Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, chaque année, une réalité s’impose : celle de la disparition des anciennes générations du feu.
Corrélativement, les crédits de paiement demandés en 2023 pour la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » sont en baisse de 7, 4 %.
S’il est normal que le budget de l’État accompagne la diminution du nombre de bénéficiaires des pensions et prestations prévues pour les anciens combattants, nous devons veiller à ce qu’il continue à proposer un haut niveau de réparation, corollaire de notre haut niveau de reconnaissance. Les dispositifs de cette mission relèvent non pas de l’ordre du soutien, mais de celui du devoir, un devoir moral intangible envers tous ceux et toutes celles qui ont consenti des sacrifices au profit du destin collectif de la France.
Je suis donc convaincue que les marges budgétaires dégagées mécaniquement par le paramètre démographique doivent être l’occasion de renforcer et de compléter les mesures existantes.
Dans cette perspective, je me réjouis des avancées contenues dans le projet de loi de finances pour 2023.
Je pense notamment à la revalorisation des pensions militaires d’invalidité au 1er janvier 2023. Le calcul de la valeur du point PMI, effectué en fonction de l’indice d’ensemble des traitements de la fonction publique d’État et mis en œuvre en 2005 se révèle non satisfaisant en période de forte inflation. Je salue donc la décision prise par le Gouvernement de répercuter dès le 1er janvier 2023 la revalorisation de droit commun de 4 % du point d’indice. Nous devrons toutefois rester vigilants face à un niveau d’inflation sans cesse révisé à la hausse pour l’année prochaine.
Dans ce contexte, l’extension de l’octroi d’une demi-part fiscale aux conjoints survivants d’anciens combattants sera également de nature à soutenir le pouvoir d’achat de ses bénéficiaires. Lors de l’examen des articles de la première partie, nous avons décidé ici d’améliorer le dispositif proposé par nos collègues députés. La suppression de la condition d’âge de décès de l’époux ancien combattant pour le bénéfice par sa veuve d’une demi-part fiscale à ses 74 ans est pour nous une mesure d’équité, qui était très attendue par le monde combattant. Nous souhaitons qu’elle soit conservée par le Gouvernement.
La mission met également en œuvre les dispositifs issus de la loi du 23 février 2022, par laquelle la France reconnaît les conditions d’accueil et de vie indignes des harkis et de leurs familles, rapatriés d’Algérie après les accords d’Évian de 1962. Mais la question reste ouverte s’agissant des personnes qui ont vécu de façon tout aussi indigne en dehors des camps et des hameaux de forestage. Je compte sur le premier rapport de la commission dite Bockel, attendu au printemps 2023, pour nous apporter un éclairage sur la justesse des critères retenus dans cette loi.
Au sein de la mission, les moyens du programme 158, entièrement consacré à l’indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, accompagnent la baisse tendancielle du nombre de bénéficiaires. C’est normal, mais, aux côtés de la politique de réparation, il est fondamental de poursuivre les actions en faveur de la mémoire. Je suis fière d’avoir représenté le Sénat à Auschwitz le 7 novembre dernier, lors de la cérémonie d’hommage aux victimes de la tragique nuit de Cristal, qui a réuni des délégations parlementaires du monde entier.
La résurgence d’un antisémitisme banalisé et dangereux doit nous conduire à être particulièrement soucieux du devoir de transmission aux jeunes générations, notamment sur ce qu’ont représenté la déportation et les camps de la mort : l’ignominie absolue.
Au fil du temps, les témoins ou les ayants droit des grands conflits disparaissent. Il nous appartient donc de conforter la politique de mémoire. Malheureusement, celle-ci concentre seulement 1, 1 % des ressources du programme 169.
De « Ceux de 14 », comme les avait qualifiés Maurice Genevois, à nos soldats en opérations extérieures (Opex), sans oublier nos valeureux combattants de l’ombre, que l’année 2023 mettra à l’honneur autour de la figure de Jean Moulin, aucune des victimes de la guerre ne doit être oubliée dans le champ de nos actions. La mémoire doit s’entretenir.
Le groupe RDSE votera les crédits de cette mission.