement de « réarmement de l’État territorial » trouve une traduction budgétaire d’une ampleur très limitée. En effet, les effectifs de l’administration territoriale de l’État augmenteront en 2023 de 48 ETP, soit une hausse de seulement 0, 16 %. Peut-être s’agit-il de l’amorce d’un changement de paradigme, mais, en tout état de cause, c’est une avancée bien limitée au regard des enjeux considérables de la mission.
Je souhaite aborder, dans un premier temps, les grands enjeux de la réforme de l’organisation territoriale de l’État.
Les préfets sont au cœur de la réforme, singulièrement les préfets de région, qui peuvent, en fonction des priorités locales et nationales, redéployer jusqu’à 2 000 équivalents temps plein par an entre diverses missions budgétaires.
Outre la mission « Administration générale et territoriale de l’État » (AGTE), les mouvements concernent les missions « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », « Écologie, développement et mobilité durables », « Culture », « Travail et emploi », « Solidarité, insertion et égalité des chances » et « Économie ».
Alors que le bilan des redéploiements devait faire l’objet d’un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances rectificative, aucun amendement n’a été déposé avant la réunion de la commission mixte paritaire. Cette situation nuit à l’information du Parlement au sujet des priorités mises en œuvre dans les territoires.
Par ailleurs, les secrétariats généraux communs départementaux rencontrent d’importantes difficultés. Manifestement, cette réforme n’a pas été suffisamment anticipée.
Les chantiers de convergence doivent impérativement s’accélérer dans le périmètre de l’administration territoriale de l’État, pour que ces services puissent fonctionner dans de bonnes conditions.
Dans son rapport sur les effectifs de l’administration territoriale, la Cour des comptes dresse des constats que je partage entièrement. Elle considère ainsi que les suppressions de postes de ces dernières années « n’ont pas été réalistes » au sein des préfectures, qui « ne fonctionnent qu’au moyen de contrats courts qui précarisent leurs titulaires et désorganisent les services ».
La Cour des comptes fait également le constat que « le plan Préfectures nouvelle génération (PPNG) de 2016 a été conçu pour adapter les missions aux réductions d’effectifs et non l’inverse ». Et elle poursuit : « En dix ans, le programme a réalisé un schéma d’emplois […] cumulé de -4 748 équivalents temps plein, soit plus de 16 % des emplois de 2010. » Au rythme du réarmement annoncé pour 2023, il nous faudrait un siècle pour parvenir à la situation de 2010…
Le ministère de l’intérieur a également mis en place un document stratégique, Missions prioritaires des préfectures 2022-2025. Ce document porte mal son nom, puisque, loin de prioriser certaines missions par rapport à d’autres, il se contente de reprendre l’ensemble des missions des préfectures.
Il est donc nécessaire que l’État clarifie son discours : ou bien les préfectures doivent prioriser leurs missions et, à ce titre, les missions les moins importantes auront vocation à abonder, en moyens et en emplois, les missions prioritaires ; ou bien aucune mission ne peut perdre d’emploi – c’est d’ailleurs mon avis – et il faut conforter en urgence les effectifs et les moyens des préfectures.
Par ailleurs, depuis plusieurs mois, les délais d’obtention des cartes nationales d’identité et des passeports atteignent des délais inacceptables. À la fin du mois de mai dernier, une personne souhaitant obtenir un passeport ne pouvait en moyenne espérer en disposer avant la mi-septembre.
Si le Gouvernement a augmenté la dotation titres sécurisés à destination des communes, l’augmentation du nombre de dispositifs de recueil ne me semble pas en phase avec l’évolution des demandes de titres.
Concernant l’accueil des publics étrangers en préfecture, dont on ne connaît que trop les nombreuses difficultés, des renforts en contractuels sont prévus jusqu’en 2024. Ce choix regrettable du Gouvernement de recourir une fois de plus aux vacataires laisse penser qu’il ne s’agit que de renforts ponctuels, alors que la priorité devrait être de consolider les services et de fidéliser des compétences.
Pour conclure, je souhaite évoquer la situation des intervenants sociaux dans les commissariats de police et les unités de gendarmerie. Vous en conviendrez sans doute, madame la ministre, ils jouent un rôle majeur pour l’accueil des victimes en situation de fragilité : femmes victimes de violences intrafamiliales, personnes en situation de handicap, etc.
J’appelle de toute urgence à clarifier le régime de financement de ces intervenants, alors que l’État se désengage au détriment des associations et surtout des départements. En la matière, je souhaite que l’État suive au minimum les recommandations d’un rapport de l’inspection générale de l’administration, en stabilisant ses financements à hauteur de 33 % de prise en charge par le fonds interministériel de prévention de la délinquance.
Au regard de ces considérations, la commission a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits de la mission.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen des crédits de la mission « AGTE » n’appelle pas d’observations particulières en ce qui concerne le programme 232, « Vie politique » – la forte diminution des crédits, de l’ordre de 75 %, s’explique par un calendrier électoral à ce jour moins chargé en 2023 ! – et le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », dont l’augmentation sert à financer la stratégie immobilière du ministère et le renforcement des moyens du fonds interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation.
C’est donc bien la question des moyens alloués au programme 354, « Administration territoriale de l’État », qui constitue l’enjeu essentiel de la mission, tant est préoccupante la situation du réseau préfectoral, en premier lieu celle de l’échelon de proximité que représentent les sous-préfectures.
Le projet annuel de performance de la mission « AGTE » prévoit un véritable réarmement de l’État territorial, dans la continuité du document Missions prioritaires des préfectures 2022-2025 et du projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, qui prévoyaient déjà un renforcement des services déconcentrés.
Je salue la prise de conscience salutaire du Gouvernement, qui semble désormais comprendre que l’État ne peut continuer à diminuer sa présence dans les territoires sans risquer d’amplifier le sentiment d’abandon de nos concitoyens comme des élus locaux.
Toutefois, ces annonces interviennent après des années de coupes budgétaires drastiques, qui ont conduit à la suppression cumulée de 14 % de l’effectif initial de l’administration territoriale de l’État entre 2012 et 2020, et de réformes incessantes, qui ont mis à mal les services de l’État.
Je rappelle que les secrétariats généraux communs départementaux ont été créés le 1er janvier 2021, afin de mutualiser les fonctions support des préfectures et des directions départementales interministérielles et de faire des économies.
Nous n’avons pas encore eu le temps de dresser le bilan de cette réforme que le Gouvernement déploie déjà un nouveau plan d’action pour les préfectures à horizon 2025.
L’annonce de la création de 210 équivalents temps plein dans les trois prochaines années, l’ouverture de six sous-préfectures cette année – dont cinq sont en réalité des déjumelages de sous-préfectures fermées au gré des réformes administratives successives – m’apparaissent dérisoires au regard des besoins et de l’atrophie qu’a subie l’administration territoriale de l’État depuis plus de dix ans.
Ainsi, pour l’année 2023, le projet de loi de finances prévoit de revaloriser le schéma d’emplois à hauteur de 48 ETP, soit certes une hausse, mais modeste, de 0, 16 % du nombre d’emplois.
De même, si je salue l’augmentation de l’ordre de 13 % en autorisations d’engagement et de 7 % en crédits de paiement, il convient de rappeler que l’impact réel de cette hausse est minoré par la revalorisation du point d’indice dans la fonction publique, dans un contexte de tensions inflationnistes.
Dans ces conditions, le réarmement de l’État territorial relève plus de la communication que d’une réelle conviction du Gouvernement.
Pour ces raisons, la commission des lois a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits de cette mission.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Dominique Théophile.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la mission « Administration générale et territoriale de l’État », pilotée par le ministère de l’intérieur et des outre-mer, verra en 2023 ses crédits augmenter de 10, 32 % en autorisations d’engagement et de 4, 14 % en crédits de paiement, sous l’effet principalement de la hausse du coût de l’énergie, d’investissements importants dans l’immobilier et dans le numérique et, d’une manière générale, du réarmement de l’État dans nos territoires.
Le programme 354, « Administration territoriale de l’État », qui représente à lui seul 60 % des crédits de la mission, porte les moyens du réseau préfectoral et des services placés sous l’autorité des préfets de région et des directions départementales interministérielles. En 2023, il connaîtra une hausse de ses crédits de paiement de 13, 3 % par rapport à 2022, afin de renforcer, de manière inédite, les moyens et les effectifs de l’administration territoriale de l’État.
Le nouveau schéma d’emplois triennal, qui prévoit une augmentation de 210 ETP, dont 48 pour la seule année à venir, est bien sûr à saluer et à mettre en perspective avec le nombre d’emplois supprimés entre 2012 et 2020.
Cette évolution traduit, je l’ai dit, le renforcement de la capacité d’action de l’État. Elle met fin à plus de vingt années de réduction systématique des effectifs départementaux et – nous le souhaitons – à la lente érosion des liens entre l’État et ses citoyens.
Conformément aux recommandations de la Cour des comptes, un rééquilibrage de la répartition des emplois entre les préfectures devrait par ailleurs être progressivement mis en œuvre, au profit des territoires les plus exposés. Je pense notamment à Mayotte.
Autre motif de satisfaction : le nombre d’apprentis dans le réseau de l’administration territoriale devrait continuer à croître en 2023. Rappelons que 622 apprentis étaient présents dans ce réseau au 31 décembre 2021 ; ils étaient deux fois moins nombreux en 2020.
Enfin, l’Agence nationale des titres sécurisés verra ses effectifs augmenter pour tenter de répondre aux difficultés rencontrées un peu partout en France dans la délivrance des titres sécurisés.
Sans surprise, le programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative », qui regroupe les crédits destinés à l’organisation des élections de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et à l’aide publique aux partis enregistrera, en 2023, une baisse importante, du fait de l’absence d’élections d’envergure au suffrage direct.
Notons cependant, puisque le sujet nous concerne tout particulièrement, que l’organisation des élections sénatoriales de septembre 2023 et des élections territoriales en Polynésie française nécessitera quelque 37, 71 millions d’euros en autorisations d’engagement, soit une baisse de 79, 90 % par rapport à 2022.
Je dirai quelques mots, enfin, sur le programme 216, « Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur », qui porte les moyens et les emplois d’une grande partie de l’administration centrale du ministère de l’intérieur et des outre-mer.
Avec 1, 96 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1, 87 milliard d’euros en crédits de paiement, il bénéficiera, en 2023, de la plus forte augmentation de crédits, en valeur comme en volume.
Le fonds interministériel de prévention de la délinquance, créé en 2007, sera par ailleurs doté, en 2023, de 84 millions d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Il permettra de financer la réalisation d’actions de prévention de la délinquance, de sécurisation ou de prévention de la radicalisation.
Dans leur rapport, les commissions des finances et des lois ont estimé, et nous le regrettons, que les moyens alloués à cette mission n’étaient pas à la hauteur des ambitions affichées. Je vous propose, à l’inverse, de ne pas bouder notre plaisir de réarmer notre État territorial, en adoptant ces crédits.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, au travers de la mission « AGTE », le ministère de l’intérieur met en œuvre trois de ses responsabilités fondamentales : garantir l’exercice des droits des citoyens, assurer la présence et la continuité de l’État dans le territoire et mettre en œuvre au plan local les politiques publiques nationales.
Notre propos portera principalement sur le programme 354 relatif à l’administration territoriale.
Tout d’abord, le constat du retrait de l’État territorial est unanime. Tout le monde s’accorde à dire que ce dernier se trouve actuellement dans une phase de recul, le dernier rapport de la Cour des comptes sur les effectifs de l’administration territoriale de l’État et le récent rapport d’information de nos collègues Agnès Canayer et Éric Kerrouche en témoignent.
Ainsi, la Cour des comptes constate que l’administration territoriale de l’État a perdu 14 % de ses effectifs en une décennie et que les baisses subies par les services déconcentrés sont souvent disproportionnées par rapport à celles supportées par les services centraux.
Au surplus, alors que les territoires doivent massivement investir dans les transitions, le ministère de l’écologie a fait le choix de faire peser cette baisse sur les services départementaux.
En définitive, la Cour juge les suppressions au sein des préfectures « irréalistes ». Elle considère que les schémas d’emplois postérieurs à 2008 mettent à mal le renforcement des missions prioritaires des préfectures, d’autant plus que ces dernières ne sont pas définies.
Le rapport de nos deux collègues Agnès Canayer et Éric Kerrouche montre que la chute des effectifs au sein des directions départementales interministérielles (DDI) est de l’ordre de 36 % en dix ans et de 10 % pour les personnels des préfectures et sous-préfectures. Cette baisse drastique et continue a été compensée par le recrutement de personnels contractuels précaires pour de courtes durées, ce qui précarise les agents, désorganise les services et complexifie leur gestion.
La rapporteure spéciale, Isabelle Briquet, abonde également dans ce sens, mettant en exergue la perte de compétences, donc la perte d’expertise de l’État, qui découle de cette stratégie d’économies de moyens.
Visiblement le Gouvernement lui-même partage ce constat. Le projet annuel de performance de la mission indique que l’évolution des moyens dédiés au fonctionnement de l’administration territoriale de l’État « traduit un renforcement de la capacité de l’action de l’État sur le terrain […], mettant ainsi fin à plus de vingt ans de réduction systématique des effectifs départementaux ».
Cependant, ces moyens sont en inadéquation avec le discours de réarmement des territoires que tient le Gouvernement. Quelle est, au fond la doctrine territoriale de l’État ?
Au vu de ce constat unanime, il aurait été logique que le Gouvernement mobilise les moyens nécessaires au renforcement de l’action de l’État dans les territoires. Pourtant, la hausse présentée dans le projet de loi de finances pour 2023 est en trompe-l’œil, car elle est principalement liée, en réalité, à l’augmentation du point d’indice et ne permet pas de répondre aux besoins. Elle représente en réalité un demi-ETP par préfecture. Par ailleurs, la répartition entre les effectifs est floue et ne précise aucun critère de détermination des redéploiements.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que la Cour des comptes a souligné le vieillissement des agents territoriaux, ce qui imposerait logiquement un recrutement échelonné au fil du temps et le développement de l’attractivité dans certaines régions.
Si le nouveau plan, Missions prioritaires des préfectures 2022-2025, marque un changement de philosophie que l’on peut saluer, les moyens alloués peinent à convaincre.
Force est de constater que les délais pour l’obtention des titres d’identité vont croissant et qu’il en est de même pour les demandes de titres de séjour.
Les collectivités n’ont toujours pas pu bénéficier d’un redéploiement d’effectifs en matière de conseil en ingénierie et de contrôle de légalité. À cet égard, la Cour des comptes estime dans un rapport récent que la qualité de contrôle se dégrade. Elle est d’autant plus critique que les recommandations formulées en 2016 n’ont pas été suivies d’effet.
Par conséquent, comme nous l’avons déjà dit les années précédentes, il y a lieu de s’interroger sur la doctrine territoriale de l’État et de réaliser un choix : soit les missions des préfectures sont de même niveau et, dans ce cas, il faut donner à l’administration les moyens de ses ambitions, soit il faut sélectionner, c’est-à-dire clarifier les missions de l’État, et renforcer certains postes.
Or le Gouvernement ne choisit pas, et « l’État touche-à-tout » perdure, sans en avoir les moyens. En conséquence, il dysfonctionne, nourrissant ainsi un sentiment d’abandon dans nos territoires, alimentant les frustrations, qui ont elles-mêmes des effets électoraux délétères.
Peu de domaines de l’action publique ont connu autant de réformes, en nombre comme en cadencement, sans qu’une évaluation soit réalisée à chaque étape.
Il est impératif pour l’État de clarifier son organisation avec ses représentants, comme son rapport aux collectivités territoriales, pour rendre l’action publique lisible et efficace et garantir un service public de proximité, qui est le pilier de notre République.
S’agissant des deux autres programmes de la mission budgétaire, le calendrier électoral de 2023 réduit à raison les crédits du programme 232, « Vie politique ».
Les investissements dans le numérique et l’immobilier, qui sont traduits dans le programme 216, sont positifs, mais d’importants efforts restent à fournir pour les applicatifs utilisés localement.
De même, si la poursuite des investissements en matière de numérique est nécessaire, il reste à évaluer les effets de leur déploiement dans le temps, car le numérique représente à la fois un besoin et une limite de l’État territorial.
Pour conclure, si l’on peut saluer la prise de conscience de l’exécutif sur le nécessaire réarmement de l’État territorial, nous partageons les conclusions de la rapporteure sur l’inadéquation des moyens mobilisés et voterons donc contre l’adoption de cette mission budgétaire.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier nos deux rapporteures, dont Cécile Cukierman, de leur travail. Elles ont très vivement rappelé l’importance et la nécessité de la présence de l’État auprès de nos habitants et de nos communes.
