Intervention de Raymonde Poncet Monge

Réunion du 28 novembre 2022 à 10h00
Loi de finances pour 2023 — Travail et emploi

Photo de Raymonde Poncet MongeRaymonde Poncet Monge :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, quelques semaines seulement après que le Gouvernement eut officialisé la contre-réforme de l’assurance chômage, nous nous trouvons face à un texte qui amorce sa mise en œuvre.

Ainsi, 20 millions d’euros sont alloués à l’expérimentation France Travail, dont les contours et missions restent flous, si ce n’est de répondre à l’injonction du « travailler plus ». Le projet se met progressivement en place, sans que ni le Parlement ni les partenaires sociaux soient pleinement saisis de son contenu.

Ce 49.3 de l’expérimentation vise peut-être à nous mettre, nous et les partenaires sociaux, devant le fait accompli, à l’occasion de la clôture prochaine et définitive des discussions sur la reconduction de la convention tripartite Pôle emploi-État-Unédic.

Cette convention prendra fin, d’ailleurs, sans que le Gouvernement ait été à la hauteur de ses promesses budgétaires. Lors de sa signature en 2015, un financement de 1, 5 milliard d’euros avait été promis. Nous n’en sommes aujourd’hui qu’à 1, 2 milliard d’euros.

La hausse des crédits alloués cette année à Pôle emploi n’est qu’un rattrapage d’années consécutives d’austérité et de baisse des effectifs, l’État transférant peu à peu la charge de Pôle emploi sur l’Unédic, au détriment, donc, des prestations qu’il convient, alors, de diminuer.

La pérennisation des équivalents temps plein accordée à Pôle emploi pour la mise en œuvre du contrat d’engagement jeune en 2020 explique la hausse actuelle des crédits. Elle ne masque guère la dégradation constante des conditions de travail au sein de l’agence. Aussi les écologistes s’opposeront-ils aux réductions d’emplois.

Selon les syndicats, la proportion de personnels en contrat à durée déterminée (CDD) à Pôle emploi serait passée de 5 % environ en 2019 à 13 % en 2021, avec de fortes disparités locales, certains sites atteignant même un taux de 50 %. L’établissement chargé de l’emploi en France diffuse le CDD comme norme !

Alors que, en 2017, les conseillers avaient en moyenne en portefeuille 46 demandeurs d’emploi en accompagnement global et 336 en accompagnement suivi, ils en ont aujourd’hui respectivement 54 et 406.

De l’avis général, les réformes successives ont porté atteinte à la sécurité des agents, provoqué des pertes de sens au travail et une gestion parfois erratique des dossiers, du fait de changements incessants dans le calcul des indemnités.

Malgré tout, le Gouvernement se réjouit de la baisse du chômage, qui est en partie en trompe-l’œil, et réduit en conséquence les crédits du programme 102, « Accès et retour à l’emploi ».

Or, de l’avis même de l’Insee, un tiers de la hausse du taux d’activité à la mi-2022 résulte des contrats en alternance, notamment en apprentissage, soit des emplois hautement subventionnés, profitant largement, selon la Cour des comptes aux plus diplômés et non aux 1, 5 million de jeunes sans emploi ni formation.

Ces derniers dépendent en réalité des CEJ, qui, malgré un certain succès – 200 000 contrats en 2022 –, restent en nombre insuffisant en projection 2023.

Comme c’est le cas pour toute personne éloignée de l’emploi, ils dépendent beaucoup des emplois aidés, comme des parcours emploi compétences (PEC), qui, eux, diminuent de 20 000, passent de douze à six mois et voient leur durée totale maximale réduite à dix-huit mois, sans explication ni justification.

De plus, la baisse du chômage pour 2023 est une hypothèse assez hasardeuse. Elle ne tient pas compte des travaux de l’Unédic, qui prévoit un tassement de la progression des emplois salariés dès l’année prochaine, ni de ceux de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), qui table sur une remontée du chômage jusqu’en 2024.

Dans un contexte où la réforme de l’assurance chômage aura pour effet de rendre les fins de droits plus précoces et de permettre la réalisation de plusieurs milliards d’économies, la hausse des crédits de la mission est en trompe-l’œil.

Par exemple, la hausse du programme 103 s’explique très largement par le transfert des crédits dédiés à l’activité partielle, qui figuraient auparavant dans la mission « Plan de relance », passant de 11, 9 milliards d’euros à 7 milliards d’euros au PLF pour 2023 en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement.

Ces jeux budgétaires ne masquent pas les insuffisances d’une politique de l’emploi qui reste antisociale et tournée vers la baisse des droits des demandeurs d’emploi.

En conséquence, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires ne votera pas les crédits de cette mission.

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