Intervention de Cathy Apourceau-Poly

Réunion du 28 novembre 2022 à 10h00
Loi de finances pour 2023 — Travail et emploi

Photo de Cathy Apourceau-PolyCathy Apourceau-Poly :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit une augmentation des crédits de la mission « Travail et emploi » de 4, 5 milliards d’euros.

Cette augmentation masque en réalité une modification des périmètres de la mission avec l’intégration des crédits de l’activité partielle qui figuraient auparavant dans la mission « Plan de relance ».

Cette augmentation masque également la baisse des crédits du programme « Accès et retour à l’emploi », notamment la diminution de 500 millions d’euros de l’indemnisation des demandeurs d’emploi.

Le Gouvernement justifie cette diminution des crédits par l’amélioration de la situation de l’emploi et les conséquences de la réforme de l’assurance chômage.

Avec cette réforme, si le taux de chômage passe sous la barre des 9 % six mois durant, la durée d’indemnisation sera réduite de 25 %.

Concrètement, à partir du 1er février 2023, un salarié de moins de 53 ans ne sera indemnisé que pendant dix-huit mois au lieu de vingt-quatre mois aujourd’hui. Un salarié de plus de 55 ans sera indemnisé pendant vingt-sept mois, contre trente-six mois aujourd’hui.

Cette réforme va diminuer les droits des chômeurs sans avoir d’effet sur l’emploi, selon le secrétaire national de la CFDT, sauf à « brosser dans le sens du poil un électorat et à faire des économies budgétaires ».

Le Gouvernement veut en réalité réaliser 4 milliards d’euros d’économies sur le système d’assurance chômage.

Cette réduction des durées d’indemnisation contraindra les personnes sans emploi à accepter des métiers pénibles et mal payés.

À l’opposé du projet du Gouvernement, nous considérons qu’il faut revaloriser le travail et lui redonner tout son sens afin que chacun y retrouve goût, avec de bons salaires et de bonnes conditions de travail.

En refusant d’augmenter les salaires et de revaloriser les métiers essentiels, vous portez la responsabilité de la dévalorisation du sens du travail, qui est un lieu non plus d’épanouissement, mais de mal-être et de souffrance.

Ce projet de loi de finances pour 2023 prévoit également la réforme du service public de l’emploi avec le projet France Travail, dont les contours demeurent très flous.

Si un préfigurateur a été nommé pour préparer sa mise en place dès 2024, les acteurs ne disposent d’aucun élément précis sur son périmètre et son contenu.

Pourtant, les enjeux sont multiples. Quid des jeunes les plus éloignés du travail, qui affrontent des problématiques dites « périphériques » et qui doivent être remobilisés ? Aucun financement n’est aujourd’hui fléché vers de réelles solutions, et les missions locales ont trop peu de leviers d’action.

Enfin, s’agissant de l’inspection du travail, nous alertons sur la situation du personnel, notamment celle des inspectrices et des inspecteurs, confrontés à une crise de perte de sens doublée d’un manque de reconnaissance de leur direction.

Face à un capitalisme de plus en plus agressif, nous avons besoin d’une inspection du travail forte pour faire respecter le travail, mais aussi celles et ceux qui travaillent.

Les crédits de fonctionnement des services déconcentrés de l’État, et donc de l’inspection du travail, n’augmentent que de 2 % en 2023.

Si l’effort ne s’accentue pas, il y a peu de chances que ces difficultés se résorbent.

Le Gouvernement réfléchit-il à de nouvelles évolutions de l’organisation de l’inspection du travail ?

Selon le rapport de notre collègue député Pierre Dharréville, entre la fin de 2017 et mars 2022, le nombre des agents chargés du contrôle des entreprises a diminué de 250 équivalents temps plein (ETP).

Sur le terrain, cela se traduit par un nombre élevé de postes vacants au sein des sections de contrôle. Le taux de vacance serait en moyenne de 15 %. Cette situation empêche l’inspection du travail de remplir ses missions en certains endroits du territoire et crée des ruptures d’égalité.

Le budget pour 2023 est censé permettre à la France d’atteindre le plein emploi, mais, en réalité, nous passons du chômage de masse à la précarité de masse.

Pour l’ensemble de ces raisons, notre groupe votera contre les crédits de la mission « Travail et emploi ».

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