Lorsque je présentais la mission « Administration générale et territoriale de l’État » en 2021, je notais déjà une stagnation des moyens alloués à cette mission. Aujourd’hui, la légère hausse budgétaire que l’on peut, il est vrai, noter n’est toutefois pas à la hauteur des besoins pour compenser les dix années de désengagement de l’État dans nos territoires.
« Nous devons réarmer les territoires ». Ces mots ne sont pas les miens, mais ceux de l’ancien Premier ministre Jean Castex. La crise des « gilets jaunes », puis la crise sanitaire ont témoigné des limites de l’État dans nos territoires. Pendant plus de dix ans, on a réduit les moyens financiers et humains, ce qui a entraîné de lourdes conséquences sur la gestion quotidienne des services déconcentrés de l’État.
Pourquoi un tel désengagement ? Où en sommes-nous de cette égalité républicaine tant promise, qui pourtant n’existe que sur le papier ?
Aujourd’hui, ce sont des files d’attente à n’en plus finir devant les préfectures pour renouveler des titres de séjour, pour obtenir des demandes de naturalisation, et j’en passe. Il n’y a pas assez d’argent pour accueillir le public ni suivre les dossiers. Il n’y a pas de véritable accompagnement, puisque les méthodes sont imposées d’en haut, sans tenir compte des réalités du terrain.
Madame la ministre, les différentes réformes administratives n’ont fait qu’augmenter la défiance envers les pouvoirs publics, entraîner des suppressions de postes et faire naître un mal-être dans votre administration.
Pis encore, la forte dématérialisation – on y revient encore – accentue les inégalités et ne permet pas de renforcer la présence de l’État. Au contraire, la rationalisation prime l’humain et, de ce fait, affecte le service public.
Nous demandons le redéploiement de l’État sur le territoire et non un semblant de rééquilibrage. Les maisons France Services, qui ont été créées pour accompagner la dématérialisation, témoignent de leurs limites : les liens sont rompus avec l’administration, les agents n’ont pas la formation adéquate et l’accompagnement de l’usager se heurte à des difficultés d’accès à l’information.
C’est une réalité de nos territoires, autant dans les milieux ruraux qu’à l’échelle urbaine, et je connais bien le sujet en tant qu’élue de Seine-Saint-Denis : des milliers de gens ne peuvent accéder aux services publics pour régler leurs problèmes quotidiens.
La Défenseure des droits nous alerte sur cette dématérialisation, qui augmente le nombre de saisines, puisque l’accès aux droits est mis en cause. Encore une fois, ce sont les collectivités territoriales qui supportent toutes ces réformes, parfois sans les ressources ni l’ingénierie nécessaires.
Aussi, rappelez-vous, mes chers collègues, voilà quelques mois encore, les délais d’attente rallongés pour obtenir une carte d’identité ou un passeport. Plusieurs centaines de communes n’avaient pas les outils nécessaires à une bonne gestion. Rappelez-vous également les délais rallongés de traitement des dossiers en préfecture, faute de personnel pour s’en charger.
Les collectivités territoriales et les élus locaux n’attendent qu’une seule chose : travailler de manière intelligente avec l’État et ses représentants. Le préfet du département ou le sous-préfet doit être en pleine responsabilité dans son territoire. Il doit faire avec les élus, afin de comprendre chaque réalité territoriale et apporter les réponses nécessaires.
Le couple maire-préfet était particulièrement applaudi et félicité durant la crise sanitaire. Pour autant, le mariage semble encore loin…
Sourires.
Les politiques imposées par le haut ne permettront pas d’obtenir des résultats positifs ni d’améliorer le service public pour les habitants. Il faut faire avec celles et ceux qui sont dans la gestion quotidienne. Car, aujourd’hui, le problème est bien celui-ci : on demande aux collectivités d’assumer des missions, alors qu’on applique des restrictions budgétaires qui mettent à mal les finances locales.
L’horizontalité doit être le maître-mot pour que l’État renoue avec ses communes et sa population. C’est uniquement en renforçant les moyens humains et financiers que nous pourrons réarmer les territoires et, ainsi, lutter contre l’isolement d’une partie de nos usagers.
Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, nous ne voterons pas cette mission.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, j’évoquerai deux points dans mon intervention : la fraude documentaire et la lutte contre la radicalisation.
La fraude documentaire est un sujet majeur, qui concerne bien cette mission. À ceux qui, par pudeur ou dogmatisme, s’évertuent à nous expliquer qu’elle n’existe pas, je souhaite raconter une petite histoire.
Un individu fiché S, chef d’un réseau sophistiqué de faussaires – faux papiers d’identité, comptes bancaires usurpés, escroqueries aux prêts automobiles – a détourné 193 véhicules au moyen de 73 fausses identités, alors qu’il était mis en examen depuis 2010, et ce dans le cadre d’une affaire de financement du terrorisme !
Toujours au sujet de la fraude documentaire, permettez-moi de vous lire ce courriel assez récent, adressé par le responsable d’un commissariat de l’Orne à l’Association des maires de ce département : « Je souhaite vous sensibiliser sur le point suivant : lors de la demande de carte nationale d’identité en mairie, les usagers présentent un certificat de naissance. Ce certificat de naissance peut être vérifié par les agents via le logiciel Comedec, qui est facultatif pour les mairies, car très onéreux. » Ne croyez-vous pas, madame la ministre, qu’il serait temps que l’utilisation de ce logiciel soit gratuite ?
Par ailleurs, lorsque nous essayons, notamment à l’occasion de l’élaboration de la loi de finances, monsieur le président de la commission, d’amender les dispositifs afin d’améliorer les communications, nous voyons nos amendements être jugés irrecevables au titre de l’article 40 de la Constitution, au motif qu’ils créent des dépenses supplémentaires. Il est donc impossible aujourd’hui, si vous voulez améliorer l’efficacité d’un logiciel en raison de difficultés de communication ou dans l’échange de données, de le faire par voie d’amendement !
Madame la ministre, il faudrait tout de même que ce type d’amélioration, notamment en ce qui concerne la sécurisation des titres d’identité en mairie, puisse être évoquée avec vos services.
D’autres mesures utiles ne peuvent ainsi être adoptées par voie d’amendement, parce qu’elles constituent une dépense nouvelle. C’est dommage !
Le responsable du commissariat poursuit : « Les voyous profitent de cette faille pour se présenter dans les mairies de ces communes avec de faux certificats de naissance et une demande de carte nationale d’identité. Si l’agent de la mairie ne s’assure pas de l’authenticité du certificat de naissance, le demandeur se retrouve avec une vraie carte d’identité, mais une identité frauduleuse. »
De mon point de vue, le dispositif relève complètement de la mission « AGTE », et la situation est tout à fait réparable.
Par ailleurs, je tenais à vous signaler qu’il n’existe toujours pas de formulaire Cerfa pour les actes de naissance en France. Si le contenu de l’acte de naissance est partout le même, chaque mairie émet des documents sur son propre papier à en-tête, ce qui crée évidemment des facilités pour la fraude.
Un programme du fonds européen pour la sécurité intérieure (FSI), doté de 98 millions d’euros au titre de la programmation 2021-2027, sera reconduit. Il est destiné notamment à la lutte contre la fraude documentaire et à l’interopérabilité des systèmes d’information. Or c’est bien de cela que nous parlons. J’ajoute que la fraude documentaire est aussi favorisée par notre mauvaise communication et par le fait que nous échangeons mal les données.
Madame la ministre, je vous demande donc très officiellement de bien vouloir prendre en considération ce fonds européen de 98 millions d’euros, une enveloppe pas tout à fait anodine. Ne pourrait-on l’utiliser ? Cela éviterait au président Raynal de rendre un article 40 et nous permettrait d’améliorer les dispositifs.
En outre, on nous dit que le fichier Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) est sur le point de disparaître au profit d’un autre fichier. Cette question relève peut-être davantage de la mission « Immigration, asile et intégration », mais elle s’inscrit pourtant dans la rubrique des titres sécurisés.
Enfin, comme chaque année, je voudrais vous dire mes doutes sur le comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR). Ce comité n’a pas encore subi la moindre évaluation. Il distribue des fonds par-ci, par-là, dans une période particulièrement critique, car on parle moins de terrorisme, certes, mais le sujet de la radicalisation demeure tout aussi important. Il est vraiment fondamental selon moi d’évaluer les actions du CIPDR.
Dans le jaune budgétaire annexé au projet de loi de finances et dénommé Liste des commissions et instances consultatives ou délibératives placées directement auprès du Premier ministre ou des ministres – un très bon document, arraché de haute lutte par le Sénat –, j’ai trouvé trace d’un conseil scientifique sur les processus de radicalisation qui s’est réuni trois fois en 2017, trois fois en 2018 et six fois en 2019. Je n’ai pu savoir s’il s’était réuni en 2020 ou 2021, la crise du covid-19 expliquant peut-être cela.
En tout cas, madame la ministre, je souhaitais vraiment attirer votre attention sur ces deux points : la fraude documentaire et l’évaluation des travaux du CIPDR.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, de prime abord, les montants annoncés semblent plutôt satisfaisants. Nous observons en effet une hausse globale des crédits de paiement comme des autorisations d’engagement de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Cette augmentation traduit une volonté de réforme pluriannuelle en matière tant immobilière que numérique, ce que nous ne pouvons que saluer. Je pense en particulier au développement du système de communication des forces de sécurité et de secours de dernière génération : le réseau Radio du futur. Il est également annoncé une rationalisation des effectifs, qui est attendue, mais qui devra répondre aux besoins réels des territoires – voilà le vrai sujet !
Comment faire pour que nous cessions, comme c’est, hélas, le cas chaque année lors de l’examen de cette mission, de constater le recul de l’État dans nos territoires, notamment les plus ruraux ?
Comment faire pour cesser d’avoir encore à dénoncer l’effacement progressif des services publics de proximité au profit de la dématérialisation et du tout-numérique, qui exclut, de fait, une partie de nos concitoyens de l’accès aux services ?
Si nous nous battons dans cet hémicycle pour la liberté des collectivités et la décentralisation, nous luttons aussi pour une déconcentration efficace qui valorise le travail des préfectures et des sous-préfectures, au service des administrés. Chacun en a conscience ; il faut maintenant traduire cela en acte.
Aussi, s’il y a du bon dans la présentation budgétaire de cette mission, j’entends également les critiques portées par les rapporteurs. Elles traduisent les inquiétudes de nos territoires.
Nous sortons de dix années de réduction continue des effectifs, comme l’a très justement souligné la Cour des comptes dans son rapport. Nous ne pouvons que nous réjouir d’observer que l’année 2022 marque la fin cette trajectoire, avec une stabilisation des emplois. Il faudra inscrire ce retournement dans la durée – c’est en tout cas ce que nous souhaitons.
Du point de vue du personnel, il faut par exemple cesser de recourir à des contrats courts, par essence précaires.
Du point de vue des institutions, nous regrettons ce phénomène de multiplication des agences aussi spécialisées qu’éloignées des administrés, lesquels ne parviennent plus à trouver d’interlocuteur.
La délivrance des titres sécurisés est sans aucun doute l’exemple le plus criant de l’échec des stratégies successives visant à rationaliser et mutualiser, ce qui n’est pas toujours efficace ni nécessairement synonyme d’économies.
Nous parlons ici de quelque chose qui affecte très concrètement le quotidien des Français et qui, par la même occasion, contribue à propager les clichés qui entourent notre administration : lenteur, mille-feuille, paperasse, complexité… Tout le monde connaît quelqu’un dans son entourage qui peut lui raconter les déconvenues qu’il a subies, lorsqu’il a voulu se faire délivrer un document.
Pour l’anecdote, j’ai eu la curiosité de contacter un avocat spécialisé dans les recours en cas de carence de l’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS). Il m’a dressé la liste des décisions des juges administratifs enjoignant à l’agence de délivrer, sous astreinte, des permis de conduire à la suite de retards de plusieurs mois.
Dans ce contexte, le groupe du RDSE s’abstiendra sur les crédits de cette mission.
Applaudissements sur les travées du groupe RDSE.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, « c’est le même marteau qui frappe, mais on en a raccourci le manche » : avancée il y a près de deux siècles, cette image du rôle des préfets comme acteurs de la proximité de l’État est toujours d’actualité.
Le préfet est le bras armé de l’État territorial. Il incarne l’État au plus proche des administrés. Le débat sur l’État territorial, les services déconcentrés et la décentralisation est ancien.
À mesure du mouvement de décentralisation impulsé dans les années 1980, l’administration territoriale de la République a évolué, avec l’émergence des collectivités territoriales. Cette consécration fait apparaître le lien indéfectible entre l’État et ses services déconcentrés, d’une part, et les collectivités territoriales, d’autre part.
La bonne santé du partenariat collectivités-État, aujourd’hui consacré par le couple maire-préfet, conditionne la qualité des politiques publiques, l’exercice des droits et la bonne gestion des ressources publiques au profit des citoyens.
Nous examinons ce soir la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Composée de trois programmes, cette mission est en hausse globale, mais de manière inégale. Néanmoins, cette augmentation n’est pas à la hauteur d’un véritable réarmement de l’État dans les territoires, comme celui qu’appelle de ses vœux notre collègue rapporteure pour avis de la commission des lois, Cécile Cukierman.
La Haute Assemblée dresse ce constat depuis plusieurs années, et la bonne réception de ce message est de bon augure. Toutefois, les moyens nouvellement alloués n’effacent pas une décennie de recul de l’État dans les territoires. En effet, les sous-préfectures ont perdu un quart de leurs effectifs physiques entre 2012 et 2019, alors que les besoins ne cessaient de s’accroître.
Ces efforts salutaires ne sont pas suffisants. Et au-delà de la simple inscription budgétaire, la réflexion doit porter sur le rôle même de l’État territorial.
Comment rompre avec le sentiment d’abandon des agents et des usagers et rétablir la confiance en un État territorial performant ?
Comment mieux associer les élus de terrain aux transformations et leur redonner de la lisibilité sur l’action de l’État dans les territoires ?
Comment donner une cohérence à l’enchevêtrement des réformes successives, jamais évaluées et empilées les unes après les autres ?
Avec mon collègue Éric Kerrouche, j’ai récemment publié un rapport d’information, au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, dont le titre est signifiant : À la recherche de l ’ État dans les territoires.
En nous fondant sur une large consultation, tant d’élus des territoires que d’agents de l’État, nous avons étayé ce que nous déplorons, depuis longtemps, au Sénat : une succession, depuis quinze ans, de réformes administratives, qui transforment sans inclure suffisamment les acteurs concernés. Près de quatre élus sur cinq estiment ne pas avoir été suffisamment associés aux dernières réformes des services déconcentrés de l’État. Et 43 % des préfets et sous-préfets consultés ont le même sentiment.
Le diagnostic est cinglant : l’État est à la peine face aux attentes des élus locaux. La moitié des maires des communes de moins de 1 000 habitants estime que l’offre de services publics sur son territoire est défaillante. Un nombre croissant de communes se tourne vers le département, l’intercommunalité ou le secteur privé en matière d’ingénierie territoriale.
Aussi, nous avons formulé plusieurs recommandations.
Tout d’abord, il faut ancrer le préfet au cœur de l’État territorial. La crise sanitaire a souligné les bénéfices du couple maire-préfet. Il est nécessaire que le préfet connaisse le territoire, en y restant plusieurs années, qu’il dispose, en période de crise, de l’ensemble des services de l’État et surtout qu’il soit délégué territorial de toutes les agences de l’État.
Ensuite, il est nécessaire d’instaurer une relation de confiance avec les élus locaux, grâce notamment à une plus grande transparence dans l’attribution des subventions de l’État et à une évaluation des préfets par les maires.
Il est aussi indispensable de garantir les moyens de l’État dans les territoires, pour qu’ils soient plus adaptés avec une meilleure répartition des effectifs, la sortie de la logique systémique des appels à projets et un renforcement des moyens du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema).
Enfin, il convient d’assurer une présence territoriale adaptée, avec une permanence physique garantie dans les locaux des préfectures et sous-préfectures, pour lutter contre la fracture numérique. Il faut notamment refondre les schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public.
Nos territoires méritent considération, moyens et performances. Il n’y aura pas de bonne décentralisation sans une réelle déconcentration des services de l’État, au service des élus et des administrés.
La mission que nous examinons n’est pas encore sur cette trajectoire. C’est pour cette raison que le groupe Les Républicains ne la votera pas.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État » que nous examinons ce soir soutiennent ce qui est au cœur de nos institutions républicaines. Ils sont en augmentation de 10, 32 % en autorisations d’engagement et de 4, 14 % en crédits de paiement.
Pour autant, cette hausse des moyens, qui intervient après dix ans de recul de l’État au sein des territoires, apparaît insuffisante au regard des enjeux considérables de la mission.
Le réseau préfectoral est indispensable à notre pays et aux services rendus à nos concitoyens. Or l’administration territoriale de l’État est actuellement très affaiblie par les réformes qui se sont succédé, et nous devons faire face à un recul des services publics, surtout des services de proximité.
