Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, permettez-moi d’abord de saluer le travail des rapporteurs, qui viennent de nous exposer les réalités et le contenu de la mission que nous examinons.
Avec plus de 20 milliards d’euros qui lui sont consacrés dans le projet de loi de finances pour 2023, la mission « Travail et emploi » enregistre, avec la mission « Écologie, développement et mobilité durables », la plus forte progression par rapport à la loi de finances pour 2022.
Notre analyse s’effectue – espérons que cela dure ! – dans un contexte globalement rassurant sur la question de l’emploi en France.
Le recul continu du chômage se poursuit. Selon les prévisions de l’Insee, le taux de chômage devrait ainsi s’élever à 7, 4 % en fin d’année. Aussi, nous saluons les efforts qui ont été déployés depuis plusieurs années pour parvenir au plein emploi, objectif primordial pour notre société.
La tendance à l’augmentation des crédits de la mission « Travail et emploi » est bienvenue pour mener à bien les réformes qui visent à développer les compétences professionnelles des Français et à réduire les inégalités d’accès à l’emploi.
S’agissant de l’apprentissage, cela a été dit, il faut saluer la progression sur le plan quantitatif. Les chiffres qui ont été cités parlent d’eux-mêmes. Saluons également un changement de regard et une approche culturelle différente de l’apprentissage de la part des jeunes, de leur famille et des entreprises.
Certes, nous ne sommes pas encore au niveau de l’Allemagne. J’aime à raconter le cas de l’entreprise Bayer, cette grande entreprise chimique, qui affiche à l’entrée de son siège comme première fierté le nombre d’apprentis embauchés chaque année, avant même le chiffre d’affaires ou le nombre de salariés. C’est une culture, c’est le modèle rhénan.
En résumé, sur le plan quantitatif, les objectifs en nombre d’apprentis sont atteints ; cependant, il y a un « mais » : l’approche qualitative des contrats d’apprentissage qui sont signés nous oblige à constater que bon nombre de contrats concernent des bac+2 ou des bac+3, voire des masters.
Ces contrats sont même devenus, pour beaucoup d’étudiants, un moyen de financer des études trop souvent coûteuses. Est-ce là le rôle de l’apprentissage ? Pourquoi pas, mais un certain nombre de conditions doivent être respectées.
La première est la clarté des objectifs. Je doute que telle ait été notre vision à l’époque du débat sur la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Depuis lors, les objectifs ont légèrement évolué et nous devons veiller à ce que cette évolution ne se fasse pas aux dépens des « décrocheurs » – je n’aime pas ce terme –, des métiers à faible qualification ou des métiers en tension. Il convient de veiller également à respecter l’équilibre financier.
À ce sujet, mes chers collègues, lorsque l’on parcourt vos rapports, on constate, cela a été dit, que France Compétences doit régulièrement recourir à des emprunts. Cela souligne certes une dynamique, mais à quel prix ?
Depuis 2020, les dépenses de guichet dépassent largement le produit des contributions des employeurs. En 2021, ce dernier s’élevait à 8, 8 milliards d’euros alors que les dépenses en faveur de l’alternance représentaient 9, 3 milliards d’euros.
À ces dépenses s’ajoutent celles qui sont liées au compte personnel de formation, estimées à 2, 7 milliards d’euros pour 2021. À ce sujet – j’aperçois Martin Lévrier –, il faudra bien évidemment lutter contre la fraude au CPF, mais aussi réguler le dispositif.