Le plan Préfectures nouvelle génération, mis en œuvre entre 2016 et 2020, a été fortement orienté vers la dématérialisation des formalités administratives et a profondément remodelé la délivrance des titres, tels que les passeports, les cartes nationales d’identité ou encore les permis de conduire.
De nombreux points de contact qui permettaient à une population souvent âgée ou n’ayant pas accès à internet de disposer d’un interlocuteur dans ses démarches administratives ont été supprimés. En outre, les publics fragiles se heurtent à l’absence de mobilité dans un certain nombre de territoires.
Si l’entrée du numérique dans les procédures apparaît nécessaire au vu des évolutions technologiques, la fracture numérique, territoriale et sociale ne doit pas être aggravée.
Or les suppressions successives des relais physiques de l’État dans les communes au profit de services en ligne ou trop éloignés ont créé un véritable sentiment d’abandon pour les habitants des territoires ruraux.
L’implantation des maisons France Services un peu partout dans nos territoires ruraux connaît un succès mitigé ; il faudra évaluer ce concept dans quelques années et, surtout, poursuivre le financement par l’État de ces structures – c’est un sujet sur lequel les maires se posent beaucoup de questions.
Cette réalité, nous la connaissons tous dans les départements ruraux. De même, nous sommes tous confrontés aux retards dans la délivrance des titres. Les délais d’obtention des cartes nationales d’identité et des passeports sont devenus inacceptables – ils peuvent aller jusqu’à quatre ou cinq mois.
La révolution numérique a ses limites, et les moyens humains restent indispensables.
Je veux enfin attirer votre attention, madame la ministre, sur une autre réalité : la diminution de la qualité de l’ingénierie territoriale délivrée aux communes.
Les départements ont souvent pallié la baisse des moyens de l’administration territoriale de l’État, en créant des structures chargées de répondre aux besoins des communes et en leur apportant soutien et conseil.
En Aveyron, le département a ainsi créé Aveyron Ingénierie afin d’offrir un accompagnement personnalisé et une assistance administrative, juridique, technique et financière aux collectivités locales et à leurs groupements dans l’exercice de leurs compétences et pour la réalisation de leurs projets. La charge de cette ingénierie incombe donc aujourd’hui au département et non à l’État.
Madame la ministre, mes chers collègues, la présence de l’État dans les territoires aux côtés des citoyens et des élus locaux est plus que jamais nécessaire. Si l’on peut se féliciter d’une prise de conscience du Gouvernement sur la nécessité de mieux assurer cette présence territoriale, ce budget ne semble toutefois pas à la hauteur des enjeux.
Pour cette raison, la majorité des membres du groupe Les Indépendants s’abstiendra sur cette mission.
M. Daniel Breuiller. Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’ancien maire d’Arcueil souffre pour les sous-préfets aux moyens rabougris et encore plus pour les usagers. C’est sans doute le cas de nombreux maires et anciens maires, peut-être même à Beauvais !
Sourires.
Ce budget présente une augmentation très légère, mais peu signifiante. Depuis 2010, quelque 11 763 postes en équivalent temps plein ont été supprimés dans l’administration territoriale et 4 748 dans le réseau des préfectures, soit 14 % des effectifs et même 24 % pour les seules sous-préfectures.
La commission des lois l’a souligné, les moyens mobilisés ne sont pas suffisants pour atteindre l’objectif de renforcement de l’administration territoriale de l’État et il est nécessaire de s’interroger en profondeur sur le rôle de l’État dans les territoires, ce que le Gouvernement se refuse encore à faire, préférant multiplier des réformes administratives.
Une traduction concrète de cette situation est la création des secrétariats généraux communs, ces nouveaux services déconcentrés interministériels placés sous l’autorité du préfet, qui est lui-même sous l’autorité du ministre de l’intérieur, mettant de fait des administrations comme celle du ministère de la transition écologique sous sa tutelle.
Cette organisation nous interroge particulièrement, d’autant que nous ne sommes pas certains que les premiers retours fassent état de gains issus de cette mutualisation.
Notre expérience des territoires montre des failles dans l’ambition du fameux couple maire-préfet. La commission des lois rappelait d’ailleurs ce problème majeur : les élus locaux ne peuvent compter que sur la bonne volonté des sous-préfets, qui entretiennent de plus en plus difficilement une connaissance fine du terrain et un lien de proximité avec les maires de leur arrondissement.
Aussi, nous avons accueilli avec intérêt le début des réouvertures de sous-préfectures et du renforcement réel d’effectifs. Le plan Préfectures nouvelle génération 2022-2025 marquera-t-il un progrès réel ? Nous le souhaitons !
Défenseur de l’égalité dans l’accès au service public, je rappellerai que le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires n’a cessé d’alerter sur les dangers d’une dématérialisation massive comme seul indicateur d’une modernisation au service du citoyen. L’illectronisme est une réalité qui touche 13 millions de nos concitoyens, et chacun d’entre nous connaît plusieurs expériences, vécues ou rapportées, de difficultés et de situations délicates, voire ubuesques, liées à la fin de l’accueil au guichet.
Nous saluons donc le début de l’augmentation attendue d’effectifs d’agents titulaires consacrés aux missions d’accueil dans les trois prochaines années.
Nous espérons que ce redémarrage pourra aussi servir dans la gestion des titres de séjour. À la veille d’un débat sur l’immigration et l’asile, nous veillerons à ce que la dégradation des délais de rendez-vous en préfecture ou de traitement des dossiers ne serve pas de justification à une aggravation de la situation des étrangers dans leurs liens et échanges avec l’administration.
Il est à noter que la commission des finances a très justement pointé du doigt le fait que la défaillance de l’État dans la délivrance des titres était inacceptable.
Nous comprenons la diminution des crédits du programme « Vie politique » au regard du calendrier électoral de 2023. Nous regrettons toutefois l’absence de la démocratie locale et participative dans ces crédits.
En résumé, allers-retours contradictoires sur la politique d’accueil de l’usager, moyens inadaptés à des réformes dont l’évaluation demeure à faire, recours trop important aux contractuels, dont la pérennisation des emplois est pourtant indispensable, notamment pour les intervenants sociaux au cœur du dispositif de prévention de la délinquance et de la radicalisation, tous ces éléments ne nous permettront pas de voter les crédits de cette mission.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, nous voilà donc parvenus à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ». Cette mission concerne principalement la situation du réseau préfectoral, en particulier de son échelon de proximité, à savoir les sous-préfectures.
Maintes fois, le Gouvernement a affirmé son intention de réarmer l’État territorial, en s’inscrivant dans la continuité des missions prioritaires des préfectures 2022-2025. Cette volonté affichée doit s’inscrire dans la triple mission des préfectures, qui a déjà été rappelée.
Nombreuses sont les personnes qui ont regretté la diminution de la présence et de l’efficacité de l’État sous sa forme territoriale. L’État a beaucoup perdu de terrain ces dernières années, au fur et à mesure des différents plans d’action et réformes.
La création des secrétariats généraux communs départementaux, il y a près de deux ans, est trop récente pour en mesurer les effets et pour évaluer la réalité des objectifs d’économies et de mutualisation des fonctions support des préfectures et des directions départementales interministérielles.
Je sais que la succession de plans d’action n’arrange pas les choses. Je me demande même si ce n’est pas devenu une sorte de stratégie de communication.
Néanmoins, il y a une chose sur laquelle nous voyons clair : les effectifs de l’administration territoriale de l’État. Nous pouvons dire que nous sommes à la croisée des chemins : la réforme de l’administration territoriale de l’État engagée il a plus de dix ans s’est traduite par une réduction ininterrompue d’effectifs. Il s’agit tout de même d’une perte de plus de 11 000 postes en équivalent temps plein que nous avons enregistrée, soit 14 % de l’effectif initial.
C’est seulement cette année que cette trajectoire a été interrompue. Naturellement, il n’est pas surprenant que domine un sentiment d’abandon et de perte de présence humaine dans les réseaux des préfectures.
Même dans l’hypothèse où le Gouvernement prendrait un soin particulier à l’allocation des moyens humains et des effectifs, en tenant compte de manière fine du niveau d’activité des préfectures et des sous-préfectures, cela se traduirait inévitablement par un effacement accru de la présence de l’État.
Il faut dire que les suppressions de postes dans les préfectures ont manqué de discernement, faute d’analyses adaptées. Nous avons tous des retours d’expérience de services au sein des préfectures qui ne fonctionnent pas ou qui fonctionnent mal et où l’abus de l’utilisation de contractuels est source de fragilité et de désorganisation.
Il a sans doute manqué une véritable réflexion globale préalable et une analyse plus fine à chaque niveau de service sur la répartition de l’effort en fonction de la réalité des besoins de chaque région.
Nous avons été un certain nombre à constater et à regretter les difficultés des directions départementales interministérielles, notamment celles de l’écologie et des ministères sociaux, ainsi que le fait que les suppressions portent sur l’échelon départemental, au profit le plus souvent des directions régionales, qui ont été largement épargnées.
Plus structurellement, il y a la question lancinante et parfois criante pour l’État du manque d’attractivité de certaines fonctions ou de territoires.
Je ne vois pas aujourd’hui de stratégie d’ensemble nouvelle, ni les moyens suffisants dans cette mission pour faire en sorte que les postes soient préservés et qu’ils ne restent pas vacants faute de candidats.
Dernièrement, la Cour des comptes a formulé des recommandations à ce sujet ; je n’y reviendrai pas, mais je pense qu’elles pourraient nous inspirer. La Cour recommande notamment un guide méthodologique pertinent, qu’il revient désormais au ministère de l’intérieur de s’approprier et de mettre en œuvre en sa qualité de chef de file de l’administration territoriale de l’État.
Nous attendons donc un rééquilibrage des emplois entre préfectures, en fonction des réalités et des besoins de chaque région. Il semble que vous envisagiez la création d’un observatoire des effectifs de l’administration territoriale de l’État, afin de fiabiliser les données relatives aux emplois au niveau tant régional que départemental. Qu’en est-il vraiment, madame la ministre ?
Une chose est sûre, c’est que toute décision doit se faire à l’aune d’un principe : le rétablissement du lien de proximité. Il s’agit notamment de redonner aux services les moyens de fonctionner, en les rendant plus accessibles et en veillant à maintenir un haut degré de qualité. Autant de principes qui, je l’espère, trouveront une consécration à l’échelle de nos territoires.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais tout d’abord vous transmettre les excuses de Gérald Darmanin, qui regrette de ne pouvoir vous présenter lui-même cette mission. Il est actuellement en déplacement à Bruxelles pour le Conseil « Justice et affaires intérieures ».
La mission « Administration générale et territoriale de l’État » du projet de loi de finances pour 2023, qui vous est soumise aujourd’hui, permet la mise en œuvre par le ministère de l’intérieur et des outre-mer de plusieurs de ses fonctions essentielles : garantir le libre exercice de leurs libertés publiques par les citoyens, avec l’organisation des scrutins électoraux ; assurer une présence continue de l’État sur l’ensemble du pays, dans l’Hexagone comme dans les territoires ultramarins ; assurer la déclinaison locale des politiques publiques nationales.
Cette mission intègre des constantes de l’action ministérielle, mais elle porte également la marque, comme la mission « Sécurités », des chantiers d’envergure portés par le projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur sur la période 2023-2027, en particulier en termes de réarmement de l’État dans les territoires et de réorientation stratégique du pilotage des politiques publiques, à l’aune des nouveaux enjeux à relever pour assurer la sécurité de nos concitoyens.
Dans le contexte de la hausse globale du budget du ministère de l’intérieur de 1, 25 milliard d’euros pour 2023, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » voit ses moyens progresser nettement, avec une augmentation de 10, 32 % des autorisations d’engagement et de 4, 14 % des crédits de paiement.
Ces chiffres témoignent d’une volonté ambitieuse tournée vers l’avenir. Nous nous donnons ainsi les moyens nécessaires pour nos objectifs dès l’année qui vient.
Plus de la moitié des crédits de la mission sont inscrits au sein du programme « Administration territoriale de l’État », qui témoigne d’un engagement sans précédent pour renforcer la capacité de l’État dans les territoires.
Partant du constat d’un besoin accru de service public et de proximité de l’État, le Président de la République a lancé cette dynamique dès l’an dernier. En témoigne notamment l’annonce qu’il a faite le 10 octobre dernier de la réouverture de six sous-préfectures – cinq en métropole et une en Guyane.
Cette évolution, qui renverse le courant des vingt dernières années, nécessite de s’appuyer sur des effectifs nouveaux. J’oserai vous paraphraser, en disant que nous réarmons les territoires.
L’objectif sur trois ans est de créer 210 équivalents temps plein, dont 50 pour la seule année 2023. Ces créations de postes viennent renforcer les effectifs préfectoraux sur des missions clés, en particulier les services dédiés aux étrangers, la délivrance des titres sécurisés, qui connaît, comme vous le savez, un fort engorgement, en grande partie conjoncturel après les deux années de crise sanitaire, ou encore la lutte contre la radicalisation et le terrorisme.
Cet élan de consolidation du réseau préfectoral bénéficiera à tous nos concitoyens en matière de sécurité et de service public, mais aussi aux élus locaux pour la conception et la mise en œuvre de leurs projets et, en définitive, à l’ensemble de notre pays.
Nous n’abandonnons pas pour autant les efforts continus menés en faveur de la rationalisation des services de l’État dans les territoires, en particulier en matière de mutualisation.
Étape charnière dans la poursuite de la réforme de l’organisation territoriale de l’État, l’année 2021 a vu la mise en œuvre des secrétariats généraux communs départementaux, nouveaux services déconcentrés interministériels placés sous l’autorité du préfet. Ils permettent de grouper et de rendre plus efficace la gestion des moyens budgétaires, des ressources humaines, des achats publics ou encore des systèmes d’information et de communication. Gage de performance et d’économies, leur déploiement se poursuivra.
Pour ce qui est de la conduite et du pilotage des politiques du ministère de l’intérieur, l’objectif constant est celui de la maîtrise des coûts, à la fois en administration centrale et dans les territoires, tout en servant la modernisation et l’indispensable amélioration des fonctions support.
Je pense en particulier aux enjeux numériques, qui constituent une priorité pour l’action du ministère.
La direction du numérique se voit attribuer des moyens nécessaires à la réalisation de ses projets d’ampleur comme la constitution du cloud de deuxième génération ou celle du réseau Radio du futur. Son budget global de 498 millions d’euros sur cette mission doit être mis en regard des autres engagements de la mission « Sécurités », qui prévoit au minimum 381 millions d’euros de dépenses numériques en 2023, notamment pour assurer la transformation numérique des services et l’amélioration des systèmes de communication.
Par ailleurs, le ministère poursuit ses efforts de rationalisation de ses emprises immobilières dans l’ensemble du pays, afin d’optimiser les coûts et de faciliter concrètement la synergie entre ses différents services.
Deux projets sont emblématiques de cette démarche : tout d’abord, la création d’un centre unique du renseignement intérieur – 43 millions d’euros sont engagés en 2023, sur un coût total de 1, 3 milliard d’euros –, alors que les services sont aujourd’hui répartis sur plusieurs sites ; ensuite, la création d’un grand pôle transversal des directions support du ministère.
Au-delà, le ministère mobilise près de 340 millions d’euros en autorisations d’engagement, afin de permettre notamment la programmation de nouveaux projets d’implantation d’hôtels de police et de commissariats, ainsi que 384 millions d’euros pour la maintenance lourde du bâti. Conformément aux priorités fixées par la Première ministre, 6 millions d’euros sont en outre spécifiquement dédiés à la rénovation énergétique des bâtiments préfectoraux.
Enfin, ce sont plus de 84 millions d’euros qui sont dédiés au financement de la prévention de la délinquance et de la radicalisation, un budget en hausse de plus de 21 % par rapport à l’année précédente.
Le programme 232, « Vie politique », est le seul qui est en baisse dans la mission, une diminution qui s’explique par le calendrier électoral bien moins chargé en 2023, avec tout de même la tenue des élections territoriales en Polynésie française, ainsi que les élections sénatoriales.
Mesdames, messieurs les sénateurs, la mission « Administration générale et territoriale de l’État » va permettre de poursuivre les chantiers de long terme du ministère et de renforcer la présence et l’efficacité de l’État dans tous les territoires.
Les investissements indispensables à mettre en œuvre pour faire face aux défis nouveaux qui menacent nos concitoyens y bénéficient de moyens solides, mais il ne s’agit en rien d’une dynamique de hausse de l’ensemble des dépenses.
En parallèle d’engagements ciblés et importants, gages d’efficacité, la politique de rationalisation et de contrôle des dépenses de fonctionnement se poursuit avec autant de rigueur.
J’ai bien entendu, mesdames, messieurs les sénateurs, vos critiques, mais je voudrais attirer votre attention sur l’effort historique que nous vous proposons dans cette mission : jamais le ministère de l’intérieur n’avait obtenu un tel budget. Il est néanmoins impossible de rattraper le retard de près de vingt ans de baisse.
J’espère que le Sénat, chambre des territoires, pourra apporter une réponse concrète aux besoins des Françaises et des Français, ainsi qu’aux impératifs de sécurité intérieure. Ce consensus, mesdames, messieurs les sénateurs, il vous appartient désormais de le dégager.
administration générale et territoriale de l’état
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.
En euros
Mission / Programme
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration générale et territoriale de l’État
Administration territoriale de l’État
Dont titre 2
2 020 976 507
2 020 976 507
Vie politique
Dont titre 2
6 263 700
6 263 700
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
Dont titre 2
829 787 282
829 787 282
L’amendement n° II-241, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros)
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale de l’État
dont titre 2
Vie politique
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Daniel Breuiller.
Cet amendement vise à augmenter de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement les dépenses de personnel portées par l’action n° 02, Réglementation générale, garantie de l’identité et de la nationalité et délivrance des titres, du programme 354, « Administration territoriale de l’État ».
Les centres d’expertise et de ressources des titres (Cert) ne disposent pas des moyens humains nécessaires pour assurer leurs missions de manière pérenne.
Des défaillances ont été analysées par la Cour des comptes dans son rapport public de 2020. Après la crise du covid-19, ces centres font face à une multiplication des demandes et n’arrivent pas à combler le retard. Une hausse, même ponctuelle, de leurs ressources permettrait sans doute de le rattraper en partie.
Les Cert rencontrent d’importantes difficultés dans le traitement des demandes de titres et le Gouvernement a fait le choix d’augmenter sensiblement le nombre de contractuels au sein de ces structures.
Ainsi, pour les demandes de cartes nationales d’identité et de passeports, alors que ce service comptait 35 contractuels en 2021, il en compte 161 en 2022.
Je partage avec les auteurs de l’amendement l’idée qu’il faut pérenniser les emplois au sein des Cert et sortir d’une logique de gestion des crises successives. L’Agence nationale des titres sécurisés m’ayant indiqué que la hausse des demandes de titres était durable, il me semble que nous devons avoir pour priorité de recourir à des fonctionnaires titulaires et leur permettre de monter en compétence sur leur mission.
La Cour des comptes considère en effet que les préfectures ne fonctionnent qu’au moyen de contrats courts. Il est donc important de titulariser ces postes, mais, dans la situation actuelle, je ne pense pas que l’augmentation des crédits proposée dans le présent amendement permette de résoudre cette difficulté. Nous devons apporter des solutions pérennes aux services en question, et non pas voter des renforts ponctuels. Pour cette raison, je demande le retrait de cet amendement.
L’accueil reste en effet une priorité ministérielle, que ce soit dans les préfectures ou dans les sous-préfectures. Une partie des 350 créations d’emplois prévues sur la période 2023-2027 est dédiée au renforcement des Cert.
Quant à la délivrance des titres sécurisés, l’État a renforcé son aide aux communes avec un budget de 21 millions d’euros pour pouvoir augmenter le nombre de rendez-vous proposés aux usagers, ce qui est une condition évidemment impérative pour diminuer les délais de délivrance des titres. Je vous propose donc de retirer cet amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-240, présenté par MM. Benarroche, Breuiller et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon, Mme M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale de l’État
dont titre 2
Vie politique
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Daniel Breuiller.
Le plan Préfectures nouvelle génération 2022-2025 avait pour objectifs le recours massif à la dématérialisation, la fin de l’accueil physique des usagers en préfecture et la mutualisation des fonctions support. Cette politique a eu des conséquences désastreuses, notamment pour l’accueil des publics les plus éloignés du numérique et pour l’accès aux rendez-vous des étrangers dans les préfectures. Pour ces derniers, il n’est plus possible de se présenter au guichet en préfecture afin d’obtenir des rendez-vous pour l’instruction et la délivrance des titres de séjour. Or les prises de rendez-vous sur internet sont quasiment impossibles. Chaque jour, des personnes se retrouvent dans l’incapacité de régulariser leur situation à cause d’un manquement des services publics.
Les juridictions font ainsi face à une augmentation très importante des référés « mesures utiles » pour obtenir des rendez-vous en préfecture, en l’absence de créneau disponible sur internet.
La Cimade a pu constater – je l’ai aussi constaté moi-même – que les ruptures de droit au séjour peuvent être dramatiques pour les personnes concernées, « entraînant non seulement un risque d’interpellation en cas de contrôle policier, mais causant fréquemment des difficultés dans l’emploi, l’accès à la formation, aux études, ainsi qu’aux droits sociaux ».
Le Conseil d’État, dans une décision datant du 27 novembre 2019, a dénoncé cette situation et a enjoint à l’État de proposer une solution alternative à la saisine par voie électronique.
Le Gouvernement a pris acte de l’échec de sa stratégie en annonçant le renforcement des effectifs et des moyens consacrés à l’accueil des usagers, mais, pour 2023, cette hausse reste trop modeste.
Cet amendement vise donc à renforcer les moyens humains permettant d’améliorer l’accueil physique en préfecture par un transfert de 7 millions d’euros.
C’est aussi une demande de retrait. Cet amendement appelle plusieurs remarques.
Le ministère de l’intérieur a en partie pris la mesure de l’importance des difficultés liées à l’accueil des publics étrangers et a fait le choix de renforcer les effectifs à hauteur de 190 ETPT par an jusqu’en 2024, en parallèle de la montée en puissance de l’Administration numérique pour les étrangers en France (Anef). Je pense que cette évolution doit être accueillie favorablement, même si, comme pour les Cert, dont nous avons parlé précédemment, la difficulté réside à mon sens davantage dans la pérennisation des postes et la montée en compétences des agents. Les renforts ponctuels n’apportent pas de réponse satisfaisante et durable aux problématiques décrites dans l’amendement. Je partage votre constat, mais je note qu’un effort a été fait par le Gouvernement.
Même avis, mais je vais donner quelques explications.
Je rappelle qu’entre 2010 et 2020 les préfectures ont supporté la suppression de 4 700 emplois, une tendance que le Gouvernement entend stopper. Depuis 2021, il a stabilisé les emplois avec un schéma d’emplois neutre qui a mis fin à ces années de diminution des effectifs. L’accueil reste donc une priorité ministérielle et une partie des 350 créations d’emplois prévues pour la période 2023-2027 est dédiée à son renforcement.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-112 rectifié, présenté par MM. Decool, Wattebled, A. Marc, Guerriau et Grand, Mme Mélot, MM. Lagourgue, Levi et Calvet, Mme Guidez, M. Belin, Mme Férat et MM. Moga et Lafon, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Automatisation du répertoire électoral unique
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale de l’État
dont titre 2
Vie politique
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
Automatisation du répertoire électoral unique
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Alain Marc.
Cet amendement a été déposé sur l’initiative de mon collègue Jean-Pierre Decool.
Le droit de vote, et son aboutissement par l’acquisition du suffrage universel, est une suite de combats et de luttes acharnés. Alors que nous sommes nombreux à prendre conscience de cette conquête faite au prix de longs sacrifices, les chiffres des élections départementales et régionales de juin 2021 sont tombés comme un couperet. Le taux d’abstention était de 65, 31 % au second tour et de 82 % pour les jeunes, selon les estimations de l’institut de sondage IFOP.
Face à ce problème démocratique, mes collègues Jean-Pierre Decool et Dany Wattebled ont fait le choix de déposer la proposition de loi n° 391 (2021-2022), qui a pour objet d’automatiser la mise à jour du répertoire électoral unique. Le dispositif de ce texte prévoit que chaque administration communique systématiquement tous les changements d’adresse des administrés à l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) pour la mise à jour du répertoire électoral unique, sauf mention contraire expresse de l’administré.
En conséquence, cet amendement vise à créer un programme « Automatisation du répertoire électoral unique » au sein de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Si je partage le constat des auteurs de l’amendement sur l’exercice du droit de vote et ses enjeux démocratiques, il me semble que l’amendement proposé pose néanmoins quelques difficultés, notamment au regard du règlement général sur la protection des données (RGPD), mais cela reste à vérifier.
Par ailleurs, l’automatisation de la mise à jour des informations, pour être suffisamment fiable, me semble également complexe à mettre en place, mais Mme la ministre pourra peut-être nous apporter des réponses à ce sujet.
Je pense enfin qu’il existe probablement d’autres moyens de faciliter les inscriptions des électeurs que ces évolutions automatiques. Je demande le retrait de l’amendement.
La mesure proposée par les auteurs de cet amendement de rendre automatiques les inscriptions sur les listes électorales des électeurs qui changent de résidence n’apporterait, à mon sens, qu’une solution partielle aux situations de non-inscription et de mauvaise inscription.
D’une part, le citoyen est libre de s’inscrire dans la commune où il souhaite voter et cet amendement semble remettre en cause les principes législatifs et réglementaires encadrant la procédure d’inscription sur les listes électorales.
D’autre part, je vous signale que le ministre de l’intérieur et des outre-mer a lancé une expertise sur la faisabilité d’un dispositif pour fluidifier la procédure de réinscription. L’avis est défavorable.
L’amendement n° II-112 rectifié est retiré.
L’amendement n° II-339 rectifié bis, présenté par Mme M. Filleul, M. Sueur, Mmes de La Gontrie, Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale de l’État
dont titre 2
Vie politique
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Cet amendement, porté par ma collègue Martine Filleul, vise à développer les travaux d’intérêt général (TIG) au niveau local et à lever un certain nombre de freins à cet effet. L’idée est que l’État propose un accompagnement des collectivités territoriales par une dotation fléchée rattachée au fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) en préfecture.
Le TIG est une peine très intéressante pour certains auteurs d’infraction en ce qu’elle permet de sanctionner, mais également de réparer, voire de réinsérer. Elle est une vraie solution alternative à l’incarcération de courte durée.
Malgré plusieurs avancées législatives, il existe encore dans la pratique des freins à la création de postes dans ce domaine. Le déploiement de référents TIG au niveau local, dont le rôle serait de faire l’interface entre les services pénitentiaires d’insertion et de probation et les collectivités locales et organismes, nécessite la création de postes supplémentaires. Ce soutien de l’État en direction des collectivités territoriales pour une meilleure réinsertion des délinquants nous paraît indispensable. Tel est l’objet de cet amendement.
À ce sujet, je ne pense pas qu’il faille changer la logique du FIPD, qui est d’abord tourné vers la prévention de la délinquance et non pas vers la sanction ou la réparation. Il importe de ne pas confondre les dispositifs et de ne pas utiliser le même outil pour prévenir la délinquance et pour la sanctionner. Les crédits dédiés aux travaux d’intérêt général étant portés par la mission « Justice », je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
Je voudrais rappeler que les crédits alloués au FIPD en 2023 sont renforcés, avec une hausse de 4, 81 millions d’euros par rapport au PLF pour 2022, soit une dotation pour cette année de 84, 09 millions d’euros. Ces crédits vont permettre de poursuivre le financement de la stratégie nationale de prévention de la délinquance, dont fait partie le déploiement des TIG à l’échelle locale, comme vous l’avez rappelé. Cet amendement me semblant satisfait, l’avis est défavorable.
L ’ amendement n ’ est pas adopté.
L’amendement n° II-294 rectifié, présenté par Mme Blatrix Contat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Administration territoriale de l’État
dont titre 2
Vie politique
dont titre 2
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur
dont titre 2
TOTAL
SOLDE
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat.
Au cours des dernières années, la nécessité d’augmenter considérablement la capacité de production électrique en énergies renouvelables (EnR) a eu pour conséquence un engorgement des services ministériels déconcentrés dans les préfectures.
L’examen préalable de chaque nouvelle demande d’installation doit suivre une procédure d’autorisation précise et longue, faisant intervenir plusieurs directions ou agences, en plus des directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal), qui sont cheffes de file et qui disposent de moyens limités.
À l’occasion de l’examen du projet de loi relatif à l’accélération de la production d’EnR, le Sénat a inséré un article 1er bis visant à créer un référent départemental pour faciliter et accélérer l’instruction des projets d’EnR et des projets industriels nécessaires à la transition écologique.
Cette mesure présente l’intérêt d’identifier un interlocuteur unique en préfecture et, partant, de garantir davantage de lisibilité aux porteurs de projets.
Cependant, son application risque de se heurter au sous-dimensionnement des services administratifs par rapport au flux des demandes. En effet, les travaux de la rapporteure spéciale du Sénat, ainsi que de la rapporteure pour avis de la commission des lois, confirment le constat établi de longue date d’un manque important de moyens humains au sein des services instructeurs dans les départements, sur l’ensemble du territoire. Or, sans des moyens en personnels, nous ne parviendrons pas à garantir le déploiement accéléré des EnR dans le respect de l’environnement et en cohérence avec les spécificités des territoires d’implantation.
Vous l’avez compris, le présent amendement est un amendement d’appel, qui me permet de vous interroger, madame la ministre, sur la réalité de l’engagement pris par Mme la ministre de la transition énergétique de prévoir, dans le PLF pour 2023, un renforcement des services de l’État dédiés à cet objectif.
S’agissant d’un amendement d’appel, je vais bien entendu en demander le retrait. Il me semble tout de même indispensable de mieux coordonner les services de l’État, de sorte que la multiplicité des intervenants ne fasse pas obstacle aux différents projets d’implantation. Madame la ministre, il faut vraiment faire avancer les choses. On ne peut accepter des blocages sur des projets aussi importants.
Parmi les missions prioritaires des préfectures pour les années 2022-2025 figure bien l’amélioration de la coordination des expertises, des modalités de suivi des projets territoriaux, du conseil et de l’orientation des porteurs de projet. L’administration territoriale a bénéficié en 2021 et 2022 d’une stabilisation de ses emplois, avec un schéma qui a mis fin, je le répète, à dix années de baisse continue des effectifs. Je rappelle que 350 créations d’emploi prévues sur la période 2023-2027 garantissent le maintien des moyens humains dans l’ensemble des services locaux, notamment ceux chargés de la coordination des politiques publiques. C’est un avis défavorable.
Je vais le retirer, mais je voudrais quand même insister sur un point. Vous n’êtes pas sans savoir que la France est le seul parmi les 27 États de l’Union européenne à avoir raté sa cible en matière d’EnR, ce qui lui a valu une amende de 500 millions d’euros. Nous ne pouvons plus nous permettre d’échouer. J’ai reçu nombre de témoignages sur des retards dans l’instruction de dossiers. Il nous faut avancer collectivement sur ce sujet. Je resterai attentive à ce que ce soit le cas.
L’amendement n° II-294 rectifié est retiré.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État », figurant à l’état B.
Je vous rappelle que la commission des finances est défavorable à l’adoption de ces crédits.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Les crédits ne sont pas adoptés.
J’appelle en discussion l’article 41 B, qui est rattaché pour son examen aux crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Administration générale et territoriale de l ’ État
Avant le 31 décembre 2023, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant les conséquences budgétaires, pour la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, d’une évolution de ses missions ayant pour objectifs :
1° La création d’un droit de communication de pièces à la commission par les fournisseurs ou les prestataires de services des candidats, sur le modèle de celui prévu pour les services fiscaux à l’article L. 81 du livre des procédures fiscales ;
2° La possibilité pour la commission de consulter le fichier national des comptes bancaires et assimilés ;
3° L’habilitation de la commission à saisir le service mentionné à l’article L. 561-23 du code monétaire et financier afin qu’il lui indique si des mouvements financiers sur les comptes alimentant une campagne ont fait l’objet de déclarations ;
4° La possibilité pour la commission de disposer d’un accès en temps réel, avec, le cas échéant, le concours des commissaires aux comptes, à la comptabilité des partis politiques soutenant les candidats aux élections.
L’amendement n° II-3, présenté par Mme Briquet, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme la rapporteure spéciale.
La demande de rapport proposée au présent article porte sur des évolutions majeures dans les compétences et les moyens de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP). Cette commission, sur son site internet, analyse le présent article comme un pas « vers une évolution des moyens d’enquête du régulateur financier de la vie politique. »
Même si des précautions ont été prises pour tenir compte des conséquences budgétaires pour la CNCCFP de ces évolutions, une telle demande de rapport ne relève pas du domaine des lois de finances.
L ’ amendement est adopté.
En conséquence, l’article 41 B est supprimé.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l’État ».
Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission des finances, mes chers collègues, je relève d’abord que les conditions de ce débat ne sont pas tout à fait satisfaisantes. Il s’agit quand même d’évoquer les dégrèvements et les charges de la dette, soit la plus grosse mission du budget. C’est un peu dommage de traiter ainsi de ces sujets importants. Je tenais à ce que cela soit dit.
Ensuite, pour reprendre en substance la formule d’une « réclame » diffusée au temps de notre jeunesse, j’ai cinq minutes pour vous dire que la mission « Engagements financiers de l’État », c’est de la dynamite. Effectivement ! Voici une mission qui explose, PLF après PLF. C’est la plus forte hausse, qui, hélas, traduit celle de la charge des intérêts, laquelle va grever nos marges de manœuvre, monsieur le ministre. Notre déficit primaire ne se résorbe pas. Bien au contraire, nous allons payer toujours plus d’intérêts.
En 2022, nous avons eu la mauvaise surprise de l’inflation et de la hausse des taux d’intérêt. En 2023, je vous annonce que ce n’est pas terminé. Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne (BCE) vient de le confirmer. Qu’est-ce à dire ? En 2023, malgré une prévision d’inflation très optimiste de votre part, nous allons payer encore plus. C’est l’effet « boule de neige », car notre déficit ne se réduit pas. Bien au contraire, en 2023, selon vos prévisions, il augmentera encore par rapport à 2022, qui n’aura finalement pas été une si mauvaise année, peut-être même meilleure que ce que nous avons voté dans la LFR ce matin. Nous le souhaitons tous, évidemment, pour notre pays.
Malheureusement, il y a encore de l’effet volume dans cette dette, et c’est bien là le problème, monsieur le ministre. Vous n’arrivez pas à inverser la courbe de la dette. Vous remarquerez au passage que celui qui avait proposé en son temps d’inverser une autre courbe s’est pris les pieds dans le tapis… Vous faites bien de ne pas l’imiter.
Sourires.
Hélas, c’est nécessaire, et le Fonds monétaire international, que connaît bien aussi Christine Lagarde, vous a rappelé à l’ordre, lundi dernier, vous invitant à redresser nos finances publiques rapidement. Rien ne va plus ! Or nous sommes à la veille ou à l’avant-veille de la notation de la dette française par les agences de notation – ce sera, je crois, le 2 décembre : Austerlitz ou Waterloo ? Nul ne le sait.
Nous verrons bien ce qu’elles diront des perspectives de notre pays, ce qui déterminera le prix que nous allons payer pour la dette.
Dans notre malheur, il faut le dire, nous avons quand même une chance, c’est la force de nos institutions. Il peut paraître curieux de dire cela quand on parle des charges d’intérêt de la dette. Seulement, si nous n’avions pas le 49.3, dans l’état actuel de la démocratie française, notre dette serait sans doute attaquée par les marchés financiers. La procédure du 49.3, qui avait été bien pensée déjà à l’époque, permet d’être sûr de pouvoir exécuter un budget.
M. le ministre délégué approuve.
Toutefois, c’est un peu mince et cela ne fait pas une politique solide pour redresser les finances publiques de ce pays, qui nécessiterait une large majorité afin d’être bien comprise des Français.
Nous allons essayer de vous aider à réduire un tout petit peu le déficit. C’est déjà ce que nous avons fait, ici, au Sénat, dans le cadre des discussions de la loi de programmation des finances publiques, en proposant une nouvelle trajectoire. L’idée est de dire que, si tout le monde fait des efforts, on peut arriver aux 3 % en 2025. Malheureusement, je crains que ce ne soit pas le chemin que vous empruntiez. Monsieur le ministre, je vous donne rendez-vous un peu plus tard pour la discussion des amendements. Je vous ferai des propositions, car j’ai décelé une incohérence entre les crédits évaluatifs de cette mission et votre scénario macroéconomique.
La parole est à M. le président de la commission des finances, en remplacement de M. Victorin Lurel, rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous examinons ce soir les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».
Intervenant au nom du rapporteur spécial, Victorin Lurel, qui n’a pas pu être parmi nous ce soir, je souhaiterais introduire mon propos par un retour sur la situation du compte. Depuis 2020, son fonctionnement est très nettement affecté par les conséquences économiques de la crise sanitaire et, désormais, par le contexte international, tant du côté des dépenses, avec d’importants moyens mobilisés pour aider certaines entreprises du portefeuille, que du côté des recettes, du fait de l’interruption des cessions d’actifs. Il a ainsi fallu recourir à plusieurs versements du budget général pour alimenter le compte.
Cette logique devrait se poursuivre en 2023. Alors que les conditions du marché ne sont toujours pas favorables à la réalisation de nouvelles cessions, les versements du budget général devraient représenter les trois quarts des recettes du compte, et même 95 % une fois retranchées les recettes exceptionnelles.
Par ailleurs, pour l’année prochaine, seule une faible part des 10 milliards d’euros d’investissements en capital prévus par le Gouvernement est connue et détaillée dans le projet annuel de performance du compte. Pour 80 % des crédits, « le caractère [des] opérations reste confidentiel, afin de ne pas porter préjudice aux intérêts patrimoniaux de l’État ». Si nous pouvons comprendre ce besoin de confidentialité, cela limite très fortement la capacité d’appréciation du Parlement pour l’année à venir.
Par ailleurs, l’inscription de 6, 6 milliards d’euros au titre de la contribution au désendettement de l’État est un véritable tour de « bonneteau » budgétaire, selon l’expression de M. Lurel. Personne n’est dupe : la contribution au désendettement vient en réalité nourrir d’autant le déficit prévu pour 2023.
C’est pour écarter ce mécanisme en trompe-l’œil que la commission des finances a adopté un amendement visant à supprimer les crédits du programme 732 du CAS. Cet amendement intervient en cohérence avec l’annulation des crédits proposés sur la mission « Engagements financiers de l’État » par notre collègue Jérôme Bascher.
Je tiens cependant à relever un point positif : le versement sur le CAS de la dotation en numéraire du fonds pour l’innovation et l’industrie (FII). Alors que celle-ci bénéficiait d’une garantie de rémunération de 2, 5 % par an sur un compte du Trésor, financé par l’État, le Gouvernement fait enfin le choix du bon sens en mettant fin à cette dotation et en la remplaçant par des crédits budgétaires.
J’en arrive à la situation du portefeuille de l’État actionnaire, lequel a retrouvé cet été une valorisation légèrement supérieure à son niveau d’avant la crise. Cette valorisation est toutefois dopée par l’offre publique d’achat visant les actions du groupe EDF.
Ainsi, si l’on isole la valorisation d’EDF, la performance du portefeuille de l’Agence des participations de l’État (APE) est très inférieure à celle des grandes entreprises françaises, et ce malgré les opérations de recapitalisation intervenues.
La nationalisation d’EDF me semble aller dans le bon sens. Elle laisse néanmoins entièrement ouverte la question de la situation financière du groupe, dont la dette devrait atteindre 60 milliards d’euros d’ici à la fin de l’année, et dont les besoins d’investissements sont évalués entre 17 milliards et 20 milliards d’euros par an.
Le nouveau président-directeur général d’EDF, Luc Rémont, qui a pris ses fonctions hier, jeudi, devra répondre rapidement aux nombreux défis de l’entreprise : il devra rassurer face aux craintes de démantèlement et permettre la viabilité de l’entreprise.
Je terminerai mon intervention en envisageant la suite : quel rôle et quels défis pour l’État actionnaire demain ? Alors que la nouvelle doctrine d’intervention de l’APE n’est pas encore définie, les pistes esquissées l’an dernier sont toujours d’actualité.
L’intervention de l’APE devra ainsi tenir compte de quatre facteurs : le soutien auprès d’entreprises touchées par la crise ; la préservation de notre souveraineté économique ; l’accompagnement des transitions environnementales et l’accompagnement face aux ruptures technologiques et numériques.
Outre un retour à la doctrine définie sous François Hollande en 2014, j’y vois surtout le choix de revenir à une utilisation des participations financières de l’État comme un outil de politique économique à part entière.
La commission des finances propose d’adopter les crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », amendés par l’amendement de la commission visant à supprimer les crédits dédiés au remboursement factice de la dette.
La parole est à M. le président de la commission des finances, en remplacement de M. Pascal Savoldelli, rapporteur spécial.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Remboursements et dégrèvements » retrace les dépenses résultant mécaniquement de l’application de dispositions prévoyant des dégrèvements, des remboursements ou des restitutions d’impôts. Le caractère mécanique de ces dépenses implique que ces crédits soient évaluatifs.
Par ailleurs, cette mission est la première en volume de crédits, tous budgets confondus, et permet d’avoir une vision d’ensemble des mesures fiscales mises en œuvre et de leurs évolutions.
Elle se compose de deux programmes, l’un consacré aux remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, l’autre aux mêmes opérations pour les impôts directs locaux.
En ce qui concerne les remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, les dépenses sont évaluées, dans le PLF pour 2023, à 123, 7 milliards d’euros, soit une très légère diminution par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2022.
Cette quasi-stabilité résulte de tendances contraires entre les différentes actions du programme ; je m’attacherai dans mon exposé à vous faire part des variables les plus notables.
Tout d’abord, les restitutions liées à la mécanique de l’impôt enregistrent une hausse importante de 6, 6 milliards d’euros entre 2022 et 2023 sous l’effet, notamment, de la hausse des restitutions de TVA qui devraient atteindre, en 2023, un total de 67, 2 milliards d’euros.
Cette augmentation s’explique par le contexte inflationniste, en raison de l’effet volume sur la TVA collectée et par le contexte d’incertitude économique, qui pousse les entreprises à opter pour le remboursement plutôt que pour l’imputation du crédit de TVA sur les années suivantes.
Ce niveau historiquement haut justifierait, à mon sens, un renforcement des moyens de lutte contre la fraude à la TVA et une évaluation plus précise des pertes en découlant. Ce travail me paraît d’autant plus nécessaire que, à la suite des différentes réformes de la fiscalité locale – suppression de la taxe d’habitation sur les résidences principales et baisse des impôts de production –, les collectivités locales ne perçoivent plus désormais que des fractions de TVA, pour un montant total de près de 38 milliards d’euros.
Ce partage de la TVA entre État et collectivités, dont le taux de dépendance à cet impôt augmente, rend indispensable une gestion optimisée de sa collecte, afin de sécuriser les ressources, tant nationales que locales.
Par ailleurs, en 2023, le niveau des remboursements de l’impôt sur les sociétés est évalué à 14, 2 milliards d’euros, soit une hausse de 13, 8 % par rapport à la LFI pour 2022. Celle-ci résulte d’une diminution attendue, eu égard au contexte économique, du bénéfice fiscal des entreprises en 2022. Toutefois, les incertitudes sont grandes en ce qui concerne l’exécution à venir.
À l’inverse, les remboursements liés à des politiques publiques enregistrent une baisse de près de 5 milliards d’euros en raison de la suppression du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et de celle de la contribution à l’audiovisuel public. Je m’interroge sur l’effet de cette dernière, annoncée comme une mesure pour améliorer le pouvoir d’achat des Français. En effet, la suppression de la contribution à l’audiovisuel public ne concernera pas les foyers les plus modestes, qui en étaient déjà exonérés.
Si le niveau du crédit d’impôt recherche (CIR) reste, quant à lui, stable, à environ 7 milliards d’euros en 2023, je demeure sceptique sur l’efficacité de ce dispositif en matière de création d’emplois et de multiplication des brevets déposés.
Par ailleurs, comment se satisfaire de l’ambition très mesurée du Gouvernement s’agissant des taux de retour de ce crédit d’impôt, avec une cible fixée à 1 euro investi pour 1 euro remboursé ?
De plus, ce crédit d’impôt est particulièrement complexe à contrôler en raison de la nécessité pour les services de la direction générale des finances publiques (DGFiP) et pour ceux du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche de se coordonner. Il génère également de nombreux contentieux relatifs au caractère éligible ou non des dépenses d’innovation. Il nous faut donc le réformer.
Je conclurai cette partie sur les remboursements d’impôts d’État par une note positive. Les remboursements liés aux contentieux de série baissent sensiblement grâce aux efforts notables réalisés dans le suivi et la gestion des plus gros contentieux.
Je prendrai quelques instants pour évoquer le second programme de cette mission, consacré aux dégrèvements et remboursements d’impôts locaux.
Dans le PLF pour 2023, les crédits évalués au titre du programme 201 s’élèvent à 4, 6 milliards d’euros, soit une baisse de 30, 8 % par rapport à la LFI pour 2022. Cette diminution résulte des baisses consécutives enregistrées lors des précédentes LFI, qui s’expliquaient notamment par la réforme de la taxe d’habitation sur les résidences principales et, dans une moindre proportion, par la réforme des impôts de production.
Le document que m’a confié M. Savoldelli étant un peu long, je me vois dans l’obligation de réduire son intervention…
Sourires.
Il ne faudrait pas rendre encore plus illisible le financement des collectivités territoriales.
Au bout du compte, les mesures de compensation des différentes réformes de la fiscalité locale engendrent une perte de l’autonomie financière des collectivités territoriales. En 2022, la part de TVA est déjà la première recette des départements et des régions. Après la possible suppression de la CVAE, elle deviendra la deuxième recette du bloc communal.
Ainsi, les ressources – et donc l’avenir – des collectivités seront désormais majoritairement tributaires d’un impôt national, sur lequel elles n’exercent aucun pouvoir en matière de fixation du taux. La dynamique de cette taxe est certes importante en cette période inflationniste, mais les évolutions futures demeurent très incertaines.
La parole est à Mme Micheline Jacques, en remplacement de Mme Martine Berthet, rapporteure pour avis.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous prie de bien vouloir excuser Martine Berthet, qui m’a chargée de la remplacer.
La commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur l’adoption des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». La compétence et le travail du personnel de l’Agence des participations de l’État ne sont bien évidemment pas en cause, mais nous regrettons et contestons les faiblesses du Gouvernement en ce qui concerne l’État actionnaire.
Tout d’abord, nous déplorons le fait qu’en dépit d’annonces qui allaient dans le bon sens, le Gouvernement n’a toujours pas opté pour le retour à un État stratège, capable de soutenir résolument la souveraineté économique de la France. La défense de notre souveraineté reste balbutiante et la nationalisation d’EDF ne doit pas nous tromper : elle est l’arbre qui cache une forêt d’atermoiements, de renoncements et d’hésitations.
En effet, nous avons toujours considéré que la doctrine d’investissement formulée en 2017 était trop floue et ne garantissait pas, en l’état, la sauvegarde de la souveraineté économique française. L’enchaînement de crises depuis 2020 a mis sur le devant de la scène nombre de produits, entreprises ou filières dont le rôle est stratégique pour notre pays, mais qui, pour autant, n’entrent pas dans les catégories que vous avez définies.
L’an dernier, nous avons donc accueilli avec satisfaction les propos du ministre et du commissaire aux participations selon lesquels l’État actionnaire allait davantage prendre en compte cette dimension de souveraineté – conformément à ce que nous martelons au Sénat depuis des années. Malheureusement, trois ans après le début de la crise, nous attendons toujours la concrétisation de ces déclarations, alors même que la nouvelle doctrine n’est toujours pas publiée…
Par ailleurs, en ce qui concerne la nationalisation d’EDF, nous n’en savons guère plus que ce que nous avons pu lire dans la presse. Les informations utiles se font rares, en dépit du montant important de l’opération.
En outre, la nationalisation ne répond pas à toutes les questions. Par exemple, comment régler la dette de près de 43 milliards d’euros d’EDF ? Comment sera financée la relance du nucléaire ? Qu’en est-il des contentieux relatifs aux concessions hydrauliques ?
De même, nous regrettons fortement la méthode par laquelle le Gouvernement envisage de se désendetter de 7 milliards d’euros grâce à ce compte, alors même qu’il ne prévoit aucune recette. En d’autres termes, le remboursement de la dette proviendra en réalité d’un simple versement du budget général. Le tour de passe-passe est vertigineux : 7 milliards d’euros sont prélevés dans le budget, mis dans le compte qui nous intéresse, et enfin versés au désendettement.
Autrement dit, absolument aucun effort structurel n’est fait pour assainir les finances publiques.
Nous remboursons la dette non pas par des économies, mais en continuant de creuser le budget général ! L’objectif de cette manœuvre est simple : afficher un effort de désendettement, qui n’en a en réalité que le nom, car, de fait, nous nous endettons pour nous désendetter…
Voilà, mes chers collègues, les trois raisons qui conduisent la commission à émettre un avis défavorable sur l’approbation de ce compte.
Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l’intervention générale et celui de l’explication de vote. Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. Christian Bilhac.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’objet de ces missions peut paraître quelque peu aride. Il n’en est pas moins crucial, compte tenu des masses financières qu’il représente : plus de 50 milliards d’euros pour la mission « Engagements financiers de l’État », plus de 120 milliards d’euros pour la mission « Remboursements et dégrèvements », sans compter les différents comptes spéciaux.
Le budget de la mission « Engagements financiers de l’État » augmente de plus de 35 % en crédits de paiement en 2023. Son montant total représenterait plus de 10 % des dépenses de l’État.
La composante majeure de cette mission est l’augmentation de la charge de la dette. La remontée des taux d’intérêt, depuis le début de l’année 2022, a eu un effet quasi immédiat sur le coût de notre endettement public, qui était resté somme toute limité ces dernières années, malgré un encours total ayant littéralement explosé, d’abord après la crise financière de 2008, mais surtout en 2020 et 2021 à cause des mesures liées à la crise sanitaire.
Plus que jamais, notre État vit à crédit, pouvant encore compter sur la qualité de la signature française sur les marchés internationaux.
La remontée est pourtant spectaculaire : près de 12 milliards d’euros supplémentaires ont été engagés dès cette année pour le seul paiement des intérêts d’emprunt, par rapport à la loi de finances initiale. En 2023, le service de la dette devrait à peu près équivaloir à 50 milliards d’euros. Il dépassera de nouveau le budget de la défense – réalité quelque peu ironique à l’heure où nous relançons l’effort militaire face à la nouvelle donne internationale.
Face au durcissement du marché obligataire, l’Agence France Trésor (AFT) n’aurait-elle pas intérêt à rechercher davantage les faveurs d’investisseurs français plutôt qu’internationaux, afin de réduire les risques de souveraineté sur notre dette publique ? À cet effet, nous pourrions nous inspirer du Japon, dont l’endettement public, le plus élevé du monde, est essentiellement détenu par des résidents. Mais peut-être cela ne collerait-il pas avec les conceptions ordolibérales qui prévalent au sein de la zone euro…
En ce qui concerne l’imputation de la dette covid dans un programme budgétaire dédié, j’émettrai les mêmes réserves que la commission des finances, relativement aux modalités de calcul et au principe même.
L’argument d’une meilleure lisibilité ne peut faire oublier que les mêmes règles s’appliquent en ce qui concerne le remboursement du capital et le paiement des intérêts. L’ensemble des dettes publiques est intégré dans la fameuse dette maastrichtienne, étalon commun aux pays européens et instrument de mesure de la Commission européenne.
Les montants énormes de la mission « Remboursements et dégrèvements » ne sont généralement pas décomptés dans la présentation courante du budget de l’État. Il est vrai qu’il y a, semble-t-il, peu à dire sur cette mission, s’agissant de restitutions d’impôts et de taxes par l’administration fiscale. L’importance du montant interroge néanmoins sur l’ampleur des irrégularités dans la perception des impôts. Mais, encore une fois, ce débat appartient davantage aux spécialistes du recouvrement fiscal.
Les dégrèvements d’impôts locaux sont plus inspirants : la suppression de la part régionale de la CVAE cette année et la suppression générale prévue pour 2023 et 2024 devant être compensées à l’euro près – ou bien le dégrèvement de 50 % aux entreprises, si le vote du Sénat en première partie venait à être définitivement retenu – donneraient lieu automatiquement à une hausse significative des mouvements sur ce compte.
En conclusion, malgré ces réserves, les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen approuveront les crédits de ces missions.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au tournant du siècle, la France s’est laissée bercer par le mythe d’une mondialisation heureuse. Cette douce musique nous a fait oublier l’importance de l’État stratège.
Malheureusement, la crise sanitaire, puis la crise énergétique nous ont cruellement rappelé sa nécessité. L’État stratège, c’est l’État qui bâtit une stratégie économique pour défendre sa souveraineté.
Il ne s’agit pas de dire que l’État doit administrer l’économie. Bien au contraire, l’État doit choisir ses priorités stratégiques et travailler, sur ces verticales, à garantir l’intérêt général sur le long terme. Cette vision doit aujourd’hui nous réunir, au-delà de nos clivages politiques.
Vous l’aurez compris, je concentrerai mon propos sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».
Les crédits de ce compte sont en constante augmentation depuis le début de la crise sanitaire, il y a près de trois ans. Cela correspond précisément au retour de l’État stratège sur le devant de la scène. En 2023, le montant des crédits dépassera les 17 milliards d’euros, essentiellement en provenance du budget général.
La succession des crises a eu un double effet positif : d’une part, elle a permis l’abondement massif de ce compte pour financer une stratégie économique ambitieuse ; d’autre part, elle a encouragé l’Agence des participations de l’État à reconsidérer sa doctrine, pour se consacrer désormais aux secteurs les plus stratégiques.
La nationalisation d’EDF, qui prépare le renouvellement de notre parc nucléaire, avec la construction, à long terme, de plusieurs EPR (European Pressurized Reactors), en cohérence avec la volonté affichée par le Gouvernement de neutralité carbone et d’indépendance énergétique, découle de cette logique.
Bien sûr, l’avenir d’EDF ne tient pas exclusivement à ces nouveaux chantiers. Notre fleuron national devra également rénover le parc existant, développer des produits d’export, tels que les SMR (Small Modular Reactors), et, bien sûr poursuivre le développement des énergies renouvelables, afin de doter la France d’un mix décarboné et résilient.
Monsieur le ministre, j’attire votre attention sur un sujet qui nous tient à cœur depuis longtemps : le renouvellement de nos concessions électriques en Aveyron. Cela fait dix ans que celles-ci sont suspendues à la décision de la Commission européenne. Or c’est au Gouvernement qu’il revient de négocier avec cette dernière. Nous souhaitions déjà, lorsque j’étais député, et c’est toujours le cas de l’ensemble des formations politiques du Sénat aujourd’hui, qu’EDF continue d’être concessionnaire.
En effet, EDF a exprimé son envie d’investir considérablement sur les barrages hydroélectriques, qui représentent en Aveyron 10 % de la production hydroélectrique nationale. Nous savons combien celle-ci est nécessaire. En quelques secondes, nous pouvons offrir une quantité considérable d’énergie ; il me semble que ce n’est pas neutre, en cette période. Aussi aimerions-nous que ce dossier avance.
Je crois que sur ces différents chantiers, la nationalisation d’EDF contribuera à la réalisation de nos objectifs.
Je salue le travail mené par notre collègue Martine Berthet, rapporteure spéciale au nom de la commission des affaires économiques, sur ces crédits.
Je partage l’essentiel de son analyse, notamment sur les enjeux liés à la nationalisation d’EDF et au grand professionnalisme de l’Agence des participations de l’État. Je fais également miennes ses réserves quant à la lisibilité du compte.
D’une part, des montants importants sont transférés du budget général vers ce compte spécial, ce qui permet certes de soutenir une politique ambitieuse, mais doit s’accompagner de décisions courageuses.
D’autre part, la nouvelle doctrine de l’agence doit également permettre la cession d’actifs non stratégiques, pour poursuivre le désendettement de l’État.
Malgré ces réserves, le groupe Les Indépendants soutiendra les crédits de ce compte spécial. Il s’agit non pas de donner un blanc-seing au Gouvernement, mais bien de renforcer le rôle de l’État stratège dans notre pays.
M. Daniel Breuiller. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il faut arrêter de confier la mission à Jérôme Bascher : à chaque fois qu’il la présente, la dette augmente !
Sourires.
La mission «Engagements financiers de l’État » est en hausse, nous dit-il, pointant, à raison, que cela est dû à un double effet : un effet taux et un effet volume.
L’effet volume compte plusieurs composantes : la dette covid, conséquence du « quoi qu’il en coûte », dans une période où ceux qui prônent l’orthodoxie budgétaire s’étaient justement convertis à la nécessaire intervention massive de l’État ; le déficit de l’État, au nom duquel le Gouvernement impose des restrictions budgétaires aux collectivités locales ; les mesures de soutien face à l’inflation.
Alors, lorsque les taux repartent à la hausse, la charge de la dette augmente – de 50 milliards d’euros, en l’occurrence. Mais ces sommes ne sont pas perdues pour tout le monde, car si l’État est endetté, il y a en face des préteurs dont les profits augmentent au même rythme, à la faveur de l’inflation.
Je le redis, face aux crises à venir, économiques ou climatiques, dont les coûts seront sans aucune mesure avec ceux déjà trop élevés de l’été catastrophique que nous venons de vivre, nous devons nous interroger sur notre manière de gérer la dette.
La dette covid est isolée, et, si M. le rapporteur spécial estime qu’aucun argument économique ou budgétaire n’est de nature à justifier cet isolement, nous pensons le contraire en ce qui concerne la part de la dette liée aux mesures environnementales. En effet, celle-ci est de nature différente et la noyer dans la masse indistincte de la dette conduira, encore une fois, à la traiter comme une variable d’ajustement.
Le Gouvernement nous proposera de nouveau son habituel arbitrage : maîtrisons d’abord la dette, puis nous prendrons les mesures nécessaires pour nous engager plus radicalement contre le réchauffement climatique.
Mais pour s’en donner les moyens, ne faut-il pas, monsieur le ministre, stopper le désarmement fiscal de l’État et limiter l’effet volume par des recettes nouvelles ? À cet effet, nous avons formulé une proposition d’impôt sur la fortune (ISF) climatique, dont j’espère que vous avez lu l’intégralité.
En ce qui concerne la mission «Remboursements et dégrèvements», nous nous prononçons sur des crédits qui, en raison du caractère mécanique de ces dépenses, sont évaluatifs, comme l’a noté M. le rapporteur spécial Pascal Savoldelli – par la voix du président Raynal.
Toutefois, ces prévisions peuvent susciter quelques interrogations.
En 2023, le rapport indique que le niveau estimé des remboursements de l’impôt sur les sociétés est en hausse de 13, 8 % par rapport à la LFI pour 2022. Ces remboursements correspondent à l’écart entre l’imposition effectivement due et les acomptes calculés sur les résultats de l’année précédente. Cette augmentation des remboursements est donc liée à la baisse attendue du bénéfice fiscal des entreprises en 2022, dans un contexte de crise inflationniste.
J’éprouve quelques difficultés à rapprocher cette information – la baisse attendue du bénéfice fiscal des entreprises dans un contexte de crise inflationniste – de votre déclaration, monsieur le ministre, dans cet hémicycle, le 21 novembre dernier : « Plus le gâteau grandit, plus les recettes fiscales augmentent. Nous percevons davantage d’impôt sur les sociétés depuis que son taux a été abaissé à 25 %.»
S’agissant de la question récurrente de la fraude à la TVA, la nécessité d’une vigilance accrue sur les risques de montages frauduleux est pointée. Nous soutenons toutes les mesures prises à cet effet, qui nécessitent selon nous une hausse des moyens humains, d’autant que le coût des postes qui y sont consacrés est moindre que les recettes qu’ils produisent.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, plan de relance, France 2030, bouclier tarifaire… Le Gouvernement a fait le choix volontariste de soutenir coûte que coûte notre économie, considérant que cet accompagnement permettra de recréer de la richesse.
Si je rappelle ici le « quoi qu’il en coûte », c’est que ce plan de soutien a affecté nos comptes publics : 200 milliards d’euros, ce n’est pas rien ! Mais cette stratégie est pleinement assumée ; elle a permis de sauver notre économie.
De fait, les crédits de la mission « Engagements financiers de l’État » affichent une hausse inédite de 15, 9 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2022. Ils s’élèveraient ainsi à 60, 2 milliards d’euros en 2023.
Cette augmentation s’explique principalement par l’ouverture, en cours d’année, de 11, 9 milliards d’euros de crédits supplémentaires pour financer la charge de la dette, dans un contexte de forte inflation – bien que la maîtrise de cette dernière en France contribue à modérer ce facteur.
En parallèle, ce niveau élevé d’inflation a également conduit les banques centrales à normaliser leurs politiques monétaires et à remonter leurs taux d’intérêt.
Après plusieurs années de conditions extrêmement favorables pour le financement de la dette française, les taux d’intérêt augmenteraient substantiellement en 2023, à 2, 6 % en moyenne annuelle pour les obligations assimilables du trésor à dix ans.
C’est donc la fin de l’argent magique, c’est-à-dire la fin de l’assouplissement quantitatif, prônée par la Banque centrale européenne (BCE), après que le procédé a été abondamment utilisé durant la décennie 2010.
Aussi, face au spectre de la dette et pour éviter les remontrances du FMI, notre gouvernement ne regarde pas ailleurs ; c’est pour cela que le « quoi qu’il en coûte » se mue en « combien ça coûte ».
C’est aussi la raison pour laquelle nous sommes convaincus que des réformes structurelles comme le recul de l’âge de départ à la retraite ou l’achèvement de la réforme de l’assurance-chômage sont nécessaires et conduiront à terme à la maîtrise de nos dépenses publiques.
C’est en ce sens que le programme 114, « Prêt garanti par l’État », poursuivra sa décrue. En effet, la mobilisation toujours forte de cette action, de l’ordre de 1, 91 milliard d’euros, baisse de 30 % par rapport à 2022.
Rappelons-nous que, dans le sillage du « quoi qu’il en coûte », le prêt garanti par l’État (PGE) avait connu un grand succès : au 31 juillet 2022, on dénombrait près de 800 000 entreprises bénéficiaires de PGE, pour un encours total de 142, 7 milliards d’euros.
Mais l’heure est désormais au remboursement. Selon le dernier baromètre Bpifrance, publié le 17 novembre, 9 % des PME et TPE ayant souscrit un PGE redoutent de ne pas être en mesure de le rembourser. Cette proportion est en hausse de 2 points par rapport à la dernière enquête en date. Toutefois, dans leur grande majorité, les entreprises devraient honorer leurs échéances.
Par ailleurs, le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » traduit l’ambition du Gouvernement de rester un État actionnaire.
La nationalisation d’EDF constitue en effet une étape indispensable pour renforcer la crédibilité de l’entreprise sur les marchés dans la perspective de la construction de six EPR2, de la poursuite du programme de grand carénage et de l’amplification des investissements dans les énergies renouvelables.
En ce qui concerne la mission « Remboursements et dégrèvements », il convient de noter que les remboursements d’impôts d’État liés aux contentieux de série baissent sensiblement, passant ainsi de 2, 7 milliards en 2022 à 1, 1 milliard d’euros en 2023, grâce aux efforts réalisés dans le suivi des plus gros contentieux. Aussi ne pouvons-nous que saluer le travail réalisé par notre administration fiscale.
En conclusion, la France se trouve en quelque sorte sur une ligne de crête, prise en étau entre le rétablissement nécessaire des comptes publics et le soutien de l’activité économique et énergétique. C’est toutefois ce seul chemin que nous devons poursuivre.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Engagements financiers de l’État » nous appelle à une grande vigilance en raison des nombreuses zones d’ombre de ses programmes.
Plusieurs points méritent notre attention.
Tout d’abord, la charge de la dette a littéralement explosé entre 2020 et 2023, enregistrant une hausse de 45, 5 %.
Les crédits de la mission sont parmi ceux qui augmentent le plus, en raison de l’inflation constante que nous subissons depuis quelques mois. Face à une hausse historique des taux d’intérêt, nous pouvons légitimement nous interroger sur vos prévisions de stabilité à l’horizon 2023.
Ensuite, les prêts garantis par l’État risquent fort d’être une bombe à retardement. En effet, la crise sanitaire, les conséquences économiques de la crise en Ukraine – crise de l’énergie ou de l’approvisionnement, coût des matières premières – et les tensions sur le marché du travail ont eu de fortes répercussions sur la trésorerie des entreprises.
Le risque est double : d’une part, une accélération du nombre de faillites, y compris d’entreprises parfaitement viables et productives et, d’autre part, une réduction de leurs dépenses d’investissement – c’est ce que les économistes qualifient généralement d’étranglement par la dette.
Les chiffres sont édifiants : parmi les quelque 700 000 entreprises ayant souscrit un PGE – pour plus de 148 milliards d’euros au total –, elles sont seulement 11 % à s’être acquittées de leur dette.
Les courbes actuelles laissent présager 37 000 défauts de paiement en 2022 – chiffre pour le moins inquiétant. Bien que le PLFR pour 2022 prévoie une baisse de 2 milliards d’euros des provisions pour les PGE, nous avons de sérieux doutes sur ce calibrage en 2023.
De la même manière, nous estimons urgent de mettre en place des mécanismes innovants pour éviter le défaut de paiement des créances aux entreprises dont la solvabilité à court terme est remise en question.
Par ailleurs, que penser de l’absence de prise en compte budgétaire de la dette covid ou de celle de SNCF Réseau parmi les crédits dévolus à la charge de la dette ? En toute logique, cela devrait pourtant être le cas.
Au regard de ces approximations, la question du désarmement fiscal de la France se pose avec d’autant plus d’acuité.
L’amortissement de ces dettes doit-il se faire sur le dos de tous les Français, en tablant sur une réduction de la dépense publique et en supprimant encore davantage de services publics ? Nous ne le pensons pas.
Bien au contraire, nous avons formulé des propositions pour davantage de justice fiscale et sociale : suppression de la flat tax, rétablissement de l’ISF, taxation des superprofits, rehaussement de la taxe sur le numérique…
Manifestement, les débats sur la première partie de ce PLF pour 2023 n’indiquent aucune remise en question de vos choix fiscaux. Vous refusez toujours de faire payer ceux qui le peuvent – les plus aisés, ceux qui s’enrichissent de la crise et de la situation économique du pays –, au détriment des plus vulnérables.
Ces choix, monsieur le ministre, fragilisent la situation financière de notre pays et accentuent le sentiment d’abandon qui gagne un peu plus chaque jour l’ensemble de nos concitoyens.
Cette fracture se manifeste dans l’accès aux services publics, car la dématérialisation est une facilité qui peut aussi isoler certains de nos concitoyens. Même s’il semble que ce soit le cap choisi, je rappelle que la dématérialisation ne peut se substituer à l’accueil du public, pour qui la fracture numérique constitue un handicap de tous les jours.
Enfin, l’analyse du programme 201, « Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux », suscite tout de même quelques commentaires.
En volume, nous constatons une baisse de 31 % environ par rapport à l’exercice précédent. Cette baisse continue n’est pas une simple ligne comptable ; elle traduit, de manière indirecte, l’insidieuse atteinte à l’autonomie fiscale des collectivités.
En effet, cette diminution découle de la suppression progressive de la taxe d’habitation, d’une part, et de la réduction massive des impôts de production, d’autre part.
Vous le savez, monsieur le ministre, nous sommes loin de partager votre position dogmatique sur la baisse d’impôt, qui conduit à une injustice grandissante. D’ailleurs, au rythme où vont vos réformes, il est à craindre qu’il ne sera plus nécessaire d’étudier ce programme l’an prochain, car, sans impôts locaux, point de remboursement ou de dégrèvement !
Ce programme pose donc la question de l’autonomie fiscale de nos collectivités, celle du lien entre l’impôt local, le territoire et les habitants, et, au-delà, celle de la démocratie locale. Si ce débat n’est pas mené, plusieurs programmes budgétaires pourraient disparaître et, avec eux, une certaine idée de la décentralisation.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, au travers de la discussion du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », qui retrace la doctrine de l’État actionnaire, je souhaite particulièrement insister sur l’avenir du groupe EDF.
En effet, après une augmentation de 2, 6 milliards d’euros au mois d’avril 2022, justifiée par la situation financière très difficile de l’entreprise – situation due aux contraintes imposées par l’État à EDF d’un blocage des tarifs de l’électricité –, les crédits doivent désormais être employés pour financer la montée au capital du groupe EDF afin de parvenir à 100 % de détention par l’État par le rachat des parts des actionnaires minoritaires.
Alors que cette opération a un coût annoncé de 9, 7 milliards d’euros, le Parlement ne dispose pas d’informations précises sur les raisons d’une telle opération ni, monsieur le ministre, sur votre vision stratégique pour l’avenir de l’entreprise historique. Les documents budgétaires en notre possession sont incomplets, voire inexistants, et vous vous refusez toujours au débat.
Pourquoi cela, alors que de nombreuses interrogations, voire des zones d’ombre persistent ?
Hormis la volonté affichée de gérer les concessions hydroélectriques en quasi-régie afin d’éviter leur mise en concurrence, qu’attendez-vous d’une détention de 100 % du capital d’EDF ?
Avez-vous abandonné la réorganisation du groupe EDF, sur le modèle du projet Hercule ou grand EDF, impliquant le démantèlement de l’entreprise et la privatisation de ses activités les plus rentables, en particulier les énergies renouvelables ?
Sur ce dernier point, pourquoi les notes préparatoires à l’opération de montée au capital qui indiqueraient qu’elle permettrait « de préparer sur une base nouvelle les négociations – régulation du nucléaire et réorganisation du groupe – à venir avec l’ensemble des parties prenantes » ne sont-elles pas accessibles aux parlementaires ?
Allez-vous céder des actifs comme Dalkia ou ouvrir le capital d’Enedis ?
Dois-je rappeler qu’EDF est au cœur de notre système électrique ? Dès lors, il est impératif qu’il y ait le plus de transparence possible quant au futur statut du groupe, au devenir du mécanisme relatif à l’accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) et au financement du nouveau nucléaire, qui seront les grands sujets de l’année prochaine.
Face aux enjeux financiers de cette montée au capital, en pleine crise énergétique et d’approvisionnement, le Gouvernement ne peut faire l’économie d’une explication devant le Parlement.
Comme cela a été rappelé sur de nombreuses travées, l’absence de recours à une loi de nationalisation ne permet pas d’avoir un débat satisfaisant sur l’avenir de l’entreprise et, ainsi, sur l’emploi des deniers publics nécessaires pour mener à bien cette étatisation. Parce qu’EDF est une entreprise stratégique contribuant à la souveraineté énergétique du pays et parce qu’elle a en charge une mission d’intérêt général et de service public, nous pensons que sa disparition dans sa forme intégrée porte en germe un risque systémique.
Comme vous le savez, monsieur le ministre, nous sommes favorables à une nationalisation d’EDF. Nous sommes favorables à la reconstruction d’un grand service public de l’énergie qui regrouperait Engie et, pourquoi pas, TotalEnergies, un service public de l’énergie soustrait aux logiques concurrentielles du marché européen.
C’est pourquoi notre groupe rejettera les crédits de ce compte d’affectation spéciale. Nous voulons rappeler au Gouvernement la nécessité d’avoir un tel débat sur la stratégie d’EDF. Ce débat doit concerner le Parlement, en associant aussi les usagers et les salariés et syndicats du groupe.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, Laurent Saint-Martin et moi-même avions envisagé, voilà quelques années, l’organisation d’un débat sur la dette avant tout examen du projet de loi de finances.
En effet, le déficit et la dette annihilent quelque peu notre liberté sur un débat extrêmement important §portant sur une mission que j’affectionne particulièrement, pour en avoir été moi-même le rapporteur spécial, lorsque j’ai eu le bonheur de siéger à la commission des finances pendant trois ans. De ce point de vue, je partage les propos du rapporteur spécial.
Par conséquent, je mesure bien de quoi il s’agit ; je pense notamment, ces dernières années, aux effets d’un taux d’intérêt négatif anesthésiant la moindre réaction. Nous n’avons eu de cesse d’alerter sur le fait qu’un beau jour, comme la Belle au bois dormant, il faudrait se réveiller, puisque les taux allaient finir par augmenter, mais, telle sœur Anne ne voyant rien venir, personne ne s’est inquiété d’une augmentation des taux qui n’arrivait pas. Cette fois, nous y sommes et le réveil est difficile !
Évidemment, je félicite le rapporteur spécial pour son travail sur cette mission.
Monsieur le ministre, je vous rappelle qu’à plusieurs reprises, les années passées, nous avions demandé une simulation des conséquences d’une augmentation des taux. Cependant, tous ceux que la commission des finances a entendus en audition se sont renvoyé la patate chaude en indiquant ne pas savoir faire.
Aujourd’hui, il ne s’agit plus de simulation, puisque nous sommes confrontés à une augmentation effective de l’augmentation des taux. Toutefois, si, par hasard, cette tendance devait se confirmer, il serait intéressant de disposer d’évaluations des conséquences immédiates de l’augmentation des taux, au moins pour l’année prochaine.
À ce moment précis de mon intervention, je tiens à saluer les agents de l’Agence France Trésor, qui accomplissent un travail absolument remarquable dans des conditions loin d’être faciles. J’en profite pour vous demander, monsieur le ministre, si vous détenez la liste des possesseurs de notre dette et comment celle-ci est répartie – une telle information serait intéressante. En effet, nous ne disposons pas de toutes les données, alors que la situation devient délicate, d’autant que nous devons affronter le problème des engagements hors bilan – sujet majeur de mon propos.
Les engagements hors bilan représentent en effet 4 615 milliards d’euros, ce qui n’est pas rien et suscite des interrogations de notre part. Monsieur le ministre, j’ignore si vous pourrez nous fournir quelques informations sur ce sujet, sachant que, à cette heure tardive, pour être populaire dans cette maison, il convient d’intervenir en trois minutes au lieu de six.
Exclamations amusées.
Mme Cécile Cukierman. Il vous suffit de ne pas parler de votre département !
Sourires.
Nouveaux sourires.
… et j’en ai en effet déjà beaucoup parlé aujourd’hui. Pour une fois, je n’en reparlerai donc pas.
Je remercie les membres de la commission des lois, qui sont majoritairement présents sur ce sujet important.
Sans plaisanterie, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le ministre, je crois qu’il faudrait essayer de faire en sorte que, l’année prochaine, ce débat figure assez tôt dans l’organisation de nos travaux, parce qu’il arrive toujours tard le soir. C’est un débat, sacrifié, alors que, à mon sens, il est absolument fondamental pour la compréhension tant de l’équilibre budgétaire que des moyens dont nous disposons pour les politiques publiques.
Il faut dépasser le caractère mécanique de l’exercice, consistant à rappeler les éléments figurant dans le rapport de la commission des finances, car il s’agit d’un dossier extrêmement important. De la même façon, le dossier relatif aux dégrèvements est éminemment politique : les dégrèvements, c’est une politique et une stratégie. Je trouve donc extrêmement dommageable que, cette année comme les années précédentes, ce débat important arrive à cette heure tardive.
Je continue de penser que la conclusion à laquelle le député Saint-Martin et moi-même étions parvenus s’applique encore cette année. C’est pourquoi je le répète : monsieur le président de la commission des finances, sans doute faudrait-il l’année prochaine organiser, en début de session budgétaire, un débat portant uniquement sur les engagements, donc sur la dette, de façon que nous soyons totalement éclairés quant aux marges de manœuvre à notre disposition sur les politiques publiques à venir.
Je remercie d’emblée les rapporteurs spéciaux, les rapporteurs pour avis et les orateurs des groupes de la qualité de leurs interventions. Je m’efforcerai de répondre dans le temps imparti aux principaux sujets soulevés et organiserai mon propos autour des trois blocs de politique publique examinés à l’occasion de la discussion des crédits de ces missions.
D’emblée, je précise que nous partageons bien évidemment la préoccupation exprimée par le rapporteur spécial Jérôme Bascher et plusieurs d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, sur l’évolution des taux d’intérêt. La programmation budgétaire du Gouvernement intègre déjà une hausse des taux d’intérêt en cohérence avec un scénario pluriannuel de normalisation des conditions monétaires. Le scénario de taux retenu pour le projet de loi de finances pour 2023 est celui d’une remontée des taux longs.
Ainsi, le projet de loi de finances fait l’hypothèse que le taux à dix ans serait à 2, 5 % fin 2022, puis à 2, 6 % fin 2023. Mme Briquet s’est interrogée sur la prévision des taux et a remis en cause celle du Gouvernement de 2, 6 % à fin 2023. Ce soir, le taux des obligations assimilables du Trésor (OAT) à dix ans est à 2, 43 % ; la prévision des marchés pour la fin 2022 est égale ou inférieure à 2, 5 % et le projet de loi de finances pour 2023 est bâti sur des hypothèses structurelles et non sur les dernières données du marché, qui est évidemment très volatil en ce moment.
À M. Bilhac qui a formulé le souhait que l’Agence France Trésor revienne sur son marché domestique, je réponds que la diversité des investisseurs internationaux est un atout et non une menace, qui nous permet d’emprunter moins cher, de diversifier les détenteurs et de les mettre en concurrence. Je rappelle d’ailleurs que détenir une OAT n’ouvre qu’un seul droit, celui d’être remboursé.
Mme Goulet a demandé des précisions sur l’impact qu’aurait une augmentation des taux. Un choc de taux de 1 point par rapport au scénario de référence à 2, 6 % entraînerait une hausse de la charge de la dette de 2, 5 milliards d’euros la première année, de 6 milliards d’euros la suivante et de 16 milliards d’euros à horizon 2027. Il s’agit donc d’un enjeu absolument majeur.
Le scénario de hausse progressive des taux d’intérêt est cohérent avec le scénario macroéconomique du Gouvernement, comme avec la cible d’inflation à long terme de la Banque centrale européenne, dont le mandat est de maintenir l’inflation de long terme proche de 2 %.
Je rappelle que le calibrage d’un montant retenu pour les appels en garantie des prêts garantis par l’État en 2023, qui a été critiqué par Mme Briquet, prend appui sur les calculs réalisés par la Banque de France pour la direction générale du Trésor et actualisés au moins deux fois par an. L’évolution des appels en garantie dépend étroitement de l’évolution de la conjoncture économique et financière, de la dynamique des défaillances d’entreprises et de la bonne santé financière des entreprises. Je pense au prix des intrants, aux coûts de production, à l’accès au financement, aux liquidités, au niveau d’endettement. C’est pourquoi aucun autre élément que les prévisions susmentionnées ne permet de présager un montant final d’avances sur indemnisation pour l’année 2023.
L’isolement budgétaire de la dette covid dans un programme dédié, qui a été relevé, si ce n’est critiqué par le président de la commission des finances et le rapporteur spécial Jérôme Bascher, a pour objectif prioritaire de retracer dans les comptes publics de manière lisible et claire le montant des dettes d’État résultant de la crise sanitaire et d’afficher une trajectoire de remboursement de cette dette entre 2022 et 2042. L’intégration de la charge des intérêts avec la dette elle-même, qui matérialise le coût complet de l’effort national, est en effet inhabituelle, mais s’apprécie au regard de sa vertu pédagogique.
J’en viens au compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ». Je rappelle d’emblée que, de manière constante, tous les gouvernements ont fait le choix de retenir un montant notionnel de prévisions de recettes et de dépenses, afin de ne pas donner de signaux au marché. Le Gouvernement est en effet soumis à plusieurs obligations : d’abord – et c’est la première d’entre elles –, l’information et la transparence à l’égard du Parlement, ensuite, gérer au mieux les données publiques et défendre les intérêts du contribuable, ce qui suppose de ne pas révéler ses intentions au marché, enfin, protéger la réputation d’entreprises, dont les difficultés potentielles pourraient nécessiter en cours d’année des opérations de recapitalisation.
C’est cette tension entre ces différents impératifs qui s’impose au Gouvernement et qui justifie l’inscription de crédits notionnels qu’a soulignée Mme Jacques dans son intervention. Malgré ces contraintes, l’effort de transparence de l’État est chaque année particulièrement important, avec la publication du projet annuel de performance du compte d’affectation spéciale ainsi que d’un rapport d’activité et d’un rapport financier de l’Agence des participations de l’État, en annexe du projet de loi de finances.
Madame Jacques, notre vision d’un État stratège existe bel et bien. Elle se concrétise en recourant à trois outils d’intervention en fonds propres, dont les doctrines sont complémentaires.
Premièrement, la Caisse des dépôts et consignations investit sans horizon de temps en tant qu’actionnaire stratégique d’influence ou de contrôle dans certains secteurs prioritaires – la transition écologique, le développement économique, la cohésion territoriale, l’habitat, la cohésion sociale –, mais elle reste évidemment également attachée à des niveaux de rentabilité minimaux.
M. le rapporteur spécial s ’ exclame.
Deuxièmement, Bpifrance investit en tant qu’actionnaire minoritaire actif au capital d’entreprises françaises, à l’occasion d’une évolution actionnariale et aux côtés d’un actionnaire majoritaire ou de référence pour assurer un actionnariat français dans ces entreprises avec un horizon d’investissement de type fonds d’investissement, même si la durée de détention n’est pas fixée ex ante.
Troisièmement, l’Agence des participations de l’État est pour sa part l’actionnaire stratégique sur les sujets les plus critiques, conjuguant un fort niveau de contrôle de l’État – on compte quarante-quatre entreprises dans lesquelles l’État est majoritaire sur les quatre-vingt-trois que détient l’agence –, une capacité à privilégier des objectifs stratégiques ou industriels avant les attentes de rendement, et des capacités financières pouvant être gérées sur le long terme et sans limite d’horizon d’investissement.
C’est dans ce contexte que doit s’apprécier la performance financière du portefeuille coté de l’APE. Ce portefeuille est fortement pondéré sur un petit nombre de secteurs, notamment l’énergie, ce qui limite sa comparabilité avec le panel plus large des entreprises du CAC 40. Ainsi, au 18 novembre 2022, la valeur des participations de l’État dans EDF et Engie représentait 56 % de la valeur du portefeuille coté de l’État.
La question de l’inscription de 6, 6 milliards d’euros au titre de la contribution au désendettement de l’État est régulièrement soulevée. Nous avons mis en place une trajectoire d’apurement de la dette née de la crise sanitaire, permettant d’amortir son montant sur une période de vingt ans par des dotations annuelles auprès de la Caisse de la dette publique (CDP). En l’absence de recettes de cession et compte tenu du caractère stratégique de la dépense, chaque échéance annuelle versée à cet établissement nécessite l’abondement préalable en recettes du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » à partir du programme 369, « Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 », à hauteur de la dépense envisagée.
Maintenir la maquette budgétaire inchangée en conservant le programme 732, « Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État », permettra d’assurer le suivi dans le temps de ces opérations, notamment quand une reprise des cessions de participations pourra être envisagée pour participer au désendettement, ce qui est notre souhait.
Sur la mission « Remboursements et dégrèvements », la hausse marquée du remboursement de la TVA traduit, de la part des entreprises, une préférence pour le présent, dans un contexte d’incertitude économique. En ce qu’il contribue à la liquidité des entreprises, le droit d’opter pour le remboursement plutôt que pour l’imputation pour les périodes d’affaires suivantes participe très concrètement au soutien de l’économie. Cet outil a été mobilisé de façon très efficace dans les premiers mois de la crise sanitaire : il fait partie des aides peu visibles, mais décisives pour nos entreprises.
Je rappelle que la TVA est censée rester neutre pour les acteurs économiques tout au long de la chaîne de valeur et que la charge de trésorerie liée au décalage entre la collecte et le reversement de la TVA peut représenter dans certains secteurs et en période de tension économique une charge réelle pour les exploitations. Ce dispositif de remboursement de TVA constitue une part majoritaire des crédits de la mission, à hauteur de 54 %.
( Mme Nathalie Goulet manifeste sa satisfaction.) Disant cela, je m’adresse particulièrement à Mme Goulet, spécialiste de cette question !
Sourires.
En parallèle, j’indique que la lutte contre la fraude à la TVA est l’un des objectifs prioritaires du Gouvernement. C’est un domaine dans lequel nous ne ménageons pas nos efforts. §
Les travaux d’estimation du manque à gagner en matière de TVA progressent. Ainsi, l’Insee a mis au point une méthode d’évaluation robuste, dont les premiers résultats donnent une enveloppe absolument vertigineuse.
L’estimation du montant de fraude à la TVA oscille entre 20 et 25 milliards d’euros par an !
Pour contribuer à sa fiabilisation, la DGFiP a lancé environ 500 contrôles aléatoires en TVA, dont les premiers résultats sont attendus dans les prochaines semaines. Bien évidemment, je les transmettrai au Parlement.
La loi de finances pour 2020 a permis d’augmenter l’arsenal juridique disponible et la coopération entre administrations, laquelle est facilitée par l’ouverture ou l’accès croisé aux applications, notamment pour lutter contre la fraude à la TVA à l’importation.
Dans le projet de loi de finances pour 2023, nous avons élaboré avec le Parlement plusieurs mesures qui nous donnent de nouvelles armes : réforme de la procédure de suspension des numéros de TVA intracommunautaire, élargissement des compétences des officiers fiscaux judiciaires à l’escroquerie à la TVA.
D’un point de vue opérationnel, la DGFiP a également engagé des actions spécifiques en ciblant des secteurs à risque, par exemple l’utilisation abusive du régime de TVA sur la marge dans le secteur du négoce des véhicules d’occasion ou, s’agissant des fraudes au carrousel, la judiciarisation précoce des dossiers détectés par l’administration fiscale.
Dans tous les domaines, les travaux sont engagés pour une transparence accrue des transactions assujetties à la TVA à partir de 2024, grâce à une meilleure maîtrise de la donnée.
Ainsi débutera auprès des plateformes électroniques la collecte des données relatives aux opérations réalisées via leur marketplace. Par ailleurs, et c’est un grand chantier dont nous serons amenés à beaucoup reparler ici, la facturation électronique se déploiera dans les relations entre assujettis à la TVA à compter du 1er juillet 2024 pour les grandes entreprises – c’est-à-dire très bientôt.
Toutes ces mesures doivent contribuer à sécuriser les ressources de l’ensemble des bénéficiaires de la TVA à un horizon proche.
Au-delà de la seule TVA, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous rappelle que la performance du contrôle fiscal continue de s’améliorer. Le montant des droits rappelés est égal à 13, 4 milliards d’euros en 2021, soit 5, 2 milliards d’euros de plus qu’en 2020, qui était une année particulière, et 1, 7 milliard d’euros de plus qu’en 2019. Le contrôle fiscal se transforme : nous faisons plus de prévention, nous ciblons mieux les contrôles en fonction des risques, notamment grâce aux data mining. En 2021, la part des contrôles issus du data mining atteint 45 %, contre une cible initiale à 40 %.
Enfin, sur les remboursements à des politiques publiques, je rappelle que la suppression de la contribution à l’audiovisuel public est une mesure nationale permettant de supprimer un impôt injuste, car forfaitaire, dû par de nombreux ménages modestes, aisément contournable et obsolète, tout en maintenant la même ambition de financement du service public de l’audiovisuel.
Le crédit d’impôt recherche a pour objectif de stimuler les investissements des acteurs privés en recherche et développement. Il s’agit d’une dépense fiscale très importante pour le budget de l’État, mais aussi de l’un des dispositifs les plus au cœur de l’attractivité économique de notre pays.
J’évoque enfin la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, dont l’enjeu est de poursuivre la baisse de la fiscalité de production en supprimant intégralement l’impôt qui génère le plus d’effets économiques néfastes à la compétitivité des entreprises françaises. Il ne m’a pas échappé que la Haute Assemblée avait rejeté l’article 5 lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances pour 2023. Comme j’ai eu l’occasion de le dire, le Gouvernement regrette fortement cette décision.
Je ne convaincrai sans doute pas une majorité d’entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, mais je rappelle que nous en avons besoin pour la souveraineté industrielle. Nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’examen des amendements, puisque l’un d’entre eux a pour objet la traduction concrète de l’absence de suppression de la CVAE.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
En euros
Mission / Programme
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Engagements financiers de l’État
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)
Épargne
Dotation du Mécanisme européen de stabilité
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque
Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19
L’amendement n° II-443, présenté par M. Bascher, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Supprimer le programme :
Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits de programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)
Épargne
Dotation du Mécanisme européen de stabilité
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque
Amortissement de la dette de l’État liée à la Covid-19
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial. Nous nous sommes déjà largement exprimés sur le cantonnement de la dette liée au covid-19 dans un seul programme. Dans la mesure où nous sommes contre, nous allons décantonner !
Sourires.
Cet amendement vise donc à supprimer le programme 369 « Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 » et les crédits afférents.
En effet, en procédant ainsi, le Gouvernement mélange les choux et les carottes, puisque ce programme rassemble le capital et des crédits de charges d’intérêts. C’est très original, comme M. le ministre l’a d’ailleurs souligné.
Nous ne sommes pas du tout favorables à cette soupe choux-carottes, au moment où le budget prend le bouillon.
Nouveaux sourires.
Vous avez parlé de pédagogie, monsieur le ministre, mais ce n’est pas le budget de l’éducation !
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
La crise a pesé sur notre endettement et ces dispositifs ont pour objectif d’identifier, retracer et suivre l’amortissement de la dette liée à la crise sanitaire.
Pendant cette crise, nous avons paré au plus urgent. Maintenant que nous en sortons, nous devons rembourser cette dette et c’est notamment par la croissance que nous y arriverons. C’est pourquoi, chaque année, une partie du surcroît de recettes liées à la croissance sera affectée au remboursement de la dette covid de l’État. Ce programme permet de suivre l’évolution de la dette chaque année d’ici à 2042, depuis son estimation initiale de 165 milliards d’euros à la fin de l’année 2021.
Nous y voyons là un enjeu de lisibilité et de transparence sur la gestion de nos finances publiques, comme de responsabilité. Par ailleurs, cela correspond à une attente des Français qui se posent de nombreuses questions sur cette dette.
L ’ amendement est adopté.
L’amendement n° II-442, présenté par M. Bascher, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs)
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs)
Épargne
Dotation du Mécanisme européen de stabilité
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque
Amortissement de la dette de l’État liée à la Covid-19
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le rapporteur spécial.
Il s’agit de remettre un peu de sincérité et de cohérence dans les prévisions du Gouvernement.
Aujourd’hui, il est très difficile de faire des hypothèses économiques et macroéconomiques – c’est un peu comme gagner au loto !
Sourires.
Ce qui est certain, en revanche, c’est que nous avons supprimé 2 milliards d’euros de crédits pour les PGE lors de l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire sur le projet de loi de finances rectificative pour 2022 ce matin. C’est pourquoi la commission des finances revoit à la baisse les prévisions du Gouvernement et propose une annulation de crédits à hauteur de 700 millions d’euros.
De deux choses l’une, soit la réalité sera pire que les hypothèses retenues et toutes les entreprises prendront le bouillon, davantage à cause des Urssaf et de la crise de l’énergie que des PGE, d’ailleurs ; soit la situation sera meilleure et les prévisions du Gouvernement sont trop hautes.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
Nous avons besoin de ces crédits pour rembourser les entreprises. Nous avons tenu compte de leur sinistralité. C’est pourquoi il est impossible de comparer les prévisions de 2023 avec le montant des crédits annulés en 2022, au regard des aléas bien plus graves qui s’annoncent pour 2023.
Je ne voudrais pas voir dans cet amendement un moyen simple pour la majorité sénatoriale de faire des économies à l’occasion de l’examen de ce projet de loi de finances.
À la fin de l’examen de la première partie, on a beaucoup parlé du solde. Je rappelle, mesdames, messieurs les sénateurs, que, dans le cadre du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027, vous vous êtes engagés sur un solde de 4, 6 milliards d’euros, ce qui nécessite de réaliser 10 milliards d’euros d’économies.
Hier, dans le cadre de l’examen de la mission « Crédits non répartis », vous avez annulé 1 milliard sur la dotation de 1, 8 milliard d’euros du programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles ». De ce point de vue, c’est de l’argent facilement trouvé.
Avec cet amendement, vous économisez 700 millions d’euros.
Il reste 8 milliards d’euros à trouver. Je pense qu’il faut plutôt les chercher dans des réformes structurelles.
Je suis désolée, monsieur le rapporteur spécial, mais je ne peux pas voter cet amendement, qui tend à supprimer des fonds alors que le risque existe toujours.
Je mets aux voix l’amendement n° II-442.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 75 :
Le Sénat a adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 76 :
Le Sénat a adopté.
Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.
En euros
Mission / Programme
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Participations financières de l’État
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État
L’amendement n° II-441, présenté par M. Husson, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial.
Cet amendement, déposé par Jean-François Husson pour la commission des finances, a pour objet de tirer les conséquences, pour ce compte d’affectation spéciale, de la décision que nous venons de prendre en supprimant la dette covid cantonnée. C’est donc un amendement de cohérence.
L ’ amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
Les crédits sont adoptés.
J’appelle en discussion les amendements portant article additionnel, qui sont rattachés pour leur examen aux crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État ».
Je suis saisie de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-105 est présenté par MM. Breuiller, Parigi, Gontard, Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Labbé, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme M. Vogel.
L’amendement n° II-195 rectifié est présenté par Mme Blatrix Contat, M. Montaugé, Mme Artigalas, MM. Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Pla, Redon-Sarrazy, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
I. – Après l’article 49
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport d’information sur l’évaluation de la mise en œuvre de l’article 66 de la loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 sur l’éco-conditionnalité des prises de participation de l’État via l’agence des participations de l’État dans le cadre du plan de relance. Ce rapport d’information fait état des perspectives de pérennisation de la mesure au-delà du plan de relance, d’élargissement à d’autres types d’aides publiques, en particulier aux prises de participation de BPI France, et de renforcement des engagements des entreprises.
II. – En conséquence, faire précéder cet article d’une division additionnelle ainsi rédigée :
Participations financières de l’État
La parole est à M. Daniel Breuiller, pour présenter l’amendement n° II-105.
Cet amendement vise à demander au Gouvernement un rapport d’évaluation de la disposition, adoptée dans la loi de finances rectificative pour 2020, qui conditionne la prise de participation de l’État dans une grande entreprise, via l’Agence des participations de l’État, à la souscription par cette dernière d’engagements en matière de réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.
En l’état, cette disposition ne concerne que les prises de participation débloquées dans le cadre du plan de relance, soit deux entreprises seulement.
Le rapport que nous demandons permettrait d’étudier l’opportunité et les conditions d’un élargissement et d’une pérennisation de la mesure au-delà du plan de relance et à d’autres types d’aides publiques, notamment aux prises de participation effectuées par Bpifrance.
De plus, ce rapport devra évaluer la pertinence des engagements demandés aux entreprises et leur éventuel renforcement. En particulier, l’on pourrait envisager un élargissement du périmètre des missions concernées, afin de couvrir les activités des entreprises à l’international, ainsi que la mise en place de sanctions en cas de non-respect des objectifs fixés.
La parole est à Mme Florence Blatrix Contat, pour présenter l’amendement n° II-195 rectifié.
Elle demande le retrait de ces amendements. Ceux-ci font référence aux crédits du plan de relance qui auraient abondé le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », mais aucun crédit de la mission « Plan de relance » n’a abondé ce compte, qui n’a bénéficié que des crédits votés dans l’urgence de la première vague de l’épidémie de covid-19, c’est-à-dire bien avant que le Gouvernement ne décide d’une politique de relance.
Puis, il ne semble pas utile de demander un rapport au Gouvernement sur des éléments qui sont, de toute façon, rendus publics par les entreprises elles-mêmes. En effet, l’article 66 de la loi de finances rectificative prévoit la publication d’un rapport annuel des entreprises sur leurs engagements climatiques.
Même avis : un tel rapport, sur la mise en œuvre de l’écoconditionnalité, est déjà disponible sur le site internet de l’APE. De plus, on trouve dans les déclarations extra-financières des entreprises des rapports annuels sur le respect de leurs obligations. Cet amendement est donc satisfait.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », figurant à l’état D.
En euros
Mission / Programme
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Accords monétaires internationaux
Relations avec l’Union monétaire ouest-africaine
Relations avec l’Union monétaire d’Afrique centrale
Relations avec l’Union des Comores
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Les crédits sont adoptés.
Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », figurant à l’état D.
En euros
Mission / Programme
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics
Avances à l’Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune
Avances à des organismes distincts de l’État et gérant des services publics
Prêts et avances à des services de l’État
Avances à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l’indemnisation des victimes du Benfluorex
Prêts aux exploitants d’aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité
Prêts destinés à soutenir Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l’épidémie de la covid-19
Prêts destinés à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l’épidémie de la covid-19
Prêts destinés au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d’Aix-Marseille-Provence
Prêts à FranceAgriMer au titre des préfinancements de fonds européens
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
Les crédits sont adoptés.
Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.
En euros
Mission / Programme
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Remboursements et dégrèvements
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)
Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)
L’amendement n° II-747 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
En euros
Programmes
Autorisations d’engagement
Crédits de paiement
Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État (crédits évaluatifs)
Remboursements et dégrèvements d’impôts locaux (crédits évaluatifs)
TOTAL
SOLDE
La parole est à M. le ministre délégué.
Cet amendement a notamment pour objet d’ouvrir 2, 3 milliards d’euros de crédits pour le programme 201. Ce mouvement tire les conséquences de la suppression de l’article 5, que je regrette, car cet article supprimait la CVAE. Il tend donc à ouvrir 2, 3 milliards d’euros de crédits destinés à la prise en charge par l’État du dégrèvement de CVAE en faveur de certaines entreprises.
En préparant cet amendement, nos services, mais aussi les équipes de la commission des finances du Sénat, se sont rendu compte d’une erreur puisque nous actons dans l’article d’équilibre de la première partie une annulation de crédits de 2, 3 milliards d’euros au lieu de procéder à une ouverture de crédits de même montant. Je vous propose de corriger cette erreur en adoptant un amendement à la fin de la seconde partie.
Nous avons adopté hier l’article d’équilibre, non sans de nombreuses délibérations décidées par la majorité sénatoriale pour revenir sur un certain nombre de votes. Au milieu des mouvements de crédits ainsi occasionnés, une erreur s’est glissée dans l’article d’équilibre.
Non, l’erreur n’a d’incidence que sur le solde budgétaire, pas sur la comptabilité nationale.
La commission ne s’est pas réunie pour examiner cet amendement. À titre personnel, sagesse.
L ’ amendement est adopté.
Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisie d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
Les crédits sont adoptés.
Nous avons achevé l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », des comptes d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », « Accords monétaires internationaux », du compte de concours financiers « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 28 novembre 2022 :
À dix heures, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (texte n° 114, 2022-2023) ;
Mission « Travail et emploi » et articles 47 à 49 :
Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » ; articles 41 et 41 bis ;
Mission « Culture » ; articles 41 quater et 41 quinquies ;
Mission « Médias, livre et industries culturelles » ;
Compte spécial « Avances à l’audiovisuel public » ;
Mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
Ordre du jour
La séance est levée le samedi 26 novembre 2022, à minuit dix.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 28 novembre 2022 :
À dix heures, quatorze heures trente et le soir :
Suite du projet de loi de finances pour 2023, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (texte n° 114, 2022-2023) ;
Mission « Travail et emploi » et articles 47 à 49 :
Mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » ; articles 41 et 41 bis ;
Mission « Culture » ; articles 41 quater et 41 quinquies ;
Mission « Médias, livre et industries culturelles » ;
Compte spécial « Avances à l’audiovisuel public » ;
Mission « Recherche et enseignement supérieur ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le samedi 26 novembre 2022, à minuit dix.